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 Les Parisii :
"le peuple des carrières"

Parisii est le nom d'origine celte qui peut désigner le peuple des CarrièresLes Gaulois sous Jules César sont estimés de 8 à 15 millions de personnes.  Les Romains et habitants de l'Empire avoisinaient de 50 en l'an 0, à 25 millions d'habitants, selon les époques, avec un déclin à partir du deuxième siècle, dont un million d'âmes pour la seule ville de Rome. Un empire de plus de 3 millions de kilomètres carrés et une densité d'environ 16 habitants par kilomètre carré.

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La présence en sous-sol du calcaire et du gypse offrit à Paris en rive gauche et au nord de la rive droite, notamment à Montmartre, toutes les ressources aux Parisii pour construire et édifier des mégalithes. En langue celtique le "P" se prononçait "K" et il semblerait que "Kwarisi" ou "Karisi" soit en Celte le terme qui désignait les carrières.
 
L'on dénombrait trois mégalithes en rive droite, ils servirent longtemps aux dévotions. Croyances et mythes ont trouvé auprès des Ligures, puis avec les Gaulois et Romains des communautés mystiques, ce que l'on nomme un syncrétisme. Du moins, des syncrétismes successifs, que l'on perçoit encore de nos jours dans le culte voué aux saints. Les trois ornements mégalithiques ont depuis disparu, mais on les connaissait à Paris au Moyen Âge sous le nom de : Pet au diable; Pierre au lait, et de Pierre au lart,  en proximité de l'église de Saint-Merri.


On ne sait pas grand-chose de l'implantation gauloise à Paris. De quoi comprendre que les traces originelles ne sont pas nombreuses ou enfouies sous les nombreuses couches d'histoires, notamment du temps de la présence romaine.

Ce sont les Latins qui allaient donner un sacré essor à un modeste camp retranché gaulois appelé oppidum. C'est du côté des Sénons, que l'on trouve de véritables traces urbaines gauloises : Melun et Sens. Il faut souligner une densité de population dans la région comparable  avec celle de Narbonne se trouvant parmi les plus hautes
estimations au sein des populations gauloises, selon M. Vacquer et autres "antiquaires" (nom donné aux archéologues au XIXe siècle).
 
A proximité de Paris, la première implantation des gaulois prit souche du côté de la ville de Nanterre. Cette même ville donnera plus tard naissance à Geneviève de Nanterre ou sainte Geneviève, Patronne de Paris. (à lire sur la page consacrée aux Francs et à Clovis)


 Les gaulois de la tribu des Parisii
 
Au tout début de l'Antiquité entre 800 et 300 avant J.C. s'implanta une tribu celto-gauloise : les "Parisii" sous domination de la tribu des Sénons. Ils peuplèrent l'actuelle île de la Cité ou une autre île, sans pouvoir l'affirmer faute de traces archéologiques. Qui plus est, c'est un fait connu à partir du seul témoignage de Jules César sur l'existence d'un espace de protection, où a pu se trouver un camp retranché sans véritable importance économique ou stratégique.

Entre moins 300 ans et moins 50 avant J.C., c'est au sein et sous protection de l'oppidum de l'île de la Cité qui reste en l'état une hypothèse non validée, que les Parisii ont été le premier groupe humain à prendre pour base cet espace. Auparavant, l'île avait tenu un rôle religieux et s'appela l'île de la Dame Blanche. On peut présumer que le camp gaulois fut muni de deux ponts reliant les deux rives, s'il a été présent sur une île.
 

 
Les peuplements celtiques allaient donner possiblement vie à un modeste camp retranché, et un lieu de repli pour les populations avoisinantes. Au sud, ou la rive gauche, les abords de la Seine a pu offrir un terrain plus propice à la culture. La présence d'une deuxième île plus importante en taille servir comme d'une protection naturelle. Pour ce que l'on sait pour la rive droite de cette époque, c'est qu'elle était relativement sauvage, humide, pas ou peu habitée, et a pu connaître de nombreuses crues, même si le débit du cours nord de la Seine a été de moins en moins virulent, la surface humide ne recula qu'au long de l'assèchement des marais, mais pas vraiment avant le Xe siècle de notre ère, le terrain ou une partie du territoire en rive nord restait pour beaucoup inhabitable.
 


