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Education
et violence ?

Sommaire de la page :

- An II : Osons l'enfance !
- La politique de tôlérance "zéro" à New-York

- L'observatoire national de la délinquance
- Banlieues 2005 : "tout va très bien... en France"
- Un danger : "la tôlérance zéro"
- "Les jetables", le sort des jeunes au Mexique


An II : osons l’enfance


Par Jean-Pierre  Rosenczveig, mai 2013

L'an II du quinquennat s'ouvre. L'an I aura été, nous dit-on, celui des reformes. Il serait plus exact de dire de certaines réformes! D'autres ont été esquissées, voire nettement repoussées. Il est grand temps, la ronde électorale de 2014 approchant, de les aborder frontalement. Tout simplement certaines contraintes juridiques les imposent. En vrac et sans exhaustivité : une vraie politique familiale globale incluant une explicitation des responsabilités sur l'enfant, des réponses judiciaires à la délinquance juvénile adaptées et conformes à notre histoire et à l'ordre international, une meilleure mise en oeuvre de la protection de l'enfance une stratégie de l'accès au droit pour tous, notamment aux plus jeunes, une politique de prévention de la délinquance juvénile, etc. Dans cette perspective (optimiste), je restitue ces jours-ci quelques posts propositionnels qui n'ont pas pris une ride en un an. Hier (post 529), les reponses à la délinquance des plus jeunes, aujourd'hui dans la perspective d'une nouvelle écriture gouvernementale,  l'objet de politiques publiques.


Le sort des enfants de France est globalement favorable. Il suffit d’ouvrir les yeux sur ce qui se passe au-delà de nos frontières. Déjà tout simplement les conflits armés leurs sont épargnés, et souhaitons durablement, depuis que l’Europe a commencé en 1954 à se construire sur des bases certes plus économiques qu’humaines, mais le résultat est là dont les jeunes générations ne sont peut être pas conscientes. Pour autant, d’année en d’année en année, la fracture sociale se creuse.

Il ne s’agit pas tant d’un écart financier qui s’agrandit chômage ou pas,  même si cette dimension ne peut pas être niée. Malheur surtout aux enfants dont les familles sont hors des réseaux qui font la richesse moderne ou dont les proches sont incapables d’user du système. La contre-preuve se trouve dans la réussite scolaire des enfants d’enseignants !

C’est un constat banal que de relever que la grande pauvreté se développe avec quelques deux millions d’enfants sur 13 qui vivent sous le seuil de pauvreté européen. C’est un autre constat banal qui découle du premier que de dire que d’entrée de jeu les chances ne sont pas égales. Tout simplement déjà dans l’espérance de vie. Accéder à la santé ce n’est pas seulement pouvoir voir un médecin ; c‘est encore avoir une certaine hygiène de vie, vivre dans un environnement d’une certaine qualité.

C’est aussi tout simplement encore plus pour un enfant avoir un cadre de vie sécure, affectivement, mais aussi matériellement. Trop d’enfants en sont privés qui vivent dans des conditions précaires même si souvent les parents font tout pour camoufler au mieux une réalité difficile.

Plus que jamais avec la multiplication des moyens de communication ces inégalités de statut sautent aux yeux de chacun, et déjà des enfants. L’injustice est flagrante source de toutes les frustrations et révoltes, positives comme négatives.

Non seulement les injustices sont criantes, mais l’espoir de les réduire un jour n’éclate pas aux yeux ! Heureusement que tous ces enfants là ne réalisent pas combien est indécente l’attitude de ceux qui ont et rechignent à mettre au pot commun. Sans faire de la politique politicienne, comment ne pas être choqué quand ceux qui ont largement de quoi vivre, se loger, voyager, partir en vacances, dépenser sans réserves pour le simple plaisir, osent s’afficher leurs égoïsmes.

Qu’on me démontre en quoi ils risquent d’être privés de quoi que ce soit qui leur soit indispensable ! Pendant ce temps-là le fossé social se creuse. Certains craignent ou espèrent une révolution ; plus sûrement c’est une société de tension permanente qui nous est promise si rien ne change.

Je suis incapable de dire si la machine économique française dans un univers mondialisé redémarrera en 2013 ouvrant de nouvelles possibilités de rééquilibrages sociaux. En revanche l’histoire démontre, y compris l’histoire récente avec notamment les exemples suédois et argentins, que nos pays ont des ressources humaines et matérielles qui peuvent leur permettre de nourrir leurs habitants.

La France, pour ne parler que d’elle, a connu d’autres moments difficiles ne fut-ce qu’au XX° siècle au lendemain des deux grands conflits mondiaux qui l’ont jetés plus bas que terre. Notre niveau de vie n’a strictement rien de comparable avec ce qu’il était dans les années 50 ! Je dis souvent en plaisantant que nos anciens ont su chasser les Allemands de Paris ; on saura surmonter la crise économique ! Là encore, par l‘instinct de survie des forces vives du pays et … quelques bonnes mesures publiques.

Plus que jamais il me semble que les jeunes de ce pays doivent être rassurés, non pas en niant les difficultés, mais en leur montrant qu’il y a toujours le soleil derrière des nuages. Sans les tromper il faut leur donner de l’espoir fondé sur des réalités. Plus que jamais il faut positiver ce qui le mérite. C’est le rôle des adultes, parents, et enseignants notamment qui environnent chaque enfant, mais c‘est aussi la responsabilité de la puissance publique et des media.

Il faut aussi, sinon en finir, du moins limiter l’effet de la spirale consumériste dans laquelle les enfants comme les adultes se sont inscrits avec les vêtements de marque et passant par les MP3, MP4, MP10 et autres portables ! La survie de la planète est ici un levier à utiliser dans la mobilisation des plus jeunes.

On peut donc souhaiter et vouloir qu’en 2013 notre pays, et pas seulement ses gouvernements, mais chacun d’entre nous, médias compris, ait le souci du qualitatif et pas seulement du quantitatif. Il ne s’agit pas de nier l’enjeu de l’emploi et du revenu, mais force est d’admettre qu’à court terme le gâteau ne grossira pas plus. Veillons donc à mieux le repartir ; veillons aussi à ne pas laisser se creuser le fossé entre ceux qui risquent le surplus et ceux qui n’ont pas accès au strict nécessaire.

Plus que jamais des politiques sociales s’imposent qui mobilisent professionnels et citoyens actifs, qui mobilisent de l’argent public, mais aussi de l’ingéniosité et de la solidarité.


La famille et l’enfance doivent être des objets explicites de politiques publiques. Il faut mieux identifier les compétences au sein de la sphère publique entre l’Etat et les collectivités locales. Des dynamiques transversales doivent être libérées comme 1982 avec les Opérations d’été en faveur des jeunes des cités où c’est moins l’argent frais versé au pot que le mandat politique qui a soulevé des montagnes. L’Etat, du gouvernement – un ministère de l’enfance est attendu – aux administrations centrales – une délégation interministérielle à l’enfance s’impose - doit se doter des instruments politiques et techniques nécessaires.

