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Amérique
Latine, sommaire année 2010, page 3
1 - Un climat de guerre froide
en AL, et accords en Europe avec un état narco criminel ?
2 - Haïti,
une nation ébranlée, FIDH
3 - Evo
Morales, Nous sommes mieux sans les Usa et sans le FMI, Amy
Goodman
4 - Colombie
: Les droits humains doivent être une priorité
pour les candidats, A.I
& -
Colombie : La situation des victimes du conflit n'intéresse
que peu les médias, CICR
5 - Colombie : Femmes et
communautés face à la
militarisation, FIDH
&
- Résolution
sur les défenseurs des droits de l’homme en
Colombie
6 - Bolivie : Le poulet aux
hormones rend les médias approximatifs, Margaux Collet
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Un
climat de guerre froide en Amérique Latine,
et accords commerciaux en Europe avec un état narco criminel
? |
Lionel Mesnard, le 20 mai 2010
Parler de guerre froide en Amérique Latine n’est
pas totalement une
exagération de langage. L’objet n’est
pas de chercher une
hasardeuse relation avec ce que furent les tensions entre les deux
anciens blocs (Étasunien et Soviétique), mais il
y a à dépeindre un
climat pesant et des clivages spécifiques dans cette partie
du monde.
Un héritage qui n’est pas sans lien avec
l’ancienne guerre froide, ou
comment les Usa ont agi et imposé le plus souvent des ordres
totalitaires aux pays vassaux du sud du continent américain.
Ce passif
ne remonte pas seulement depuis la seconde guerre mondiale, il
s’est
imposé dès le XIX° siècle avec
la doctrine Monroe. Cette inféodation
des états latino-américains a
été presque totale depuis la colonisation
de Cuba en 1898 par les Etats-Unis, scellant la fin
définitive ou la
chute de l’empire colonial espagnol en Amérique
centrale et du
sud.
L’histoire des relations entre les Usa et ses voisins du sud
va tout au
long du XX° siècle peser fortement sur une
destiné plutôt sanguinaire,
de 1945 à la chute du mur de Berlin, la domination sera sans
partage.
Il se dessinera un sous-continent en prise avec des régimes
populistes
et fascistes et avec l’appui bienveillant de la diplomatie
étasunienne,
de ses multinationales, de ses conseils militaires et
économiques en
tout genre. Triste figure du monde libre que d’avoir vu
fleurir des
régimes ou l’élimination des opposants
faisait foi de doctrine. Depuis
1898, les interventions armées de l’Empire furent
nombreuses et
toujours au service d’une idéologie totalitaire.
Elles reflètent
parfaitement les choix politiques auxquels n’ont jamais
été associés
les autres peuples américains, des organismes
transcontinentaux comme
l’O.E.A. (Organisation des États
Américains) ont souvent été le lieu
d’enterrement de toute velléité face
à la puissance dominante.
On ne peut pas comprendre ce qui se déroule en
Amérique Latine si l’on
se réfère uniquement au vocable colonial. Le
colonialisme a été un fait
pendant trois siècles jusqu’aux
indépendances latino américaines, dont
nous fêtons cette année le bicentenaire du Mexique
à l’Argentine. Ce
qui va s’enclencher outre-atlantique comme mouvements de
libération est
une des conséquences de l’invasion par
Napoléon 1er de l’Espagne
(1808). Dans un premier temps, les élites du cône
sud et les
bourgeoisies locales vont se réclamer de Ferdinand VII le
monarque
déchu de l’Empire castillan, mais en son sein peu
à peu des voix
indépendantistes vont fleurir. Un jeune homme plein de
vitalité au
Venezuela va devenir en quelques années la tête de
proue de ce
mouvement d’émancipation. Son nom est Simon
Bolivar. Il est issu d’une
vieille famille noble de Caracas, c’est en Europe en 1804 et
1805 qu’il
va parfaire son éducation intellectuelle avec son professeur
et
compatriote Simon Rodriguez. En 1810, Simon Bolivar va de Caracas
à
Londres où il va implorer Francisco Miranda de reprendre le
flambeau de
la lutte indépendantiste. La même
année, l’indépendance du Venezuela
est proclamée à Caracas et le jeune Bolivar va
devenir un homme
incontournable.
Son influence sera majeure et ira bien au-delà du Venezuela.
Il n’est
pas le seul à incarner la libération des
Américains espagnols, mais il
est celui qui aura la plus grande compréhension des
questions
géopolitiques de son époque, notamment
à l’échelle du continent et de
son futur. Il ne devra pas seulement faire face à
l’ancienne puissance
coloniale, mais il inclura le rôle néfaste de la
couronne britannique
et la puissance montante continentale que sont les
États-Unis. Bien que
l’appelant de ses vœux, il refusera de se rendre au
premier sommet
intercontinental (le Congrès de Panama en 1826). Il
était hors de
question de faire entrée une puissance dominante au sein
d’un espace
qu’il souhaitait construire sur les ruines de
l’Empire espagnol. La
fameuse «Patria Grande » visait à
réunir toutes les nations latines, à
dépasser les égoïsmes locaux.
Cette clairvoyance de Simon Bolivar est en parti ce qui le conduira
à
sa perte, parce que l’on ne peut pas dire que ses
idées vont triompher,
et il vaut mieux tenir compte de son analyse négative de la
situation
de son temps. Concernant en particulier la Colombie (ancienne
Nouvelle-Grenade), il critiquera non seulement Santander (le premier
président colombien) et devra s’en
protéger. Il sera en désaccord sur
le choix de s’endetter auprès de
l’Angleterre ou d’inféodé
économiquement les pays de la région. Il
n’y a pas qu’une vision de
militaire chez cet homme un peu abusivement comparé
à Napoléon, mais la
perception d’un politique qui a bien compris que
d’autres mécanismes
peuvent peser fortement sur le devenir d’une nation. Pour
Bolivar, un
sou est un sou quand il s’agit des dépenses
publiques, et il comprend
les dangers de la dette sur les besoins de développement
interne et
d’intégration du nouvel ensemble affranchit de la
tutelle espagnole
(linguistique, culturel et politique). Au regard des combats politiques
menés par ce personnage historique, l’on doit
s’interroger pourquoi son
empreinte reste t-elle vivace ?
L’après, Simon Bolivar sera la victoire des
bourgeoisies nationales et
la domination impérialiste de la Grande-Bretagne, puis
progressivement
étasunienne. L’objet n’est plus en soit
une présence militaire mais de
pouvoir influer sur les marchés et les économies
locales. Et dans le
cas de l’Amérique Latine, l’Angleterre
et les Usa s’imposeront comme
les principaux bailleurs de fonds en de juteuses affaires commerciales.
Le rôle économique va supplanter les besoins
vitaux des populations
comme au beau vieux temps de la colonie, mais pas seulement. Le pillage
des richesses sera au bon vouloir des compagnies et diplomaties
étrangères en raison de la soumission des
élites ou oligarchies
hispano-américaines. Du jour au lendemain une production
pouvait
s’écrouler, changer de lieu, se trouver en
concurrence avec un autre
marché et disparaître (canne à sucre,
cacao, café, caoutchouc, …).
De nombreuses productions minières ou
végétales ont connu ce sort, ce
n’est pas un phénomène mineur. Il en va
même de comment un marché peut
fluctuer, l’exemple le plus connu fut la concurrence entre le
Brésil et
l’Indochine. Le Brésil grand producteur de
caoutchouc va connaître
l’effondrement de sa production et des cours
entraînant le déclin d’une
Ville comme Manaus, c’est en Asie que les coûts
l’emporteront
provoquant la disparition d’un marché qui avait
fait la richesse de la
région Amazone du Brésil. Mais cette
réalité, c’est aussi imposé
ailleurs en Amérique du Sud. La liste des produits serait
longue à
établir, tant elle a provoqué des manques
à gagner conséquents sur les
économies nationales, et qu’elle continue toujours
à avoir des
résultats négatifs, à
l’exemple de la culture de l’eucalyptus en
Uruguay, du soja en Argentine, ou bien du palmier à huile en
Colombie.
Les puissances exportatrices et les grands trusts décident
ainsi des
besoins, elles contrôlent l’offre et la demande,
mais aussi choisissent
ou elles produisent le produit de base.
Dès 1898, l’attitude des États-Unis
sera très agressive sur le
continent. Ce n’est pas une deux ou deux interventions
militaires qui
auront lieu, mais des dizaines et sous de multiples formes (directes ou
indirectes). Les fascismes latino-américains n’ont
pas été des
mécanismes lointains avec ce qu’a pu
connaître la montée des fascismes
en Europe aux débuts des années 1920.
L’Amérique Latine va même devenir
une terre d’accueil et d’application des
méthodes policières et
militaires pratiquées lors de la seconde guerre mondiale,
puis plus
tardivement mises en oeuvre pendant la guerre
d’indépendance de
l’Algérie. Dans l’art de la guerre
à mener aux peuples du monde, pour les
oppositions démocratiques ou progressistes, la note a
été salée. Combien
de fantoches au pouvoir, de dictatures sanglantes, de guerres
silencieuses se sont menés outre-atlantique contre toutes
les formes de
dignité humaine, pourtant ce qui pourrait paraître
une destinée propre
à cette partie du monde n’a plus raison
d’être.
Ces dix dernières années ont pour beaucoup
changées la donne, on peut
imputer à un homme un rôle majeur, oui
indéniablement Hugo Chavez a
favorisé une prise de conscience, et il a
été la préfiguration de
nombreux changements politiques en Amérique du Sud. Et bien
plus, il en
va de sortir d’une économie
d’inspiration purement néo-libérale et
de
répondre à la demande interne en
élevant les conditions de vie des plus
faibles économiquement. L’éducation et
la formation étant comme partout
ailleurs un moteur de l’élévation des
consciences individuelles et des
capacités d’un pays à consolider et
développer ses productions. Il n’y
a pas que le Venezuela, qui demande aujourd’hui la fin
d’un certain
type de domination, il existe un assez large consensus dans le
cône
sud.
Et à suivre ce qui se déroule en Colombie pose la
question de la
prégnance d’un modèle qui favorise les
tensions guerrières. Avec les
conflits en Afghanistan et en Irak, les Usa ont perdu du terrain sur la
chasse gardée, notamment la base militaire de Mantua en
Équateur a été
démantelée et afin de concentrer les forces dans
la région
un nouvel accord a été conclu avec le
président Alvaro Uribe pour sept
nouvelles bases sur le territoire colombien. Il ne suffit pas que la
Colombie dépense deux fois plus en armement que son voisin
pour que
l’on dénonce un peu vite les seuls achats du
président vénézuélien.
Mais il ne faut pas oublier que les Usa ont consacré
plusieurs
milliards de dollars à la lutte contre les cultures des
drogues ne
faisant paradoxalement que conforter le marché
illégal. Ce serait aussi
oublier qu’en Colombie et pas en trame de fond se
déroule un conflit
meurtrier.
La question est de savoir si aujourd’hui et avec le
changement de
président intervenu à Washington, il faut
s’attendre à un relâchement
ou un abandon de la part de la puissance maîtresse. Entre le
discours
et la réalité, il y a le risque d’un
gouffre et en ce domaine, rien n’a
vraiment changé et nous sommes loin d’un
infléchissement de politique.
Pourtant et depuis la seconde fois dans son histoire politique des
nations sud américaines n’avalisent plus les choix
militaires et
stratégiques, dans leur ensemble elles ont
été plus que critique
concernant le coup d’état intervenu au Honduras en
2009 et la création
de sept bases militaires supplémentaires en Colombie. On
pourrait
s’appuyer sur l’exemple du Venezuela, mais il
n’est pas le seul pays à
vouloir faire entendre sa voix.
Fini en quelque sorte ce temps où tout se
décidait ou s’impulsait au
sein du département d’État, nous sommes
entrés dans une ère nouvelle
des relations internationales ou une seule voie s’imposait
à tous.