Sur la rive droite là où se tenait la Tutela, aujourd'hui disparue, les populations gauloises y dessinèrent des sentiers aux travers des marécages. Ils devaient y exploiter les ressources vivrières. Bien avant que ne se concentre une population en ces lieux. La proximité d'une vaste étendue marécageuse n'a pu qu'avoir un rôle dans le choix de l'implantation gauloise. Les boues permettaient de construire, de fabriquer des poteries. Les alluvions offraient de belles récoltes, au titre des hypothèses.

Ci-contre une illustration de la cité gauloise de la tribu des Parisii.
 
 
Qui sont les Gaulois ?
 
Un peuple métisse, plus structuré que ne l'afficha ses divisions. Qui des Ligures ou des Celtes, ou des deux, voire des premiers Homo-Sapiens des premières incursions a été le résident d'origine type qui donna naissance au Gaulois? Le mystère des gènes, et des mélanges restent à éclaircir, et sans chercher à classifier, la génétique est aussi un outil scientifique. De plus, ont été mal discernées les différences cultuelles ou culturelles entre les Germains voisins, les Celtes du Danube, jusqu'aux Galates des Balkans (à lire sur la page précédente).

Les Parisiens furent un peu de tout cela ou comment l'assimilation rapide des populations du cru a pu fonctionner avec l'arrivée de vagues successives de populations celtes, sans connaître des changements profonds dans les structures de pouvoir. Une domination qui agissait par la force avec la capacité d'avoir des armes de guerre puissantes, pouvait être une condition pour les plus faibles ou conquis de leur soumission au nouvel occupant.
 
La Gaule dite indépendante au début de la guerre des Gaules est divisée en tribu ou peuple selon l'entendement des auteurs actuels et passés, sur un sujet ayant fait de grands-pas, mais qui reste à encore à définir.  La partie méridionale de l'hexagone était déjà sous domination romaine, pas loin des Sequanes dans les Alpes, les Helvètes ne voulurent perdre leur liberté et se suicidèrent en masse.

Plus au nord, les Parisiens, les Aulerques et Sénons, en raison de leurs forces sur les champs de bataille furent les alliés principaux de Vercingétorix. Mais au sud-est, les voisins Eduens étaient soumis aux Romains, mais ils n'étaient pas exemptés de divisions internes. Le maillon faible de l'unité gauloise, mais pas le seul. César dû faire face à une résistance forte et a passé sept années de guerre pour rallier les derniers rebelles à l'Empire, et plus encore à les pacifier.

 

 
C'est Rome et sa puissance qui firent de Lutèce, Lutetia ou Lucotecia pour les auteurs latins, une ville fleurissante, et aussi une voie de communication importante vers le nord des Gaules dites Celtique et Belge. En passant par une ligne droite, par exemple allant d'Orléans à Dreux, on désignait sous le nom de "cardo" l'ensemble routier qui organisait déjà les voies de circulation à la fin de la Gaule indépendante (vers 60 av. J-C).

Chronologie de la guerre des Gaules 



Dessus : Vase gaulois


-58
:  César est nommé proconsul de la Gaule cisalpine et transalpine.
Au mois de mai : Les Eduens demandent l'aide aux romains suite à des pillages helvètes. En juin : César remporte la victoire sur les Helvètes près de Montmort et  sont forcés de regagner leurs terres.   
-57 : Jules César soumet la Belgique.     
-56 : Pacification de toute la Gaule par César et ses lieutenants.     
-55 : César et ses troupes repoussent les armées germaniques et les poursuit au delà du Rhin, puis débarque en (Grande) Bretagne.     
-53, en février : Trois légions viennent renforcer les sept légions déjà présentes en Gaule. En avril : César convoque l'assemblée des Gaules à Samarobriva (Amiens) ; Intervention de César contre les Carnutes, les Trévires et les Sénons qui n'ont pas répondu à sa convocation.   
- 52 mars : César prend Vellaunodunum (Montargis), Genabum (Orléans), Noviodunum. En avril : Victoire de Vercingétorix à Gergovie, en réalité  le siège est levé par César. Et fausse victoire des troupes romaines à Avaricum (Bourges). Au mois de juin : Victoire de Titus Labiénus sur les Parisii à Lutèce. A la mi-septembre : L'armée de secours gauloise échoue devant Alésia. 
Fin septembre : Capitulation de Vercingétorix.
 