Le parlement doit parachever la création des délégations à l’enfance dans chaque chambre. J’ose avancer que nous aurions besoin aujourd’hui d’un organisme public et pluri-partenarial de recherche et de vulgarisation des connaissances sur l’enfance et les politiques de l’enfance tel que François Mitterrand l’avait impulsé dans ses 110 propositions.

Mieux l’enfance doit être un point de référence de notre réflexion sociale. Il est révélateur que le débat dit « sur le mariage pour tous » ne tourne qu’autour du droit des homosexuels à adopter et du devenir de l’institution famille. Peu se préoccupent des enfants qu’on s’apprête à fabriquer pour satisfaire telle ou telle attente. Quelle régression !

Quand on ne prend pas prend en otage l’intérêt de l’enfant !. Dans le temps où l’on s’apprête à légiférer pour satisfaire quelques dizaines de milliers d’adultes, on néglige que plus d’un million d’enfants se trouve sans adultes de référence aux responsabilités nettement affirmées.

Depuis 15 ans nous sommes nombreux à appeler à une loi qui clarifierait les responsabilités de ceux qui élèvent un enfant sans en être le père ou la mère. Et ce dans l’intérêt des enfants, mais aussi des beaux-pères ou belles-mères, parfois du même sexe que le parent « ‘gardien ». Pour éviter aussi ces enfants qui se retrouvent dans la toute-puissance faute d’avoir été protégés par un cadre rassurant.

Et que dire du sort fait aux familles roms ou aux enfants étrangers isolés mal-traités sur notre territoire faute de courage politique? Que dire de tous ces squats où pullulent nombre d’enfants dans des conditions de vie digne d’un pays en voie de développement ? Et que fait-on de plus pour combattre l’embrigadement de nombreux jeunes dans le business des quartiers dominés par le marché de la drogue ? les mafieux eux savent embaucher et donner du statut aux jeunes. Je n’évoque même pas la nécessité de permettre les compteurs à l’heure s’agissant de la justice pénale des mineurs mise à mal 10 ans durant par une politique à courte vue.

Dans cette période difficile économiquement difficile qui tend les rapports sociaux il faut plus que jamais retrouver du bien commun, du sens commun. Comme effectivement la volonté profonde de bouter les Allemands hors de France qui a permis de réunir dans le même combat des hommes et des femmes de sensibilités très différentes.

L’enfance et le sort des enfants de France peuvent être en 2013 - et au-delà – l’un de ces axes fédérateurs pour notre pays.

Nous n’avons pas à rougir des bases d’où nous partons. Les enfants y trouveront leurs comptes, mais les adultes également. Ainsi promouvoir les droits des enfants dans les établissements scolaires (par exemple la liberté d’expression à travers les fanzines et autres journaux) ne signifie pas donner aux élèves le pouvoir, mais rechercher des attitudes responsables. C’est le meilleur moyen de combattre la violence au sein de l’institution.

En 81, nous avons osé récréer un ministère de la famille. En 82, nous avons osé parler la maltraitance à enfants. En 2013, osons afficher l’enfance comme objet de politique publique. Un débat politique serait utile sur les termes d’une politique POUR promouvoir le bien-être des enfants.(2)

On propose de changer de posture : il ne s’agit pas d’être contre (contre la maltraitance à enfants, contre les pédophiles, contre la délinquance juvénile, contre les abandons d’enfants etc.), mais d’oser enfin avoir des utopies dont découleront des dynamiques. Quels projets a-t-on pour les enfants de ce pays ? Il s’agirait déjà de considérer l’enfant comme une personne et non pas comme un simple objet de désir, voire de plaisir ou comme une petite chose fragile qu’il convient de protéger par compassion. Tout un programme … à retrouver (3).

En 2013, je vous le dis, osons l’enfance !

Notes :

(1) L’Institut de l’enfance et de la famille, établissement créé en 1984, avant d’être supprimé dans les années 95 par étroitesse d’esprit

(2) C’est la démarche que nous avons avancé dès 2008 à travers un argumentaire pour une loi POUR promouvoir le bien-être des enfants préparé par DEI-France. Document réactualisé en 2012 et tout à fait opérationnel.

(3) De Françoise Dolto à la Convention internationale sur les droits de l’enfant en passant par les travaux du Conseil d’Etat sous la plume de Paul Bouchet (1989) les lectures ne manquent pas


Source : Le blog de Jean-Pierre  Rosenczveig : Cliquez ici !




La politique de la
 « tolérance zéro » :


Les véritables enseignements
de l’expérience new-yorkaise




par Laurent MUCCHIELLI


“ Zero tolerance ”, le slogan new-yorkais a fait mouche ces dernières années. En France, il est arrivé tardivement, dans le contexte électoral des années 2001-2002. Certes, la référence aux États-Unis suscite toujours l’ambivalence en France. Nul ne s’est donc risqué à l’utiliser de façon trop directe. Pourtant, tout en s’en démarquant plus ou moins nettement, la plupart des responsables politiques français, à l’exception des écologistes et de l’extrême gauche, ont repris à leur compte le vocable de “ tolérance zéro ” pour signifier à l’opinion publique d’une part qu’ils entendaient apporter des réponses à la délinquance et aux “ incivilités ”, d’autre part qu’ils entendaient améliorer l’efficacité du système pénal pour réduire “ l’impunité ” dont bénéficieraient nombre d’auteurs d’actes de délinquance. C’est bien une “ tolérance zéro à la française ” qui s’est peu à peu dégagée dans le débat politique (Le Monde, 4 décembre 2001). Et il est manifeste que le nouveau ministre de l’Intérieur s’inspire largement de cette doctrine. C’est pourquoi il n’est pas inutile de faire le point sur ce qu’a été réellement l’expérience new-yorkaise et de se demander en particulier s’il s’agit d’une politique efficace de réduction de la délinquance. La réalité est singulièrement plus complexe.

Un nouveau management policier

L’histoire de la tolérance zéro commence avec l’expérience de sécurisation du métro de New-York par un policier aux méthodes innovantes (Willam Bratton), durant la première moitié des années 1990. Il s’agit de donner pour mission à la police de ne pas se contenter de courir après les délinquants signalés mais d’être beaucoup plus présente sur le terrain afin d’arrêter plus systématiquement les fraudeurs, les drogués, les taggueurs et les mendiants, dont on présume que certains sont aussi des délinquants au moins occasionnels.

