|

|
Cliquez ci-dessus pour revenir à la page d'accueil
|
|
Sommaire, Amérique
Latine, année 2009, page
n°3
1- Les limites du
socialisme de la pensée bolivarienne d’Hugo Chavez
& - Sur le Venezuela "du
miracle agricole" au chavisme,
par Jennifer Constant
2
- Dernières vidéos de Pantuana TV... sur la
Colombie (en espagnol)
3 - Les murs, ou la marque
visible de l'exclusion, par Jean-Sébastien Blanc
4 - Entretien avec
Marc Saint-Upéry, par Lémi, Article
XI
5- La
malédiction du pétrole, par
Moisés Naím
6 - Lettre de Colombie,
par le professeur Miguel Angel BELTRAN
7 - AK-47 est l’arme
la moins réglementée au monde, par
A.I. Belgique
|
|
|
|
|
Les
limites du socialisme
de
la pensée
bolivarienne d’Hugo Chavez
par
Lionel Mesnard - 23 décembre 2009
Dix
années après son accession à la présidence
du Venezuela, Hugo Chavez laisse un bilan de son action. Ce bilan est
à prendre à deux niveaux, l’un repose sur la
question des évolutions internes au Venezuela et l’autre
sur le plan international et l’influence de ce dernier. Ainsi
s’offre l’occasion de s’interroger sur le devenir du
socialisme du vingt-et-unième siècle, et se demander si
le chavisme a pu répondre aux espoirs qu’il a pu susciter
au Venezuela et au-delà? Il serait difficile de ne pas
reconnaître une personnalité forte au président
Chavez. Lequel reste après une décennie un catalyseur des
opinions publiques. C’est pour ou contre, il est rarement fait
place à la seule raison, à l’analyse des
circonstances ou des causes, ou des faits. Peut-on à un moment
échappé à un discours partisan et
évité le pathos et la caricature? C’est un peu tout
l’enjeu de ce texte, ou comment se trouver à la bonne
distance critique?
Quand en 1999 Hugo Chavez devient le
premier mandataire de son pays, il ne l’est pas sous les couleurs
d’un rouge très vif. Il est même dans le sillage
«troisième voie» d’un Tony Blair ou d’un
Bill Clinton. Son gouvernement est composé de diverses
sensibilités de droites comme de gauches. Sa première,
ministre de l’économie, pour exemple fut un pur produit de
la pensée «néo-libérale». Dans le
sillage de l’élection présidentielle, Hugo Chavez
engagea un référendum pour une nouvelle constitution et
l’emporta avec 71% des suffrages. C’est ainsi que
naquît la République Bolivarienne du Venezuela. Le projet
chaviste du moment incarnait plus un gaullisme latino-américain,
tant il exista des similitudes entre la cinquième
République française et depuis
vénézuélienne. C’est un projet souverainiste
que porte avant tout Hugo Chavez, il va néanmoins incarner peu
à peu à l’échelle de l’Amérique
Latine une espérance émancipatrice face à
l’ogre étasunien.
C’est en voulant
réformer son pays que Chavez va se heurter assez rapidement
à une opposition résolue à l’évincer
du pouvoir. En s’attaquant à PDVSA (la compagnie nationale
des pétroles), en nationalisant la première industrie et
pompe principale des finances extérieures du pays, il prendra de
face les classes privilégiées. Elles n’entendirent
pas d’une bonne oreille la mise en place d’une nouvelle
redistribution des richesses notamment étatiques. Dans un pays
ou depuis les années 1980, la population (70 à 80 %)
vivait en dessous du seuil de pauvreté, l’idée de
remettre en cause ce qui permet de contrôler au moins 50 pour
cent des richesses du pays, et 80 pour cent des rentrées de
devises étrangères pose inévitablement aux
oligarques une limite à ne pas franchir. Depuis 2001, Georges
Bush et son gouvernement entendaient imposer au monde un nouvel ordre
basé sur «le bien et le mal». La Guerre en Irak
restera un conflit dont l’objet fut l’appropriation des
réserves énergétiques, et l’on
n’envisagera pas du tout à Washington, un ordre
selon lequel, 15% de l’approvisionnement en pétrole des
USA viendrait à échapper au contrôle de ses
multinationales.
Jusqu’au coup d’état
intervenu en avril 2002, rien ne présumait qu’Hugo Chavez
deviendrait l’une des têtes de la gauche radicale en
Amérique Latine. Il représentait un républicanisme
social bon teint avec quelques accents radicaux. Rien qui
n’aurait pu susciter en Europe et aux USA un tel
déploiement de moyen pour en finir avec un président
légitime. Pourtant le Premier ministre Juan Manuel Aznar et le
président des États-Unis appuieront une opposition
n’ayant pas grand-chose à faire de la
légitimité démocratique. Il fallait se
débarrasser de cet individu à contre courant avec les
dogmes économiques des néo-conservateurs. Le mauvais
rameur allait se faire destituer un 11 avril 2002, pour revenir deux
jours plus tard avec le soutien de millions d’anonymes. Qui
pouvait envisager ce retour improbable? Chavez aurait pu être de
la liste des présidents légitimes éliminer ou
parti en exil. Il n’en sera rien, et ce sera un échec
flagrant pour la centrale patronale et les partis de l’opposition
putschiste.
L’année 2003 connaîtra au
Venezuela des grèves à répétition poussant
l’économie au bord de l’asphyxie et le pays au bord
de la guerre civile. Les évolutions du président
l’amèneront après le vote révocatoire du 15
août 2004, à prononcer le mot tabou, à
évoquer le changement par une transition socialiste. En 2005
l’opposition refuse de se présenter à
l’Assemblée Nationale, et en quelque sorte laisse aux
partisans du président l’ensemble des sièges de
députés. Par ailleurs, sur l’ensemble des scrutins
(plus d’une dizaine de 1999 à 2009) tous sauf le
referendum sur les changements constitutionnels de 2007 seront
massivement soutenus, à quelques bémols près
concernant la perte du Grand Caracas lors des dernières
désignations municipales. On ne peut pas dire que ce
président ne dispose pas de soutien populaire. Plus encore, il
restera, le fer de lance du Venezuela à travers les
médias du monde entier pendant près d’une
décennie. Même au fin fond de la Creuse, tout à
chacun est en mesure d’émettre un avis sur le quotidien
des Vénézuéliens et de son président
rebelle... Et cela peut confiner à un matraquage et à
confondre Chavez et les siens avec les personnages sud
américains d’Hergé le dessinateur de Tintin. Mais
entre la réalité et le fantasme, il y a de grands pas.
Il
ne faudrait pas non plus faire de Chavez une panacée. Ce
n’est pas en agitant la brocarde, en criant «Vive
Chavez» que miraculeusement les failles du système ont
pris fin. Nous en sommes loin, tant les déséquilibres
sont légions au Venezuela, et même si le chavisme a permis
de transformer certains pans de la société, on ne change
pas les dégâts du passé d’un trait de plume.
Depuis le deuxième septennat et les élections
présidentielles du 3 décembre 2006 au Venezuela, la
politique interne est marquée par une stagnation, si ce
n’est un retour en arrière concernant le rôle
opérant des missions. Les missions sociales, éducatives
et médicales étaient la clef de voûte de la
révolution bolivarienne des premières années.
