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Lutèce, la gallo-romaine

Là où l'empire Romain prit domination, il imposa ses règles, d'évidence celles de la construction et de l'urbanisme.

Les cités en Gaule correspondirent trait pour trait à la civilisation romaine : routes pavées, temples, théâtres, arènes, aqueducs, rues perpendiculaires,  etc... Ce qui deviendra plus tard Paris est à l'origine une ville d'inspiration latine. Une approche pas si éloignée de la conception contemporaine de l'urbanisme.

Ci-contre : "le frigidaire" (thermes de Cluny)

 

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Si Lutetia (en latin), plus couramment Lutèce a été une ville de très moyenne importance, elle a eu pourtant sa monnaie et les romains fortunés aimèrent y venir séjourner, et la présence passagère d'empereurs romains dans la lignée des Augustes marquait la fin de la république romaine.


Repères chronologiques :

-44 : Assassinat de Jules César à Rome.

-43 : Fondation de Lugdunum (Lyon).
-31 : Octave triomphe d’Antoine et de Cléopâtre (l’Égypte devient romaine).
-27 : Octave prend le nom d’Auguste et devient le premier empereur de Rome et débuts du Haut Empire romain (fin vers 280).
-21/-20 : Résistances gauloises avec les révoltes des nobles Florus et Sacrovir contre les impôts et non contre Rome.
-20 : Premières traces d’occupation gallo-romaine sur le site parisien actuel.
-15/-13 : L’empereur Auguste séjourne à Lyon (Lugdunum), dénommée capitale des Gaules (Gallia). Il est procédé à une réorganisation géographique et politique des provinces gauloises avec la partie Lyonnaise (Lugdunemsis) à dominante Eduens, de Belgique (Belgica) et d’Aquitaine (Aquitania), une Gaule séparée de la partie Narbonnaise intégrée ou annexée par Rome depuis plus d’un siècle. Le Rhin depuis les Pays-Bas jusqu’en Suisse, délimite la partie non soumise des Germains ou échappant à leur romanisation contrairement à des villes comme Trèves, Bonn, Mayence ou Cologne. Nous sommes loin des divisions en sept parties de la Gaule conquise par Jules César, la Bretagne faisant référence à la grande île, et l’Armorique est incluse à ce nouvel ensemble géographique.
*
Premier siècle : Fondation de Lutèce (Lutetia).
année 09 : Désastre de Varus, fin de la conquête en Germanie.
année 14 : Mort d’Auguste et les débuts de la Pax Romana, l’empereur Tibère prend sa suite.




Ce fut une ville paisible, avec une garnison militaire de petite importance, bien qu'elle donna lieue à des "hivernages", pour le repos des troupes. C'est en rive gauche que la cité allait s'étendre et accueillir une population de l'ordre de 5 à 20.000, selon les sources et les périodes. Au tout début du 1er siècle, à Lutèce on peut estimer à 2.000 habitants ses débuts romano-gaulois. Et il faut noter un arrêt de la production artistique Celte pour un art de copie ou s'assimilant à l'Empire, voire à la Grèce comme référence et culture prédominante avant l'occupation romaine.

Pour mémoire seule une petite rébellion a pris place contre l'autorité romaine.
Il
y fut mis fin par la volonté des habitants, plus que de la volonté de ceux chargés de protéger la ville. Pour autant, les résistances ne prirent pas totalement fin, mais en d'autres termes, c'est-à-dire en relation avec les questions religieuses et la prédominance des cultes polythéistes. Les divinités celto-gauloises ne disparurent pas, mais se partageaient les cultes avec les dieux romains, notamment avec Mercure ou Jupiter. Il est possible de parler de domination culturelle, en plus des questions sociales et économiques, entre autres avec les monnaies qui allaient prendre une place importante dans la coupure entre élites romanisées et gaulois traditionnels de l'Ouest européen : Celtes, Aquitains et Belges.

Le développement de Lutèce s'est étendu en contre-fort de la Montagne Sainte Geneviève. Les protections édifiées vers 270 ne tinrent pas l'assaut des Germains et la ville allait connaître les premiers soubresauts parvenant du Nord et de l'Est européen. Entre-temps et depuis la fin du premier siècle, Lutetia prospéra et développa mieux qu'ailleurs la Pax Romana ou la "paix romaine".


Théodore Vacquer et l'histoire de Lutèce?

Si Eugène Belgrand a laissé des témoignages précieux pour son époque et sur la Préhistoire, il serait difficile de ne pas donner à lire (après dans l'encadré) quelques apports des travaux de Théodore Vacquer (1824-1899).

Cet "antiquaire" ou archéologue n’est pas une figure connue en dehors de cercles de spécialistes, pourtant son travail, ses recherches et ses écrits apportent des lumières supplémentaires sur les Parisii et Lutèce
.
Ci-contre : un Hercule gaulois

 

Dans le cas de Théodore Vacquer, il a été préféré de lui réserver une place, ses travaux comparés à d’autres de la même génération ou presque est bien plus conséquent, et ses appréciations sont très utiles pour se plonger dans la Gaule Celtique (Chevelue ou Lyonnaise). Un moyen d’aborder 400 ans d’une histoire pas seulement de domination militaire. Mais avec un contenu où la géographie, les espaces routiers et l’architecture, plus la population autochtone, nous dévoilent des évolutions, des crises, ou comment l’archéologie a su faire connaître une histoire fragmentaire en terre des Parisii.

Le livre qui a retenu notre attention n’est pas né de la volonté de l’auteur, mais de comment à partir de ses archives il a pu être transmis une histoire de Paris à l’époque Gallo-romaine, datant de 1912. L’objet n’est pas de faire une comparaison avec les travaux actuels, l’archéologie en région île de France dispose de plusieurs pôles de référence (Cnrs, Inrap, universités et musées) et les méthodes employées sont bien plus élaborées et élargies aux spécificités des recherches faisant appel à une ingénierie propre et des technologies de pointe.

Ce qui n’empêche pas que les travaux de Vacquer d’être d’une grande qualité, mais les fouilles n’étaient pas liées à des mesures légales comparables, et plus encore à des fouilles comme le conçoivent les chercheurs actuels. D’autant plus qu’il a été un des aménageurs ou superviseurs de la capitale sous la conduite du préfet Haussmann et de la Ville de Paris, elle-même sous la tutelle de l’Etat.