En traquant tous les gibiers, on espère attraper aussi bien les petits que les gros. Fort de ses résultats dans le métro (une forte réduction des vols, une chute de la fraude, la raréfaction de la mendicité), Bratton est nommé en 1994 à la tête de la police de New-York par le nouveau maire Rudolf Guliani qui a placé les questions de délinquance et de police au cœur de sa campagne électorale (avec le soutien notable du syndicat des policiers de la ville de New York). Pour mettre en œuvre à grande échelle sa nouvelle politique de sécurité, Bratton obtient rapidement : 1/ une forte augmentation des effectifs de police (de 30 à 40 000 hommes en quelques années, pour une ville de 7,5 millions d’habitants), 2/ une réorganisation des moyens statistiques d’évaluation locale à la fois de la criminalité et de l’efficacité policière (grâce notamment à un système informatique baptisé “ Compstat ” et qui est devenu quasi mythique à New York), 3/ les moyens de faire pression pour “ remettre les policiers dans la rue ” et intensifier leurs contrôles sur la voie publique, à l’affût des moindres infractions, 4/ le droit de saisir immédiatement les armes découvertes au cours des fouilles. Au cœur de l’opération, il s’agit donc d’imposer à la police de nouvelles façons de travailler et d’être évaluée : un nouveau management de la police. Cette dernière doit être “ sur le terrain ”, elle doit s’attaquer à tous les petits désordres et non simplement aux crimes traditionnels, elle doit être évaluée statistiquement au niveau du quartier et les responsables de chaque commissariat doivent rendre des comptes chaque semaine à leur directeur général. Pour réaliser cette réforme profonde des habitudes de travail des policiers, en plus des moyens budgétaires, Bratton pourra notamment licencier une partie de la hiérarchie policière et faire chuter sa moyenne d’âge. Au fond, “ il dirige l’administration policière comme un industriel le ferait d’une firme jugée sous-performante par ses actionnaires ” (L. Wacquant).

En passant du métro à l’ensemble de la ville, les méthodes de Bratton n’ont pas changé de nature, mais elles ont pris une dimension politique nouvelle et sont devenues le support d’une communication centrée sur la “ reconquête ” de la voie publique par la police, la sûreté des “ honnêtes gens ” dans les rues et la mise à mal de l’“ impunité ” des délinquants. Mais entre la communication et la pratique il y a souvent un important décalage.

La baisse de la délinquance aux Etats-Unis

Durant de nombreuses années, l’expérience new-yorkaise a fait autorité auprès des hommes politiques et des journalistes américains. Depuis la fin des années 1990, alors qu’elle s’étendait à d’autres pays comme la France, la mode a cependant un peu passé aux États-Unis. Peu d’experts américains soutiennent encore aujourd’hui que la chute de la délinquance et de la criminalité à New York est due fondamentalement à la politique de tolérance zéro. Les recherches statistiques et les comparaisons régionales et internationales délivrent en effet ces constats : 1/ la criminalité avait commencé à baisser à New York dès 1991-1992, soit avant l’arrivée de Bratton ; 2/ des baisses de la criminalité parfois comparables à celle de New York ont eu lieu dans quantité d’autres grandes villes américaines qui n’ont pas mis en œuvre une politique de tolérance zéro (par exemple Boston, Houston, San Diego ou encore Dallas) ; 3/ une baisse de la criminalité comparable à celle des États-Unis a eu lieu également au Canada, pays dont les politiques policières et pénales sont profondément différentes. A cela, l’on peut ajouter l’opinion de beaucoup de chercheurs, selon laquelle la nouvelle politique policière n’a pas eu d’effet significatif sur la consommation et le trafic de drogues. Sur un plan général, ce n’est pas fondamentalement la tolérance zéro qui a fait baisser la criminalité et la délinquance à New York. Dès lors, qu’est-ce qui explique cette baisse générale aux Etats-Unis depuis 1991-1992 ?

Les recherches déjà mentionnées indiquent que deux facteurs macrosociologiques ont un rôle statistiquement déterminant : la démographie et l’économie. Souvent oublié, le facteur démographique joue un rôle important à l’échelle historique. Au cours de son histoire, une société n’a pas toujours le même pourcentage de jeunes âgés par exemple de 15 à 25 ans. Aux Etats-Unis, l’évolution démographique a été marquée par l’arrivée des enfants du “ baby boom ” après la guerre, puis par celle de leurs propres enfants qui, précisément, sont arrivés à l’âge adulte autour de 1990. Depuis, la proportion des jeunes dans l’ensemble de la population américaine décroît fortement. Ensuite, le facteur économique demeure déterminant. Le taux de chômage a baissé de 36 % aux États-Unis au cours des années 1990, de 27 % au Canada. Ces deux facteurs globaux sont communs à l’ensemble du continent nord-américain sur lequel se constate partout la baisse du crime. Pourtant le Canada et les Etats-Unis n’ont absolument pas la même politique pénale. Ainsi, le taux d’incarcération a légèrement baissé au Canada au cours des années 1990 alors qu’il a augmenté de plus de 40 % aux USA durant la même période, et l’évolution du taux de policiers par habitant indique la même opposition de tendance. Enfin, de nombreux chercheurs proposent un troisième facteur explicatif de la baisse de la criminalité dans les grandes villes américaines, en particulier de la baisse des homicides et des vols violents : c’est un tournant dans les cycles de la consommation et du trafic de drogues, la fin de “ l’ère du Crack ”.

Effets visibles et effets cachés de la tolérance zéro à New York

Est-ce à dire que le nouveau management policier de Bratton fut sans effet ? Il semble logique de penser que cette politique a pu réduire les petites délinquances de voie publique et les désordres les plus visibles (mendicité, prostitution, errance de toxicomanes et d’alcooliques), qui préoccupent traditionnellement fort peu la police alors qu’ils font l’objet des principales récriminations des habitants et des commerçants. Il n’existe pas d’évaluation scientifique sur ce point mais il est probable que cet effet existe même si le renforcement des contrôles a souvent pour effet d’une part de déplacer les problèmes au lieu de les résoudre (par exemple les clochards et les prostituées chassés d’un lieu ne disparaissent pas pour autant, ils trouvent d’autres lieux), d’autre part d’amener les délinquants à s’adapter à la nouvelle donne policière (c’est ainsi que les saisies d’armes à feu dans le métro avaient été spectaculaires au début, puis avaient chuté rapidement). Mais pour les autres délinquances, la simple observation de ce qui constitue le travail ordinaire de police amène à douter que ce travail puisse avoir des incidences majeures sur des phénomènes comme l’homicide, les bagarres entre voisins et entre groupes de jeunes ou encore les violences domestiques.

Enfin, l’évaluation ne serait pas complète si l’on ne signalait pas un effet pervers important de cette politique. Les commentateurs français “ oublient ” généralement de signaler que l’un des effets de la politique menée à New York a été d’accroître fortement les abus de pouvoir et les violences commises par les policiers au cours des contrôles effectués sur la voie publique, et dont les victimes ont été massivement les jeunes noirs des quartiers pauvres. Si une partie de la population est donc satisfaite de l’intensification des contrôles policiers, une autre en fait les frais. Selon un sondage réalisé en août 2000 à New York, 61 % de l’ensemble des sondés estimaient que la police faisait un bon travail, mais que 42 % des noirs et 36 % des hispaniques disaient avoir peur lorsqu’ils sont abordés par un policier. En effet, la mise en œuvre concrète de la politique de “ tolérance zéro ” consiste essentiellement dans l’intensification des contrôles d’identité et des fouilles pratiqués sur des personnes que les policiers jugent a priori suspectes. Mais ces personnes ne sont pas représentatives de la diversité de la population. Ce sont en réalité massivement les jeunes hommes noirs et hispaniques qui font l’objet de cette présomption de dangerosité. C’est ce que l’on appelle en France le “ contrôle au faciès ” et le problème du “ racisme professionnel ” des policiers. Les spécialistes de la police estiment que “ tous les chercheurs qui ont observé de près les pratiques policières, en France comme à l'étranger, concluent à la réalité d'un discours raciste généralisé, qui constitue pour les policiers une véritable norme à laquelle il est difficile, lorsqu’on est policier de base, d’échapper et plus encore de s’opposer.