 La bataille de Lutèce



La personnalité de Camulogène, le chef gaulois des Parisiens en moins 52 av. J-C (d'origine Aulerques) incarna un certain esprit de résistance. Il dû faire face à des Romains faisant de la guerre un "art", et César comme tout stratège de son envergure s'avéra un habile tacticien. Dans son récit de la Guerre des Gaules, il a fait croire qu'une partie de ses troupes ne le suivaient pas - les Eduens ses alliés gaulois avaient été après Gergovie réticents à continuer à combattre. Et ils se trouvaient aussi menacés par leurs voisins Helvètes. César le fit abondamment savoir sur tout le territoire de la Gaule.  De cette façon, la nouvelle parvint aux oreilles de Camulogène et s'en servit comme source pour présumer peut-être trop vite d'une victoire à Gergovie?

 
L'échec de Gergovie confirma une faiblesse dans les armées romaines. Contretemps guerriers, César construisit une stratégie nouvelle et revit ses alliances. Il allait favoriser la surprise et faire suivre de fausses nouvelles. Camulogène dans la bataille de Lutèce allait s'appuyer sur une déstabilisation probable des forces romaines. Pour les Romains, il s'agissait surtout d'éliminer un fédérateur ou plusieurs, comme ce vieil homme résistant, le chef militaire des Parisiens. Camulogène accumula les erreurs stratégiques. Il alla jusqu'à mettre le feu à l'Oppidum, pensant que seule la politique de la terre brûlée pouvait mettre à mal des légions très éloignées, ou sans forces ou appoints nécessaires, qu'il croyait arrivée. Et il poussa l'erreur jusqu'à partager en trois groupes toutes les troupes à l'origine rassemblées pour répondre à un assaut massif des troupes romaines.
 
L'on sait que sur les champs de bataille les Romains ont pratiqué des assauts en corps à corps, notamment avec les Celtes d'Angleterre. Ce qui devint une tactique éprouvée, car elle profitait de l'indiscipline des formations celtiques. Il en fut aussi pour les armées gauloises en leur incapacité à battre une formation romaine de plus de cent mille hommes, même avec deux cent mille gaulois en ordre de bataille. À Gergovie, les gaulois n'ont pu à aucun moment vraiment repousser les armées de César. Et Jules César a du lui aussi douter de sa capacité à faire plier ces hommes d'un courage exemplaire. Tel un jeu d'échec, le "pat" était possible. Sans compter sur la vraie arme de cette histoire qui résida surtout à tromper en tout l'ennemi, à nourrir des rumeurs et pratiquer des assauts moins frontaux, mais plus meurtriers et symboles de puissance sur les futurs soumis.
 
César disposait à ses côtés de compagnies gauloises, aux côtés des légions romaines, et cela a du être utile à ce que chaque camp espionna et devina les intentions de l'autre. A ce jeu les romains ont eu un jeu d'avance. C'était d'anciennes victoires que les battus se joignaient à l'Empire et formaient les troupes en mouvement sur le terrain. Comme les Eduens, qui eux donnèrent l'impression de se chamailler après l'échec de Gergovie. Chez César naquit l'idée d'une stratégie qui résida à attaquer au moins en deux lieux en territoire gaulois, avant l'attaque ultime d'Alésia. César alimenta à plein les rumeurs, retourna à Rome et revint sur le champ des opérations avec une stratégie résidant d'abord à calmer les divisions des Eduens. Labiénus, lieutenant de César, lui mettait des troupes en bateau et provoquait là ou l'on n'attendait pas les Romains. À cette annonce, la panique fut grande chez les Sénons et Parisiens, et l'effet de surprise joua pleinement, et ce malgré une forte résistance. La ruse gagna à plein et affaiblissait le camp gaulois pour toujours.
 