L’érudit, méticuleux et solitaire Théodore Vacquer a rassemblé tout au long de son existence une foultitude d’anciens documents. Il a ainsi suivi les grands chantiers de réaménagements jusqu’à ce qu’il parvienne à trouver l’emplacement des Arènes de Lutèce dans la saillie opérée dans le percement de la rue Monge en 1860. Dans cette artère, il a pu avec des ouvriers mettre à jour d’anciens sarcophages gallo-romains. Ce conservateur du musée Carnavalet officiait pour la municipalité parisienne. Il pouvait ainsi donner un avis, le plus souvent d’expertise et avec des interrogations propres à un archéologue?

A savoir, l’étiage ou le niveau de sols, leurs compositions et si les hypothèses soulevées tenaient la route. Une note qu’il fit sur l’emplacement d’un ancien cimetière romain proche de l’Hôtel-de-Ville. Un auteur a eu la bonne idée de faire un ouvrage dès plus remarquable sur ce féru d’histoire sur les origines gauloises, plus exactement s’afférant aux Parisiens d’avant et d’après la conquête de Jules César de la Gaule Aquitaine, Celtique et Belge.


Repères chronologiques :

43 :
Conquête de la Bretagne (Britannia) par Claude.
48 : L’empereur Claude obtient du Sénat l’accès des notables des trois Gaules aux magistratures romaines.
Vers 50 : Construction du forum, des thermes (du Collège de France), des arènes.
68 : La révolte de Vindex contre Néron et crise de l’Empire.
69/70 : Les Bataves romanisés se révoltent, le mouvement est impulsé par Civilis et suivi par des Germains se liguant à ses côtés, en Gaule, il est rejoint par Julius Sabinus.
Vers 95 : Apparition de la première hiérarchie chrétienne sous Clément, 4ème évêque de Rome avec la Première lettre aux Corinthiens, son pontificat aurait duré de 92 à 99.

*

A partir du IIe siècle : Une possible construction du théâtre de Lutèce sans l’affirmer, embellissement du forum et construction des thermes de la rue Gay-Lussac.
Vers 150 : Apogée de l’Empire et de la Pax Romana. L’empire est à son plus haut stade de colonisation par l’étendu de ses territoires et la population de l’empire estimée de 50 à 80 millions d’habitants.
Vers 175 :
construction des thermes  de Cluny, apogée de la ville romaine.
*
A partir du IIIe siècle : Une forte insécurité engage la fortification des villes. Deux tiers du siècle sont marqués par des contestations et des désordres internes à l’empire.
212 : Un édit de Caracalla donne la citoyenneté romaine à tous les hommes libres de l’empire.
Vers 230 : S’engage un recul urbain.
235 : L’empereur Sévère Alexandre est assassiné, il en résulte une guerre civile. En parallèle démarrent les premières vagues d’invasion germanique et une période d’anarchie militaire.
260-275 : L’«Empire gaulois», terme ambigu est une période de guerres civiles et de problèmes économiques au sein de l’empire, toutefois les 6 ou 7 empereurs accolés à cette période trouble se réclamaient tous de Rome. Cette distinction est venue avec la découverte de pièces en circulation frappées par les autorités romaines en terres gauloises.
284-305 : Débuts du Bas Empire romain et Dioclétien empereur.
286 : Milan devient la capitale de l'Empire. (fin en 402)
293 : Instauration de la tétrarchie, ou le découpage en 4 territoires et 4 nouvelles autorités tutélaires de l’empire sous l’impulsion de Dioclétien.






Le dieu Mercure

Bas relief (musée Carnavalet)


Paris à l’époque Gallo-Romaine



Jardin du Musée de Cluny


Théodore Vacquer et Félix-Georges de Pachtère

 
« La forêt couvrait l'Yveline et la Laye, et, partie en amont de Paris des bords de la Seine, elle les rejoignait en aval vers Saint-Cloud et Saint-Germain, Elle s'avançait même sur Lutèce. De la plaine Saint-Denis, elle montait sur les sables de Belleville et de Montmartre et s'étendait sur les alluvions du Marais. Du Sud, elle devait dévaler des sables de Beauchamp de la montagne Sainte-Geneviève sur le sol marécageux de Grenelle. Les monastères qui s'établirent dans le bas-fond de l'amphithéâtre parisien dès les temps mérovingiens attestent sa présence. Une tradition veut qu'au IXe siècle, l'église Sainte-Opportune se soit établie sur l'emplacement d'une chapelle de Notre-Dame « aux bois ». Encore aujourd'hui, ces bois arrivent aux portes de Paris, à Vincennes et à Boulogne ».

(…) Le Parisis s'étend sur la Marne jusqu'au-delà de Lagny-sur-Marne, en aval du grand coude de Jablines. Dans la Brie, la fixité de ses limites est peut-être marquée par le village de Châtres. (…) Sur la rive gauche de la Seine, les Sénons lui laissent tout le cours inférieur de l'Essonne, et la Juine comme frontière d'un moment, mais ils sont maîtres du pays par la Seine, les hautes vallées de l'Yerres, de l'Essonne et de la Juine. Les Carnutes enfin tiennent les sources de l'Orge, de la Rémarde, de l'Yvette et de la Bièvre.

(…) Note sur la population des Parisiens : « Elle aurait été de 78.000 à 108.000 habitants pour une superficie de 3.300 kilomètres carrés (1/3 de l’actuelle région Ile de France en superficie). La densité moyenne aurait été de 29,6 habitants au kilomètre carré (environ 100.000 habitants). La région parisienne aurait été plus peuplée que la Narbonnaise. Mais M. Beloch (l’auteur de ce chiffrement) a bien dû s'avouer que son mode de calcul, quelle qu'en soit la valeur approximative générale, ne pouvait s'appliquer aux Parisiens.

(…) Lutèce était bien située sur le fleuve pour permettre un passage facile en cet endroit de passage nécessaire. Tandis qu'un peu en amont ou un peu en aval, il eût fallu, pour traverser la Seine, cheminer indirectement par deux îlots pour tomber sur la rive gauche en plein marécage, l'île de Lutèce permettait à une industrie encore peu audacieuse, à la fois de relayer son effort et de construire en deux parties seulement ce pont de bois qu'il eût été plus difficile de lancer d'une seule venue. Lutèce doit son importance à sa situation en plein fleuve sur le passage d'une route. Sa croissance est liée aux progrès de la Seine et de cette route comme voie commerciale ou militaire. (…)

Mais pour que Lutèce, ville d'importance locale, sorte de sa médiocrité, il faut que la route du Nord-Est devienne un grand chemin. Or c'est à basse époque seulement, avec les grandes invasions barbares du IIIesiècle, qu'elle deviendra une route militaire sur laquelle s'avanceront les Francs jusqu'à Soissons, puis jusqu'à Paris. Le développement de la ville est lié aux progrès mêmes de l'invasion. (…) Lutèce du premier au quatrième siècle va connaître diverses évolutions ou péripéties, se subdivisant en deux périodes de deux siècles de durée, que l’on nomme le Haut et Le Bas Empire. (...)