Légitiment le Brésil, le Chili,
l’Argentine, le Venezuela, la Bolivie,
l’Équateur, l’Uruguay et le Paraguay ont
plutôt des comptes à demander
à l’ancienne tutelle impériale. Aucun
de ces pays n’a été
épargnés, ils
ont tous connu l’ordre noir des pouvoirs fascistes et les
mêmes dogmes
conçus au Pentagone en faveur d’un ordre
totalitaire. Si cette donne a
pu changer, elle le fut en fonction de l’enlisement de
l’armée
étasunienne en Afghanistan et en Irak ces
dernières années, et surtout
l’arrivée au pouvoir d’hommes nouveaux :
Chavez, Lula, Morales, Correa,
Tabarez, Pepe Mujica, Lugo, Madame Bachelet, les époux
Kirchner.
L’hyperpuissance ne concentre plus les mêmes moyens
et les opinions
publiques latino-américaines ne sont plus vraiment
à la botte de
l’ancien maître. Ces changements intervenus ont
bousculé les schémas
classiques, des pouvoirs progressistes n’hésitent
plus à manifester
leurs désaccords, voilà quelque chose qui
était inconcevable, il y a à
peine vingt ans.
Il reste manifestement un point noir en Amérique du Sud, un
pays dont
on parle relativement peu et qui semble vouer en France à
une certaine
indifférence. La Colombie n’est pas d’un
exotisme singulier, c’est un
État vivant de plein fouet des problèmes
très contemporains. Vingt
millions de pauvres sur une population de quarante-cinq millions
d’habitants, plus les corruptions, les narcotrafics en tout
genre, le
phénomène récent d’une
prostitution enfantine massive, sans oublier les
guerres civiles répétitives et sans fin, font de
cette nation un
concentré de beaucoup de
déséquilibres. Soixante ans de conflits sans
vraies interruptions devraient faire prendre conscience que ce qui
s’y
déroule n’est pas un fait du hasard. La Colombie
n’est pas un espace
perdu du monde, elle est confrontée à de
gigantesques difficultés, qui
ne présument rien de positif pour notre humanité.
Ce ne sont pas des
phénomènes extérieurs à
notre planète. Il en va de faire tomber un mur
de silence. D’appeler comme l’on dit, un chat, un
chat… Une guerre est
une guerre, et il n’y a pas d’autres termes pour
parler des réalités.
Ce conflit a des conséquences sur toute la région
et en premier lieu au
Venezuela et en Équateur.
Si, il existe un parfum de guerre froide, il est parfaitement entretenu
non point pas l’arrogance d’un homme mais par la
superpuissance
continentale, toutefois en déclin. À Vouloir
imposer un ordre du monde,
au nom de la seule lutte contre le terrorisme, le décompte
des morts
civils en Colombie ne fait que s’alourdir
d’année en année. Il ne peut
y avoir de solution de paix, sauf si l’on cherche
à faire taire en
premier lieu les armes. Pourquoi vouloir renforcer ce qui est un
échec,
non seulement en Irak, en Afghanistan, mais aussi en Colombie. Des
accords comme le plan Colombie n’ont en rien
altérer les réseaux autour
des plantations maffieuses de la cocaïne, plus le
désordre est grand et
plus activités criminelles fructifient. De même,
elles débordent des
frontières et à qui savoir fait le plus de
bénéfice des trafics, les
plus values sont plus importantes sur les marchés
nord-américains et
européens, contre seulement 10 à 20 % des
bénéfices dans les pays
producteurs.
Des intérêts qui ne se confinent pas uniquement
à des marchés
parallèles, les premiers présents et depuis
longtemps sont les
multinationales, elles concentrent par
l’intermédiaire ou paravent de
holdings colombiennes de nombreuses affaires et sont une des sources du
paramilitarisme, c’est-à-dire
l’existence de milices d’extrêmes droites
qui font régner la terreur dans les terres les plus
reculées et sur les
régions voisines. Ces négoces participent
à l’expansion du conflit dans
les campagnes. Depuis des années on solde des parties du
territoire à
des groupes internationaux, tout en prétendant
éradiquer la guérilla.
Ressources vivrières ou minérales, des pans
entiers du pays sont
sacrifiés à des intérêts
très éloignés du régime de
peur qui habite le
monde agricole colombien. Cette donne se renforce en la
présence de
divers intérêts aboutissant à un moment
ou à un autre dans les circuits
financiers de notre monde globalisé, et peut
représenter un bon nid
douillet pour différents groupes occultes ou cartels en
présence.
Les 17 et 18 avril 2010 a été signé un
Accord de Libre Échange entre
les pays membres de l’Union et la Colombie. Quand par
ailleurs, les
élus démocrates des deux chambres aux Usa ont
bloqué la signature d’un
nouveau traité, il y a à se demander si
l’Europe ne joue pas avec le
feu ? Veut elle faire entrée dans son espace
économique un état
criminel et maffieux ? Veut-elle un jour se voir condamner pour
complicité à des crimes contre
l’Humanité ? Tel est un des enjeux
humains de la signature de ce traité, il est inacceptable
que l’on
puisse signer avec un pays si marqué et
disqualifier en raison du
nombre d’atteintes à la dignité
humaine. Il en va de même de la
politique interventionniste menée depuis trop longtemps en
Colombie.
Elle doit cesser et permettre de mettre un terme à la guerre
en cours.
Quand l’Europe prendra la mesure de ce qui se passe en
Colombie, il
sera possiblement trop tard. Le sommet Europe Amérique
Latine qui s’est
tenu les 17 et 18 mai 2010 à Madrid sous
l’égide de l’Espagne a
été
l’occasion de finaliser l’Accord de Libre
Échange entre les 27 pays de
l’union et le gouvernement d’Alvaro Uribe
(Colombie), d’Alan Garcia
(Pérou) mais aussi avec l’ensemble des pays
d’Amérique Centrale. Il
restera comme ultime étape la ratification devant le
Parlement
Européen. Ces traités vont sceller une ouverture
des marchés permettant
la libre circulation des marchandises et des capitaux. Concernant la
Colombie, à contre courant de ce qui se passe aux Usa, nous
allons
engager la signature des citoyens européens dans un pays qui
ne laisse
rien augurer de bon. La question n’est pas même de
savoir, si, il est
politiquement acceptable ou pas, au nom d’une
sensibilité politique
libérale ou interventionniste de ratifier cet accord de
libre-échange.
Il est de savoir si nous souhaitons nous cacher encore longtemps la
face aux atteintes quotidiennes des droits de l’Homme en
Colombie, et
si nous souhaitons faire entrer de plein fouet des
mécanismes maffieux
ou corrupteurs supplémentaires au sein de nos
économies ?
Ce n’est pas la moindre des interrogations, et cela ne vaut
pas que
pour la Colombie. Il s’agit du rôle et du poids
économiques des cartels
de la drogue dans le monde, de leurs influences, mais aussi du haut
niveau de nuisance. Ce qui se passe en Colombie depuis les
années 1970
a permis de constituer une industrie prospère, de la
culture, en
passant par sa transformation jusqu’à sa
commercialisation. Les cartels
colombiens sont devenus maîtres non seulement d’un
gigantesque empire
économique, mais d’une certaine manière
du pays. Cent trente élus
nationaux mis en cause ces dernières années dans
des affaires liant le
trafic de drogue aux milices paramilitaires, nous ne parlons pas
d’un
épiphénomène, mais de
l’empreinte des pieuvres locales sur les pouvoirs
étatiques et économiques. Le père du
président a certes été tué
par les
Force Armées de Colombie, mais l’on
précise rarement que c’est en
raison de sa place dans les narcotrafics.
Il est peu relaté en France que non seulement le
père fut un capo de
taille, mais que plus récemment le cousin Mario Uribe et les
deux fils
(Geronimo et Tomas) ont eu maille à partir avec la justice.
Touchant
les liens d’Alvaro Uribe avec l’ancien patron du
cartel de Medellin
Pablo Escobar, ils sont connus de tous, et le très probable
ordonnateur
de son assassinat fut l’actuel président. Ce ne
sont pas faisceaux ou
des soupçons qui planeraient au-dessus de la personne du
président
colombien, c’est un problème épineux
dont on ne cherche pas à prendre
en considération l’ampleur. Au-delà de
l’individu ou de la personne,
pourquoi se fait-il que le palais présidentiel en 8 ans
à Bogota soit
devenu l’antichambre du paramilitarisme et par ailleurs un
des lieux de
contrôle sur la majorité des trafics (les
paramilitaires se trouvant à
la tête de 60 pour cent du trafic…)?
L’économie de la drogue représenterait
entre cinq et dix pour cent des
richesses financières de ce monde. Comble du comble, la
manne sonnante
et trébuchante n’atterrit pas dans les pays
producteurs. La plus forte
plus value est engendrée par la vente au
«détail» et s’effectue
principalement en Europe et Amérique du Nord,. De plus, ce
sont sur nos
trottoirs que se consomme et se perpétue le
marché et une vente
favorisant une très forte rentabilité.
Nous sommes ici et là-bas
face à « une industrie » qui emploie une
« main d’œuvre » relativement
nombreuse, en France on estime à 100.000 personnes vivant de
l’acheminement et de la revente des drogues. Ce chiffre est
au minimum
à doubler en Colombie et les pays adjacents, car du paysan,
en passant
par le labo, il faut prendre en compte les convoyeurs et les besoins
logistiques pour inonder le monde occidental. De plus, quand on
connaît
les conséquences sociales et les méfaits de la
cocaïne chez les
usagers, les dégâts sociaux pèsent du
coup sur les régimes solidaires
ou maladies. Nous devrions nous poser comme question comment
pouvons-nous aider un pays à s’extraire de maux si
pesants. Il n’y a
pas de fatalité colombienne, chaque pas vers la paix est
à prendre en
considération, mais on ne peut pas reconnaître des
accords qui vont
vers une légitimation d’un état narco
criminel.
Tous droits réservés
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Haïti,
une nation
ébranlée
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Fédération Internationale des Droits de
l'Homme,
le 19 mai 2010
Avant-propos
La mission est profondément impressionnée par l’incroyable
dignité
et la remarquable « résilience » du peuple
haïtien dans cette
épreuve, malgré le traumatisme causé par les dizaines de milliers de
morts et des destructions sans nom qui ont ébranlé la nation
entière. Elle salue l’extraordinaire mobilisation de
solidarité qui
s’est exprimée tant au niveau national qu’au
niveau international, et
l’engagement des très nombreux acteurs qui tentent de
répondre sur
place à ce drame exceptionnel.
La FIDH présente une nouvelle fois ses plus sincères condoléances et
rend hommage aux militants, membres de la famille et amis du secteur
des droits humains qui ont péri dans cette catastrophe, avec une
pensée particulière pour Mme Yvrose SAINT-JEAN, directrice exécutive
du Comité des Avocats pour le Respect des Libertés Individuelles
(CARLI).
Présentation
générale d’Haïti
Haïti est un État situé dans la partie ouest de
l’île d’Haîti (ou île
d’Hispaniola) qu’il partage avec la République
dominicaine
(partie est). C’est la seconde plus grande île des
Grandes Antilles
après Cuba. Le pays occupe 36% de la surface de
l’île, soit 27 750
km2.
Haïti est dirigée par un président de la République élu
pour une
période de 5 ans. Le président ne peut remplir que 2 mandats et
ceux-ci, non consécutifs. Le président actuel, René Préval, avait
été réélu en 2006.
Il existe un Parlement bicaméral et un gouvernement dirigé par un
Premier ministre. Le pays est divisé en 10 départements (1), 137
communes, 565 sections communales. La capitale, Port- au-Prince, est de
loin la ville la plus importante du pays, avec près de 3 millions
d’habitants sur un total de 9,8 millions (2).
1. Le Centre, le Nord, le Nord-Est, le Nord-Ouest,
l’Artibonite, les
Nippes, l’Ouest, le Sud, le Sud-Est et la Grande-Anse. Chaque
département est dirigé par un délégué nommé par le gouvernement.
2. Statistiques 2008 des Nations unies :
http://www.unicef.org/infobycountry/haiti_statistics.html.
Introduction
Le 12 janvier 2010, les 35
secondes pendant lesquelles la terre s’est soulevée dans
diverses
régions du pays, notamment à Port-au-Prince, Léogane,
Petit-Goâve,
Grand-Goâve et Jacmel, et les répliques qui ont suivi, ont
non
seulement provoqué une catastrophe humanitaire sans précédent mais
ont aussi ébranlé les fondements mêmes de la nation
haïtienne.