Elles eurent un impact non négligeable et changèrent le
quotidien de beaucoup de défavorisés.
L’enthousiasme des premières années a fini par
stagner, le révélateur d’une incapacité
à reformer l’outil étatique à son terme. De
même, les infrastructures laissent à désirer faute
d’investissements à la hauteur et surtout de disposer de
toute la technicité nécessaire. L’eau et
l’électricité ne devraient pas manquer dans un pays
qui en regorge, plus exactement dans une nation se voulant souveraine,
mais qui en l’état ne dispose pas vraiment de services
publics fonctionnels. On pourrait ainsi reprendre point après
point les ratés, les contradictions du socialisme dit bolivarien
a n’avoir pas su réformer les bases d’un État
en faveur d’une véritable redistribution sociale et
économique. Après 10 ans d’exercice, le taux
d’imposition sur le revenu est resté quatre fois moindre
que la France de Nicolas Sarkozy. Comment peut-on comprendre une telle
inertie face à de véritables déséquilibres
de revenus entre vénézuéliens et par ailleurs
chanté les louanges d’une révolution socialiste?
Ce
constat peut-être terrible pour ceux qui pensaient que «
l’intrépide» Chavez allait nous ouvrir comme avec
une baguette magique les clefs d’un socialisme, tout en
échappant à certains errements du passé ou
contradictions. Il a tendance à se mouler à une bouillie
idéologique ayant quelques relents d’un autre âge,
nous y reviendrons. Il se trompe à ne pas prendre en compte le
virage amorcé par le président Obama, même
s’il demeure très modeste et en dessous des attentes
d’une gauche «radicale». Mais il est trop facile de
dénoncer le président étasunien, lequel lors du
sommet de Copenhague a pris une porte dérobée pour
intervenir en séance plénière. Les
mécanismes ou processus qui pourraient amener à ce que
l’on assassine Chavez ont déjà été
mis en œuvre plus d’une fois. Le président Chavez a
déjà été, ou sera l’objet d’un
attentat meurtrier, si ses services secrets ne font pas leur boulot ;
et il en est de même pour son homologue, qui, lui non plus
n’en est pas à sa première tentative
d’assassinat. Pourquoi toujours tomber dans des polémiques
stériles, quand par ailleurs le discours d’Hugo Chavez sur
l’état de la planète à Copenhague sonne
juste. Pourquoi se complaire avec les gesticulations
médiatiques, quand on sait ce que la presse retiendra comme
propos?
Sous la présidence Bush, l’on pouvait
accepter certaines embardées. Les petites phrases
lâchées un peu vite à un auditoire faisaient
partie du folklore, de façon à galvaniser les troupes.
Tout cela est devenu rocambolesque pour souhaiter autre chose que la
société du spectacle. Chavez est un tribun plus
qu’un idéologue, et il n’a rien de très
révolutionnaire quand il use de l’invective. Une part de
sa pensée raisonne comme un paternalisme de
«gauche». Aussi à s’accrocher de la sorte au
pouvoir est plus qu’un écho des failles, mais les termes
d’un pouvoir autocratique sans devenir, car dans
l’incapacité à se renouveler. À se remettre
à l’homme providentiel, l’on ôte toute
responsabilité individuelle et l’on ne construit pas le
socialisme. Le but étant l’émancipation de tout
à chacun et non sa soumission à une icône
même vivante. Quand le socialisme devient en plus d’une
doctrine, une morale, mieux vaut prendre quelques distances et se
ressourcer ailleurs.
La présumée révolution
vénézuélienne fait débat et il est temps de
sortir d’un unanimisme où tout serait merveilleux au pays
de Chavez. À contrario, penser, écrire que le
régime bolivarien n’a produit que le pire est tout aussi
absurde. Ces dernières années ont été
marquées par un regain de l’Amérique Latine et
l’on a vu ressortir tous les clichés les plus ridicules et
les nostalgies les plus vaines. C’est par une lecture du
présent ou du moins ce qui a donné lieu à des
changements dans un temps récent, que nous en tirerons une
analyse des réalités. Le reste, les mythologies de toutes
sortes et les exaltations militantes n’ont que peu
d’intérêt. C’est au mieux un questionnement
sociologique à prendre en compte, mais qui n’explique rien
du vécu des Vénézuéliens et l’impact
au quotidien des mesures prises par la présidence de la
République, ainsi que son Assemblée Nationale.
En
réalité, la révolution bolivarienne est un
processus plus bourgeois que prolétarien. Elle a certes permis
de sortir la tête de la misère à des millions
d’individus, de se croire à part égale avec les
classes dominantes. Le mouvement a fini par plonger en la construction
d’une nouvelle bourgeoisie, et en la permanence de la corruption.
Difficile d’échapper à certains principes de
réalité, ou le régime bolivarien n’a pas su
agir faute de disposer d’un outil administratif fiable et
véritablement effectif. On ne peut lui imputer à Hugo
Chavez la responsabilité des logiques corruptives, elles ne sont
pas nouvelles dans ce pays, mais d’avoir suivi le même
modèle de reproduction des élites bourgeoises. Le
contournement de l’administration s’est traduit en un
délitement de l’État, et l’on ne conduit pas
un pays avec les accents d’une caserne. Trop de pouvoir dans les
mains d’un seul homme pose problème et pas seulement au
Venezuela. Tant que certains à gauche continueront à
chercher le sauveur suprême, nous sommes condamnés
à répéter des mécanismes bien connus au XXe
siècle, notamment l’appropriation des pouvoirs par une
nomenclature. De plus, le Bolivar de Karl Marx est à lire avec
attention, surtout pour bien comprendre que Simon Bolivar n’a
jamais été un proto socialiste, mais le produit
d’une classe sociale à une époque donnée. Il
a permis une transition politique en la naissance de nations
s’appuyant principalement sur les bourgeoisies locales, au
même titre que ce qui se déroula en France à la fin
du dix-huitième siècle et la prise de pouvoir de
Napoléon Bonaparte.
Le mouvement bolivarien n’a
rien de très révolutionnaire au sens socialiste du terme,
c’est au mieux un projet nationaliste visant à
reconstituer l’Empire espagnol en Amérique Latine au
profit d’une nouvelle classe dirigeante. Le projet chaviste
s’appuie en des fondements socialistes dont le penseur serait
Simon Bolivar? Il y a au demeurant un problème sur la lecture
des événements, comme il se déroule actuellement
et depuis une décennie au sujet du Venezuela. Hugo Chavez est
plus proche des nationalismes latino-américains et assez proche
du péronisme, en particulier dans sa posture de gouvernant quasi
autocratique. Et il n’est pas vraiment dans la posture d’un
socialiste porteur d’un projet autogestionnaire, ou
émancipateur. Le chavisme est un grand bazar théorique
où l’on croit après mixage avoir posé les
termes d’un socialisme pour le XXIe siècle. Il y a
une méprise d’importance concernant le contenu et
même des inquiétudes, si le président
vénézuélien ne comprend pas, qu’il n’a
rien d’éternel, et que le castrisme n’est pas
l’horizon indépassable des gauches américaines.