Le Haut Empire : Ier et IIe siècle après J-C

Le développement de Lutèce comme cité n’a pas été une exception et son essor à l’image de la Gaule sous domination Romaine, toutefois ce n’était qu’une obscure place forte. La position géographique de Lutèce s’est avérée décisive.

Si Jules César n’y passa qu’en coup de vent, celui-ci ne fit que vaguement référence aux Parisii et à leur campement - pour le stratège - ce fut une autre affaire. Lutèce devenait un axe routier névralgique parce que stratégique, un point de jonction offrant une position centrale et des moyens d’interventions militaires plus adéquats pour tenir en respect les peuplades soumises ou à tenir en respect. En bref un point de passage de ses troupes qui permettait à Rome d’asseoir sa position.

Avec le Premier siècle de l’ère dite chrétienne, les variations de pouvoir depuis Rome mettent fin à la République, nous entrons sous le règne des Augustes, et aux errances, complots et crimes pour l’obtention du titre suprême, le Sénat vidé de ses attributs ouvre à des exercices politiques dictatoriaux.

L’Oppidum qui n’était qu’un espace de repli dans son île. L’ancien camp retranché, brûlés par ses occupants sous les ordres de Camulogène, lui passera de ses structures villageoises qui l’environnaient à une petite ville de 2.000 habitants. C’est en rive sud que cette petite commune devenue un petit point dans l’Empire allait faire sa mue et atteindre possiblement 20.000 habitants à son apogée.

L’impulsion possiblement commencée sous l’Empereur Tibère donna une architecture et une organisation comparables aux vues de l’envahisseur ou des conquérants romains, les particularités tenant au références religieuse. Cette région de la Gaule allait prospérer, et connaître une certaine stabilité, pour autant la résistance gauloise n’était pas totalement éteinte, mais plus active ailleurs avec des contextes d’autres natures.

Nous sommes encore loin d’un contexte de basculement ou changement religieux, le passage au monothéisme fut un processus en cours mais non affirmée. Faut-il attendre 161 le sacrifice de sainte Blandine à Lugdunum (Lyon) pour voir un début de christianisme, la toute majorité se référant aussi bien à dieux locaux que des divinités venues de Rome ou de la Grèce. Un joyeux éclectisme qui aura un rôle dans la notoriété de ce qui n’était qu’un trou perdu ou presque.

Le plus souvent l’île de France est mentionnée et se voit placée en Gaule Celtique, les Parisii une tribu non négligeable, mais très loin des groupes les plus puissants en nombre, comme les Sénons ou Eduens, et plus au Nord les tribus Belges et à l’Est une partie de la Germanie, sans compter à l’Ouest avec l’Armorique, à distinguer de la Bretagne, la grande île.
»


Source : HISTOIRE GENERALE DE PARIS - PARIS À L'ÉPOQUE GALLO-ROMAINE
ETUDE FAITE À L'AIDE DES PAPIERS ET DES PLANS DE TH. VACQUER
de Félix-Georges de Pachtère, historien et géographe (1881-1916)
à partir des travaux de Théodore Vacquer (1824-1899), archéologue, archiviste.

Edition de l'Imprimerie Nationale – 1912


Vidéo à découvrir : Quand Paris s'appelait Lutèce 
(France 3 - durée 28 minutes)


La présence des Arènes avec 17.000 spectateurs et d'un théâtre, démontre une certaine vitalité de la vie culturelle et une place importante du spectacle à Lutèce. Le monde urbain s'éveille et l'on peut affirmer que cette ville a connu au début de l'ère chrétienne une assez grande stabilité et devint rapidement un nœud routier et fluvial important.

A souligner, presque 200 ans de stabilité, ce qui est très rare dans l'histoire de l'Humanité, de la petite commune celte à la ville gallo-romaine, que de chemins accomplis. Les dits gaulois allaient en moins d'une centaine d'année accepter la suprématie latine, même devenir un exemple au sein de l'Empire. Si l'on parlait de barbares à Rome, les gallo-romains devinrent un exemple de développement et de raffinement après seulement quelques décennies de domination. Quand Rome ne cessa de jouer la nostalgie et l'annonce de son déclin.
Les Romains laissèrent aux dominés le choix de la religion. Ils remplacèrent toutefois la loi celte par la loi romaine. Des patriciens (d'origines gauloises) siégèrent au Sénat à Rome.

L'un d'eux, Antonin Le Pieux, 84-161 après J.C., Nîmois d'origine devint empereur (ci-contre).
 La prospérité des Gaulois amena à un réseau denses de villes. Elles furent toujours selon les préceptes de Rome, s'embellissant de constructions et édifices. On dénombra jusqu'à 65 amphithéâtres dans les Gaules romanisées. Toutefois, les réseaux routiers en Gaule étaient déjà antérieurs aux Romains, et la partie Narbonnaise était annexée depuis quelques décennies, bien avant la guerre des Gaules.

 

Descriptif de la vie à Lutetia
 
Paris et son histoire de l'eau n'est pas un détail de son histoire. Ce fut un problème important tant la situation sanitaire a pu connaître des accents pathétiques. Néanmoins au IIIe siècle (après J-C) l'on vantait les qualités de l'eau de la Seine. Ce qui ne durera pas avec l'accentuation de la population à la fin du premier millénaire.

La Seine fut même une poubelle à ciel ouvert dès le Moyen Âge et une réalité urbanistique oubliée depuis. Bien que ranimée par la pollution actuelle, et à vouloir à ses risques et périls y nager entre le rejet des eaux usées et la navigation du fleuve. Il n'est resté jusqu'à présent qu'une promesse électorale d'un maire extravaguantesque de Paris, datant de la fin du vingtième siècle...
 
 
Il importe de préciser que la navigation fluviale a connu dès l'époque gallo-romaine un rôle économique important, sans parler de ses marines de guerre. La corporation des Nautes fut le nom donné au corps des premiers bateleurs de la Seine. C'est de leur maxime, elle tangue mais ne coule pas..., que Paris a sur ses armoiries un bateau et la devise Fluctuat nec mergitur.