Le caractère normatif de ce racisme policier en fait avant tout un élément de la culture policière, distinct du racisme ambiant ou de celui des couches sociales dont les policiers sont issus, et qui n’a pas un caractère de construction idéologique ou doctrinaire. […] les représentations racistes ont un caractère opératoire, en ce qu’elles permettent de différencier des individus. Elles constituent en quelque sorte des instruments de travail et font partie de cet ensemble de connaissances pratiques qui forment l’arrière-plan, la référence du travail policier. Le recours aux attributs ethniques a pour les policiers un caractère fonctionnel, au même titre que l’âge ou le sexe, dans la mesure où la police de la rue renvoie avant tout à une conception de la normalité conçue comme adéquation d’un type de population, d’un espace et d’un moment donnés. Tout décalage entre ces trois paramètres déclenche le soupçon policier et peut déboucher sur une intervention ” (Lévy, Zauberman, 1998). Ce constat international constitue une donnée hélas rarement prise en compte dans le débat.

Pour conclure


La politique de la “ tolérance zéro ” consiste à demander aux policiers de s’attaquer beaucoup plus massivement aux désordres de la voie publique tels que les vols parfois accompagnés de violence, la prostitution, la mendicité, l’alcoolisme, et à contrôler de façon beaucoup plus intense les personnes et les véhicules. Si une telle politique n’est pas dénuée d’effets sur la tranquillité de la voie publique, son efficacité à moyen et long terme en matière de lutte contre la criminalité reste à démontrer. Par ailleurs, elle s’accompagne d’effets pervers non négligeables, le principal étant d’exacerber les tensions entre la police et les jeunes des minorités ethniques qui constituent traditionnellement des “ populations-cibles ” de l’action policière, par conséquent d’augmenter le risque de dérapages des contrôles et des fouilles vers des “ bavures policières ” susceptibles à leur tour de décrédibiliser les policiers, de leur attirer des actes de représailles voire, dans certains contextes, de favoriser le déclenchement d’émeutes. On peut enfin regretter que cette expérience new-yorkaise très médiatisée accapare les esprits, au détriment de l’étude d’autres expériences de transformation des habitudes de travail de la police (ce que l’on appelle aux États-Unis la “ police communautaire ”).

A l’origine de ces débats aux États-Unis, il faut mentionner l’importance de la théorie de la “ vitre cassée ” de Wilson et Kelling, dont l’expérience de police de New York s’est réclamée mais qu’elle a en réalité totalement dévoyé. Pour Wilson et Kelling, le rétablissement de la tranquillité publique dans les quartiers en difficulté devait passer par la transformation des modes de travail des policiers pour qu’ils s’insèrent dans le tissu relationnel d’un quartier et y jouer ainsi un rôle pacificateur et régulateur, en collaboration avec les habitants. Un tel état d’esprit serait bienvenu en France où la “ police de proximité ” n’est souvent qu’un slogan et une réorganisation administrative que n’accompagne aucune réforme véritable des modes d’intervention de la police. La diffusion de l’idéologie de la “ tolérance zéro ” risque même de vider totalement de son sens et de ces effets cette tentative de réforme et de conduire aux mêmes impasses qui font que cette politique est aujourd’hui remise en question aux Etats-Unis, à la suite notamment d’une série de bavures policières.

Bibliographie

Brodeur J.-P., 1997, La police en Amérique du nord : des modèles aux effets de mode, Les cahiers de la sécurité intérieure, 28, p. 171-184.
Greene J., 1999, Zero Tolerance : a case study of police policies and practices in New York city, Crime and Delinquency, 2, p. 171-187.
Harcourt B., 2001, Illusion of Order. The False Promise of Broken Windows Policing, Cambridge, Harvard University Press.
Lévy R., Zauberman R., 1998, La police et les minorités visibles : les contradictions de l’idéal républicain, in Cartuyvels Y. et alii., eds., Politique, police et justice au bord du futur, p. 287-300.
Wacquant L., 1999, Les prisons de la misère, Paris, Raisons d’Agir.
Wilson J., Kelling G., 1994 (1982), Vitres cassées, Les cahiers de la sécurité intérieure, 15, p. 163-180.


Source d'origine :
 Hommes & Libertés, 2002, n°120, p. 38-40


Pour consulter et en savoir plus :

Le site de Laurent Mucchielli :  Cliquez ici !


Un Observatoire national
de la délinquance


Interview de Laurent Mucchielli



- Comment recevez-vous l’annonce de la création de l’Observatoire de la délinquance?

Elle arrive un peu tard. Après un an et demi durant lesquels nous avons eu droit aux statistiques mensuelles de la police et de la gendarmerie, avec convocation au ministère des cinq départements affichant les plus fortes hausses. Ce qui suscite trois réflexions. La première est que ces statistiques mensuelles donnent des résultats agglomérés qui ne permettent aucune analyse fine. En somme, on publie suffisamment pour donner un peu de matière à commentaires aux journalistes, mais en réalité on ne donne pas assez pour véritablement permettre l’analyse. La seconde réflexion est qu’il est très étonnant que personne ne fasse la remarque suivante : on sait que les statistiques de la police et de la gendarmerie enregistrent l’activité de ces services. Dès lors, si les policiers et les gendarmes sont plus nombreux, s’ils ont des consignes pour être plus sévères (« tolérance zéro ») et si on crée de surcroît de nouvelles infractions, en toute logique ils devraient constater davantage d’infractions. Or la délinquance enregistrée baisse. Singulier paradoxe ! Troisième réflexion : personne ne semble comprendre les conséquences du fonctionnement de ces statistiques. Encore une fois, elles enregistrent l’activité des policiers et gendarmes. Dès lors, en toute logique, les cinq départements affichant les plus fortes hausse ne sont pas les plus mauvais, ce sont au contraire les meilleurs, ceux qui ont le plus travaillé !

- Sa composition vous semble-t-elle équilibrée ?

Non. Sur 27 membres, il n’y a qu’un seul chercheur spécialiste de ces questions. C’est dérisoire. Par ailleurs, le président de l’observatoire est Alain Bauer, dirigeant d’une société privée de conseil en sécurité, connu pour ses propos catastrophistes sur les délinquants « de plus en plus jeunes et de plus en plus violents », leurs parents « démissionnaires », etc., et puis aussi la France devenue plus dangereuse que les Etats-Unis, et puis le terrorisme omniprésent, etc. J’aurais souhaité un conseil présidé par une personnalité incarnant le service public, et davantage de chercheurs fins connaisseurs des questions de délinquance. Par ailleurs, au-delà du conseil, les gens qui vont réellement travailler seront salariés de qui, sous les ordres de quel patron, nommé par qui ? Il s’agit d’un institut qui reste dépendant du ministère de l’Intérieur, non d’un établissement public véritablement indépendant. Que se passera t-il si les conclusions de l’observatoire ne plaisent pas au ministre ? L’expérience le dira. En réalité, la meilleure façon qu’aura cet observatoire de prouver son indépendance sera sa transparence. Publiera t-on un minimum de choses pour garder le monopole du commentaire ? Ou bien mettra t-on véritablement à disposition de tous les chercheurs (et de tous les citoyens intéressés) les résultats des travaux et des enquêtes ? C’est dans cette transparence que l’on vérifiera si cet observatoire tient ou non ses promesses et ressemble un peu à ce que certains de nos voisins sont capables de faire (par exemple le Home Office en Angleterre).