À
bilans difficilement comparables, d’autres présidents de
gauche moins marqués dans la radicalité ont permis aussi
un recul appréciable quantitativement et qualitativement des
inégalités. Il n’y a pas une voie vers le
socialisme mais possiblement plusieurs. Et il ne faut pas
négliger des contextes internes différents d’un
pays à l’autre, mettre sur le même plan le
Brésil et le Venezuela pousserait à choisir la
méthode du président brésilien, mais comment
comparer un paquebot à une embarcation de modeste tonnage. Le
président vénézuélien reste un
phénomène atypique, et il importe de souligner que toute
comparaison avec la Bolivie et l’Équateur et autres
nations sud américaines est un exercice périlleux. Chaque
pouvoir affronte l’expérience du pouvoir à partir
de situations locales propres ou singulières. La
réalité surtout démontre qu’il
n’existe pas une seule gauche qualifiée de radicale en
Amérique Latine, mais diverses gauches, plus ou moins radicales
à l’examen des faits. Et à ce titre le
chavisme n’est pas une orientation que l’on peut qualifier
assurément de socialiste, mais par trop souvent un nationalisme
agressif. Si l’on s’en tient au message politique virulent
qui s’appuie sur l’insulte, au même titre que la
propagande néo-conservatrice. À force de vouloir rendre
démoniaque l’adversaire, on finit par prendre les traits
de ses ennemis et leur ressembler.
Tout le drame de
l’histoire du Venezuela est depuis presque un siècle de
dépendre principalement d’une seule ressource, quand les
capacités de développement sont à l’inverse
nombreuses. Pour exemple, sa dépendance alimentaire et ses
capacités agricoles sont une source du problème (lire le
mémoire en bas de ce texte). Le monde agricole est
très minoritaire dans un pays construit principalement autour de
grosses métropoles urbaines : 87 % des
Vénézuéliens vivent en ville et sur une proportion
relativement limitée du territoire. Les réformes
accomplies n’ont pas mis fin aux immenses
propriétés privées et ce vers une plus juste
organisation du marché agricole et de ses terres, et par
ailleurs satisfaire la demande interne en produits alimentaires.
Néanmoins on ne peut pas mettre vraiment au bilan d’Hugo
Chavez une absence de volonté de changer les rouages d’une
société établie sur un mode quasi moyenâgeux
de la répartition des ressources vivrières et de ses
sols. Nous en sommes toutefois à nouveau à poser la
question de la redistribution et la construction d’une
économie post-capitaliste au service et au profit de tous.
Il
y a peu à dire sur le non-respect des démocratiques
exercé sous les mandatures du président Chavez, son
pouvoir n’est pas contestable aux vues des règles les plus
communes du républicanisme et de la démocratie.
Néanmoins certaines formes de l’autoritarisme sont au
centre de ce que l’on dénomme le pacte civique et
militaire. C’est un mode d’organisation social
s’appuyant sur une présence de l’armée
disproportionnée dans les instances civiles. La présence
d’une réserve ou d’une garde nationale est un
archaïsme et un outil à double tranchant. Il n’y a
pas à encenser ou exécrer cet homme, mais le
républicanisme ou le radicalisme petit-bourgeois n’a rien
de novateur et risque de s’essouffler rapidement, s’il se
limite à une narration sur la paranoïa et l’ennemi
héréditaire colombien et étasunien. Il ne pourra
dissimuler longtemps les nombreuses failles et contradictions de son
discours. Il nous reste à nous interroger sur d’autres
usages du pouvoir et à concevoir un monde un peu moins emprunt
de pathos. Les récentes déclarations élogieuses du
président vénézuélien sur le terroriste
Carlos ont de quoi surprendre. Ce n’est pas la première
fois que le président vénézuélien
s’exprime de la sorte. Tout cela pousse à la
popularisation d’un criminel ou plus exactement d’un
barbouze. En réalité, les voies de la révolution
bolivarienne (et de son socialisme du XXIe siècle) ont pris une
orientation faisant craindre une redite idéologique ; nous
renvoyant aux mauvaises heures de la guerre froide concernant les
différents avec la Colombie.
Dix ans c’est une
période suffisante pour se demander si l’on a
constaté des améliorations, mais aussi des blocages ou
les reculs. Ce qui est sidérant ce sont les contradictions
en oeuvre, comme ce besoin immature d’un chef charismatique,
là où, l’on attend avant tout une révolution
des mentalités. Finalement on replonge dans les vieux
classiques, et l’on tire sur la ficelle des paranoïas
collectives. D’où provient ce choix de vouloir envisager
un ordre du monde avec les pouvoirs nationaux les plus compromis dans
la soumission des hommes et notamment des femmes. Il deviendrait comme
par miracle possible de construire un nouveau socialisme et une
alternative au monde «libéral» avec les composantes
les plus rétrogrades ? comment ne pas avoir des doutes et peu
des certitudes ? En toute vraisemblance ce que l’on
dénomme du côté de Caracas comme le camp des
«talibans», cette composante a semble-t-il prit le dessus
sur l’appareil du PSUV. La ligne castriste a malheureusement un
goût de déjà-vu. Il n’y a pas à se
réjouir de voir ce monolithe de la pensée être
présent et actif autour de Chavez. Revenir aux thèses du
tiers-mondisme des années 1970 c’est possiblement renouer
avec un terrorisme international meurtrier et très loin de toute
ambition en faveur d’une paix mondiale.
De nos jours, les
cartes ne sont plus les mêmes, et ne pas prendre en
considération la chute du mur du Berlin ou la révolution
de velours comme un fait majeur de l’échec des
stalinismes, c’est se mettre en situation de rejouer le
passé contre l’avenir. Croire que la Chine est porteuse de
changement on se met le doigt dans l’œil. Ce n’est
pas une alternative crédible pour l’humanité. Le
pire est d’aller soutenir des régimes et des mouvements
rétrogrades, et en particulier à dominante religieuse. Le
Coran et Marx même combat, c’est vouloir éliminer
toute une partie des pensées de Karl Marx. Sa
considération pour les choses religieuses n’a jamais
été très grande et sans critiques. Ce fut un
athée très combatif et c’est sur ce point
précis que l’on peut se questionner sur les mythes
toujours décalés des réalités politiques
très éloignés du réel ou du vécu
Humain. Les voies de l’émancipation restent ou demeurent
le sujet hors contexte sauf à vouloir comprendre à quel
point il ne s’agit pas toujours d’une pensée
socialiste et démocratique, encore moins communiste, mais bien
un fourre-tout idéologique permettant une grande
adaptabilité aux conjonctures. De plus, Marx n’a jamais
constitué une méthodologie marxiste, il a analysé
des contextes passés et de son temps, historiques, sociologiques
et économiques principalement.
Dans sa lecture d’un
presque contemporain qui se nommait Simon Bolivar, son analyse est rude
et sans équivoque pour ce nationaliste bourgeois, toute lecture
équivalente de nos jours serait une erreur. Il existe une
réalité, un discours nationaliste dont
l’armée est le fer de lance et discrédite pour
beaucoup les voies d’un monde pacifié et capable
d’entreprendre les changements à venir. L’engouement
chaviste a fait son temps, à trop chercher des parallèles
on se noie dans des détails improbables. Se demander mais
pourquoi nous sommes de gauche et ce que nous attendons comme mutations
vont au-delà d’une seule patrie. Nous pouvons en avoir
plusieurs ou tout simplement penser que tous vivant ici-bas sont et un
même combat. Se libérer du chauvinisme serait un grand pas
pour l’intelligence et penser le monde ne peut se traduire en
ennemi ou en ami, en bon et méchant. Si l’objet est de
combattre la mondialisation, il est préférable
d’avoir pour premier souci de proposer une alternative au
système, et ne pas se contenter d’une situation de fait
avec de vieux remèdes idéologiques. Au lieu de se
triturer les esprits sur l’identitaire, il reste encore à
se poser la question de l’Homme et de sa place au milieu de
systèmes correspondant rarement à une exigence
indispensable, le devenir de l’espèce et
l’émancipation de toutes et de tous, bourgeois inclus?