Deux mois après le tremblement de terre, alors que la phase
d’urgence
n’est pas encore terminée mais que s’élaborent
déjà des plans de
reconstruction du pays et de l’État, les trois organisations
haïtiennes membres de la FIDH en Haïti, le Réseau National
de
Défense des Droits Humains (RNDDH), le Centre Œcuménique
des Droits
Humains (CEDH) et le Comité des Avocats pour le Respect des Libertés
Individuelles (CARLI), ont sollicité l’envoi d’une
mission
internationale sur place, autour de trois objectifs :
- exprimer une solidarité active avec le peuple haïtien, et
en
particulier avec le secteur de défense des droits humains ; - se
rendre dans des zones sinistrées, écouter des acteurs nationaux et
internationaux et formuler des observations et recommandations
concernant l’impact sur les droits humains de la gestion des
réponses
apportées jusqu’à présent ; et
- accompagner les organisations nationales des droits humains dans
leurs réflexions et propo- sitions concernant la «
refondation »
d’Haïti sur des bases démocratiques et dans le respect des
droits
fondamentaux.
Du 18 au 28 mars, une délégation de la FIDH composée de Geneviève
Jacques, ancienne secrétaire générale de la CIMADE (Centre
Œcuménique d’Entraide, France), et de Benoit Van
der Meerschen,
président de la Ligue Belge Francophone des Droits de
l’Homme, s’est
rendue en Haïti où elle a rencontré un grand nombre
d’acteurs de
premier plan, haïtiens et étrangers, et visité plus
d’une dizaine de
camps pour personnes sinistrées, notamment dans la région de
Port-au-Prince et sur la zone côtière proche de
l’épicentre du
séisme.
La
mission a pu s’entretenir avec des représentants :
1. des autorités haïtiennes Le président de la République,
René
Préval ; le ministre de l’Intérieur, Paul Antoine
Bien-Aimé ; la
ministre des Affaires étrangères, Marie Michelle Rey ; le ministre de
la Justice, Paul Denis ; le directeur général de la Police Nationale
d’Haïti, Mario Andresol.
2. de la communauté internationale L’Ambassadeur de France,
Didier Le
Bret ; le responsable de la section des Droits de l’Homme de
la Mission
des Nations unies pour la Stabilisation en Haiti (MINUSTAH) et
coordonna- teur du « Cluster Protection », Elio
Tamburi ; le
responsable de la section politique de la MINUSTAH, John Brevan ; le
responsable de la section État de droit de la MINUSTAH, Fernando
Castañon Alvarez ; la responsable de la communication du Bureau des
Nations unies pour la Coordination des Affaires humanitaires (OCHA),
France Hurtubise ; la responsable du Fonds de développement des
Nations unies pour la femme (UNIFEM), Kathy Mangonèse, ainsi
qu’un
représentant du Programme alimentaire mondial (PAM).
3. du secteur des droits humains Les chargés de mission ont également
eu l’occasion de rencontrer de façon plus
informelle diverses
personnalités et responsables associatifs de la société
haïtienne.
Enfin, un séminaire d’une journée, organisé à
l’initiative de la
FIDH, a rassemblé une quin- zaine de représentants
d’organisations
haïtiennes du secteur des droits humains pour réfléchir
autour de la
question : « Haïti après le séisme : comment
inclure les droits de
l’Homme dans la reconstruction? ». Cette journée
de discussion très
riche a largement inspiré les commentaires et recommandations de la
mission. (Voir le programme et les participants en annexe.)
La
mission a également effectué des visites de camps de personnes
sinistrées :
Elle s’est rendue dans six communes (Port-au-Prince, Delmas,
Pétion-Ville, Petit-Goâve, Leogane et Cité Soleil) et a
visité 11
camps et campements spontanés hébergeant des personnes sinistrées
où elle s’est entretenue avec les membres des comités
locaux
d’organisation des camps :
- Place des Artistes et Place Dessalines sur le Champ de Mars à
Port-au-Prince (environ 22 000 personnes) ; - Club Golf de
Pétion-Ville (environ 50 000 personnes), à Delmas et Pétion-Ville ;
- Centre Sportif de Dadadou à Delmas (environ 10 000 personnes) ;
- Fondation St Preux et Bobin à Peguyville/Pétion-Ville (campements
de 2 000 et 4 000 personnes) ; - Camps de Petite Guinée (800
personnes), Place Centrale (800 personnes) et Cité Gaston (près de 4
000 personnes) à Petit -Goâve ;
- Camp du Parc Gérard Christophe à Léogane (près de 5 000 personnes)
Enfin, la mission s’est rendue sur un site de relocalisation
en phase
de préparation situé sur l’ancienne piste
d’aviation à la sortie
nord de Port-au-Prince, près du bidonville dans la commune de Cité
Soleil. (...)
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Bolivie
: Nous sommes mieux
sans les États-Unis et sans le FMI |
Une interview d’Evo
Morales, par Amy Goodman, le 10 mai 2010
Lors
de
la clôture de la Conférence des Peuples du Monde
sur le Changement
climatique à Cochabamba, Democracy Now a fait une interview
du
président Evo Morales. Amy Goodman a parlé avec
Morales de la décision
d’États-Unis de couper l’aide climatique
à la Bolivie, du trafic de
stupéfiants, du dixième anniversaire de la Guerre
de l’Eau de
Cochabamba, de la protestation au gisement d’argent San
Cristobal, et
de la contradiction entre la promotion du milieu environnemental et les
industries d’exploration et d’extraction des
ressources en gaz, pétrole
et minerais. Jeudi 29 avril, les organisateurs du sommet des peuples
ont publié un Accord des Peuples basé sur les
réunions des groupes de
travail. Les principales propositions comprennent
l’établissement d’un
tribunal international pour poursuivre les pollueurs,
l’approbation
d’une Déclaration Universelle des Droits de la
Terre-Mère, la
protection des migrants climatiques et la pleine reconnaissance de la
Déclaration les Droits des Peuples Indigènes de
l’ONU.
Amy
Goodman : Nous
émettons depuis Olivia dans la localité de
Tiquipaya, dans les environs
de Cochabamba. Jeudi, le Sommet des Peuples du Monde sur le Changement
climatique et les Droits de la Terre-Mère s’est
clos sur une grande
manifestation dans le Stade Félix Capriles de Cochabamba en
présence du
président de la Bolivie Evo Morales et du
président du Venezuela Hugo
Chávez. Pendant les trois derniers jours du sommet, connu
simplement
comme “Le Sommet,” dix-sept groupes de travail se
sont réunis pour
discuter de différents sujets relatifs au climat, de la
dette
climatique aux dangers de la commercialisation des crédits
carbone.
Hier soir, les organisateurs du sommet ont publié un Accord
des Peuples
basé sur les réunions des groupes de travail. Les
principales
propositions comprennent l’établissement
d’un tribunal international
pour poursuivre les pollueurs, l’approbation d’une
Déclaration
Universelle des Droits de la Terre-Mère, la protection des
migrants
climatiques et la pleine reconnaissance de la Déclaration
des Droits
des Peuples Indigènes de l’ONU. Le sommet des
peuples a aussi condamné
le programme de reboisement connu sous le nom de REDD,
Réduction des
Émissions de la Déforestation et de la
Dégradation.
Dans la manifestation de jeudi le président bolivien, Evo
Morales, a
appelé les dirigeants du monde à adopter les
propositions du sommet des
peuples. Quelques heures avant la manifestation, des partisans de
Morales ont rempli les rues de la ville. Morales est le premier
président amérindien bolivien, et une grande
partie de son appui
provient de la population indigène majoritaire en Bolivie.
Les signes
de la vibrante culture indigène bolivienne
étaient bien visibles dans
le stade et aux alentours. De nombreuses femmes indigènes
portaient des
chapeaux de feutre et des polleras. Le son des flûtes de pan
et du
charango pouvait être entendu dans tout le stade tandis que
de divers
groupes musicaux étaient présents sur
l’aire de jeu. Des femmes et des
enfants vendaient des pâtés en croûte et
des jus frais. Dans la
manifestation, le président
vénézuélien Hugo Chávez a
fait remarqué que
“le capitalisme pourrait mener à la destruction de
la planète. Pour
ceux qui croient que c’est une exagération, il
faut rappeler que la
planète a vécu des millions
d’années sans l’espèce
humaine.” Tandis
que se finit le Sommet des Peuples sur le Changement climatique et les
Droits de la Terre-Mère, nous nous sommes réunis
avec le président de
la Bolivie Evo Morales. Après les débats sur le
climat ratés à
Copenhague, en décembre dernier, Morales avait
lancé un appel pour
organiser le sommet des peuples pour donner aux pauvres et au peuple du
Sud du Globe l’occasion de formuler des stratégies
sur la lutte contre
le changement climatique. Le président Morales reste avec
nous durant
une heure. Nous sommes ici à
l’Université de la Valle – Uni de la
Valle, comme on l’appelle ici – à
Tiquipaya.
Amy
Goodman : Vous
avez participé avec nous plusieurs fois à
Democracy Now ! à New York.
C’est un honneur être ici dans votre pays, en
Bolivie.
Président
Evo Morales : Encore merci beaucoup de m’inviter
à parler comme nous l’avons toujours fait.
Amy
Goodman : Eh
bien, nous parlons au lendemain de la clôture de la
Conférence des
Peuples du Monde, le lendemain du Jour de la Terre. Est-ce que vous
pensez avoir réussi ?
Président
Evo Morales :
Eh bien, d’abord... je suis surpris par la participation de
tous. Cela
n’était pas dans nos prévisions, tant
de gens : plus de 30 000
participants à 16 ou 17 ? tables de travail et une
déclaration
tellement sage pour la vie et pour la nature. La participation
d’hommes
de science et de gens très responsables venus de
différents secteurs et
régions du monde. Il y a deux choses
particulièrement importantes. À
Copenhague on voulait approuver un document qui abîme la
Terre-Mère. On
ne débattaient seulement que sur les effets de la crise
climatique, pas
sur les causes. Et les peuples ont débattu des causes, qui
sont le
capitalisme – on pourra parler plus en détail du
rapport –, les
transgéniques qui font mal à la
Terre-Mère et à la vie humaine. Et en
plus de cela, je salue le fait qu’il y ait un grand
intérêt à entamer
un dialogue avec les Nations Unies, de manière à
ce que les conclusions
des peuples du monde soient écoutées et
respectées, pas seulement par
les peuples qui ont participé mais qu’elles soient
écoutées et
respectées par l’humanité dans son
ensemble habitant la planète Terre.
Amy
Goodman :
Les propositions qui sont issues de cette conférence, de ce
sommet,
pouvez-vous les mentionner et les expliquer, en commençant
par le
Tribunal de Justice Climatique ?
Président
Evo Morales : Par
exemple les pays développés devraient respecter
l’accord de Kyoto et
cela signifie appliquer la réduction de 50% des gaz
à effet de serre et
que l’augmentation de la température globale doit
être stabilisée à un
degré centigrade. Créer un tribunal climatique de
justice siégeant à
Cochabamba et je dit merci aux mouvements sociaux qui ont
approuvé
cette proposition et le fait que le siège soit en Bolivie.
Qu’est-ce
qui a été débattu ? : Le
référendum mondial sur la crise climatique, que
les ressources
économiques qui sont utilisées pour la
défense et la guerre le soient
pour la vie et la nature. Selon nos informations les pays
développés
dépensent 1,7 milliard de dollars pour la défense
et la sécurité
internationale (les interventions militaires)... Imaginez, un milliard
sept cents millions de dollars pour sauvegarder la vie et la nature ce
serait si important. C’est le droit de la
Terre-Mère, le droit à la
régénération de sa
biocapacité. C’est très important.