La circulation fluviale était déjà un enjeu important et la congrégation des Nautes était puissante. Ce type de voie de communication a assuré le commerce par voie navigable, un enjeu non négligeable dans l'expansion économique de Lutèce. Et jusqu'à aujourd'hui, si cela peut échapper, Paris demeure un grand port marchand et fluvial, le plus important en Europe.

À noter:
la dédicace d'un pilier volumineux d'au moins six mètres de haut et composé d'au moins cinq blocs de granit en l'honneur de l'empereur Tibère (début du premier siècle).
 

Un pilier (ci-contre une parcelle) offert par la corporation des Nautes à Lutèce.

Les marchands bateliers de la Seine avaient pour représentation le dieu gaulois Smertrios, qualifié de "vainqueur du serpent". Mais aussi des dieux romains et des dieux traditionnels gallo-celtes.


Musée de l'archéologie de Paris

Pour info, le musée se situe sur le parvis de Notre-Dame

 
 
 Le quotidien à Lutèce

Le droit romain ne fit pas des femmes l'égale du chef de famille. Il exista une loi sur le divorce, mais elles eurent pour interdiction l'accès aux carrières publiques.

Se limita principalement ainsi l'activité des femmes à la famille et à la religion, avec de rares sages-femmes ou des doctoresses. Certaines néanmoins connurent une situation sociale de premier plan.

 
Veuves fortunées ou jeunes héritières pouvaient avoir un rôle économique, voire politique au sein du monde gallo-romain. Les femmes dans la vie religieuse eurent une grande place. Les déesses jouèrent un rôle important dans l'ordonnance des cultes, et les prêtresses ont été nombreuses. Avec l'apparition du christianisme les femmes allaient perdre progressivement cette place et ce pouvoir au profit d'un clergé masculin.
 
La vie d'un enfant (de famille aisée) se déroulait jusqu'à la septième année à la maison, puis à l'école jusqu'à environ dix-huit ans. Le jeune bambin grandissait ainsi, entouré de ses frères et sœurs, et il avait des jouets, des jeunes esclaves de son âge lui étaient choisis pour compagnons. Garçons et filles avaient aussi des animaux familiers.
 
Le costume type des habitants de Lutèce était un caleçon long, un peu bouffant, ou légèrement étroit pour ressembler plutôt à la culotte qu'au pantalon. Par dessus les braies ou le pagne, l'on passait une tunique à manche. Les femmes portaient fréquemment une tunique et généralement un long châle enroulé autour du torse.


Vidéo Manger à Lutèce (3 minutes) - Lutèce en 3D (site)


Découverte archéologique et en animation 3D d'une maison à Lutèce
 
Réalisation Olivier Lemaître - Extait du DVD "Lutèce, Paris gallo-romain"

 
Le monde des marchands était à la fois composé d'artisans et commerçants : potier, sabotier, cordonnier, tonnelier, tailleur, etc. Les marchands de produits alimentaires étaient les plus nombreux, les plus variés avec le marchand de légumes secs, le pâtissier, le marchand d'huile, etc. La vente des boissons et principalement du vin représenta l'une des activités les plus rentables du commerce de gros et de détail, la boisson la plus courante fut une cervoise à base de blé, ou d'orge.

Cette stèle d'époque montre la mère de famille entourée de ses enfants, aux côtés de son époux décédé ou agonisant.

Selon les fresques, la veuve porte le gobelet et la serviette utile au repas funéraire ou bien un coffret pleins de ses bijoux et deniers.



 Les espaces publics

« La découverte des Arènes fut amenée par le percement de la rue Monge, qui se poursuivit, au début de l'année 1870, à partir de la rue du Cardinal-Lemoine. »

La résurgence des Arènes de Lutèce remonte à l'année 1860, après que fut expropriée la Congrégation de Notre-Dame, propriétaire des terrains. Ce fut Théodore Vacquer, architecte, de même antiquaire (ou archéologue) qui se vit dans un premier temps charger de l'aménagement de la rue Monge, où il entreprit les premières fouilles, ainsi que le suivi des travaux de terrassements, avant la mise à jour en 1870 de cette ancienne structure romaine quasi oubliée (en photo ci-contre).



Cet espace ainsi conçu permettait de mettre en valeur des exhibitions, et pour les plus connus les combats des gladiateurs. Les jeux du cirque furent supprimés par des successeurs de Constantin. Les arènes sont répertoriées depuis au moins le Moyen Âge. Des textes des XIIe et XIIIe siècles l'attestent. Elles furent peut-être restaurées à l'époque mérovingienne, mais rien ne l'affirme.

L'Amphithéâtre pour les jeux du cirque désignait les arènes, le Théâtre était réservé au jeu de l'esprit et  se situait rue Racine (6ème arrondissement). A Lutèce comme ailleurs les édifices réservés au spectacle étaient tout aussi important que les bains (Thermes de Cluny) et le sport. Dans les très grandes villes comme Rome, un Odéon pouvait même s'ajouter au théâtre. Des lieux de surveillance de la rumeur publique et de transmission intellectuelle. Le théâtre était à la fois festif et spontané, autour de la farce (ou comédie grotesque), et aussi de la tragédie. L'espace s'ouvrait à une "orkhêstra improvisée" délimitée par les spectateurs.
 
Le forum, et aussi le temple, la place centrale, la basilique et ses boutiques. Le Forum de Lutèce était un espace public, s'y tenait des cérémonies officielles et religieuses. La place publique représentait un vaste rectangle d'environ 60 mètres de long offert aux promeneurs. Non loin se tenait le Temple et ses offices. Puis, la Basilique où se trouvait les tribunaux, où se traitait les affaires publiques et commerciales.

« On doit orner de verdure les espaces à découvert qui s’étendent au milieu des portiques, parce que les promenades à l’air libre sont très hygiéniques pour les yeux. L’air subtil et léger qui s’élève de la verdure, se répandant à cause du mouvement du corps, éclaircit en effet la vue ; il  enlève des yeux une humeur grossière et rend la vue plus perçante. En  outre comme le corps s’échauffe par suite du mouvement, l’air en pompant les humeurs des membres, diminue la réplétion et atténue, en le dissipant ce qui dans le corps, étant en trop, ne peut être supporté. »

Selon Vitruve, architecte Romain

Les Temples, rien que des indications éparses. Ils ont dû subir des destructions complètes avec l'expansion du christianisme. Ils n'étaient pas répartis au hasard, on sait que l'urbanisme romain avait des préceptes théologiques, dont Vitruve a transmis une théorie. Impossible de dénombrer aussi les chapelles réparties au hasard de la croissance de Lutèce. L'on doit ainsi à Vitruve, architecte du 1er siècle (avant J-C) une méthode sur l'organisation urbaine du temps de la civilisation Romaine. Son travail servit longtemps de base pour le travail des chercheurs et archéologues.