Sur
le fond, il n’y a pas à tirer un bilan sombre, pas plus
à en tirer des louanges. Si le président
vénézuélien a su épouser des attentes
populaires, toutes n’ont pas pu aboutir, le plus souvent faute de
disposer d’une administration à la hauteur des enjeux.
Existe-t-il pour autant des présomptions pour penser que
«La révolution a dégénéré en
gouvernement»? À vous de jugez. Hugo Chavez vue de France
donne le sentiment de s’être enfermé dans une
citadelle idéologique d’une assez grande pauvreté
en matière de transformation de l’appareil
d’état, et il doit faire face dans son propre camp
à une absence de critiques sur le chemin parcouru par le
mouvement bolivarien ces dernières années. Possiblement,
certaines voix n’ont pas pu vraiment se faire entendre, et
l’on ne comprend pas toujours ce que veut dire ou induit une
pensée critique. Comme l’écrit le blogueur Patxi
avec un goût prononcé de la provocation, nous sommes
parfois au pays « de Candy » (dessin animé pour
enfant candide). Tout est beau et joli au pays de Chavez, quitte
à en oublier toute la complexité d’un pays. Si
l’on ne cherche pas un bilan équilibré de dix ans
d’actions politiques à des fins sociales et
économiques, ou bien le rôle négatif ou positif de
la diplomatie vénézuélienne, l’on
s’écarte de toute analyse des réalités.
Note :
|
|
|
|
|
|
|
|
LES
MURS, OU
LA MARQUE VISIBLE DE L’EXCLUSION
La construction de barrières de
sécurité dans les villes
de Rio
de Janeiro et de Buenos
Aires
par
Jean-Sébastien Blanc (*) -
novembre 2009
Si l’évolution
internationale semble se diriger vers une
parcellisation incarnée par l’érection de barrières dans
les zones
sensibles de la planète, un développement identique se produit à
l’intérieur des grandes villes.
Les
murs sont à la mode. Au niveau international, ils s’érigent
dans des zones de fracture pour tenter de trouver des solutions aux
problèmes protéiformes de l’insécurité et des flux
migratoires.
Le plus « visible » de
tous, celui
séparant Israël de la Cisjordanie, a été condamné par la
communauté internationale par le biais de l’avis consultatif
de
la Cour Internationale de Justice le 9 juillet 2004. Cependant, sa
construction se poursuit sans que l’état israélien ne
semble
inquiété outre mesure. A la frontière sud des Etats- Unis, une
immense barrière tente d’empêcher
l’entrée
incontrôlable des migrants mexicains en quête de
meilleures
conditions de vie. Dans de nombreuses zones « chaudes
» de
la planète, à Ceuta et à Melilla, entre l’Inde et le
Cachemire, le Maroc et le Sahara Occidental, le Bangladesh et
l’Inde, l’Arabie Saoudite et le Yémen, etc., des
murs
s’érigent pour asseoir du mieux possible le
contrôle
glissant de l’Etat sur le territoire et les mouvements de
population. moins selon les tenants du néolibéralisme,
unaccroissement des richesses qui bénéficierait à tous, mais, pour
reprendre les mots du philosophe Jean- Luc Nancy, dans son ouvrage
dédié à la mondialisation, en réalité «
s’accumulent
de façon proportionnelle les clivages et les apartheids dans
l’accès à la chose urbaine.1 »
L’Amérique
Latine, avec ses mégalopoles tentaculaires, est certainement le
continent où cette déchirure sociale se perçoit le plus
clairement. Les nantis se réfugient dans leur tour d’ivoire
2,
tandis que les bidonvilles phagocytent les rares espaces épargnés par
l’urbanisation intempestive. Face à la misère galopante et
à
l’insécurité croissante, certaines villes ont opté pour la
construction de murs de division à l’intérieur de
leurs
propres « enceintes ». Comme le souligne très
justement le
sociologue Zygmunt Bauman, « les murs qui entouraient
autrefois
la cité la traversent désormais et s’entremêlent
en
différentes directions. Quartiers protégés, espaces publics
rigoureusement surveillés et accès sélectif, gardiens armés aux
portails et portes électroniques.3 » Nous nous proposons ici
d’examiner deux situations représentatives de la réalité
latino-américaine : tout d’abord la construction
d’une
enceinte autour de certaines favelas de la ville de Rio de Janeiro,
puis la tentative (gelée) d’ériger une barrière entre un
quartier populaire et une commune cossue de la banlieue nord de Buenos
Aires, pour tenter d’enrayer l’escalade de la
violence qui
sévit particulièrement dans ces zones « tampon ».
Suite de
l'article en format PDF :
(*)
Jean-Sébastien Blanc est étudiant au Master en Relations
Internationales à la Faculté de Droit UBA de Buenos Aires,
en
Argentine
Source
: Observatoire
des Amériques ou des membres du Centre d’Études sur
l’intégration et la Mondialisation (CEIM)
|
|
|
|
|
« Pratiquer une
solidarité active
avec
certains processus de
transformation
sans
les fétichiser
»
22 octobre 2009, par
Lémi
Entretien avec Marc
Saint-Upéry, écrivain et journaliste
Il
a écrit en 2007 "Le rêve de Simon Bolivar"
(éditions la découverte)
ARTICLE XI : La
politique latino-américaine draine beaucoup de fantasmes
«
sauce Guevara/Tapioca », surtout quand elle concerne la
gauche.
Pourquoi projette-t-on tant d’irrationnel sur cette partie du
monde et sur ses hommes politiques (sur Chávez, par exemple)
?
Marc Saint-Upéry :
C’est
ce que j’appelle le problème de
l’« exotisme
familier ». Il y a entre l’Europe –
notamment
l’Europe de langue romane – et
l’Amérique
latine un mélange de différence exotique et de
continuité culturelle – entre autres en raison du
substrat
latin et catholique et de la proximité linguistique
– qui
font de cette relation un espace de projection
privilégié
de tous les fantasmes idéologiques et de toutes les pulsions
utopiques. Hier, Paris était la Mecque du progrès
et de
la culture pour toutes les élites
latino-américaines.
Aujourd’hui, les expériences menées
à
Caracas ou à La Paz sont perçues comme une des
clés de l’émancipation universelle par
une partie
de la gauche radicale européenne. Les mêmes
personnes qui
se garderaient bien de se prononcer sans enquête approfondie
sur
la trajectoire des maoïstes népalais, les
problèmes
du gouvernement communiste indien au Bengale, la guérilla
musulmane en Thaïlande ou les conflits internes de
l’ANC
sud-africaine, n’hésiteront pas à
émettre
des proclamations définitives ou à
s’engager dans
des polémiques féroces – et en
général passablement sous-informées
–
à propos des zapatistes, de Chávez ou des
piqueteros
argentins. Il n’est pas trop difficile d’apprendre
l’espagnol ou le portugais, il est encore plus facile de
croire
qu’on les comprend bien et surtout, qu’on saisit
par ce
biais toutes les nuances d’une situation sur le terrain
– y
compris quand on y exalte l’altérité
supposée de l’Indien ou du Noir (qui semble
consoler
certains de la grisaille de leur modernité quotidienne).