- L'« État 4001 », sur lequel l'observatoire va continuer de s'appuyer, est-il un bon outil ? Et pourquoi ?

La question centrale est plutôt de sortir de l’idée de mesurer la délinquance à l’aide des seules statistiques policières, de développer d’autres outils de connaissance, au premier rang desquels les enquêtes de victimation, réalisées auprès d’échantillons représentatifs de Français, dans le but de savoir ce dont ils ont pu être victimes même s’ils ne l’ont pas déclaré à la police ou que leur plainte n’a pas abouti. Ces enquêtes coûtent cher si on les prend vraiment au sérieux (avec de gros échantillons, dans différentes régions), mais c’est une des clefs de l’avenir de la mesure de la délinquance. On verra si cet observatoire reçoit les moyens de les réaliser ou bien s’il procède essentiellement à une compilation de données administratives.

Source : l'Humanité, année 2003


Bibliographie de Laurent Mucchielli


Les viols collectifs. Phénomène médiatique et contre-enquête sociologique, Paris, La Découverte, à paraître en janvier 2005.
Mythes et histoire des sciences humaines, Paris, La Découverte, 2004.
Crime et sécurité : l’état des savoirs (sous la dir. avec Philippe Robert), Paris, La Découverte, 2002.
Violences et insécurité. Fantasmes et réalités dans le débat français, Paris, La Découverte, 2001 (2ème éd. augmentée 2002).
La société française en tendances (avec le groupe Louis Dirn), Paris, Presses Universitaires de France, 1998.
Le cas Spencer. Religion, science et politique (avec Daniel Becquemont), Paris, Presses Universitaires de France, 1998.
La découverte du social, Naissance de la sociologie en France (1870-1914), Paris, La Découverte, 1998.
La sociologie et sa méthode. Les Règles de Durkheim un siècle aprèssp (sous la dir. avec Massimo Borlandi), Paris, L’Harmattan, 1995.
Histoire de la criminologie française (sous la dir.), Paris, L’Harmattan, 1994.

Articles récents


« Les caractéristiques démographiques et sociales des meurtriers et de leurs victimes. Une enquête sur un département de la région parisienne dans les années 1990 », Population, 2004, 59 (2), p. 203-232.
« L’évolution de la délinquance juvénile en France (1980-2000) », Sociétés contemporaines, 2004, 53, p. 101-134.
« L’islamophobie, une myopie intellectuelle ? », Mouvements, 2004, n°31, p. 90-96.
« Promesses et illusions de la “tolérance zéro” », in Universalia 2003, Paris, Encyclopaedia Universalis, 2003, p. 238-242.
« Le rap de la jeunesse des quartiers relégués. Un univers de représentations structuré par des sentiments d’injustice et de victimation collective », in Boucher M., Vulbeau A., eds., Émergences culturelles et jeunesse populaire. Turbulences ou médiations ?, Paris, L’Harmattan, 2003, p. 325-355.
« Délinquance et immigration en France : un regard sociologique », Criminologie, 2003, 2, p. 27-55.

Source : ENS-Socio - 2004



 Voilà, tout va bien
en France
"Madame la marquise"...

Par Lionel Mesnard, le 12 novembre 2005
 

Depuis Pierre Mendés France dans les années 1950, qui à gauche a su tenir un discours à la jeunesse et en faveur d'une république citoyenne ? Personne. Cette idée (de Jaurès, ou de Léon Blum) de s'adresser aux plus jeunes pourrait sembler ringarde, un tantinet désuet, mais qui ne constate pas le gouffre entre générations ? Il devient inquiétant et ne peut que pousser à un sentiment d'injustice général et à la banalisation de la violence. Il est impossible d'analyser à chaud les raisons des affrontements, à moins de se limiter à comptabiliser les voitures incendiés. Voire pire à relayer les inepties des médias, et commenter des à peu près. Il s'est en effet produit sur tout le territoire une flambée, sa propagation soulève des interrogations. Tout le monde y va de sa petite réalité, de sa pseudo-connaissance des périphéries urbaines.

La crise économique perdure depuis 2001 et s'y surajoute une crise des institutions politiques, et de plus les quartiers populaires explosent après avoir trop longtemps couvés nos déséquilibres urbains et sociaux. Serions-nous, comme l'a exprimé un journaliste vénézuélien face à un "caracaso" à la française ? En février 1989 au Venezuela, la famine avait poussé les populations des quartiers défavorisés à se soulever, à manifester un ras le bol du système politique, et présumer du changement en mouvement depuis 1999. Nous remplissons en l'état des similitudes fortes. Les institutions vénézuéliennes nous donnent une piste pour asseoir enfin dans notre pays la démocratie. Nous vivons en France dans un système autocratique, inégalitaire, ou la redistribution des richesses est aussi problématique que dans un état du tiers monde. Pour ce qui est de la participation de tous, n'en parlons pas, l'idée d'émancipation par la citoyenneté demanderait des institutions démocratiques. Nous en sommes loin, et il suffit de reprendre le même constat que fit Pierre Mendès France en 1965.

Nous voilà face à une mutation à entreprendre ou une crise à subir sans fin ? Il en va d'une prise de conscience et de nous organiser librement, de penser le monde autrement, de faire naître un sentiment citoyen fort. La politique est l'affaire de tous, mais quand 76% de l'opinion choisit le recours à l'état d'urgence, jusqu'ou pousse t'on la manipulation des esprits, jusqu'ou pousseront-ils la tentation du coup d'état permanent ? Des socialistes approuvant de tels choix nous rappellent indirectement des heures sombres de notre histoire en Algérie, voire un mois de juin 1940. Et oui, qui sait si la prochaine étape ne sera pas les pleins pouvoirs à Chirac, en vertu de l'article 16 de notre constitution !??

Bien que les conditions de vies soient bien plus âpres au Venezuela pour 70% de la population, il y a l'honneur d'un peuple à vouloir prendre ses difficultés à bras le corps, à chercher des solutions collectives et engager des transformations progressives et progressistes. Le Venezuela, a t'il ouvert un nouveau cycle ou un tournant historique ? En attendant, ce n'est pas impossible, et à ne pas sous estimer. L'enjeu est un socialisme nouveau pour notre siècle et à l'échelle de notre humanité. Tous et sans question d'âge, nous avons à nous mobiliser contre toutes les formes d'injustices ; à nous organiser pour construire un état de droit social et un contrôle citoyen des dépenses publiques. Du moins, il serait temps de sortir d'un système politique qui date du 17ème siècle, de mettre fin aux privilèges des pouvoirs bourgeois. Une révolution démocratique reste à faire ! Ou comment redonner un sens à l'engagement et à l'action dans un espace commun, et au profit d'une redistribution équitable. Le monde peut encore changer de base, le reste est une affaire de conscience. De classe?