La Nécropole (*) dit de St-Jacques, bien que Lutèce disposa de plusieurs nécropoles, elle a été la seule identifiée. De l'emplacement de l’ancienne abbaye de Port-Royal à Denfert-Rochereau, sur un axe sud-nord. Normalement les nécropoles  se tenaient au bord d’une voie de circulation, comme le Cardo dit "maximus", en dehors de la ville Antique et alla en s'agrandissant et empiétant son espace. La nécropole (*) de St.-Jacques est estimée à quatre hectares de surface. Seule une partie minime des sépultures  a été retrouvée, soit environ 400 tombeaux, datant du  Ier siècle jusqu’au IIIe siècle, et  s'amenuisant  au IVe siècle comme espace mortuaire (incinération et monuments).

(*) Nécropole provient du Grec "nécros et polis" : la Cité des morts.

 

« On devra creuser fortement ces allées : à droite et à gauche on fera des égouts de pierre, et dans les parois, qui regardent les promenades, on insérera des tubes inclinés du faite vers les égouts. Ceci fait, on remplit  l’excavation avec du charbon ; par dessus on répand du sable qu’on égalise.  Ainsi donc, par suite de la porosité du charbon et l’introduction des tuyaux dans les égouts, la plus grande quantité des eaux y est reçue et les promenades restent sèches et sans humidité. »

Vitruve (Livre V, chapitre IX)

A partir du IIe siècle, les constructeurs romains prirent une eau de qualité́ et en quantité à environ une quinzaine de kilomètres au sud de Lutèce, de nos jours près de Rungis et Wissous (Val-de-Marne), dans un espace où̀ se concentrent des eaux saines et abondantes. Ils s'appuyèrent sur les dénivelés du terrain marquant une pente naturelle et douce à un peu plus de la moitié du parcours et une connaissance approfondie de la géographie et de ses reliefs.

Le parcours de l'aqueduc romain allant jusqu’aux thermes de Cluny, il était relié à la rivière de la Bièvre à la hauteur de l'actuelle ville d'Arcueil (Val-de-Marne), cette autre construction revêtait la forme d'un pont de dérivation. Il reste depuis lors que deux vestiges (colonnes), non loin de l’aqueduc dit de Médicis (de la reine Marie). Les matériaux étaient fait d'une maçonnerie composée de petites pierres et des gravillons assemblés dans du mortier, avec pour couverture une dalle. L'aqueduc romain restera en usage  jusqu’au IXe siècle, après les parisiens durent se contenter principalement de l’eau de la Seine jusqu'au XVIe siècle.


Les vestiges de la période gallo-romaine à Paris ne sont pas si nombreux, mais pour ce qu'il en reste, c'est imposant. A ce titre, les Thermes de Cluny (de nos jours le Musée du Moyen Âge) se trouve dans le quartier latin, et l'aqueduc est encore visible du côté de Cachan et des canalisations depuis Arcueil (Val-de-Marne) jusque dans les sous-sols parisiens, pour certains restaurés ou mis à la vue du public.

L'aqueduc fut restauré du temps d'Henri IV pour l'alimentation en eau de la capitale, notamment pour les eaux du jardin et Palais du Luxembourg (Le Sénat). Et ce ne fut pas le seul aqueduc en direction de Paris, il en existe d'autres, comme ceux de la Vanne et du Loing, qui sont aussi des noms de rivières prenant sources en Bourgogne. Ces eaux alimentèrent le réservoir de Montsouris à partir du XIXe siècle (au sein du parc du même nom), une œuvre d'Eugène Belgrand.
 

Le président du conseil municipal
de Paris reçoit
une lettre de Victor Hugo

Monsieur le président,
 
Il n'est pas possible que Paris la ville de l'avenir renonce à la preuve vivante qu'elle a été la ville du passé.
Le passé amène l'avenir.
Les arènes sont l'antique marque de la grande ville.
Elles sont un monument unique.
Le conseil municipal qui les détruirait se détruirait en quelque sorte lui-même.
Conservez les arènes de Lutèce.
Conservez-les à tout prix.
Vous ferez une action utile, et, ce qui vaut mieux,vous donnerez un grand exemple.

Je vous sers les mains

   Paris, le 27 Juillet 1883, Victor Hugo

 

Peu après, le conseil municipal se porta acquéreur des vestiges des Arènes qui furent classées auprès des monuments historiques, un square fut aménagé sur le site toujours existant.

 
« Les villes sont des bibles de pierre. Celle-ci n’a pas un dôme, pas un toit, pas un pavé, qui n’ait quelque chose à dire dans le sens de l’alliance et de l’union, et qui ne donne une leçon, un exemple ou un conseil. Que les peuples viennent dans ce prodigieux alphabet de monuments, de tombeaux et de trophées épeler la paix et désapprendre la haine. Qu’ils aient confiance. Paris a fait ses preuves. De Lutèce devenir Paris, quel plus magnifique symbole ! Avoir été la boue et devenir l’esprit ! »

Victor Hugo - Paris-Guide - chap. Déclaration de paix - 1867



 Les Romains, l'art de construire et le plâtre
 
Question anodine à première vue, mais importante dans les faits. Mais qu'ont pu importer les romains aux gaulois comme matériaux de construction? L'on sait qu'ils furent les premiers inventeurs du béton dit armé. Ce procédé a disparu avec l'Empire pour réapparaître à Paris quelques siècles plus tard comme une nouvelle invention...  

 
Ce que l'on sait moins, c'est le rôle du plâtre qu'ils allaient diffuser là où ils s'établirent en Europe du Nord. La présence des carrières de gypse près de Lutèce allait devenir un atout de son développement. D'où son succès pour l'ornementation de la ville et les segmentations au sein des édifices parisiens. Reste d'une tradition qui depuis est l'élément incontournable des maçons, et il semble que de l'envol de Lutèce aux enfants de Clovis, ses administrateurs ont toujours cherché à mettre en valeur les bâtiments.