En remontant la Seine les légions romaines profitèrent d'un moyen de transport rapide pour l'époque, là, où l'on attendait des troupes par les plaines épuisées par les combats de Gergovie ce fut au contraire des troupes offensives et reposées qui parvinrent.

Labiénus posa un premier camp à Melun et sillonna d'abord par le nord la future Lutèce où s'étaient rassemblées les forces des Parisiens et des Sénons.
 
César lui attaqua au Sud les Avernes et évita ainsi toute union entre les Gaulois avec ceux du Massif central, du moins ceux qui avaient manifesté aux Romains un refus d'alliance, en particulier les Sénons et les Parisiens, et leurs voisins Aulerques et Bellovaques. Titus Labiénius en arrivant au nord de Lutèce jugea impossible de passer par cette partie en raison des marécages trop présents et impropres à la bonne circulation des soldats et des armes lourdes (la Tutela). De plus, la fortification était plus imposante par la partie nord de l'oppidum, il fit demi-tour et retourna à Melun. De là, il envisagea un plan d'intoxication et divisa ses troupes, une petite part dût se faire remarquer et concentra l'attention des fronts gaulois qui attendaient, plus qu'ils ne voulaient attaquer. Les Sénons craignaient pour Melun, qu'en était-il de leur bastion en région Ile de France? Le malaise joua à plein entre les deux tribus gauloises réunies un temps.
 
Les armées romaines firent mine de partir à grand bruit, mais de Melun les embarcations pouvaient à tout moment soutenir une attaque de front et attendaient l'assaut final et le déplacement dernier vers l'oppidum. Ceux qui prirent pied à terre, cette fois s'approchèrent par le sud, et il fut surtout de faire sortir et se diviser en nombre les gaulois et les amener à la défaite. Ce fut un coup de poker de la part de César avec son lieutenant Labiénus, qui tenta d'affaiblir par le nord les faibles acquis fédérateur de Vercingétorix. Le peu d'information, l'impréparation des gaulois, plus le changement stratégique firent que d'Ivry-sur-Seine à la Seine en proximité de l'oppidum des Parisiens, le lieu où se déroulèrent les combats. Mais pas aux champs de Mars selon la légende  (site actuel de la Tour Eiffel), voulu comme le lieu ultime de la bataille - annonçait cependant la future défaite des gaulois.
Plus la petite note stratégique de Titus Labiénus fut de mener ses déplacements la nuit, ce qui désappointa les soldats celto-gaulois, qui n'entendaient pas grand-chose à l'art de cette guerre, si savamment menée. Chaque détail ou déplacement massif devait offrir des conditions maximales de réussite. C'est-à-dire des carrés d'infanteries qui supportaient les flèches et maintenaient une pression sur le terrain.

Suivis des lanciers qui à l'approche des derniers dizaines de mètre, se servaient de leurs projectiles et semaient ainsi une grande confusion chez les assaillis. Toujours suivait une attaque équestre qui profitait de la dispersion des gaulois par les lances pour administrer le plus souvent le coup de grâce.

Voilà pour Camulogène et ses hommes, un ennemi qui arrivait de toute part, au nord, à Melun, en petit nombre au sud de l'oppidum parisien. Labiénus se dissimula derrière les marécages au sud-est du camp gaulois et avança par petite touche et fit faire silence sur les navires prêt à se lancer. Quand enfin Camulogène pensa et décida de porter un coup décisif à des troupes en déroute comme la rumeur l'envisageait, il sortit du camp retranché. Au lieu de tenir un front, il pensa qu'il valait mieux se diviser. Division interne ou choix du chef, là où la bataille fit rage, elle ne fut pas là où elle se devina. Aurait-il été pris à revers, par les armées venant du fleuve?
 