La violence n'est toutefois pas la solution, mais il est temps que la colère sociale s'exprime, qu'elle permette de nous organiser pour un changement politique de fond. Les révoltes urbaines ne peuvent que renforcer l'état policier, il importe de trouver un dialogue intergénérationnel, et être enfin à l'écoute des maux de la jeunesse. Les solutions de De Villepin sont dangereuses et rétrogrades, en revenir à l'âge de 14 ans pour l'apprentissage signifie un recul de 30 ans en arrière. Le ministre de l'économie proposant de son côté un budget 2006 au profit des rentiers n'aidera pas à créer des richesses et encore moins les redistribuer. La dette publique gonfle et la reprise économique sont aux abonnés absents. La sécurité publique est devenue un fonds de commerce très frelaté, le résultat des lois cyniques du ministre Perben, qui ont remis la justice au service du politique. Le bilan global est sinistre depuis avril 2002 en chiraquie, la décomposition est en route.

Nous allons avoir des cohortes de sociologues ou experts en criminalité pour nous expliquer les raisons du malaise. Attendons nous au pire, notamment dans l'utilisation du mot réalité. Le problème est politique et l'on va refiler gentiment le bébé aux spécialistes patentés de la chose. Juger les gestes de gamins un peu, beaucoup barrés au titre des réalités et de plus étant de très loin de ressembler à la majorité de ceux qui résident en banlieue. Il y a le risque de nous renvoyer à une impasse. Tout pareillement, si on alimente les peurs et des réflexes sécuritaires. Le problème est avant tout une forte crise du monde urbain. Si l'on prend pour référence la région parisienne, il n'y pas de surprise, à l'est les villes et départements pauvres et à l'ouest vit paisiblement notre bonne bourgeoisie parisienne. La séparation géographique est avant tout économique et sociale et nous payons plus de 40 ans de politiques inégalitaires entre les territoires, et une architecture anxiogène ou inappropriée à des populations urbanisées.

Entre 1959 et 1992, nous sommes passés en Région île de France de 5 millions à un peu moins de 12 millions d'habitants. L'on constate encore de nos jours une urbanisation du peu restant d'espaces agricoles, et qui pose ou posera des problèmes. Le phénomène de rurbanisation ne présume en rien de bon, sauf à favoriser la spéculation des terrains nus et créer une extension abusive de l'espace urbain. De repousser à nouveau les populations les plus pauvres à 50 ou 60 kilomètres du centre. Justement, si on regarde de plus près ce que représente Paris face aux autres communes de l'est parisien, il y a un monstre économique sans réel connexion avec sa périphérie. Quand la plupart des grandes métropoles disposent d'une communauté urbaine, Paris, la capitale dispose d'un statut propre et de quasiment aucun dispositif d'échange, ce qui se traduirait en jargon technocratique à faire de l'intercommunalité. L'on sait aussi depuis longtemps que la coupure spatiale entre l'est et l'ouest parisien est le résultat d'un déséquilibre patent entre l'habitat et l'emploi.

On peut affirmer que les différentes politiques menées depuis toujours n'ont jamais prises en compte les déséquilibres et su penser la Ville, la "cité" au sens plein et non limité à un quartier. La marginalisation que dénonçait, il y a déjà quelques années l'abbé Delorme sur l'organisation périphérique, a pris toute son ampleur et nous voilà en plein dans l'absurde du centralisme à la française. 12 jours ou la France a été emporté par l'affectif et en a oublié sa raison. Il existe des millions d'invisibles que la Nation n'a pas su prendre en compte, mais les profits des grandes entreprises n'ont jamais connu de tels niveaux ( 41% au troisième trimestre 2005 pour Total). Si le président français passe pour un progressiste à l'international, voire un altermondialiste, vue de France ses politiques et ses gouvernements prouvent le contraire. Quand l'UDF ou le centre droit joue pour quasi seul opposant à des politiques néfastes ou suicidaires, on se demande où se trouve la gauche ? En clair, ils sont à la droite des démocrates chrétiens, ils n'ont même plus la capacité de s'indigner. Nous baignons en pleine schizophrénie, et notre système républicain se délite.

Les institutions de la cinquième République sont à leurs limites. La fin d'un système ubuesque s'approche et il est temps que le peuple souverain donne son avis sur ses attentes et ses besoins. A nous, modestes citoyens de réclamer au plus vite des états généraux populaires, d'ouvrir des cahiers de doléances et de soutenir une nouvelle constituante. Mais attention rien ne dit que ce processus de violence et de répression n'en soit qu'à son début, la dépression ambiante n'augure pas vraiment d'un renouveau politique. 15 millions de français vivent dans la précarité, une dizaine dans la pauvreté, le bilan est affligeant, mais pour cela l'état d'urgence n'a pas lieu dans la tête de nos élites.

Voilà, en très bref, tout va bien en France "Madame la marquise"....

 

Un danger nous menace, 

les thèses rétrogrades de la "tôlérance zéro" !

  par Lionel Mesnard, année 2002

Nous comprenons ce que sont l'espérance, la peur, la sécurité, le désespoir, le contentement et les remords de conscience. En effet l'espérance n'est autre chose qu'une joie instable, née de l'image, d'une chose future ou passée, de laquelle nous doutons. La peur est une tristesse instable, née de même l'image d'une chose douteuse...  Spinoza, in l'Ethique, livre 3 : "De l'origine et de la nature des affections".

Le sentiment d'insécurité en France n'est certainement pas à récuser, il est prégnant, mais fortement subjectif. Les statistiques actuelles de la police française ne sont que le miroir aux alouettes des violences subies. Comme dans toute addition, comment additionner "des carottes et des navets" : un vol de portable et un viol de l'intimité sexuelle? Il y a d'un point vue politique à comprendre dans l'insécurité ce qui est de nature de l'angoisse et ce qui est criminel. Le monde politique par trop souvent ne prend en compte que la réaction de peur, certes légitime mais dont le fondement est toutefois relatif, sauf la plainte des victimes. Ce qui peut attenter à la personne est au vue des statistiques noyé dans la masse des actes comptabilisés, les 4 millions de délits et crimes (recensés en 2001), ne reflètent qu'un chiffrage global. Quelle lecture qualitative peut-on envisager et ressortir de cette masse informe? Quelles variables peut-on faire intervenir pour se rendre compte de ce qui peut avoir un rôle criminogène et en esquisser les causes?

A regarder les sondages d'opinions peut-on avoir une lecture fiable du réel ? Ne pourrait-on pas se fier à des données plus objectives. Si un sondeur s'interroge sur "avez-vous peur, dans la rue, la nuit, ...?" : il y a en probabilité et de la par la nature de la question d'y introduire de nombreuses réponses dès plus relatives. En raison de la part plus que subjective de la question posée et peu importe la personne. En lui demandant de répondre à un sentiment, elle ne répond pas à un fait objectif, sauf à dire que majoritairement nous avons plutôt peur de sortir la nuit, plutôt que le jour, quelle découverte... 