Bref,
l’avantage de l’Amérique latine, du
point de vue de
l’imaginaire, c’est que c’est une sorte
de Même
qui est un peu Autre et un Autre qui est un peu le Même.
Vous
refusez le manichéisme à
l’œuvre chez
beaucoup de commentateurs politiques. Pour vous, il n’y a pas
deux gauches en Amérique du Sud, mais quatre ou cinq, voire
plus. Pourquoi se refuse-t-on à admettre la
complexité de
ce paysage politique ?
Je ne sais pas
si on peut
généraliser quant à un «
refus »
général d’admettre la
complexité, mais ce
qui est clair, c’est qu’il y a, à droite
comme
à gauche, bien des préjugés et des
œillères idéologiques. Et je ne dis pas
ça
parce que je me considère comme au-delà du bien
et du mal
: je m’inscris clairement a gauche et j’ai des
activités militantes qui seraient
considérées
comme impardonnables par les journalistes censément
«
objectifs », lesquels font souvent de la politique et de
l’agitation idéologique sans le dire. Mais je
crois que
les militants devraient essayer d’éviter de croire
systématiquement à leur propre propagande, parce
que
ça finit par leur jouer de mauvais tours. Il me semble
qu’on peut fort bien pratiquer une solidarité
active avec
certains processus de transformation sans les fétichiser ni
tomber dans la « mythologie militante », comme la
dénonce justement le sociologue bourdieusien Franck Poupeau
[5].
Quant
à la fameuse histoire des soi-disant « deux
gauches
», certains lecteurs critiques m’ont
reproché une
forme d’empirisme agnostique qui tendrait à
suggérer qu’il y aurait en fait autant de gauches
que de
pays, voire que de courants de la gauche elle-même au sein de
chaque pays. Si c’était là ce que je
disais, ce
serait effectivement tautologique et ne nous avancerait pas beaucoup en
termes d’analyse. Mais ce n’est pas ce que je dis.
Il y a
certainement des « ressemblances de famille » et
des
catégorisations possibles, mais elles ne sont pas toujours
celles qu’on croit. Par exemple, on parle souvent de
l’axe
Caracas-Quito-La Paz, et il est vrai qu’il y a des
éléments communs entre ces gouvernements.
D’une
part, il y a ce qu’on peut appeler la « mystique
refondationnelle », l’idée
qu’il fallait
refonder symboliquement la république ou la nation sur de
nouvelles bases ; c’est cette idée qui a
justifié
dans ces trois pays la convocation d’une Assemblée
constituante. D’autre part, il y a une certaine
sensibilité « national-populaire », un
convocation
rhétorique d’un « peuple »
générique et parfois sacralisé contre
une
oligarchie maléfique et antipatriotique. Cette
sensibilité existe dans une version
légèrement
plus ethnicisée en Bolivie, plus caudilliste au Venezuela,
plus
républicaine-jacobine en Équateur ; elle est en
tout cas
assez différente de la matrice réformiste
d’origine
marxiste-catholique, classiste et démocratique radicale du
PT
brésilien, ou bien de la tradition
social-démocrate
chilienne. [6]
Cela dit, il n’y a en
Équateur ou en
Bolivie rien qui ressemble à l’occupation massive
de
l’appareil d’État par des militaires de
carrière telle qu’elle a lieu au Venezuela
– et soit
dit en passant, rien qui soit comparable en termes quantitatifs
à l’orgie rentière et au niveau de
corruption
routinière qui existe au pays de Chávez.
Inversement, au
Venezuela, l’écrasante majorité tant
des couches
intellectuelles créatives que des nouvelles classes moyennes
technocratiques sont – ou sont devenues –
radicalement
antichavistes, alors qu’elles soutiennent assez largement le
gouvernement en Équateur, par exemple. Et au niveau des
politiques publiques, les soi-disant différences entre
«
radicaux » et « modérés
» tiennent
encore moins la route. Donnons quelques exemples. Le gouvernement
d’Evo Morales, que d’aucuns perçoivent
comme un
régime « radical » et « issu
des mouvements
sociaux », a en fait complètement «
blindé
» la politique financière et monétaire
de
l’État et l’a confiée aux
mains de
technocrates qui mènent dans ce domaine une gestion
très
prudente et passablement « orthodoxe ». Cela a
même
valu à la Bolivie l’éloge du FMI.
(Notons que cette
prudence et cette relative orthodoxie sont pour bonne part dues au
souvenir traumatique de l’échec spectaculaire du
gouvernement de gauche de l’Union démocratique et
populaire (UDP), en 1982-1985, qui fut littéralement
terrassé par ses contradictions internes et par une gestion
économique désastreuse débouchant sur
une
hyperinflation traumatique ; ce trauma fut d’ailleurs une des
principales sources de légitimation des réformes
néolibérales des gouvernements
ultérieurs.) En
Équateur, la réforme de l’enseignement
supérieur, considérée comme
élitiste et
technocratique par l’ultra-gauche locale, va dans un sens
passablement divergent de la logique politique et administrative des
missions éducatives et des «
universités
bolivariennes » du Venezuela. Une des mesures les plus
notables
du gouvernement de Rafael Correa est une réforme fiscale qui
instaure une imposition progressive semblable à celle
instituée par divers systèmes
européens
d’inspiration plus ou moins social-démocrate, ce
qui
constitue une innovation relativement radicale dans le contexte
latino-américain. Or, il vaut la peine d’observer
qu’en plus de dix ans de « révolution
», le
gouvernement bolivarien, tout « radical »
qu’il soit,
a réussi à faire baisser le niveau
d’évasion
fiscale mais n’a pas altéré la
structure injuste et
régressive du système de taxation
vénézuélien. Pour sa part, le
très «
modéré » Tabaré
Vázquez a mis en
œuvre en Uruguay une réforme similaire
à celle de
l’Équateur qui instaure une plus grande
équité face à
l’impôt.
Il faut
aussi comprendre qu’un vote pour un mandataire
censément
de gauche, voire « révolutionnaire »,
n’exprime pas nécessairement une tendance
homogène
de gauche ou progressiste au sein de l’électorat.
Les
enquêtes sur l’électorat chaviste, par
exemple,
démontrent régulièrement que ses
membres tendent
majoritairement à se percevoir comme de centre, voire de
droite
pour une partie d’entre eux, et qu’ils ont une
image
plutôt positive de la propriété
privée et
assez négative du modèle cubain. Et dans tous ces
pays,
une confiance relative dans l’économie de
marché
– et une culture mercantile omniprésente et
très
dynamique sur le terrain, comme chez les aymaras boliviens qui votent
pourtant pour le MAS « socialiste » par exemple, ou
dans
une bonne partie des secteurs populaires
vénézuéliens qui baignent dans une
économie
informelle ultra-commerçante et un imaginaire
consumériste exacerbé – peut
parfaitement coexister
avec un fort attachement à un État protecteur des
pauvres
et une conception du « socialisme » comme forme
magnifiée et institutionnalisée de
charité
chrétienne.