Je peux te dire : Je connais le sujet et je l’ai
vécu dans ma famille,
dans ma communauté, dans mon ayllu. Cette année
nous semons à cet
endroit, l’année suivante aussi, ensuite il faut
l’abandonner pour
5,6,7 ou 8 ans, et dans 6, 7 ou 8 ans il sera
régénéré. Le terrain a
besoin de plus ou moins ce temps. Le temps passe, nous le laissons et
nous y revenons. Et ainsi, si nous faisons tourner les cultures, il
n’y
a pas d’impact nuisible pour l’environnement. Ce
sont des petites
choses, mais elles deviennent de grandes choses au niveau international
en terme d’environnement global. En Bolivie après
cet événement, nous
allons commencer à reboiser. Et le plan que nous voulons
développer ici
en Bolivie a été approuvé
l’an dernier pour le premier anniversaire du
jour de la Terre-Mère. Et avant c’était
le Jour de la Terre-Mère,
c’était nationale, maintenant c’est le
Jour International de la Terre.
Un an après cela, c’est-à-dire
maintenant, nous allons commencer à
planter. Et à la deuxième année,
l’an prochain donc, nous aurons planté
dix millions de plantes : Qu’est-ce cela signifie ? Que les
boliviennes
et boliviens, qu’ils soient enfant ou personne
âgée vont planter une
plante ou un arbre. Nous sommes dix millions et il y aura dix millions
de plants, sans aucun apport international simplement
l’effort et
l’apport des boliviens pour arriver à reboiser
notre pays.
Amy
Goodman : Pouvez-vous expliquer ce qui c’est
passé avec les glaciers ici en Bolivie ?
Président
Evo Morales :
A Chacaltaia, près de la ville de La Paz, enfant on
entendait en
permanence que les gens allaient pratiquer le ski. Et maintenant que je
suis le président et que je vis à La Paz on ne
skie plus là-bas. C’est
comme un paysage lunaire et il n’y a pas de neige. Par
là il y a
Chorolque, dans le département de Potosí et les
mineurs disent qu’avant
le Chorolque était habillé d’un poncho
blanc. Ils me disent que dans 50
ans il n’y aura plus de neige sur l’Illimani, la
grande montagne qui
domine le paysage de La Paz. Selon les experts cela à
à voir avec
problèmes d’eau, bien sûr. Et ce
n’est pas seulement un énorme souci
pour les paysans indigènes qui aiment la
Terre-Mère et qui la soignent,
mais pour toute la population dans son ensemble.
Amy
Goodman : Président Morales, qui pourrait
être poursuivi devant un tribunal de la justice climatique ?
Président
Evo Morales :
D’abord, les pays développés qui ne
respectent pas le Protocole de
Kyoto C’est l’accord de base, le Protocole de
Kyoto. Les pays
développés devraient mettre en application ses
mesures d’une manière
responsable. Nous commencerions avec les pays qui ne l’ont
pas
ratifiés, qui n’ont pas signé le
Protocole de Kyoto, comme le
gouvernement des États-Unis. Et pour cela il y a la Cour
internationale
de justice, de façon à que la nouvelle
organisation qui naît du sommet
puisse poursuivre tout d’abord les pays qui n’ont
pas ratifié le
Protocole de Kyoto, et en second ceux qui l’ont
ratifié mais qui ne
l’appliquent pas.
Amy
Goodman :
Nous parlons au président Evo Morales, au
président de la Bolivie.
Hier, durant la manifestation du Jour de la Terre, le ministre des
Affaires étrangères de
l’Équateur a dit que des États-Unis ont
réduit
leur aide à l’Équateur de 2,5 millions
de dollars parce qu’il n’a pas
signé l’Accord de Copenhague. Il a dit
qu’il donnerait deux millions et
demi de dollars aux États-Unis s’ils signent le
Protocole de Kyoto. En
Bolivie des États-Unis ont réduit leur aide de
2,5 ou 3 millions de
dollars parce que la Bolivie n’a pas signé
l’Accord de Copenhague.
Pouvez-vous expliquer ce qui s’est passé ?
Président
Evo Morales : Ici
il y a un sabotage et un chantage permanent de la part du gouvernement
des États-Unis. Je ne peux pas croire qu’un
président noir soit si
vindicatif contre un président indien. Parce que nos
grands-parents et
nos populations, noires et indigènes, ont
été exclues, ignorées,
humiliées. Obama vient de cette expérience, de
cette souffrance. Moi
également. Et le discriminé discrimine
l’autre discriminé.
L’oppressé
oppresse l’autre oppressé. On nous faisait chanter
conjointement, mais
c’est un chantage passé, maintenant il nous fait
un chantage de 2 ou 3
millions de dollars. Avec fierté et humilité je
pense qu’aujourd’hui
nous sommes mieux sans les États-Unis. Et nous sommes mieux
économiquement, dans les politiques
macroéconomiques, sans le Fonds
Monétaire International.
Amy
Goodman : A quoi devaient servir les 3 millions de
dollars, avant la réduction de l’apport ?
Président
Evo Morales :
A des projets sociaux bien sûr,autour de
l’environnement. Mais ce sont
seulement trois millions. Dans la lutte contre le narcotrafic ils ont
la responsabilité de faire un investissement ce
n’est pas une
coopération, c’est leur devoir. Malgré
cela, ils se sont retirés et
nous devons faire face à la lutte contre le narcotrafic avec
seulement
des miettes pour faire comme si. Et comme ça par exemple,
j’ai
l’information qu’ils devaient investir dans le
Compte du Millénaire
comme 600 millions de dollars et ils ont tout
arrêté. Nous avons résolu
cela avec d’autres pays. Nous parlons d’un grand
investissement. Nous
n’allons pas réclamer, non nous n’allons
pas réclamer, nous avons notre
dignité. Mais ce qu’ils font c’est comme
se venger, ce qu’ils font
c’est effrayer et c’est pourquoi j’ai des
doute, je suis comme celui
qui a été soumis, ainsi que sa famille,
maintenant étant président je
peut discriminer un autre mouvement qui a discriminé.
Amy
Goodman : Voyez-vous un changement entre le
président Bush et le président Obama ?
Président
Evo Morales : Si quelque chose a changé
c’est seulement la couleur du président.
Amy
Goodman : Président
Morales, vous avez fréquemment parlé de la
différence entre coca et
cocaïne. Vous dites que la coca n’est pas la
cocaïne. Pour un public
américain, c’est difficile de comprendre
ça. Expliquez-nous s’il vous
plaît.
Président
Evo Morales : Bon...
La cocaïne est comme le cheveu blanc du traducteur et la
feuille de
coca est verte comme les feuilles de cette plante. La feuille de coca
dans son état naturel est un aliment, c’est une
médecine. Elle
s’utilise beaucoup dans les rituels, comme vous avez pu le
voir dans
les cérémonies de la Conférence
Mondiale pour les Droits de la
Terre-Mère. Par conséquent, pour transformer la
coca en cocaïne, on
utilise beaucoup de produits chimiques, et c’est un
mélange d’acide
sulfurique et d’autres corps chimiques qui la transforment en
drogue.
Mais nous n’avons pas la culture de la cocaïne, de
la feuille de coca
oui, mais pas de la drogue. Je regrette beaucoup que le
Département
d’État des États-Unis nous accuse du
fait que les consommateurs de
feuilles de coca sont narco-dépendants. C’est une
absurdité. C’est
totalement faux. Et que nous les producteurs de feuilles de coca sommes
des narcotrafiquants et que la coca c’est la
cocaïne, c’est
complètement mensonger. Par conséquent nous
sommes engagés dans une
bataille permanente pour continuer d’informer tout le monde
à ce sujet.
Mais les gens comme vous, par exemple, savent
déjà que la coca ça n’est
pas la même chose que la cocaïne [1].
Mais, en plus de cela... quand l’étain bolivien
était à son apogée et
servait l’industrie nord-américaine, les
États-Unis promouvaient les
cultures de coca pour que les mineurs, les ouvriers, en consommant des
feuilles de coca [2], puissent extraire l’étain
pour l’envoyer aux
États-Unis. Et ils donnaient des décorations aux
meilleurs producteurs
de coca. Il existe des documents sur tout cela. Je suis convaincu de
que la cocaïne, le trafic de stupéfiants, est une
invention des
États-Unis. Sous cette invention, ils ont
créé cette guerre contre le
trafic de stupéfiants et le capitalisme vit des guerres, le
capitalisme
a besoin des guerres pour vendre son armement [3]. Alors ce
n’est pas
un problème isolé, le problème des
drogues : c’est un problème qui a à
voir avec les intérêts du capitalisme, et sous le
prétexte de la lutte
contre le narcotrafic, ils installent des bases militaires [4].
C’est
le contrôle politique, la domination, la soumission.
C’est le nouveau
colonialisme.
Amy
Goodman : Président
Morales, permettez-moi cependant de vous demandez. Je parlais, non pas
avec vos adversaires, mais avec vos partisans, qui
s’inquiètent qu’il y
a un problème croissant de narcotrafic. Je me demande si
vous pensez
qu’il en est ainsi, vous plus que personne, comprenez
qu’une quelconque
chose de ce type pourrait provoquer une intervention massive. Par
conséquent : qu’est-ce que vous ferez à
ce propos ?
Président
Evo Morales : C’est
un problème. Nous le reconnaissons. Je ne sais pas
s’il est croissant,
mais oui ... les cartels de la drogue et de la cocaïne sont si
puissants et l’État Plurinational (de la Bolivie)
ne dispose pas des
outils et de la technologie pour lutter efficacement contre les cartels
de la drogue. C’est une faiblesse de notre part. Et le plus
important
c’est le mouvement paysan a volontairement réduit
les cultures de la
coca. Avant c’était une éradication
forcée qui violait des droits de
l’homme. Le problème c’est que nous ne
sommes pas équipés de radars, de
satellites et le narcotrafiquant n’est pas celui qui foule la
coca. Il
habite dans le monde entier et son argent est dans les banques. Nous
devons en finir avec le secret bancaire : pourquoi pas ? Imaginez que
sans ça il n’y a pas d’apports
à un effort réel et effectif contre le
trafic de stupéfiants.
Amy
Goodman :
Y a-t-il un rôle que les États-Unis peuvent jouer
dans le combat contre
le trafic de stupéfiants dans ce pays que vous
considéreriez
constructif ?
Président
Evo Morales : Nous avons uniquement besoin
d’équipement, de technologie
Amy
Goodman :
Nous parlons au président de la Bolivie Evo Morales, qui
était cocalero
[5], chef du syndicat des cocaleros. Maintenant, je veux revenir dix
ans en arrière. Je veux revenir à la Guerre de
l’Eau, grâce à laquelle
vous avez réellement augmenté votre
popularité et vous êtes finalement
arrivés à la présidence. Ici
même par cette fenêtre de
l’Université de
la Valle, nous pouvons voir la montagne Tunari.
C’était le nom utilisé
par cette compagnie mystérieuse, les Eaux du Tunari, qui
était en
réalité la compagnie nord-américaine
Bechtel, arrivée pour privatiser
la fourniture en eau. Vous vous êtes joint aux agriculteurs,
aux
travailleurs industriels dirigés par Oscar Olivera, et vous
avez dirigé
un mouvement de masses contre la privatisation qui a expulsé
Bechtel.
Parlez-nous de cette période.
Président
Evo Morales :
Je suis né à Oruro, Orénoque, dans un
autre département de l’Altiplano,
et après avoir fait mon service militaire obligatoire en
1978, je suis
allé en 1979 avec mon père au Chapare, dans la
région du Chapare, qui
est un département de Cochabamba. Et en 79, 80, on
était de passage par
ici, j’ai vu le Tunari toujours enneigé. La
majeure partie de l’année
il y avait de la neige. Maintenant, quand la neige tombe elle tient une
demie journée maximum. Je l’ai vu. Eh bien, en
marge de ce sujet, les
premiers compagnons qui se sont levés contre le creusement
des puits
l’ont fait près d’ici au lieu dit Vinto,
Vinto Chico. Je rappelle
parfaitement que les communautés avaient
été mobilisées pour bloquer
les routes. Et ils m’ont dit : Evo, qu’est-ce que
tu penses des
contacts avec la presse ? Amenez la presse. Le gouvernement va nous
faire mal avec la privatisation de l’eau. Et
j’avais quelques amis dans
la presse. Et nous les avons amené à Vinto, nous
avons discuté avec eux
et ils l’ont dénoncé. Je suis
resté très impressionné par la
situation.
Je parle des années 90. J’ai beaucoup appris.