Les Sénons, avec leurs propres divisions tribales gauloises s'en retournaient à Melun, leur point de résidence et d'origine en région parisienne ; les Aulerques et Bellovaques ne parvinrent pas comme il avait été présumé. Quelques cohortes romaines peu aguerries jouaient aux épouvantails et firent mines de les attendre. Les Parisiens divisés en deux, - une partie attend au nord - et aurait pu être attaqué par la flottille par effet de surprise. Ils engagèrent possiblement le feu et une sortie vers le sud depuis le camp de retranchement. Labiénus attendit qu'un autre front s'engagea avec toutes les troupes au sol pour lancer une ou deux offensives consécutives.

Une première légère donna le sentiment d'une faiblesse et laissa passer les Sénons en direction de Melun. Le gros des bataillons attendaient ailleurs, préparant une deuxième charge, peu de jours après, les Gaulois étaient pris définitivement en tenaille ou à revers et dans l'impossibilité de faire face aux assauts du rouleau compresseur des armées latines.
 
Camulogène et ses troupes finirent massacrés. Labiénus aux derniers jours posa son camp dans la plaine d'Ivry, et les navires se tenaient à l'embouchure de la Bièvre en planque, ou en forces d'appoints. La machine de guerre était là pour dérouter les troupes gauloises. Caché derrière un marais en rive sud Labiénus avait tout mijoter, tout présumer de la faiblesse des Parisiens.

La hardiesse des gaulois parisiens n'était pas en cause face à une armée professionnelle. De plus, ayant des informateurs et qui pouvait acheter l'honneur des braves.
Tout cela laisse à présumer de divisions bien orchestrées. César ne tardât pas à faire de cette offensive un bon conducteur pour affaiblir Vercingétorix et ses soutiens du nord du massif central. Tout lui semblait perdu à Gergovie et à force de rumeurs, le piège se referma dans les mâchoires d'une armée sans états d'âmes.
 



  À ces jeux de guerre, les Sénons se joignirent à César en vue de l'assaut final contre Vercingétorix. Comme les Eduens au nom de "la paix des braves", une tribu pouvait se rallier à l'ennemi, suite à une défaite. La lecture du récit que César nous laisse, parle de la ruse, des notes qui ne disent pas tout et laissent pour ensemble à s'interroger, et laisser l'imagination faire le reste.

Les gaulois s'en retournèrent à leurs activités sédentaires et allaient comme avec les Celtes d'orient finir par accepter l'étranger. Cette fois-ci venu du sud, et pour longtemps. L'influence latine aura de beaux jours devant elle, malgré quelques dernières résistances.



Après la bataille de Lutèce, il se tint la défaite d'Alésia, la même année. En début de -52, Vercingétorix a le sentiment d'avoir gagné. Seulement quelques mois plus tard, il échouait à Rome comme vaincu. La bataille de Lutèce a pour intérêt de mettre en lumière ce qui a pu affaiblir le camp gaulois et les prouesses stratégiques de Jules César. On estime à un million de gaulois morts et à un million d'hommes fait esclave au service de l'Empire, les quelques éléments chiffrés des sept ans des champs de bataille de la Guerre des Gaules (au pluriel), alors que Jules César le pensait en Gaule, comme une unité géographique et politique.


La bataille de Lutèce reconstituée



Extraits de la Guerre des Gaules de César

(...) Campagne de Labiénus

 « Pendant ces mouvements de l'armée de César, Labiénus (1) ayant laissé à Agendicum (Sens), pour la garde des bagages, les recrues récemment arrivées d’Italie, se porte avec quatre légions vers Lutèce. Cette ville appartient aux Parisii et est située dans une île de la Seine. Au bruit de son arrivée, un grand nombre de troupes ennemies se réunirent des pays voisins. Le commandement en chef fut donné à l'Aulerque Camulogène (2), vieillard chargé d'années, mais à qui sa profonde expérience dans l'art militaire mérita cet honneur.  Ce général ayant remarqué que la ville était entourée d'un marais qui aboutissait à la Seine, et protégeait merveilleusement cette place, y établit ses troupes dans le but de nous disputer le passage.