Il faut donc
considérablement relativiser le poids des discours et des
représentations idéologiques officiels. Seule une
analyse
minutieuse des trajectoires et des configurations institutionnelles et
politiques des diverses forces en présence et, bien entendu,
de
leurs rapports réels avec les divers
intérêts
économiques établis, peuvent permettre
d’identifier
la « tendance » réelle de tel ou tel
gouvernement.
Cet amalgame d’intérêts, de trajectoires
et de
configurations est beaucoup plus significatif que la question un peu
idiote de savoir si le président Untel, le ministre Machin
ou le
député Chose sont « plus proches de
Chávez
» ou bien ont « plus
d’affinités avec Lula ou
Bachelet ».
Tout ça demande un
travail
d’enquête un peu plus exigeant que la simple
lecture des
communiqués gouvernementaux et des diatribes de la presse
militante. Or justement, pour revenir à votre remarque sur
« le refus de la complexité »,
au-delà des
préjugés idéologiques des
observateurs, il ne faut
pas sous-estimer le poids de la simple paresse intellectuelle et
journalistique. Essayer de vraiment comprendre ce qui se passe,
c’est difficile, c’est fatigant, et ce
n’est pas
toujours gratifiant pour votre confort mental et vos
préjugés, quels qu’ils soient.
Diversifier ses
sources, penser à des interlocuteurs inattendus (ce sont
à peu près toujours les mêmes
«
autorités » qui sont interviewées, et
en cela la
presse « alternative » n’est
guère plus
innovante que les médias dominants), savoir
déchiffrer la
rhétorique des uns et des autres, mesurer le poids des
dynamiques sociologiques informelles par rapport aux discours de
barricade et aux façades institutionnelles, cela demande du
temps, de la patience et une certaine disponibilité
à se
laisser surprendre par la réalité qui ne
caractérise guère le regard sur
l’Amérique
latine, pour les raisons que j’ai
suggéré en
réponse à votre première question
Vous
désignez l’Amérique du Sud comme un
parfait «
laboratoire » des gauches. Pourquoi une telle effervescence
des
mouvements progressistes depuis une dizaine
d’années ?
Est-ce appelé à durer ? Que pensez-vous de cette
idée selon laquelle le « Socialisme du 21e
siècle
» aurait pris racine en Amérique du Sud ?
Je
parle de laboratoire du point de vue latino-américain. Cela
vous
surprendra peut-être, mais je ne crois pas que la gauche
européenne ait beaucoup à en apprendre, les
dynamiques
sociologiques et les contextes institutionnels sont trop
différents. Ce qui ne veut pas dire que ces
expériences
ne sont pas dignes d’intérêt, loin de
là. Ce
qui caractérise les gauches latino-américaines,
c’est pour nombre d’entre elles la force des liens
qu’elles conservent avec le secteurs populaires et les
mouvements
sociaux, même si ces relations ne sont pas exemptes de
frictions
et de contradictions parfois très fortes, et aussi la mise
en
oeuvre de certaines dynamiques participatives, même
s’il ne
faut pas en surestimer la portée. En revanche, en ce qui
concerne le contenu des politiques publiques, les plus novatrices et
les plus efficaces ne sont guère que des adaptations
«
développementistes » de l’arsenal
républicain
progressiste ou social-démocrate traditionnel (ce qui peut
toutefois représenter un progrès assez radical
dans les
conditions de l’Amérique latine), avec souvent
plus de
difficultés d’application qu’en Europe
étant
donné l’impéritie et la corruption des
appareils
administratifs locaux.
Mais
revenons à votre
question. Je ne vais pas trop m’étendre sur les
causes de
l’ascension de la gauche. Elle s’explique
notamment, bien
entendu, parce que les promesses des modèles
néolibéraux des années 1980 et 1990 en
terme des
croissance, d’équité,
d’inclusion sociale,
d’efficacité et
d’accessibilité des services
privatisés, etc., n’ont pas
été tenues, y
compris du propre point de vue des critères et des
indicateurs
économiques et sociaux chers à leurs partisans.
On
assiste aussi dans presque toutes les sociétés
latino-américaines à ce que le sociologue
bolivien
Álvaro García Linera, avant de devenir
vice-président de son pays, décrivait comme une
«
émergence plébéienne » ayant
souvent de
fortes connotations ethno-raciales, soit un effritement du colonialisme
interne et de l’hégémonie symbolique et
politique
qu’exerçaient les élites
traditionnelles sur la
société. C’est un
phénomène qui ne
profite pas nécessairement à la gauche
– de fait,
il a jadis favorisé le fujimorisme au Pérou
– mais
que la gauche a su capter au cours de ces dernières
années.
Cela peut-il durer ?
C’est certainement un
peu plus qu’un épisode
éphémère,
puisque la plupart des nouveaux mandataires plus ou moins progressistes
ont été réélus, ou bien que
leurs
successeurs désignés ont également
été favorisés par les urnes. Cela dit,
à
moyen terme, on doit prendre en compte l’effet de
l’usure
du pouvoir et des promesses qui ne seront pas tenues ou mal tenues, et
aussi des facteurs structurels de fragilité comme la
persistance, voire le renforcement, du modèle
primo-exportateur
et rentier (dépendance excessive du revenu national
à
l’égard des matières
premières), ou encore
le déchaînement de
l’insécurité et de
la violence urbaine, qui affecte d’abord les pauvres et les
rend
sensibles à certains discours sécuritaires
réactionnaires. Ensuite, il y a la fragilité et
la
volatilité des identifications idéologiques. Un
exemple :
au Brésil, tous les électeurs «
lulistes »
sont loin d’être « pétistes
» (adeptes
du PT), et malgré l’immense popularité
de Lula et
les indicateurs économiques et sociaux assez favorables de
son
gouvernement, il n’est pas exclu qu’une
majorité de
Brésiliens, y compris une fraction importante des couches
populaires, votent pour le candidat d’opposition
José
Serra (PSDB, centre-droit) fin 2010.