Après vient ce contrat avec les Eaux du Tunari. Pour les
gens de la
ville, les tarifs de l’eau allaient augmenter de 300, 400,
jusqu’à 700
pour cent. Cela a provoqué la réaction de la
population. Et la
privatisation des versants, de l’irrigation, pour les gens
qui
mettaient en place l’irrigation, pour le mouvement paysan,
tout cela a
été un problème. Et
Fernández, Oscar Olivera, nous les avons convoqué
pour nous réunir et pour débattre. Omar
Fernández, qui faisait parti
des constructeurs des irrigations. Et Oscar Olivera du secteur ouvrier.
Et ce qui m’a le plus fait réagir ça a
été au Parlement – entre 1999 et
2000 j’étais parlementaire – ils
m’ont dit au Parlement qu’il fallait
approuver un crédit, je crois qu’il
était de 50 millions de dollars de
la CAF (la Corporation Andine de Promotion) pour le donner à
ceux de
Tunari. Moi, pour le moins, ma manière de penser,
s’il y a une
entreprise qui s’adjuge ou qui privatise, l’eau ou
toute ressource
naturelle, elle a à investir de l’argent. Pourquoi
l’État allait-t-il à
prêter de l’argent pour l’entreprise des
Eaux du Tunari ? Tu comprends
? Dans le monde indigène et paysan, dans le monde des
pauvres,
l’entrepreneur c’est celui qui a beaucoup
d’argent. Les transnationales
sont multimillionnaires. Et là une transnationale, les Eaux
du Tunari,
s’adjuge la privatisation de l’eau et
l’État, le Parlement, voulaient
approuver une loi pour obtenir un crédit pour les Eaux du
Tunari.
Quelle type de privatisation est-ce donc ? Maintenant je peux en parler
avec plus de raison, avec beaucoup de connaissance, à propos
de ces
transnationales.
C’est ce sujet qui a attiré mon attention. Ici il
n’y a pas
d’investissement des entreprise. Après nous avons
été informé qui
étaient les associés de la multinationale Tunari
: un
homme politique
comme Médina Dorienne et d’autres politiques. Et
se sont
groupés pour
créer une grande entreprise. Mais il n’y avait pas
d’argent, et par
conséquent ils supposaient que le gouvernement bolivien
allait
leur
prêter l’argent. Cela et beaucoup
d’autres choses
nous ont unis, au
mouvement paysan, aux irrigateurs et aux gens de la ville. Je dirais
que le secteur d’Oscar Olivera a un peu participé
à
cette lutte. Ceux
qui se sont vraiment battu se sont les irrigateurs, les paysans et les
cocaleros. Nous nous sommes unis dans la lutte. Nous n’avions
pas
de
problème d’eau au Chapare. Chapare, et la Lune ?
Trop
d’eau. Le sujet
est qu’ils étaient sur une politique de
privatisation.
Là nous avons de
l’eau potable et elle est aux mains d’un syndicat.
Nous
avons dit :
“Cette politique va arriver ici tôt ou tard. Avant
qu’elle n’arrive au
Chapare c’est mieux que nous allions combattre à
Cochabamba.” Quand un
jour je me suis senti comme battu ici dans les mobilisations,
à
ce
moment, près de mille compagnons ont
décidé de
sortir participer à une
marche et ils ont dit : “nous allons à la marche
!”
Nous sortons et
déjà la police commence à nous gazer
et la presse
dit : “Ils ont gazé
les cocaleros qui luttent pour l’eau”. Oh ... et la
population se lève
et un état de siège a été
instauré.
C’était le dernier état de
siège et
nous l’avons battons. Depuis cette fois ils n’y a
plus
d’état de siège.
Amy
Goodman :
Alors : comment vous sentez-vous – à partir de
cette victoire – d’avoir
expulsé Bechtel du pays? D’avoir
été un manifestant qui lançait des
pierres, et de devenir président de son pays,
représentant la police et
les militaires à qui vous vous opposiez alors.
Président
Evo Morales :
Eh bien, maintenant que je suis président on continue
à sortir les
entreprises. Avant en tant que dirigeant d’un mouvement
social,
maintenant en tant que Président. Depuis que je suis
président on a
sorti les Eaux d’Illimani de La Paz. On est entrain de soritr
la
Transredes, le groupe pétrolier. Cela ne change pas. Ce sont
des
politiques définies par les mouvements sociaux, et nous les
continuerons. Oui, je veux que cela se sache : Jamais plus
d’entreprises propriétaires de nos ressources
naturelles. Oui, nous
avons besoin d’associés. Par exemple les
différents accords que nous
avons passé avec plusieurs entreprises.
L’entreprise investit, mais
sous contrôle, et le propriétaire c’est
l’État Plurinational de la
Bolivie. Nous sommes les propriétaires de 60% des actions et
eux? Ils
investissent 40%. La récupération de leur
investissement est garanti
légalement et constitutionnellement mais le droit des
usagers est
également garanti.
Amy
Goodman :
Vous parlez de l’industrie et du rôle des
corporations. Je voudrais
considérer comment vous faites face aux droits
indigènes, les droits
environnementaux, et les conciliations avec les corporations. Allons
à
San Cristobal, la mine, les protestations de la semaine
dernière. S’il
vous plaît dites-nous ce qui se passe là-bas. Les
mineurs ont fermé la
zone. Ils demandent que Sumitomo, la compagnie japonaise, leur paie des
réparations, et qu’elle arrête de
contaminer l’eau. Je crois qu’elle
utilise 6.000 litres d’eau par seconde. Que fait le
gouvernement ? Que
faites vous, président Morales ?
Président
Evo Morales :
Tout d’abord, c’est une concession
légale, garantie et légalement
blindée par le gouvernement précédent.
C’est l’héritage des
gouvernements néolibéraux. Mais aussi les
communautés de la zone
doivent savoir que l’entreprise a convenu avec elles. Ils ont
créé une
fondation pour donner de l’argent aux membres des
communautés et
d’expérience ce genre d’accord, de
chantage ou de prébende ne sont pas
la solution. Ils ne sont pas éternels. Et les coupables ce
sont les
dirigeants de ces communautés qui ont accepté,
ils se sont mis d’accord
avec l’entreprise. Mais il y a également une
composante politique.
Quand la droite a perdu aux élections municipales, le jour
suivant avec
les conflits salariaux ont commencé. Si nous voulons
résoudre l’affaire
San Cristobal il faut changer la loi. Le code de l’industrie
minière.
Et sûrement faire une profonde révision du contrat
de la concession.
Mais hier ou avant-hier le conflit s’est terminé.
Ils l’ont levé les
barrages et on a discuté vraiment. Mais parfois ce type de
conflits
sont utilisés politiquement à un niveau local.
Amy
Goodman :
Le Département d’État (US) a
émis un
avertissement que les gens ne devaient pas voyager dans cette zone.
Président
Evo Morales :
Non... Il se trompe... On entend toujours ce genre de campagne de la
part du Département d’État des
États-Unis. Un petit tronçon de la route
est bloqué. Mais je le répète, il a
été débloqué il y a deux
jours. Et
après on m’a informé que plusieurs
touristes avaient été bloqués, mais
les communautés, d’une manière
responsable ont fait passer les
touristes. Imaginez-vous, cette manière qu’a le
Département d’État des
États-Unis de sataniser. Et nous nous disons de
manière humaine : les
compagnons ont un droit. Bien que ce soit politisé. Bien
qu’ils ne se
rendent pas compte que les responsables de ces accords ont non
seulement été les gouvernements
précédents mais également leurs
dirigeants, leurs ex-dirigeants communs. Il y avait un double accord,
les entreprises avec l’État et les entreprises
avec les dirigeants du
mouvement paysan de la région. Je sais ça parce
que j’étais là-bas et
j’ai discuté avec les compagnons. S’ils
ont fait une fondation, je ne
sais pas combien de millions de dollars par an ils investissent. Cela
ne veut pas dire réduire des responsabilités,
bien sûr. C’est notre
responsabilité de chercher des solutions. Et je disais il y
a un moment
qu’il y a des contrats bien blindés, nous sommes
responsables de ces
contrats, mais maintenant : Comment les changer ?
Amy
Goodman :
Passons au sujet principal. L’économie bolivienne
est basée à 20 ou
30%, sur les industries extractives comme l’argent, le zinc.
On
commence maintenant à réellement extraire du
lithium. La Bolivie a les
principales réserves au monde de lithium, une source
alternative
incroyable d’énergie pour les batteries, pour les
voitures électriques.
Comment conciliez-vous les industries extractives avec
l’environnement,
la Pachamama le mot indigène pour la Terre-Mère,
et avec les droits
indigènes ?
Président
Evo Morales : Là
nous avons besoin d’études poussées. Si
nous voulons défendre la
Terre-Mère et les Droits de la Terre-Mère, tout
projet
d’industrialisation de ressources naturelles doit respecter
la
régénération de sa
biocapacité. Avec plusieurs minerais, par exemple,
avec des minerais non renouvelables, ce sera difficile. Maintenant, le
débat interne c’est que faire, parce
qu’avant, la Bolivie vivait de
l’étain comme État colonial. Maintenant
nous vivons du gaz et du
pétrole. Nos ressources économiques viennent
fondamentalement du gaz et
du pétrole et en second lieu de l’industrie
minière. Dans quelle mesure
l’industrialisation de ces ressources peut-elle permettre le
respect de
la Terre-Mère? À partir de la
conférence (le Sommet de Cochabamba),
nous devons tous changer. Mais quand on nous dit que le lithium serait
une énergie alternative, je demande : comment traiter la
saumure ? Et :
sur quelle période cela peut-il se
régénérer ? Certains me disent 50 ou
100 ans. Je serais heureux si c’était 50 ans parce
que nous avons
environ 10 000 Kms carrés de salar. C’est immense.
De la manière dont
nous avançons. Mais si c’est
régénéré, nous serions
satisfaits, d’avoir
une solution de remplacement pour ces énergies qui font tant
de mal à
la Terre-Mère.
Amy
Goodman : Ce
sont les thèmes qui ont été
traités par la table 18, le groupe qui n’a
pas été inclus au sommet, mais même
quelqu’un sur la scène de la
cérémonie d’ouverture, Faith Gemmill du
nord de l’Alaska, a dit qu’il
fallait : “Maintenir le charbon sous terre, maintenir le
pétrole sous
terre.” Qu’est-ce vous répondez
à cela, à l’arrêt des
extractions ?
Président
Evo Morales :
Voulez-vous que je dise la vérité sur la table 18
? C’est l’affaire des
ONG et des fondations. Les frères indigènes, ceux
qui jamais, on eux
pour la première fois une table indigène
à la 17. Comme il s’agit de
justifier des investissements des ONG, les "ONGistes" ont
établi la
table 18 pour justifier ces investissements. Maintenant, le
débat
interne. Ces fondations, ONG, ont dit : “Amazoníe
sans pétrole”. Alors
qu’est-ce qu’ils me disent que je vais couvrir les
puits de pétrole,
les puits de gaz. La Bolivie... de quoi va-elle vivre ? Soyons
réalistes. Mais comme ces fondations et ONG justifient avec
cette
classe, en utilisant quelques frères indigènes.
Je n’accuse pas les
frères indigènes. Ils utilisent les dirigeants
pour justifier leurs
bons salaires, leur expérience. J’ai
écouté hier, dans la nuit,
jusqu’à
deux heures du matin avec La Vía Campesina. Vous connaissez
La Vía
Campesina. Je suis fondateur. Et les uns disent, me disent
qu’ils ne
construisent pas de routes, les autres me disent : “Tu ne
réprimes
pas”. Avant-hier, quand il était ici
derrière, à Colomi, j’ai
annoncé
que nous allions construire une route double voie d’Oruro
à Colomi. Ce
projet est le plus applaudi par les compagnons de base, les gens qui
ont besoin d’avoir un accès. Si nous regardons
dans ce coin, tout près,
dans El Alto, chaque jour ont me demande un petit barrage
d’eau. Alors,
les ONG et quelques dirigeants disent : "Non", quand ils
n’interprètent
pas les nécessités de leurs bases.
C’est vrai. Et c’est pourquoi, hier
soir c’était comme une confrontation avec La
Vía Campesina.
Amy
Goodman : il nous reste seulement trente secondes. Votre
espoir pour ce sommet ?