Labiénus travailla d'abord à dresser des mantelets, à combler le marais de claies et de fascines, et à se frayer un chemin sûr. Voyant que les travaux présentaient trop de difficultés, il sortit de son camp en silence à la troisième veille, et arriva à Metlosedum (Melun) par le même chemin qu'il avait pris pour venir. C'est une ville des Sénons, située, comme nous l'avons dit de Lutèce, dans une île de la Seine. S'étant emparé d'environ cinquante bateaux, il les joignit bientôt ensemble, les chargea de soldats, et par l'effet de la peur que cette attaque inopinée causa aux habitants, dont une grande partie d'ailleurs avait été appelée sous les drapeaux de Camulogène, il entra dans la place sans éprouver de résistance. Il rétablit le pont que les ennemis avaient coupé les jours précédents, y fit passer l'armée, et se dirigea vers Lutèce en suivant le cours du fleuve. L'ennemi, averti de cette marche par ceux qui s'étaient enfuis de Metlosedum, fait mettre le feu à Lutèce, couper les ponts de cette ville ; et, protégé par le marais, il vient camper sur les rives de la Seine, vis-à-vis Lutèce et en face du camp de Labiénus.

Déjà le bruit courait que César avait quitté le siège de Gergovie ; déjà circulait la nouvelle de la défection des Eduens et des succès obtenus par la Gaule soulevée. Les Gaulois affirmaient, dans leurs entretiens, que César, à qui l'on avait coupé sa route et tout accès à la Loire, avait été, faute de vivres, forcé de se retirer vers la province romaine. De leur côté, les Bellovaques, instruits de la défection des Eduens, et déjà assez disposés à se soulever, se mirent à lever des troupes et à préparer ouvertement la guerre. Labiénus, au milieu de si grands changements, sentit qu'il fallait adopter un tout autre système que celui qu'il avait jusque-là suivi ; il ne songea plus à faire des conquêtes ni à harceler l'ennemi, mais à ramener l'armée sans perte à Agédincum (Ville de Sens). Car d'un côté, il était menacé par les Bellovaques (gaulois belges), peuple jouissant dans la Gaule d'une haute réputation de valeur ; de l'autre, Camulogène, maître du pays, avait une armée toute formée et en état de combattre ; enfin un grand fleuve séparait les légions de leurs bagages et de la garnison qui les gardait. Il ne voyait contre de si grandes et si subites difficultés d'autre ressource que son courage.

Ayant donc, sur le soir, convoqué un conseil, il engagea chacun à exécuter avec promptitude et adresse les ordres qu'il donnerait ; il distribua les bateaux, qu'il avait amenés de Metlosedum, à autant de chevaliers romains, et leur prescrivit de descendre la rivière à la fin de la première veille, de s'avancer en silence l'espace de quatre mille pas et de l'attendre là. Il laissa pour la garde du camp les cinq cohortes qu'il jugeait les moins propres à combattre, et commanda à celles qui restaient de la même légion de remonter le fleuve au milieu de la nuit, avec tous les bagages, en faisant beaucoup de bruit. Il rassembla aussi des nacelles et les envoya dans la même direction à grand bruit de rames. Lui-même, peu d'instants après, partit en silence avec trois légions, et se rendit où il avait ordonné de conduire les bateaux.

Lorsqu'on y fut arrivé, les éclaireurs de l'ennemi, placés sur toute la rive du fleuve, furent attaqués à l'improviste pendant un grand orage survenu tout à coup ; l'armée et la cavalerie passèrent rapidement le fleuve, avec le secours des chevaliers romains chargés de cette opération. Au point du jour et presque au même instant, on annonce aux ennemis qu'il règne une agitation extraordinaire dans le camp romain, qu'un corps considérable de troupes remonte le fleuve, qu'on entend un grand bruit de rames du même côté, et qu'un peu au-dessous des bateaux transportent des soldats. À ce récit, persuadés que les légions passent le fleuve en trois endroits, et que l'effroi causé par la défection des Eduens précipite notre fuite, ils se partagent aussi en trois corps. Ils en laissent un vis-à-vis de notre camp pour la garde du leur ; le second est envoyé vers Metlosedum, avec ordre de s'avancer aussi loin que les bateaux, et ils marchent contre Labiénus avec le reste de leurs troupes.