Un sentiment insécure à première lecture n'évoque pas grand chose. Sauf une prise en compte de la nature de quelque chose de vague, qui est associée à ce que nous vivons et avons connu, ou pas, comme stabilité tout au long de notre existence. Pour image : les peurs enfantines du loup, où l'enfant invente un monde, où se crée paradoxalement un univers apaisant. L'enfant peut ainsi apprendre normalement et maîtriser sa peur, et grandir comme un petit d'homme heureux. Mais d'autres en grandissant continueront à avoir "peur du loup", ou bien à avoir "peur de l'autre"?

Au contraire, si l'on pose une question qui touche directement ou pas la personne, le questionnaire est plus fiable et limite son champ interprétatif :"avez-vous été l'objet d'une ou plusieurs violences...? La personne va donner un résultat plus fidèle, surtout si l'on en sort une enquête s'appuyant sur des données statistiques ou de sources réelles ou vécues (et pas que policières). Deux millions de femmes battues (et 200.000 hommes), 1200 suicides aboutis chez les moins de 18 ans par an en France. Il y a des chiffres qui eux parlent plus que de raison sur l'insécurité au quotidien, de plus un viol sur deux n'est pas déclaré et pris en compte. Pour dernier exemple, le viol de mineurs représente un dossier sur deux actuellement plaidé en cours de justice pénale. Depuis l'abolition de la peine de mort en 1981, les homicides sont restés stables et l'incidence des crimes de sang représente une toute petite marge de la criminalité. Considérer qu'il y a en potentiel de quelques milliers de gens très dangereux est un fait. On ne peut soupçonner tout le monde. Ce qui ferait soixante millions de victimes ou de coupables en puissance... La police fait son travail répressif, mais n'a pas réponse à tout, et la justice doit toujours primer comme facteur d'équilibre.

La question politique de l'insécurité implique de ne pas se tromper et de pouvoir apporter des réponses conformes au réel. Ce réel violent est objecté, il impliquerait à critiquer l'organisation de nos sociétés. Tout cela touche à une question fondamentale, celle de l'intime, de la protection réelle de l'individu de sa naissance à sa mort dans une société de droit. Pas vraiment consciente de l'ampleur des souffrances humaines au sein des familles, premier foyer de violence bien avant la rue !

Faut-il pour cela un flic par foyer ou par immeuble? ce serait grotesque, mais il serait temps que les victimes puissent trouver une véritable service public d'assistance et de soutien. Il faut aussi repenser la réparation et limité l'enfermement. Pour remettre sur les rails de la vie, ceux qui peuvent trébucher ou avoir besoin de repères. En soit il faut sanctionner la faute, selon les griefs et l'âge de l'individu, mais toujours permettre à toute personne de devenir autonome et responsable de ses actes. Tel est l'objectif non avoué mais indispensable de toute action réparatrice. Le constat n'a rien d'étonnant, ce sont les plus faibles les premiers touchés : femmes et jeunes sont en tête des victimes de l'insécurité en des données constantes (ou en augmentation et particulièrement les agressions sexuelles). Les 170.000 crimes et délits commis en 2001 chez les moins de 18 ans (400.000 en Allemagne pour comparaison) ne font pas des jeunes les responsables si facilement désignés à la vindicte populaire.

C'est au monde adulte de porter un constat lucide, rassurant et intégrant les jeunes, les femmes, les personnes âgées pour mieux vivre dans la collectivité. Ce sont elles les victimes de l'égoïsme ambiant et pas les électeurs masculins du haineux F.N. La crise du politique réside dans l'énoncé de paroles, et les paroles attendues ne peuvent provenir que de l'entendement d'une société sachant accompagner les nouvelles générations. Aujourd'hui, les familles, les lieux d'éducation, ou de santé sont au centre de trop nombreuses violences sociales. Le politique ne peut en un coup de baguette magique répondre à des questions si complexes, qui demanderont à bien en examiner ce qui peut conduire à un progrès ou à une régression ? Nous sommes tous juges de constater que l'insécurité existe, mais pas ou on la recherche vraiment, et avec ce sujet il y a de quoi s'interroger sur notre malaise de civilisation.

Des prises de positions courageuses sur des tabous de société tel que l'inceste, la maltraitance physique et sexuelle des enfants, les viols conjugaux, ont contribué à lever l'ombre sur une partie immergée de l'iceberg social. Il est temps d'envisager des actions d'une autre nature et en rapport avec les besoins d'un monde sécurisant et inclusif. Certains ont joué avec le feux, notamment quand on veut faire passer la France pour un pays ou le danger nous menace ? Bientôt, peut-être découvrirons-nous certains experts en sécurité, comparer un jour sur nos écrans virtuels la France à la Colombie, (ou ci-dessous l'article sur le sort des enfants pauvres en Amérique Latine)? Peut être demain, si la République continue de s'affaiblr. Surtout, si les hommes et les femmes de ce pays tournent le dos au progrès et à la liberté. Si vouloir exploiter ou vivre de la misère devient une rente d'affaire et le tremplin des pulsions les plus morbides, qui sait que ce qui nous attend comme pouvoir fasciste.

A jouer avec des peurs incertaines, nous risquons fort d'en payer le tribut. Il n'y aura pas de scénario catastrophe si nous nous mobilisons pour une responsabilisation du monde adulte. Pour porter des réponses, qui n'ont à rien voir avec la mélasse actuelle. Ce n'est pas aux enfants de répondre aux déséquilibres sociaux et économiques des "grands", encore moins de les désigner comme symtômes, ils en sont le plus souvent des victimes idéales. Nous devons apprendre à faire reculer la violence en se confrontant aux causes, le drame des chiffres c'est que l'on peut les interpréter, comme bon nous semble.


 
 

 Les «jetables»



par Jesus Ramirez Cuevas

 LES MEURTRES D'INDIGENTS AUGMENTENT AU MEXIQUE

En Amérique latine, les crimes systématiques de vagabonds, enfants des rues et autres personnages des dénommés bas fonds, sont chaque fois plus fréquents. En Colombie et au Brésil, chaque année des délits de ce type se produisent par centaines, beaucoup perpétrés par des policiers, et au Mexique les exécutions d'indigents de plus en plus fréquentes, inquiètent. Les exécuteurs de ce « nettoyage social », expression colombienne pour se référer au phénomène, partagent l'idée que leurs victimes ne sont pas des personnes productives, mais bien des êtres inutiles dont on peut se passer, des obstacles qu'il faut éliminer, des résidus humains d'un système global qui les rejette d'avance.

En un mois, six indigents ont été assassinés à Tijuana. Tous ont été exécutés avec des armes à feu du même calibre et, sans exception, ils ont reçu le tir de grâce. La peur s'est emparée des gens qui vivent dans les rues de cette ville frontalière, mais les autorités n'ont arrêté personne. Par les caractéristiques des meurtres, on soupçonne qu'ils pourraient être l'oeuvre d'un escadron d'extermination d'indigents.