Les murs des maisonnées de Lutèce étaient enduits de plâtre et de chaux, les plafonds constitués de bois et de plâtre.
Le plâtre peut servir dans la maçonnerie pour unir les pierres les unes aux autres. Les artisans romains en usèrent comme revêtement extérieur : de couleur "ton chaud d'ocre rouge". Mélangé on en fait un stuc. Du plâtre et de la poudre de marbre offre un bel éclat pour l'ornementation des édifices.
 
 
 
À Lutèce, sur les bords de la Seine, les huttes de la tribu des Parisii firent place à des bâtisses plus solides. La colline de Montmartre regorge de gypse : des dalles, des carreaux de plâtre, des colonnes plusieurs vestiges des IIème et IIIème siècle de notre ère en témoigne. La chute de l'Empire et les invasions entraînent pour de longs siècles le déclin des constructions en pierre au profit de bâtiments en bois.

Au Moyen Âge, les bâtisseurs, les moines de Cluny et de Cîteaux allaient remettre à l'honneur l'emploi du plâtre.
La profession s'organisa et codifia son activité : le Livre des métiers, commandé par Louis IX au Prévôt de Paris, a été le texte fondateur des corporations au XIIIème siècle. Le mot plâtrier désignait celui qui réalisait l'extraction et la cuisson du gypse (c'est-à-dire le fabricant)..
 
 
 Les premiers réseaux routiers
 
L'existence des routes fut un des traits forts de l'urbanisme latin. On peut en comprendre l'importance au titre qu'obtint Marcus Vispanius Agrippa (-63 à -12 avant J-C.) : Grand maître des voies romaines. Les voies de communications participèrent à l'essor de l'Empire.

Ci-contre : le tracé du Cardo
 
 
 
Les Latins en Gaule ont tracé "la Via Domitia" vers 118 avant J.C. dans la région de Narbonne. Le reste des provinces gauloises furent par la suite desservies par un réseau de voies militaires, impériales publiques, régionales et privées. Un réseau dense : en dehors des zones de montagne et de marais, les maillons routiers sont espacés de l'ordre de cent kilomètres au maximum. Au premier siècle Lutèce était déjà un nœud routier : au nord un pont mènait aux routes de Senlis, de Rouen et de Melun, au sud partaient les voies de Dreux et Chartres et le cardo menait vers Orléans.
 
Ce réseau routier romain a été surveillé et entretenu, ses voies étaient construites et munies de fossés, de postes de douane ou de péage, et jalonnées par les bornes milliaires. Pour le franchissement des cours d'eau étaient construits des ponts de bois ou en pierres qui servirent d'appui. Les pierres formaient des voûtes levées avec des engins à poulie, puis étaient scellées à la chaux, un procédé obtenu par cuisson du calcaire. Les routes romaines furent utilisées par des voitures à deux roues tirées par des chevaux non ferrés et munis d'attelages, le réseau de l'Empire dans sa globalité comporta environ quatre-vingt-dix mille kilomètres de grandes routes et deux cent mille kilomètres de voies secondaires.
 
Les premières dégradations par le gel furent observées dans le nord de l'Empire sur l'usure des chaussées. Cela suscita une réglementation de Dioclétien (vers 245 - 313 ap. J-C.), il limita la charge des charrettes. Ce même réseau fut aussi à l'origine du développement de relais, d'auberges, de villes étapes, et, même, de cartes routières comme en témoigne une copie du XIIIème siècle d'une carte des itinéraires romains (du IIIème et IVème siècle).

Une des dernières bornes milliaires date de 435. Ce qui conduisit progressivement avec la chute de Rome, en Europe occidentale, à l'arrêt de l'entretien des routes et un frein à la circulation charretière du VIe au VIIe siècle, au profit d'une navigation fluviale de faible activité.

Ce fut au cours du IVe siècle que Lutèce devint Paris, abréviation de civitas Parisiorum ou urbs Parisiorum. Civitas (ou civitates au pluriel) est l'équivalent d'une agglomération ou d'un district et urbs désigne la ville.

Au sud se tenait le faubourg Saint Jacques, la route qui menait à Orléans trouvait dans son axe nord le faubourg Saint-Martin, celui-ci en direction des Flandres.


Ci-contre : le tracé du Cardo de Vaugirard

 à la  Villette, Paris intra-muros
 

 
Ce développement suivait les grands axes urbains datant des premier siècles. Mais en l'état rien ne permet d'affirmer qu'une voie romaine passa précisément  par le faubourg Saint-Martin. Nous sommes là face à un enjeu de mémoire, donc faillible, et il reste semble-t-il du travail aux archéologues à Paris. Si la volonté politique n'essaie pas de son côté d'empêcher la recherche de faire son travail, comme on a pu le constater ces dernières années autour d'enjeux immobiliers. Pour exemple assez récent du côté de l'ancienne ferme de Montsouris (rue de la Tombe-Issoire 14ème arrondissement) où se situe des restes de la canalisation, ils ont été en partie épargnés. Alors que peut peser un bout d'aqueduc, de route face à des enjeux spéculatifs?
 
La Cité des Parisiens se tournait vers le christianisme importé en 250 par le saint Denis, premier évêque de la ville et figure de légende. Les nouveaux édifices religieux allaient se dresser sur les anciens temples gallo-romains pour la vénération de personnalité chrétienne, telle que sainte Geneviève. La rive droite parisienne, hors la partie dite de la "grève" (la plage de sable disparue) ou ce qui correspond au quartier du Marais ne se peupla véritablement que sous le règne des Mérovingiens (à partir du VIe siècle) à  la hauteur de l'église Saint-Laurent (en bas de la Gare de l'Est - Paris 10ème).

Résumé en vidéo de Lutèce à Paris - Images en 3 D (durée 3 minutes)


L’empereur Julien dit l’Apostat, le dernier républicain? (vers 331-363)


A partir du IVe siècle : Il s'agit d'une grande période d’insécurité, une bonne partie de la ville de Lutèce se replie dans l’île de la Cité, et édification du rempart, du Palais et de la basilique civile (du marché aux fleurs).
306-337 : Règne de Constantin.
307 : Trèves, capitale des Gaules.