Quant au
socialisme,
franchement, j’ai pu suivre de très
près certains
des « débats » sur le «
socialisme du XXIe
siècle » au Venezuela et en Équateur,
et j’ai
été frappé par le caractère
vague,
incantatoire, purement émotionnel ou abstrait, et parfois
tout
simplement délirant, des discours qui circulent à
ce
sujet. Sur le plan pratique, dans aucune des expériences
plus ou
moins progressistes en cours, j’insiste, dans aucune
d’entre elles, on n’observe des transformations
durables de
la structure économique et sociale qui arrivent au niveau de
celles mises en œuvre par les travaillistes britanniques dans
leur pays en 1945, par exemple. Par ailleurs, les partisans du
«
socialisme du XXIe siècle » eux-mêmes
reconnaissent
que tout ça n’est pas très clair. Lors
d’une
réunion officielle d’intellectuels sympathisants
de Hugo
Chávez organisé par le Centre international
Miranda
– un organisme de réflexion et de formation
financé
par le gouvernement bolivarien – en juin 2009, les
participants
signalaient ainsi que « le fait de ne pas le
définir [le
socialisme du XXIe siècle] a un avantage qui implique que
l’on n’est pas en train de
répéter des
modèles mais d’autre part, cela
démontre aussi un
manque de caractère concret qui le maintient dans un trop
grand
flou. […] Où sont les documents
théoriques de la
révolution bolivarienne ? Où sont les
différentes
sensibilités idéologiques ? C’est un
problème terrible ». Et de s’interroger
sur le peu
de réalité de « la construction
d’un nouveau
modèle économique productif qui assure une
véritable transition au socialisme », sur les
risques
grandissants de la « logique rentière »,
du «
centralisme », du « militarisme », du
«
clientélisme partidiste », de la «
corruption et de
l’inefficience », mais aussi sur le
déficit
démocratique au sein du Parti socialiste unifié
du
Venezuela (PSUV), sur la confusion du Parti et de
l’État
et sur le phénomène de
l’«hiperliderazgo» de Chávez
–
qu’on pourrait traduire comme
«l’hyperdirigisme du
leader» – et les dangers d’un
«césarisme
progressiste» qui «infantilise la
société». Comme on pouvait
s’y attendre, ces
braves gens se sont aussitôt fait vertement
réprimander
par le « commandant en chef », qui leur a
rétorqué que « baisser le profil de son
leadership
était justement ce que voulait l’ennemi
» et a mis
en doute leur statut d’intellectuels
révolutionnaires, non
sans ajouter qu’«il y a beaucoup de gens qui se
prétendent chavistes et en réalité ne
le sont
pas». À bon entendeur, salut.
Venons
en à Hugo Chávez, justement. Dans votre livre,
vous
refusez de tomber dans le manichéisme. Vous repoussez les
accusations de dictature tout en démontrant que la
«
révolution » bolivarienne n’a finalement
pas grand
chose de révolutionnaire.
Bon,
d’abord il
faut savoir que ce que je raconte sur le Venezuela ne me fait pas que
des amis. Les antichavistes sont souverainement agacés par
mon
refus de faire de Chávez l’incarnation
suprême du
mal ou par mes sarcasmes sur le prétendu «
totalitarisme
» du régime bolivarien et la paranoïa
classiste et
raciste de tout un secteur de l’opposition
vénézuélienne. Les philo-chavistes,
pour leur
part, sont indignés parce que, selon eux, je tiendrais
exactement « le même discours que la presse
d’opposition putschiste». Certains pauvres
plumitifs
stalino-bolivariens se sont même gentiment
employés
à essayer – sans trop de succès
– de faire
censurer mes propos sur le Venezuela dans tel ou tel forum. Notez que
ma position n’est pas non plus celle de je ne sais quel
«
juste milieu », parce que j’ai horreur du
« juste
milieu ». Paradoxalement, je pense en fait qu’il y
a des
éléments de vérité dans
certaines positions
extrêmes tant des chavistes que des antichavistes. Je ne sais
pas
si vous connaissez cette blague soviétique du temps de la
perestroïka, mais elle exprime assez bien, par analogie,
l’esprit de la chose. Deux bureaucrates du parti se
rencontrent
et le premier dit au second : « Tu sais Ivan, j’ai
deux
très mauvaises nouvelles. » « Raconte,
Boris.
» « Eh bien la première, c’est
qu’il
paraît que toutes les merveilles qu’on nous a
racontées sur le socialisme étaient fausses.
»
« Mince alors, rétorque Ivan, et la
deuxième ?
» «Oh, la deuxième, elle est
peut-être encore
pire: toutes les horreurs qu’on nous a racontées
sur le
capitalisme étaient vraies.»
Alors
vu que ce que je
raconte sur le Venezuela est souvent très
controversé, je
vais me livrer à un petit exercice divertissant en vous
citant
des propos qui viennent du camp bolivarien, et de sources
médiatiques insoupçonnables d’un point
de vue
philo-chaviste. Voilà ce que déclarait un
militant
chaviste de base sur le site bolivarien Aporrea après la
défaite du gouvernement lors du
référendum sur la
réforme constitutionnel en décembre 2007 :
« Au
lieu d’expliquer et d’ouvrir le débat
sur quelque
chose d’aussi important, on a choisi d’imposer la
réforme, d’obliger les gens à dire oui
aveuglément ; […] on les a obligés
à
participer à des manifestations officielles, on a mis en
œuvre un prosélytisme grossier, on les a
forcés
à voter tous les amendements en bloc et on a
satanisé
tout ceux qui ont osé soulevé la moindre
objection au
cours des fausses discussions qui ont été
organisées par les autorités. […]
Voilà le
résultat : on se retrouve maintenant avec plus de trois
millions
de “traîtres” (NdA : les
électeurs chavistes
qui se sont abstenus) qui n’étaient pas
nécessairement en désaccord avec le projet de
réforme en soi, mais qui se sont fait
l’écho de
toute une série de désillusions et de
désespoirs
[…]. Il y a une espèce de ras-le-bol, de fatigue,
d’écoeurement. […] Ce qu’il y
a eu,
c’est une sorte de vote sanction contre ce chavisme vain,
sans
principes, débordant de mots d’ordre creux,
arrogant,
entêté, bureaucratique, qui s’est
enkysté
dans les entrailles de l’État […]. Et
si on veut
vraiment savoir ce qui s’est passé […]
on pourrait
continuer à énumérer les causes : la
décadence d’une nouvelle classe bureaucratique
puissante
et opulente, le bavardage patriotard et belliqueux artificiel, la
diabolisation de la critique, l’inefficience des organismes
publics, le fossé existant entre le citoyen de base et ses
représentants, les appels à
l’obéissance en
lieu et place du débat, la rhétorique
grandiloquente et
superficielle, l’incapacité manifestée
par
l’État de combattre le pouvoir
parallèle de la
délinquance sous toutes ses formes, le veto
médiatique
contre la pensée critique, l’habitude de fuir ses
responsabilités en cherchant des coupables
extérieurs, et
un interminable et cetera (…) [7] ».
Par
expérience, je peux vous dire que c’est
là une
excellente description du chavisme vécu au quotidien, et que
ça n’a pas changé depuis 2007, bien au
contraire.