Bataille de Lutèce


Au point du jour toutes nos troupes avaient passé, et l'on vit celles de l'ennemi rangées en bataille. Labiénus exhorte les soldats à se rappeler leur ancienne valeur et tant de combats glorieux, et à se croire en présence de César lui-même, sous la conduite duquel ils ont tant de fois défait leurs ennemis, puis il donne le signal du combat. Dès le premier choc, la septième légion, placée à l'aile droite, repousse les ennemis et les met en fuite ; à l'aile gauche qu'occupait la douzième légion, quoique les premiers rangs de l'ennemi fussent tombés percés de nos traits, les autres résistaient vigoureusement, et aucun ne songeait à la fuite. Camulogène, leur général, était lui-même avec eux, et excitait leur courage. Le succès était donc douteux sur ce point, lorsque les tribuns de la septième légion, instruits de ce qui se passait à l'aile gauche, vinrent avec leur légion prendre les ennemis en queue et les chargèrent.  Même dans cette position, aucun Gaulois ne quitta sa place ; tous furent enveloppés et tués. Camulogène subit le même sort. D'un autre côté, ceux qu'on avait laissés à la garde du camp opposé à celui de Labiénus, avertis que l'on se battait, marchèrent au secours des leurs, et prirent position sur une colline ; mais ils ne purent soutenir le choc de nos soldats victorieux. Entraînés dans la déroute des autres Gaulois, tous ceux qui ne purent gagner l'abri des bois ou des hauteurs furent taillés en pièces par notre cavalerie. Après cette expédition, Labiénus retourne vers Agendicum, où avaient été laissés les bagages de toute l'armée. De là il rejoignit César avec toutes les troupes. » (...)

Notes du texte de Jules César  :


1 - Titus Labiénus décède en 51 av. J.-C. dans une bataille sur le terrain formant la plaine de Vaugirard – près d’Issy-les-Moulineaux (dépt. des Hauts-de-Seine).

2 - Camulogène, général gaulois, chef des Parisii.


Source en ligne du texte : BIBLIOTHECA CLASSICA SELECTA


Note n°37 sur Lutetiae

Livre VII
- Notes de Charles Louandre

Pages 404 et 405 
- Charpentier éditeur - 1868

Les détails de la bataille livrée par Camulogène aux Romains, dans les environs de Lutèce, ainsi que le lieu précis où cette bataille a été donnée, ont beaucoup préoccupé les érudits. Nous ne rapporterons point ici tout ce qui a été dit à ce sujet. Nous, nous en tiendrons à l'opinion qui a été émise dans ces derniers temps par M. Jules Quicherat, et qui nous paraît tout à fait concluante. M. Quicherat a publié, dans le tome XXI des Mémoires de la Société des antiquaires de France, une dissertation intitulée :

Du lieu de la bataille entre Labiénus et les Parisiens

Le bras mort de la Seine. (Atlas de Paris - Evolution d'un paysage urbain -Parigramme, 1999)


LA TUTELA : A. Lombard-Jourdan - Aux Origines de Paris, 
La genèse de la rive droite jusqu’en 1223 - Paris, Editions du CNRS - 1985

Nous avons contrôlé, par le texte de César et l'examen attentif des lieux, cet excellent travail. Il nous a paru de tous points incontestable dans ses conclusions, et nous croyons faire plaisir à tous ceux qui s'intéressent à notre histoire nationale en reproduisent ici l'analyse que M. Quicherat a bien voulu faire lui-même de sa dissertation, pour les notes de notre édition de César.