Président
Evo Morales :
Je voulais vous expliquer ... – je n’aime pas
sentir qu’il n’y a pas de
liberté d’expression dans l’expression
de leur préoccupation. Mais je
veux qu’ils sachent que c’est vrai. Et
qu’hier soir avec La Vía
Campesina, nous avons eu une confrontation. Ils sont restés
muets à
propos des barrages, à propos des routes. Maintenant je suis
l’ennemi
des thermo-électriques, par exemple, mais pas des
hydroélectriques.
Regardez ... sinon ...
Notes
:
[1]
Étant donné la culture de la consommation de la
feuille de coca dans
les Andes, qui est à la foi un élément
symbolique et sacré fort et un
élément quotidien de la pharmacopée
locale (voir note suivante).
[2] Dans les Andes la feuilles de coca a toujours
été utilisée pour
pouvoir tenir en accomplissant des tâches dures,
accentuées par le
manque d’oxygène, le tout dans un milieu
plutôt aride et avec peu de
nourriture disponible. La coca est parfaite dans ce rôle, ses
propriétés vasodilatatrices et excitantes qui
permettent à la fois
d’augmenter l’apport d’oxygène
et de réduire les sensations de fatigue,
de soif et de faim.
[3] Et accessoirement on peut aussi considérer que le
narcotrafic est
lié aux réseaux de vente d’armes, bien
pratique pour vendre de
l’armement discrètement et/ou avoir
accès à un flux alternatif d’argent.
[4] Dans l’année 2009 les États-Unis
ont signé un accord avec le
président colombien Uribe pour
l’établissement de 7 bases militaires US
sur le sol colombien. Le rayon d’action de ses bases et
à l’échelle du
continent sud américain, il pourrait presque atteindre
l’Afrique de
l’Ouest. De plus en 2010 les États-Unis ont ouvert
une seconde base
militaire au Honduras, pays "repris en main" par l’oligarchie
locale et
l’aide militaire et politique directe des
États-Unis.
[5] Cocalero : cultivateur de coca.
Source : Democracy Now,
Traduction de Primitivi
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Colombie
: les droits humains doivent être
une priorité
pour les candidats de la campagne électorale |

Amnesty International, le 10 mai 2010
Amnesty International a exhorté les candidats à
l’élection
présidentielle de Colombie à faire des droits
humains une priorité de
première importance pour le scrutin du 30 mai.
Le candidat indépendant Antanas Mockus et l’ancien
ministre de la
Défense Juan Manuel Santos font partie des principaux
candidats en lice
pour succéder au président Álvaro
Uribe.
« Il est choquant que, dans un pays où les droits
humains sont
régulièrement bafoués par les
différentes parties au conflit armé qui
sévit depuis 45 ans, cette question n’ait pas eu
la priorité qu’elle
méritait », a déclaré Susan
Lee, directrice du programme Amériques
d’Amnesty International.
Soucieux de placer les droits humains au premier rang des
préoccupations lors de ce scrutin, les participants
à la campagne
nationale et internationale pour le droit de défendre les
droits
humains et les membres de l’organisation Medios para la Paz,
deux
organisations de la société civile, ont
invité les candidats à la
vice-présidence à prendre part à un
débat sur les droits humains qui se
tiendra le 5 mai à Bogotá, en Colombie.
Amnesty International a d’autre part condamné le
fait qu’aucune des
parties – qu’il s’agisse de groupes de
guérilla, de paramilitaires ou
des forces de sécurité – n’a
protégé les civils des conséquences du
conflit sur le plan des droits humains, ni respecté leur
droit de ne
pas se laisser entraîner dans les hostilités.
Le gouvernement actuel du président Álvaro Uribe
a été critiqué pour
son « refus obstiné et absurde de
reconnaître l’existence d’un conflit
armé » et sa persistance à nier que
« la Colombie continue de souffrir
de graves problèmes dans le domaine des droits humains et de
l’humanitaire ».
« Chaque année, des centaines de milliers de
civils sont forcés de
quitter leur foyer en raison du conflit ; de nombreux autres sont
menacés, enlevés, tués ou victimes de
disparition forcée, » a
déclaré
Susan Lee.
« La situation des populations indigènes, des
Afro-Colombiens et des
communautés de petits fermiers, ainsi que celle des
défenseurs des
droits humains, sont particulièrement précaires.
Nous avons besoin de
savoir le plus rapidement possible ce que le nouveau
président pense
faire pour y remédier. »
Malgré quelques avancées dans certaines
enquêtes judiciaires fortement
médiatisées sur des atteintes aux droits humains,
l’impunité demeure la
règle et la plupart des auteurs
présumés n’ont jamais
été identifiés,
et encore moins jugés et condamnés.
« La triste vérité est que la grande
majorité des auteurs d’atteintes
aux droits humains continuent à échapper
à la justice, tandis que
beaucoup de personnes qui se sont impliquées dans des
enquêtes
importantes où l’on a constaté quelques
avancées – avocats, procureurs,
juges, témoins – sont
régulièrement menacées ou
tuées. »
« Le nouveau gouvernement doit savoir clairement ce
qu’il va faire pour
que les victimes et leurs familles obtiennent la justice
qu’elles
méritent. »
« Nous espérons que tous les candidats
déclareront sans ambiguïté que,
s’ils sont élus, ils auront la volonté
politique de mettre fin à ces
décennies d’atteintes aux droits humains et de
surmonter l’obstacle
endémique et honteux de l’impunité,
grâce auquel ces violences se
poursuivent encore à ce jour », a
déclaré Susan Lee.
Si aucun des candidats n’obtient plus de 50 % des suffrages
lors du
scrutin de mai, un second tour aura lieu en juin. Le nouveau
gouvernement entrera en fonction en août.
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Colombie
: la situation des victimes du conflit
n'intéresse que peu les médias |
Par le Comité
international de la Croix-Rouge, le 26 avril 2010
Depuis que le conflit armé s'est
déplacé des zones densément
peuplées
vers les régions plus reculées, la situation des
dizaines de milliers
de personnes qui continuent de subir les attaques
n'intéresse
pratiquement plus les médias, a indiqué
aujourd'hui le Comité
international de la Croix-Rouge (CICR).
« Le sud et la côte Pacifique sont parmi les
régions les plus touchées
par le conflit armé », a
précisé Christophe Beney, chef de la
délégation du CICR en Colombie. « Les
communautés indigènes et
afro-descendantes en particulier sont durement frappées.
Beaucoup de
gens sont contraints de fuir, car leur vie est menacée.
D'autres se
font tuer, blesser ou sont victimes de violences sexuelles. Et encore,
la plupart des tragédies qui se produisent dans ces
régions ne sont pas
révélées par les médias.
»
Ces dernières années, les
délégués du CICR ont
enregistré quelque 800
signalements de violations du droit international humanitaire, dont 28
cas d'homicide, 61 attaques dirigées directement contre des
civils et
84 cas de disparition de personne en relation avec le conflit
armé. Les
menaces de mort sont une des raisons pour lesquelles des personnes ont
été contraintes de fuir de chez elles. L'an
dernier, le CICR a payé les
frais de transport d'environ 400 personnes qui avaient reçu
de telles
menaces, afin de leur permettre d'aller se réfugier en lieu
sûr.
« Nous étions à la maison quand soudain
nous avons entendu des coups de
feu », explique Maria, qui s'est récemment enfuie
de chez elle, dans le
sud du pays. « Quand nous avons regardé dans la
cour, nous avons vu le
corps de mon frère qui gisait par terre. Ils nous ont
laissé
l'enterrer, puis ils nous ont forcés à quitter le
village. Qui sait ce
qu'il serait advenu de nous si nous avions décidé
de rester. » Lorsque
des gens comme Maria doivent partir de chez eux, ils perdent
généralement tout ce qu'ils possèdent.
« Si nous parvenons à limiter le nombre de
violations du droit
international humanitaire, nous réduirons le nombre de
personnes qui se
sentent obligées de fuir pour leur
sécurité », explique Christophe
Beney. « Le nombre de personnes
déplacées en Colombie n'a cessé de
croître au fil des années. Désormais,
le pays en compte officiellement
plus de 3,3 millions, l'un des chiffres les plus
élevés au monde. » Se
sentant menacés par les affrontements, très peu
de déplacés osent
rentrer dans leur village. En 2009, le CICR a fourni des colis
alimentaires ou des bons d'achat, des articles ménagers
essentiels et
des assortiments d'articles d'hygiène à plus de
50 000 personnes
déplacées.
Pour répondre aux besoins les plus pressants, le CICR
concentre son
action dans une vingtaine de régions du pays
particulièrement touchées
par le conflit armé, où les organismes
gouvernementaux et d'autres
organisations humanitaires sont peu présents. Dans les
régions isolées,
il permet aux communautés de trouver des moyens d'existence
stables
grâce à des projets
générateurs de revenus. Il s'efforce
également de
leur donner un meilleur accès aux services essentiels tels
que soins de
santé, approvisionnement en eau et assainissement, ainsi
qu'à
l'éducation.
Ces dernières années, les engins explosifs
artisanaux et les restes
explosifs de guerre se trouvant à proximité des
habitations et des
terres agricoles ont constitué une menace croissante pour
des milliers
de personnes ; en effet, ils ont fait de nombreux morts et
blessés
graves et créé d'importantes
difficultés économiques. En 2009, le CICR
a modernisé des points de collecte d'eau, des dortoirs
scolaires et
d'autres infrastructures importantes dans des régions
sûres de manière
à aider la population à rester loin des zones
infestées d'engins
explosifs. Il s'est aussi attaché à aider les
familles d'agriculteurs à
mener de nouvelles activités agricoles dans ces
régions sûres.
Source : http://www.cicr.org/web/fre/sitefre0.nsf/html/colombia-news-260410
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Résolution
sur la situation des femmes
et des communautés face
à la
militarisation croissante
et à l’intervention des
Etats-Unis en Colombie |
Fédération Internationale des Droits de
l'Homme,
le 6 mai 2010
Réunie en son XXXVIIe Congrès mondial
à Erevan, Arménie, du 6 au 10
avril 2010, la Fédération internationale des
ligues des droits de
l’homme (FIDH) fait part de son extrême
préoccupation quant à la
situation, les conditions de vie et le sort des femmes et des
communautés résultant de l’intense
militarisation du territoire
-préoccupation encore renforcée par la
présence de bases militaires des
Etats-Unis en Colombie, porteuse de risques d’escalade du
conflit dans
le pays et d’augmentation des tensions dans la
région.
CONSIDÉRANT, Que depuis l’année 2002,
date de mise en place du premier
gouvernement du Président Alvaro Uribe Vélez, est
appliquée une
politique dénommée politique de
sécurisation de la démocratie niant
l’existence d’un conflit social et d’un
conflit armé en Colombie et
qui, qualifiée de lutte contre le terrorisme, est
à l’origine de la
méconnaissance du príncipe de la distinction
à établir entre civils et
combattants, de l’implication de la population civile
à travers des
programmes comme la constitution d’un réseau
d’informateurs et de
“milices populaires” (soldados de mi pueblo y
soldados por un día) et,
par conséquent, de l’affaiblissement des
príncipes consacrés dans le
droit international humanitaire et ratifiés par
l’Etat colombien.
Que le constat est d’autant plus préoccupant que
le gouvernement
colombien prend des décisions qui mettent à mal
la souveraineté
nationale en raison de l’ingérence directe des mal
nommés “accords de
coopération internationale pour la
sécurité” qui autorisent la
présence
et l’implantation de troupes américaines dans sept
territoires de
Colombie à travers la cession d’un nombre
équivalent de bases aériennes
et militaires à Palanquero (au centre), à Apiay
(à l’est) et à Malambo
(Nord Caraïbes) ; en raison aussi des effectifs accueillis
(800
militaires et 400 mercenaires jouissant d’une totale
immunité) dans les
forteresses militaires de Tres Esquinas (Sud) et de Tolemaida (centre)
et dans les bases navales de Cartagena (Nord Caraïbes) et de
Bahia
Málaga (Pacifique ouest) – tout ceci constituant
un abandon de
souveraineté et l’institutionnalisation de
l’impunité au regard des
violations perpétrées contre la
législation, la constitution et les
droits de l’Homme comme dans le cas de soldats
nord-américains déjà
impliqués dans exactions, certaines liées au
trafic de stupéfiants.