313 : L'édit de Milan des empereurs Constantin et Lucinius sur la tolérance religieuse est promulgué dans tout l'Empire, et permet « d'adorer à sa manière la divinité qui se trouve dans le ciel » (fin du matyricide chrétien).
325 : Le concile de Nicée condamne le prêtre Arius.
330 :
Fondation de Constantinople.
337 : Triumvirat (pouvoir à 3) et Constance II jusqu’en 361.

Ci-contre le mur d'enceinte (fouilles de 1908)

L’apostasie est une « renonciation publique à une confession, plus particulièrement (l’) abandon de la foi » chrétienne ou autres dogmatiques religieuses, et elle est encore considérée comme un crime contre « dieu » dans  des approches et lois fondamentalistes et/ou étatiques.

Julien en 360 lors de son dernier hivernage déclarait : « J’étais alors en quartiers d’hiver près de ma chère Lutèce. Les Celtes appellent ainsi la petite ville des Parisii. C’est un îlot jeté sur le fleuve, qui l’enveloppe de toutes parts. Des ponts de bois y conduisent de deux côtés. Le fleuve diminue ou grossit rarement ; il est presque toujours au même niveau, été comme hiver ; l’eau qu’il fournit est très agréable et très limpide à voir et à qui veut boire. »

L’empereur Julien dit le philosophe ou l’apostat, est nommé en latin Flavius Claudicus Julianus. Il est né en 331 ou 332 à Constantinople (l’actuelle Istanbul), sa langue maternelle fut le Grec, son frère Constantin a été empereur de l’église chrétienne d’Orient. Julien apprit le latin quand il fut nommé César en Gaule, soit comme vice-empereur, par décision de Constance II, le fils de Constantin. Il dut aller combattre sur les frontières de l’Est de la Gaule ou de l’Empire romain. A cette occasion, il rasa sa barbe en signe de sagesse. Souvent cité dans les histoires de Lutèce et le monde antique, ce personnage historique est souvent évoqué sans que l’on sache véritablement l’empreinte qu’il a pu laisser. Toujours en butte à la place des légendes ou mythes, Julien a été deux ans un des envoyés de Rome, puis se trouva réprouvé par ses futurs auxiliaires et le monde chrétien. Il représenta le dernier soubresaut des mystiques polythéistes.

« Tant que Paris resta renfermé dans les deux bras de la Seine qui forment l’île de la Cité, l’eau du fleuve suffisait aux besoins de ses habitants ; mais lorsque les Romains l’eurent fait sortir de ses premières limites, et triplé sa superficie en y réunissant plusieurs bourgs environnants, qui portèrent à 113 arpents les 44 de sa première enceinte, il devint nécessaire d’amener l’eau des plateaux élevés qui la dominent, pour alimenter plusieurs de ses quartiers. Alors fut construit, vers 357, par l’empereur Julien, l’aqueduc d’Arcueil, qui amenait au Palais des Thermes les eaux de Rungis. Au IXe siècle ce premier aqueduc fut ruiné par les Normands, aussi bien que cette partie de la ville qui occupait le mont Lucotitius, aujourd’hui Sainte-Geneviève, et les nombreuses habitations qui s’étendaient, à droite de la Seine, depuis où est notre Pont-au-Change jusqu’à la Grève ».
 
Tableau historique des eaux de Paris et de leur distribution, Adrien Louis Lusson – 1835

Julien séjourna à deux occasions à Lutèce, dont il fit des louanges et les vertus de ses eaux, en 358 et 359, on lui devrait un aqueduc et les thermes de Cluny (plus ancienne). Julien devint empereur ou César en titre en 361 et mourut deux ans après. Homme de lettres, il a laissé un certain nombre de textes et en tant que sujet d’histoire. Il est une preuve que la linéarité n’existe pas vraiment, du moins que le paganisme ou les croyances divines ou naturelles au IVe siècle étaient encore très vivaces.

La christianisation à ce stade a été sérieusement remise en cause dans ce qui peut s’apparenter à un dernier soubresaut des polythéismes face à un pouvoir chrétien pas encore établi, mais déjà en voie de s’imposer comme la foi unique ou reconnue seulement depuis Constantin en 311 (fondateur de Constantinople) au début de cette même centurie. Julien l’apostat a laissé des écrits qui ont retenu l’attention de Denis Diderot ou de Voltaire, a-t-il été un précurseur de la tolérance religieuse? Possiblement ou à contrevent des dogmes de l’unité religieuse, d’un passage au christianisme d’un seul tenant, qui n’a pris forme ou corps que beaucoup plus tardivement, et pas sans ruptures avec les premiers évêques et saints de la foi christique.

En juin 362, l’empereur Julien promulgua des lois et interdit aux Chrétiens d'enseigner la poésie classique évocatrice des dieux, qu’ils niaient dans leurs fondements. Les Chrétiens selon lui devaient par eux-mêmes reconnaître leurs erreurs. Le mois de  mars de l’année suivante, Julien partait d’Antioche accompagné de son armée gauloise et celles du roi d’Arménie, suite aux offensives victorieuses de l’empereur Perse Shapur II contre Constance II (Amida, Singara et Bezabdé). Julien, allait vouloir réparer l’affront et perdre la vie au combat le 26 juin 363, son corps par la suite a été ramené à Tarse (dans l’actuelle Turquie).

Repères chronologiques

Vers 350 : Lutèce est un site stratégique dans la défense de la Gaule et un cantonnement fréquent de troupes.
352-358 : Incursions des Alamans et des Francs en Gaule.
353-357 : Persécution des païens dans l'Empire.
355 : Julien le philosophe quitte en décembre Milan, il devient chef militaire et hiverne à Vienne (en Rhône-Alpes).
356 : Constance II fait publier un édit interdisant les cultes païens sous peine de mort. Julien repousse les Alamans à Autun (en Bourgogne).
357 : Constance II menant des combats par ailleurs donne tout pouvoir à Julien sur la Gaule et promulgue un édit interdisant les astrologues et devins. Julien gagne du terrain sur les Alamans, il remporte une victoire à Strasbourg et s’attaque au pays Mosellan.
358 : Julien hiverne à Lutèce en janvier et y installe son quartier général, puis mène des combats contre les Francs et reprend la Vallée de la Meuse. Le César des Gaules prend ses quartiers de nouveau en automne à Lutèce.
359 : Julien renforce les positions des armées romaines sur le Rhin et fait des incursions en pays des Germains.
360 : Julien en février à Lutèce est proclamé Auguste par son armée, il repart combattre en territoire Franc, puis se retourne à Vienne (Viena). Constance II décéde en novembre, quand il se préparait à combattre Julien. Ce dernier part pour Constantinople et ne reviendra plus en Gaule.
361, 362, ou 364 : Le concile de Paris condamne l’arianisme.
361-363 : Julien est proclamé empereur renvoyant ceux qui ne lui sont pas acquis dans les administrations, et il est restauré pendant deux années le paganisme et la liberté de foi.