- Je pars, dit M. Quicherat, de l'identité d'Agendicum et de Sens. Labiénus suit la rive gauche de la Seine jusqu'à un perpétua palus que je démontre ne pouvoir être formé par la Bièvre, mais qui l'était certainement par l’Orge. Il rebrousse donc chemin après s'être avance seulement jusqu'à Juvisy. Il va chercher passage à Melun et recommence sa route en suivant la rive droite de la Seine. Je démontre qu'il n'a pas passé sous Paris, qu'il n'a pas même traversé la Marne et qu'il a posé son camp sous Créteil, en vue de Paris, qu'on découvre de là dans un lieu qui s'appelle aujourd'hui Notre-Dame-des-Mesches.

Cette position appelle celle de Camulogène qui se met devant Paris vers les terrains actuels du Jardin des Plantes.

Pour l'opération du passage des Romains, voici les points que je détermine :

Les bateaux romains stationnent vers l’endroit où est à présent le pont de Choisy. Les batelets (petits bateaux) sont envoyés en amont à Villeneuve-Saint-Georges. Le rendez-vous des bateaux et de l'armée qui s'avance à pied est à quatre milles au-dessous du point où étaient stationnés les bateaux, c'est-à-dire en face du Port-à-l'Anglais, tout près du confluent de la Seine et de la Marne. L'armée passe et se range en bataille dans la plaine de Vitry.

Le plan de Camulogène consiste :

1° A envoyer un corps dans le direction de Metlosedum, corps destiné à surveiller les batelets romains qui remontaient la Seine avec fracas. Ceci m’amène à conjecturer que Metlosedum localité détruite; était un oppidum correspondant à peu près à la situation d'Athis-Mons.

2° A laisser e regione Castrorum (le lieu de retranchement), en observation, en face de camp romain, un praesidium (protection) qui y était nécessairement déjà, car les Gaulois ne seraient pas restés sans faire surveiller le camp romain, et cette faction était faite par le praesidium  en question envoyé dès le commencement, soit à Thiais, soit à Choisy. C'est là que César peut avoir fait quelque confusion d'après le rapport de Labiénus, en semblant indiquer comme improvisée, une manoeuvre déjà faite.

3° A conduire le fort de l'armée gauloise contre les Romains, de manière à barrer la plaine d’lvry et à défendre les hauteurs de Vitry.

Nous arrivons à la bataille. La septième légion rompt les Gaulois qui barraient la plaine d’lvry. La douzième se charge de ceux des hauteurs de Vitry dont elle n'a pas si bon marché. Je remarque que César, qui parte d'abord de la présence de trois légions, ne dit rien de l'action de celle qui combattit au milieu, preuve qu'elle fut battue et vraisemblablement en voulant escalader le mamelon où est le fort d’Ivry. Il faut que la septième vienne secourir la douzième pour que la victoire se décide. Elle se décide par le massacre de tout l'état-major gaulois qui tenait alors la plaine en avant des hauteurs d’lvry.

L'endroit où Camulogène a été tué est le véritable lieu de la victoire. Ce lieu a été appelé Victoriacum. Un autel y a été élevé. La religion des Romains a été perpétuée sous l'empire du christianisme par une église de Saint-Gervais et de Saint-Protais, saints militaire, qui ont été substitués aux divinités guerrières du paganisme. La poursuite faite en dernier lieu par le cavalerie romaine a pour théâtre les hauteurs de Villejuif et de Bicêtre.

Ajoutons aux détails qu'on vient de lire que M. Quicherat a recueilli dans plusieurs documents du Moyen Âge des indications et des traditions qui donnent un nouveau poids à sa critique; et nous ne doutons pas que les personnes qui suivront son travail dans son ensemble ne restent convaincues, comme nous I'avons été nous-même, qu'il a fixé de la manière la plus nette et la plus précise l'un des points les plus controversés des Commentaires.



Les Sénons, Brennos et sa bande ? : cliquez ici
Avec Luc Baray - Directeur de recherche au CNRS -
France Culture - Carbone 14 - 24-06-2018 - durée 30 minutes


 
Suite de la promenade :
La vie quotidienne à Lutèce

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