Des 225 personnes assassinées dans cette ville pour cette année (la majorité liée au trafic de drogues), presque personne, à part la police, n'a semblé remarquer ces crimes. D'autant moins que plusieurs d'entre eux n'ont pas été identifiés, parce qu'ils sont sans nom et n'ont pas de famille qui réclame leur corps. Le seul souvenir qui reste d'eux est un petit autel avec des images religieuses et des fleurs en plastique que leurs compagnons de rue, comme eux indigents, ont érigé dans l'avenue Internationale.

Le parquet enquête sur ces meurtres de « vagabonds ». Parmi les indigents, l'alerte s'est répandue et ils cherchent déjà comment se protéger face à de nouvelles agressions. Le journal El Universal a fait connaître le témoignage de Simón, originaire de Oaxaca qui est arrivé en ville il y a six mois pour passer aux Etats-Unis, et n'ayant pu le faire il a rejoint les vagabonds de la frontière : « On dit que ce sont des personnes qui veulent nous effrayer, qui ne veulent plus que nous donnions une mauvaise image ici, il y a toujours eu des rafles, mais maintenant ils nous tuent ». (El Universal, 30/05/05).

Le cas de Tijuana est loin d'être le seul. Il y a deux semaines un groupe de jeunes à Fresnillo (Zacatecas) a tué l'indigent, Javier González, El Cobijas, en l'arrosant d'essence et en lui mettant le feu, après l'avoir tabassé. Le crime implique sept jeunes fils de riches chefs d'entreprises et commerçants, une nièce du sénateur José Bonilla et un neveu du sous-procureur de Fresnillo, Francisco Javier Martínez. Leur divertissement nocturne, ont-ils déclaré, était de frapper des indigents. Étant des personnes victimes de la couche sociale la plus basse, personne ne se soucie de ce qu'il leur arrive, raison pour laquelle il n'existe pas de registre de meurtres semblables ou d'agressions. La seule exception a été peut-être à Guadalajara où, dans les années 90, une personne s'est attachée à faire disparaître plus d'une dizaine d'indigents, ce qui fit scandale dans la « perla tapatía » (nom donné à la ville de Guadalajara, ndlr) et obligea les autorités à arrêter le responsable.

Mais qu'ont en commun tous ces crimes ?

En Amérique latine, où des millions de personnes vivent dans la rue, chaque année on enregistre des milliers de meurtres de vagabonds, d'enfants des rues, de prostituées et d'homosexuels. Dans son rapport sur les exécutions extrajudiciaires de 2004, Asma Jahangir, rapporteur de l'ONU, a mentionné des cas d'exécutions d'enfants de quartiers pauvres en Colombie, au Brésil, au Guatemala, au Honduras et en Jamaïque (en indiquant que ce ne sont pas les seuls pays). Le Brésil et la Colombie sont en tête des statistiques de ce type de délits qui impliquent des policiers, des paramilitaires et des narcotrafiquants.

En Colombie, on enregistre chaque année plus de 300 meurtres de personnes qui vivent dans la rue, la majorité perpétrés par des policiers et des paramilitaires. Au Brésil, il existe des escadrons de la mort formés par des policiers qui commettent de nombreux crimes contre des indigents dans les favelas de Rio de Janeiro et de São Paulo. Le 31 mars dernier, 11 policiers ont assassiné 30 personnes dans deux quartiers de Rio (seules deux des victimes avaient des antécédents pénaux et cinq étaient des adolescents). Les policiers sont arrivés dans un bar en tirant puis ils sont allés dans un autre quartier où ils ont tué 12 personnes sans discrimination. Ce type de crimes a eu une résonance au niveau international quand ces escadrons ont tué 21 personnes dans la favela de Vigario Geral en 1993, en plus de huit enfants qui dormaient dans l'atrium d'une église dans le centre de Río. A Sao Paulo, l'année passée, il y a eu une vague de crimes contre des indigents, commis par des policiers liés à des groupes néonazis.

Actuellement, certaines personnes impliquées dans ces crimes doivent répondre à des procès devant la justice brésilienne, ce qui n'arrive pas dans d'autres pays. Au Venezuela, le Programme vénézuélien d'éducation-action aux droits humains (PROVEA), dans son rapport 2003-2004, rapporte 201 exécutions dans cette période (87% imputés à des policiers), la majorité d'entre elles étant de jeunes de moins de 24 ans, pauvres et noirs de quartiers populaires. 50 de ces victimes étaient des enfants et des adolescents. Dans la plupart des cas, les victimes sont des délinquants, enfants des rues et vagabonds (seulement à Caracas pour cette année, 11 indigents ont été assassinés).

Résidus humains

Les cas de violence enregistrés au Mexique contre des indigents et des enfants des rues, vont en augmentant. Le risque existe de voir se répéter d'autres cas d'exécutions et de meurtres de gens vivant dans la rue, en raison de la montée de la violence et de l'impunité. Actuellement dans le pays, il y a plus de 100 mille personnes qui résident dans la rue, les deux tiers étant des enfants. Les passages à tabac de vagabonds ou d'indigents sont quotidiens (la majorité infligés par des policiers). Dans le cas des crimes, les auteurs de ce « nettoyage social », comme l'appellent les Colombiens, justifient leurs actions par l'éthique du progrès, considérant qu'il s'agit de gens improductifs qui, outre le fait « d'enlaidir » les villes, ne causent que des problèmes. « Comme ils ne servent à rien, pensent-ils, le mieux c'est de les exterminer ».

Cette logique est loin d'être une conduite criminelle exceptionnelle. Comme l'indique le célèbre sociologue polonais, Zygmunt Bauman, le capitalisme global crée ses résidus humains propres, « les non productifs », « les exclus ». « La production directe de corps superflus, dont on n'a plus besoin pour le travail, est une conséquence directe de la globalisation », indique son plus récent livre, « Vidas desperdiciadas. La modernidad y sus parias » (Paidos, 2005) [Vies gaspillées. La modernité et ses parias] Pour paraphraser Bauman, la justification éthique de ces crimes se fonde sur le fait que les victimes ne sont pas des personnes productives, mais bien « inutiles » à la société de consommation, par conséquent « jetables », des restes.

Dépouillés de toute dignité, refoulés en marge de la société, des milliers de gens essayent de survivre sur des terrains vagues, dans des parcs, dans la rue, dans des voitures abandonnées ou dans des égouts. Les mêmes qui, selon le plan « Tolérance Zéro » proposé par Giuliani [1] pour le DF [District fédéral, la ville de México], doivent être éradiqués des espaces publics et, une fois leur existence « criminalisée », ils deviennent les victimes d'abus policiers et de ceux qui les méprisent dans tout le pays. La condition d'être un jetable croît au rythme du progrès, c'est pourquoi prévenir des conduites qui plaident pour leur extermination peut éviter un chemin sans retour.

NOTES:

[1] Ancien maire de la ville de New-York, Rudolf Guliani, symbole des politiques de « tolérance zéro » a été consulté en tant qu'expert en la matière pour la ville de Mexico. (ndlr)

 

Source : Site RISAL - Année 2005




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