Au sein du bourg Saint-Marcel, il est édifié une première église chrétienne, son premier lieu de culte recensé !

365-366 : Séjours à Lutèce de l’empereur Valentinien Ier à l’occasion de ses campagnes contre les Germains.
380 : Edit de Thessalonique promulgué par Théodose 1er (347-395) : "Nous voulons que tous les peuples gouvernés par la juste mesure de Notre Clémence vivent dans la religion (du) divin apôtre Pierre".
386 :
Conversion d’Augustin d’Hippone, Berbère, sa doctrine va tenir un rôle conséquent d’un point de vue théorique dans le christianisme, il a été un sujet d’études et nourrir des controverses nombreuses pendant des siècles : notamment le Jansénisme.
392 : Le christianisme devient religion officielle à Rome.
395-396 : Arles devient la capitale des Gaules.
395 : Séparation de l’Empire entre l’Orient et l’Occident (Rome et Constantinople).
397 : Décès de Martin, évêque de Tours. Sa tombe devient un haut lieu de pèlerinage.
406 : Les Vandales, les Suèves et les Alains traversent le Rhin.
410 : Rome est conquise et pillée pendant 3 jours par les Goths d'Alaric 1er, sauf les basiliques chrétiennes, le droit d'asile est respecté. (document sur Les Wizigoths par Bruno Dumézil).



Photos des Arènes





Fouilles de la rue Monge





 

La Gaule sous domination romaine,
à travers la Celtique : Lutèce ou Paris ?



Camille Ju
llian (1902)

« Le pays s'éclaircissait tout à fait au confluent de l'Yonne et de la Seine : on entrait dans la vallée du grand fleuve, plus ouverte, plus riante, mieux cultivée, et l’on arrivait à Lutèce ou Paris. Paris était peu de chose alors, et nul n'aurait pu en ce moment prédire ses glorieuses destinées. Si l’on avait pu croire à la naissance d'une grande capitale dans ce pays maussade et déshérité, Romains et Gaulois n'auraient songé qu'à la ville de Sens.

Toutefois, Paris devait offrir un agréable lieu de repos et de réconfort au touriste fatigué par un monotone voyage à travers les forêts. On se sentait enfin dans un paysage plus élégant, où l'air était plus libre, le coup d'œil plus varié. Paris n'était en ce temps-là qu'un petit port de commerce, le centre du cabotage dans la vallée de la Seine, et l'intermédiaire obligé du transit entre Sens et l'Océan : c'est ce qui donnait une importance particulière à cette corporation des «nautes parisiens», qui apparaît dès le temps de Tibère.

La ville occupait surtout l’île de la Cité, son berceau primitif. Mais, sur la rive gauche de la Seine, elle s'était peu à peu étendue et gravissait les pentes du mont Sainte-Geneviève : là se construiront bientôt ses édifices de plaisir. La rive droite était laissée aux marécages.


Les débuts de Paris ont été lents et pénibles, mais sa marche sera continue. Lyon a surgi tout d'un coup dans toute sa splendeur : il est tombé aussi brusquement qu’il s’est élevé. Paris a marché doucement, à pas réguliers, assurés. Trois ou quatre générations après le règne d’Antonin, on lui donnera, sur la rive gauche, un amphithéâtre, dont les ruines sont à peine visibles, et des thermes, en partie bien conservés.

Au IVe siècle, au moment où tant de villes célèbres des Gaules déclinent et s'effondrent, Paris continue agrandir : non pas en étendue, car, à partir de l’an 300, il se renferme de nouveau dans son île; mais il croit au moins en renom. Il sera la résidence aimée du césar Julien, l'empereur le plus semblable aux Gaulois qui ait jamais gouverné la Gaule. Désormais, son avenir est fixé.

Julien nous a raconté avec enjouement son séjour à Lutèce et nous a donné, à son sujet, de piquants détails : « J'étais en quartier d'hiver dans ma chère Lutèce : c'est ainsi que les telles appellent la petite ville des Parisiens. Elle est située sur le fleuve, et un mur l'environne de toutes parts, en sorte qu'on n'y peut aborder que de deux côtés, par deux ponts de bois. Il est rare que la rivière se ressente beaucoup des  pluies de l'hiver et de la sécheresse de l'été. Les eaux pures sont agréables à la vue et excellentes à boire. Les habitants auraient de la peine à en avoir d'autres, comme ils sont dans une île; l'hiver n'y est pas rude, ce qu'ils attribuent au voisinage de l'Océan, qui peut envoyer jusque-là des souffles propres à tempérer le climat. Ils ont de bonnes vignes et des figuiers même, depuis qu'on prend soin de les revêtir de paille et de ce qui peut garantir des injures de l'air. »

Julien ajoute qu'une année « un hiver extraordinaire couvrit la rivière de glaçons : c'étaient des pièces énormes de glaces, qui flottaient au gré des eaux, et qui, se suivant sans relâche, étaient près de se raccrocher et de faire un pont. On se chauffe, en ce pays-là, par le moyen de poêles, qu'on met dans la plupart des appartements ». On voit que bien des choses sont restées du Paris d'autrefois : ce qui a le plus changé, c'est l'eau de la Seine, « excellente à boire », disait Julien.

En aval de Paris, la navigation était assez active sur la Seine; des navires descendaient jusqu'à l'embouchure, pour gagner de là l'île de Bretagne. Rouen était le vrai port maritime de la région; mais son importance était bien inférieure à celle de Nantes et de Bordeaux. Des embouchures des trois fleuves océaniens, celle de la Seine est aujourd'hui la plus vivante : c'était alors, au contraire, la moins fréquentée. »

Source :
Gallica-Bnf -  Camille Jullian, historien et archéologue
Gallia tableau sommaire de la Gaule sous domination romaine
   Pages 278 à 282 - Editeur Librairie Hachette - 1902



Une conférence  de Bertrand Lançon (*)
 
"La chute de Rome n'aura pas lieu"


(*) Historien spécialiste de l'Antiquité tardive
 


Université de Corse Pasquale Paoli, 5 octobre 2022



Suite de la promenade :
Le Moyen Âge à Paris

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