Que la militarisation croissante des territoires, de la vie civile et
des corps des femmes en Colombie ont eu pour résultats : une
augmentation des violations des droits humains, une intensification du
conflit armé y compris des exécutions
extrajudiciaires (sur un total de
plus de 1600 cas dénoncés, plus de 800
l’ont été au cours des six
dernières années), la mise en accusation des
défenseurs des droits de
l’Homme et la persécution ourdie par les services
de renseignement à
l’encontre d’organismes d’action sociale
et de leurs dirigeants.
Que la militarisation multiplie et renforce les violences
exercées à
l’encontre des femmes, la logique de guerre montrant comment
la vie et
le corps des femmes sont désormais
considérés par les diverses forces
politiques, militaires et économiques qui
s’affrontent en Colombie
deviennent des moyens pour contrôler et exercer le pouvoir.
Le corps
est devenu territoire de violence.
Que l’impact disproportionné du conflit
armé sur les femmes
colombiennes a été amplement reconnu et
dénoncé par
l’arrêté 092 de la
Cour constitutionnelle, et que la situation des victimes
témoigne de la
gravité des actes de violence spécifiquement
perpétrés à l’encontre des
femmes dans le pays ; dans cet arrêté, la haute
Cour fait une analyse
complète des différentes formes de violence
infligées aux femmes en
estimant qu’elles sont exacerbées dans un contexte
de conflit armé.
Que de nombreuses femmes colombiennes, du plus profond de leurs
entrailles et avec toute la force de leur raison et de leur
capacité à
s’organiser et à se mobiliser, ainsí
que par amour pour leurs fils,
leurs filles et leur pays, voient se dérouler avec
préoccupation ce
processus d’abandon de la souveraineté du
territoire national –
processus qui se transforme en champ de bataille pour
résoudre des
conflits internes et se traduit par la mise en place de
stratégies
politiques, économiques et militaires contre un continent
qui cherche à
construire son propre destin.
Que l’installation des sept bases militaires
dotées d’une présence
nord-américaine en Colombie fait partie d’une
décision politique
géostratégique pour permettre de
contrôler l’orbite géostationnaire qui
tourne directement au-dessus de l’équateur
terrestre. Dix pays dans le
monde ont des orbites géostationnaires : le
Brésil, la Colombie,
l’Équateur, le Congo, le Gabon,
l’Indonésie, le Kenya, la Somalie,
l’Ouganda, le Zaire la RDC – ce qui explique
l’intérêt du Pentagone qui
cherche à consolider sa présence en Colombie .
Que l’installation de bases militaires
nord-américaines en Colombie
constitue une stratégie militaire de la part des
États-Unis d’Amérique
pour contrôler l’Amérique du Sud et,
notamment, afin : 1) d’y conduire
des études et mises en valeur stratégiques ; 2)
d’exercer un contrôle
sur la population et la propriété du sol ; 3) de
veiller à l’intégrité
du territoire et à la construction
d’infrastructures à son profit ; 4)
d’exercer un contrôle militaire sur le
développement, 5) ainsi que sur
la fiscalité et les intérêts financiers
; 6) de conclure des accords
commerciaux selon ses propres règles 7) d’y mener
des actions
humanitaires pour écouler sa production.
Que la présence militaire nord-américaine dans
les conditions
d’immunité décrites plus haut est
préoccupante dans les bases
colombiennes, qu’elle a en outre des effets très
négatifs sur le
respect des droits humains et de la paix en Colombie et porte
préjudice
à la stabilité de la région.
Que l’aide apportée pour renforcer la
capacité des institutions
colombiennes à mener des opérations de
renseignement et d’espionnage,
ainsi que l’appui logistique fourni pour améliorer
la “sécurité” dans
le contexte actuel de gigantesques opérations de
renseignement menées
illégalement, constituent une menace pour la
démocratie et les
garanties et libertés individuelles
déjà fortement diminuées.
Que l’installation de bases militaires
nord-américaines augmente les
risques de violence à l’encontre des femmes, des
jeunes et des jeunes
filles comme en témoignent les actes de viol commis sur des
jeunes
filles mineures par des militaires nord-américains relevant
du Plan
Colombie, ainsi que le tournage de vidéos à
caractère pornographique
montrant des jeunes filles mineures de la région avec des
militaires et
techniciens nord-américains.
DÉCIDE, d’exiger de l’Etat colombien
qu’il mette fin aux exécutions
extrajudiciaires et à l’impunité de ces
actes, qu’il poursuive et
sanctionne leurs auteurs.
D’exiger du gouvernement colombien qu’il fasse
connaître dans son
essence et sa totalité l’accord de
coopération militaire signé entre la
Colombie et les États Unis d’Amérique.
De constituer une commission composée de
représentants de la société
civile et de la communauté internationale chargée
d’évaluer l’impact de
la présence des bases américaines sur les droits
des femmes, le(s)
territoire(s) et la région.
D’exiger du gouvernement national qu’il respecte
ses obligations
internationales visant à protéger les femmes et
les jeunes filles
contre tout type de violence et à mettre un terme
à l’impunité des
crimes liés aux violences spécifiquement commises
à l’égard des femmes.
D’exiger des gouvernements de la Colombie et des
États-unis d’Amérique
qu’ils fournissent publiquement d’amples garanties
concernant
l’utilisation de ces bases pour confirmer qu’elles
ne serviront pas de
tête de pont pour agresser un autre pays américain.
D’exiger la transparence du processus afin que les conditions
de
l’immunité juridique dont jouissent les militaires
et les mercenaires
nord-américains ne soient pas stipulées dans des
clauses
confidentielles exemptes de tout système de
contrôle démocratique. Sur
la base de ce príncipe, nous pouvons préconiser
une limitation de
l’immunité qui garantisse que les violations
graves des droits de
l’homme et du droit international humanitaire ne restent pas
exclues de
la juridiction colombienne. Cette clause devra mettre
l’accent sur la
non immunité des délits à
caractère sexuel étant donné la
récurrence et
la gravité de ce type de conduite chez les troupes
étrangères. Il
faudra aussi envisager le cas d’autres délits qui,
même s’ils ne
constituent pas des violations des droits de l’homme,
pourraient
équivaloir à nier le droit
d’accès à la justice pour les personnes
en
cause si les auteurs de ces délits étaient
assurés de jouir de
l’immunité.
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Résolution
sur les défenseurs
des droits de
l’homme en Colombie |
Fédération Internationale des Droits
de l'Homme,
le 6 mai 2010
La Fédération internationale des ligues des
droits de l’Homme (FIDH) a
tenu son 37ème Congrès Mondial, à
Erevan, Arménie, du 6 au 10 avril
2010 ; la situation complexe à laquelle se trouvent
confrontés les
défenseurs des droits de l’homme en Colombie a
été abordée lors de ce
congrès, et,
ATTENDU QUE, depuis ces dix dernières années,
plusieurs autorités et
organismes à l’échelle internationale
ont notamment fait part de leur «
… profonde préoccupation face au climat
d’intimidation et
d’insécurité
dans lequel les défenseurs des droits de l’homme
en Colombie
travaillent ». La recrudescence des graves violations contre
leurs
droits démontre que les recommandations émises
par Madame Hina Jilani,
ancienne Représentante Spéciale du
Secrétaire-Général des Nations unies
sur la situation des défenseurs des droits de
l’Homme, lors de sa
visite il y a plus de sept ans n’ont pas
été mises en œuvre, et qu’en
outre le Gouvernement a agi contre celles-ci.
Depuis 2004, un groupe spécial de renseignement
stratégique (appelé «
G3 ») opère au sein même du Bureau de
renseignement du DAS (Département
Administratif de la Sécurité), qui
dépend directement du président
Álvaro Uribe Vélez. Le G3 a lancé la
plus grande opération de
l’histoire du pays d’espionnage illégal
et de suivis méticuleux du
travail des défenseurs des droits de l’Homme et
des organisations. Sur
la base d’informations obtenues de manière
illégale, des listes de
syndicalistes et de défenseurs des droits de
l’Homme devant être
assassiné – et qui effectivement le furent, ont
été fournies à des
groupes paramilitaires et des opérations de «
sécurité offensive » ont
été menées, telle que des attaques,
montages judiciaires, des menaces
de mort et des violations répétées
commises contre des droits des
défenseurs des droits de l’Homme et leurs proches.
L’opinion publique a eu connaissance dernièrement
des
rapports des
services de renseignement dressés par les «
Regionales de
Inteligencia
Militar » (RIME, ou Unités régionales
de
renseignement militaire) de
l’Armée, où il est fait
référence de
manière généralisée aux
chefs de
file des organismes et mouvements sociaux et aux défenseurs
des
droits
de l’homme en tant que personnes insurgées. Cette
pratique
illégale des
RIME de l’Armée a été
réitérée dans les rapports du
Département
de
Antioquia et du Département de Caquetá,
élaborés tant en 2008 qu’en
2009.
Sur la base des rapports des services de renseignement, et des nombreux
témoignages rémunérés et
fournis par le Réseau des Informateurs au sein
de chaque Brigade Militaire, des dizaines de personnes ont
été jugées
par le Ministère public et placées en
détention lors d’opérations
militaires médiatiques, comme ce fut le cas pour CARMELO
AGÁMEZ, membre
du Movice (Movimiento Nacional de Víctimas de Estado, ou
Mouvement
national des victimes de l’État), de la Section de
Sucre, et de MARTÍN
SANDOVAL, Président du Comité permanent pour la
Défense des droits de
l’Homme en Arauca.
Depuis la mi-février 2009, dans plus de 30 villes et
plusieurs régions
du pays, des menaces de mort et des pamphlets menaçant ont
été
largement diffusés, dans le dessein de contrôler
par la terreur les
conflits sociaux engendrés par la crise sociale et le
chômage
grandissant dans les secteurs les plus marginalisés du pays.
Les
opérations de « nettoyage social » ne
cessent d’augmenter, ayant pour
cibles les jeunes marginalisés issus de nombreux secteurs.
Le mouvement
communal a dénoncé le fait que jusqu’au
mois de mai, près de 100
dirigeants communaux ont été
assassinés à travers tout le pays, et
qu’ils ont été les victimes de
multiples intimidations émanant de
pamphlets menaçants diffusés dans
différentes régions du pays. La
plupart de ces menaces sont le fait de groupes paramilitaires tels que
: les Águilas Negras (les Aigles noirs), les Autodefensas
Unidas de
Colombia (les Autodéfenses unies de Colombie), mettant en
évidence une
reconfiguration militaire des mouvements paramilitaires et leur
positionnement en tant qu’acteurs majeurs de la
stratégie de
gouvernance urbaine dans le cadre de la politique de «
Sécurité
Démocratique ».
Au fil de cette année, les défenseurs des droits
de l’homme et leurs
organisations ont continué d’être la
cible d’attaques, notamment à
travers des dégâts causés à
leurs sièges sociaux et des vols
d’informations. Il semblerait qu’il existe une
corrélation entre le
nombre de croissant d’attaques contre les sièges
sociaux, les
défenseurs eux-mêmes et les vols
d’informations, et les abondantes
récompenses offertes par le ministère de la
Défense à quiconque fournit
du matériel informatique, des disques durs, des
clés USB et autres
supports d’ « information servant de fondement pour
la continuité des
travaux d’information et la planification
ultérieure d’opérations »
(Directive secrète N° 029 de 2005,
émanant du ministère de la Défense,
Cap. 4. Citation exacte.).
Sous le gouvernement du Président
Uribe, les
défenseurs des droits de l’Homme ont dû
travailler dans un climat
d’attaques permanentes et de de campagnes publiques de
dénigrement de
la part du président lui-même, du
vice-président et d’autres hauts
fonctionnaires du gouvernement qui cherchent à monter la
société contre
eux, et à présenter publiquement les
défenseurs comme étant des «
ennemis, à savoir des complices ou alliés du
terrorisme ». Dès les
premières heures de son gouvernement, le
président Uribe a désigné les
défenseurs des droits de l’Homme comme des
« politiques qui au bout du
compte servent le terrorisme, et qui en toute
lâcheté se cachent sous
le drapeau des droits de l’Homme » (8 septembre
2003).
Un très grand nombre de défenseurs des droits de
l’Homme vivent des
situations de risques reconnues et se retrouvent sans protection,
conséquence directe d’ordres passés
visant à
les priver entièrement de
leurs droits et garanties leur permettant de travailler. La
privatisation des services de protection et la commercialisation des
services de prévoyance et de sécurité
contenus
dans le projet de Loi
sur les Sociétés privées de
sécurité
prévoient que l’État se
libère de
sa responsabilité directe en matière de
protection des
défenseurs,
journalistes, syndicalistes et leaders sociaux en situation de risque,
permettant ainsi à des entreprises privées, y
compris des
entreprises
étrangères, de pénétrer ce
marché
que représentent les services de
protection. Non seulement l’État n’a pas
mis en
œuvre les
recommandations de la Représentante Spéciale Hina
Jilani
mais il agit à
l’encontre de celles-ci dans presque tous les domaines.
Malgré les recommandations
répétées
préconisées par des organisations
internationales à l’État colombien pour
la protection de la défense des
droits humains, les femmes défenseurs continuent de faire
l’objet de
menaces, d’attaques et de harcèlements, portant
atteinte à leur
intégrité mais également à
leur travail de défense des droits humains.
Face à ces attaques, la situation
d’impunité est alarmante. Il n’y a
aucune politique de prévention et de sanction efficace pour
garantir
les droits fondamentaux des femmes défendant les droits
humains même
lorsque le risque d’atteinte à leur vie et
à leur intégrité est
élevé,
persistant et systématique.
Cette situation grave et persistante à l’encontre
des femmes défenseurs
en Colombie a également été
constatée par la Cour constitutionnelle,
pris des injonctions pour surmonter, à tout le moins, les
faiblesses
suivantes : (i) l’absence de réponse
adaptée en matière de protection
de la vie, de la sécurité personnelle et de
l’intégrité des leaders des
populations déplacées1 ; (ii) les dangers
spécifiques pour les femmes
qui travaillent dans des organismes sociaux ou des organisations de
promotion des droits de l’Homme dans des zones
touchées par le conflit
; (iii) les lacunes de La Loi 975 de 2005 quant à la
protection
suffisante et adaptée pour les victimes et les
témoins au cours des
enquête, en violations des standards et obligations en la
matière. Face
aux constatations, recommandations et ordres
précédents, la réponse de
l’État colombien est toujours insuffisante, en
particulier, quant au
manque de mesures de prévention, de protection et de
sanction qui
favorisent l’augmentation des conditions de violence contre
les femmes
défenseurs des droits humains.
Il convient de : Exhorter le Président de la
république et les hauts
fonctionnaires du gouvernement, en vertu des Directives
Présidentielles
(07 de 1999) et Ministérielles (09 de 2003), à
mettre fin à la
stigmatisation systématique des hommes et des femmes
défenseurs, à
faire une déclaration publique et formelle dans laquelle ils
reconnaitront l’importance du travail légitime des
hommes et des femmes
défenseurs et leur contribution indispensable au
renforcement de la
démocratie et de l’État de droit.
Exiger que le gouvernement national cesse les activités
d’espionnage
illégal contre les défenseurs, qu’il
cesse le recueil illégal
d’information de la part des différents services
de renseignement et
que l’on garantisse l’accès des hommes
et des femmes défenseurs à
l’information complète contenue dans les archives
des renseignements,
et que le Ministère Général de la
Nation avance de manière rapide et
impartiale dans les enquêtes en cours contre tous les
fonctionnaires
impliqués dans les activités illégales
de la DAS, pour déterminer ceux
qui ont donné les ordres mais aussi ceux qui les ont
exécutés.
Exiger que cesse la pratique des poursuites contre les femmes et les
hommes défenseurs basées sur des rapports des
renseignements et des
déclarations d’informateurs ou de
démobilisés faites en échange de
bénéfices juridiques ou économiques ;
De même, que s’ouvrent des
procédures pénales et disciplinaires contre tout
procureur de la
république ou tout autre fonctionnaire qui aurait
violé la loi en
enquêtant sur les hommes et les femmes défenseurs
en se basant sur des
indices faux ou infondés, et que soient
prononcées les sanctions
correspondantes.
Exiger que les programmes de protection du Ministère de
l’Intérieur
soient mis en place conformément à la
jurisprudence de la Cour
Constitutionnelle à cet égard, et que toute
réforme sur ces programmes
soit effectuée au travers de consultations directes avec les
défenseurs
des droits humains pour s’assurer que les changements
correspondent aux
nécessités de ceux-ci dans toutes les
régions du pays, en particulier :
* Exiger que l’on mette fin à
l’impunité et que
l’indépendance
judiciaire soit garantie. Que l’Union Nationale des Droits de
l’Homme
et du Droit International Humanitaire du ministère public
(Unidad
Nacional de Derechos Humanos y Derecho Internacional Humanitario de la
Fiscalía) recherche et centralise toutes les plaintes
déposées pour
menaces et violations contre les hommes et femmes
défenseurs, identifie
la chaine de responsabilité de commandement de crimes et
sanctionne les
responsables. Le ministère public devra divulguer
périodiquement et
publiquement les résultats de ses recherches ; Que soient
abrogées les
conventions entre le Ministère Général
de la Nation et les organismes
de renseignements militaire et politique (RIME, DINTE et DIPOL) pour
éviter qu’ils ne s’octroient des
facultés de police judiciaire envers
les services de renseignement et interdire l’utilisation des
rapports
de renseignements dans les procédures judiciaires.
* Exiger le démantèlement réel des
groupes paramilitaires et mettre fin
aux liens avec les agents d’État, et
également juger et sanctionner les
agents d’État ayant participé, soutenu
ou toléré le fait que des
groupes paramilitaires aient commis de graves violations des droits de
l’Homme, y compris contre des hommes et des femmes
défenseurs.
* Exiger de l’État colombien des garanties pour le
travail que
réalisent les femmes dans la défense de leurs
droits, des enquêtes et
des sanctions concernant les faits de violence, y compris les violences
sexuelles faites aux femmes et des garanties pour leur travail de
défense de leurs droits humains.
* Exiger de l’État colombien qu’il
mettre fin, de manière immédiate,
aux faits de violence contre les femmes, et en particulier les femmes
défenseurs, qui sont dus à la
responsabilité des agents de l’État.
* Exiger de l’État colombien qu’il
respecte la totalité des ordres
issus de l’Auto 092 (prévention et protection des
femmes en situation
de déplacement)
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Bolivie
: Le poulet aux hormones
rend les médias approximatifs |
Margaux Collet, Jeudi 29
Avril 2010
Vous l'avez sûrement lu partout: le poulet aux hormones rend
homosexuel, selon Evo Morales. Sauf que le président
bolivarien n'a pas
dit ça.
«Le poulet aux hormones rend chauve et homosexuel, selon Evo
Morales.»
Le titre de plusieurs articles parus ces derniers jours rend perplexe,
fait sourire, puis incite à cliquer. Mais qu'est-ce qui a
bien pu
traverser l'esprit du président bolivien pour en arriver
à une telle
corrélation? Jusqu'ici plutôt populaire et
chouchouté par les médias,
Evo Morales a en pris pour son grade, à la suite d'un
discours prononcé
le 20 avril lors de la Conférence sur le climat de
Cochabamba, en
Bolivie.
Cette réunion de mouvements sociaux avait
reçu peu d'échos
dans la presse européenne jusqu'à ce que, le 21
avril, tombe la fameuse
dépêche titrée d'abord par l'AFP
«Bolivie: la malbouffe rend chauve
selon Morales, l'opposition s'indigne». Dès le
premier paragraphe, on
apprend que: «L'opposition en Bolivie s'est
indignée mercredi des
"légendes urbaines" propagées par le
président Evo Morales, qui a
accusé la veille la malbouffe occidentale de provoquer la
"calvitie" et
des "déviances" sexuelles.» Information reprise
par de nombreux médias
et blogs sous le titre: «Le poulet aux hormones rend chauve
et
homosexuel, selon Evo Morales.»
Sur
Liberation.fr par exemple, on peut notamment lire:
L'opposition bolivienne et les organisations homosexuelles ont
critiqué
mercredi les propos du président Evo Morales, qui a
déclaré la veille
que consommer du poulet aux hormones provoque des
«déviances» sexuelles
chez les sujets masculins.
Un
contributeur de Mediapart écrit également:
Dans son grand discours de mardi, Evo Morales a dit, de
manière très
sérieuse, que la consommation de poulet
génétiquement modifié rend les
hommes pédés.
Surprise qu'Evo Morales ait pu tenir de tels propos associant
folkloriquement consommation de poulet et homosexualité et
me méfiant
du traitement médiatique dont peuvent faire l'objet certains
chefs
d'Etat latinoaméricains, je me suis penchée sur
son discours. Sans
trouver grand-chose qui puisse expliquer de tels commentaires.
Qu'a-t-il dit qui puisse déclencher un tel tollé?
Le reportage intitulé «Pour Evo, les OGM provoque
l'homosexualité» se
clôt sur les seuls propos qu'a tenu le président
à ce sujet: «El pollo
que comemos esta cargado de hormonas femeninas. Por eso los hombres,
cuando comen este pollo, tienen desviaciones en su ser como
hombre.»
que l'on peut traduire de la façon suivante:
Le poulet que nous mangeons est chargé d'hormones
féminines. C'est pour
cela que lorsque les hommes mangent de ce poulet, ils ont des
déviations dans leur identité en tant qu'homme.
Aucune allusion à l'orientation sexuelle donc, et encore
moins à
l'homosexualité (en revanche, Evo Morales parle bien de la
calvitie:
«D'ici 50 ans, nous serons tous chauves.»). Dans
son discours de
clôture, le premier président indigène
de la Bolivie s'en est pris aux
méfaits de l'alimentation transgénique sur la
santé, qui reste certes
sujet à polémique mais n'en demeure pas moins une
thèse valable.
Les réactions aux comptes rendus (plus qu'au discours
lui-même) qui ont
été faits par les médias, ne se sont
évidemment pas fait attendre.
L'opposition bolivienne a «condamné» et
les producteurs de poulet
brésiliens -premiers exportateurs au monde- ont
rejeté les propos du
président. A Madrid, la fédération
d'Etat LGBT a protesté, qualifiant
d'«atrocité qu'un chef d'Etat fasse des
déclarations aussi surréalistes
sur l'homosexualité d'une part en la considérant
comme une déviance, et
d'autre part en l'associant avec les OGM».
Un
air de déjà-vu
Cette polémique rappelle plusieurs déboires qu'a
pu connaître Hugo
Chavez avec la presse, européenne notamment. Le dernier en
date
concerne le séisme en Haiti de janvier dernier. Le Monde.fr
titrait
alors «Pour Hugo Chavez, les Etats-Unis sont responsables du
séisme» et
le JDD «Haïti : les divagations de
Chavez». Comme le détaille Marc
Fernandez sur Slate.fr, une telle unanimité des
médias pour diaboliser
le président vénézuélien
s'appuyait sur un article paru sur le site de
la chaîne d'Etat Vive mais qui n'était nullement
un discours officiel.
Hugo Chávez n'a donc jamais déclaré
que les Etats-Unis avaient provoqué
le tremblement de terre.
Ce n'était pas la première fois que les
médias européens déformaient
des propos de Chavez. Le 9 janvier 2006, Libération publiait
un article
intitulé «Le credo antisémite d'Hugo
Chávez», s'appuyant sur un
communiqué du Centre Simon Wiesenthal, organisation qui
milite contre
l'antisémitisme et traque les anciens nazis. Là
encore un discours
raccourci, mal traduit et interprété à
tort. Et une association un peu
rapide avec les positions politiques défendues par Chavez,
l'accroche
de l'article étant
«Antinéolibéral,
anti-impérialiste... et
antisémite?».
L'épisode du poulet aux hormones peut faire craindre que
l'image
d'affabulateur peu crédible qui était
jusque-là l'apanage d'Hugo Chavez
ne se propage désormais à son homologue bolivien
Evo Morales. A moins
bien sûr de tirer une «morale» de
l'histoire Morales : se méfier des
raccourcis accrocheurs...
Source : Slate.fr
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