Dans les semaines qui ont suivi la défaite, il y a eu des
centaines, voire des milliers de cris du cœur de ce genre
dans
toute une série de forums publics liés au
mouvement
bolivarien. Après quoi, le leader et l’appareil
ont mis le
holà à ces débordements à
travers un
mélange d’autocritiques rhétoriques,
sans
conséquences pratiques, et de rappels musclés
à la
discipline révolutionnaire. Maintenant, si on veut un
diagnostic
moins viscéral et plus structurel, tournons nous vers ce
qu’en dit une autre source insoupçonnable, Roberto
Viciano
Pastor, un juriste progressiste espagnol proche de Izquierda Unida qui
connaît très bien le processus
vénézuélien, auquel il a
prêté ses
services, et qui a également participé au
processus
d’élaboration des nouvelles constitutions
équatorienne et bolivienne. Dans un article
publié en
décembre 2008 par le quinzomadaire alternatif espagnol
Diagonal
[8], Pastor met en lumière cinq menaces centrales. En
premier
lieu, les profondes carences administratives de la «
révolution », qui selon lui mettent radicalement
en danger
la fonctionnalité et la continuité des programmes
sociaux
les plus vantés par le gouvernement, notamment en
matière
de santé et d’éducation. En
deuxième lieu,
le niveau scandaleux de corruption, qui mine la
légitimité du régime. En
troisième lieu,
l’essor vertigineux de la délinquance et de
l’insécurité, qui trahit la persistance
de graves
problèmes sociaux et dont les premières victimes
sont les
pauvres. Enfin, le juriste espagnol dénonce «
l’incapacité du gouvernement à
dépasser la
dépendance à l’égard du
pétrole
». À quoi il ajoute : « Le pari en
faveur
d’une économie alternative passant par le soutien
aux
entreprises de taille moyenne de l’industrie nationale et la
tentative de créer un vaste réseau de
coopératives
de production et de services a échoué de
façon
spectaculaire, donnant lieu au gaspillage de centaines de millions de
dollars parce que les autorités n’ont pas
lié la
distribution des fonds destinés aux nouvelles
coopératives à un plan de viabilité
des nouvelles
entités financées. Résultat, au bout
d’un
certain temps, l’immense majorité des
coopératives
se dissolvent ou ne fonctionnent plus. » La
cinquième et
dernière menace soulignée par Pastor,
c’est celle
du « désenchantement » : « Ce
qui est grave,
c’est la frustration des espérances d’un
peuple qui
a parié pour le changement. Et cette frustration risque
d’entraîner la délégitimation
sociale de
toute idée de changement pour au moins une
génération. Et ce pas seulement dans le pays
affecté directement. La globalisation de
l’espérance qu’a
représentée pour
beaucoup de gens la révolution
vénézuélienne risque de se transformer
en
globalisation du désenchantement. »
Après
des années d’enquête et de suivi du
processus
vénézuélien, je peux
témoigner que tout
cela est malheureusement vrai, et parfois même en dessous de
la
vérité. Et tous les observateurs
honnêtes ayant
passé un minimum de temps au Venezuela ailleurs que dans les
agapes officielles offertes aux intellectuels « amis du
processus
» ou les visites guidées des villages Potemkine du
régime vous diront la même chose.
Mais
Chávez reste-t-il encore très populaire
auprès de
la population vénézuélienne ? Quels
sont les
prochains défis qu’il va devoir relever ?
D’abord,
il faut savoir que si Chávez continue à gagner
les
élections, il n’exprime nullement les
vœux de la
« majorité » des
Vénézuéliens :
il ne représente en fait aujourd’hui
qu’environ un
tiers de l’électorat, soit 6 millions sur 16,8
millions
d’électeurs (le score maximum de Chávez
étant les 7 millions 300 000 voix engrangées lors
de
l’élection présidentielle de
décembre 2006).
De son côté, le score de l’opposition
tourne autour
de 5 millions de voix et augmente lentement mais sûrement
à chaque scrutin depuis deux ans. Au prix d’un
volontarisme spectaculaire et sans ménager les ressources de
l’État, le « commandant en chef
» a
réussi à remobiliser une partie des
abstentionnistes de
décembre 2007 pour faire enfin passer sa réforme
constitutionnelle en février 2009, mais le nombre de Non
à la réforme a en réalité
légèrement augmenté. Même
s’il faut
bien entendu prendre tous les sondages, quelle que soit leur
provenance, avec des pincettes, les enquêtes
d’opinion les
plus sérieuses – soit celles effectuées
par les
instituts dont les pronostics électoraux se sont
généralement vérifiés et
que le
gouvernement lui-même n’a pas
répugné
à citer par le passé – confirment au
cours de ces
derniers mois une nette érosion de la
crédibilité
du régime bolivarien et de l’évaluation
positive de
ses politiques. Il s’agit d’ailleurs d’un
phénomène qui affecte aussi fortement les milieux
populaires. On l’a vu avec la perte de certains bastions
plébéiens du chavisme aux élections
municipales et
régionales de novembre 2008, comme la mythique zone de
Petare,
à l’est de Caracas, même si le
président
continue à bénéficier d’une
base de soutien
et d’identification émotionnelle importante dans
ces
secteurs.
Quant
aux
défis que Chávez affronte, ils sont en gros ceux
identifiés par les critiques que j’ai
cités
précédemment. À quoi il faut ajouter
depuis au
moins fin 2008 la détérioration notable de la
situation
économique, le ralentissement spectaculaire de la
croissance, le
rendement décroissant des programmes sociaux, la
montée
des conflits du travail, les problèmes
créés par
la surévaluation du bolivar et l’orgie
d’importations, le déclin constant du secteur
productif
non pétrolier et le grave déficit de gestion et
de
productivité de la compagnie nationale PDVSA, vaisseau
amiral et
poule aux œufs d’or de l’État
vénézuélien. Enfin, le Venezuela
souffre
d’une inflation à deux chiffres – la
plus
élevée du continent, puisque le gouvernement
lui-même prévoit qu’elle atteindra au
moins 26 %
pour l’année 2009 – qui grignote les
réels
mais fragiles progrès accomplis aux cours des
dernières
années en matière de redistribution de revenu.
Bref, mon
impression générale, c’est que
s’il est vrai
que le régime de Chávez a stimulé une
espèce d’empowerment symbolique des secteurs
marginalisés, politisé la question sociale et mis
en
œuvre des transferts massifs (et pas toujours très
efficaces) de revenus pétroliers, sur le fond il semble bien
que
la « révolution bolivarienne » se soit
limitée à passer une couche de peinture rouge sur
le
modèle de capitalisme d’État rentier,
gaspilleur et
clientéliste-parasitaire typique du « Venezuela
saoudite
» pendant ses phases de prospérité. Et
cette couche
de peinture est en train de s’écailler de
façon de
plus en plus voyante.
Alors attention, exposer les
graves
déficiences du régime bolivarien ne revient
nullement
à valider les délires de certains sur la
«
dictature » de Chávez ou à exiger son
renversement.
Hugo Chávez est le président
légitimement
élu du Venezuela et, en termes diplomatiques, toute forme de
déstabilisation organisée du gouvernement
vénézuélien par la «
communauté
internationale » à la demande de Washington et
sous
prétexte de déficits démocratiques
réels
(il y en a) ou imaginaires (il y en a aussi) serait une monstrueuse
hypocrisie. Car on ne verra jamais aux États-Unis ou en
Europe
ce même genre de campagne politico-médiatique
systématique et soutenue contre le gouvernement du
président égyptien Moubarak, par exemple, un
régime à façade
pseudo-démocratique qui,
pour le coup, est cent fois plus autoritaire et répressif
– sauf qu’il s’agit bien entendu
d’un
allié docile et discret de l’Occident. Je ne suis
pas non
plus en train de dire que Chávez est « fini
». Le
leader vénézuélien est un formidable
animal
politique, il a du temps devant lui et plus d’un tour dans
son
sac, sans compter qu’il dispose évidemment de
ressources
énergétiques et financières
exceptionnelles. Il a
lui même avoué publiquement, et avec une candeur
hallucinante, qu’il était tout à fait
conscient en
2003 qu’il allait perdre le référendum
révocatoire réclamé par
l’opposition (et qui
fut finalement convoqué en août 2004) et que, sur
les
conseils et avec l’aide de Fidel Castro, il avait mis le
paquet
pour retourner la situation grâce au lancement des fameuses
« missions » bolivariennes [9]. Par ailleurs, son
parti est
celui qui a le plus fort taux de pénétration au
sein des
masses populaires, tandis que l’opposition est
divisée,
généralement médiocre et
dénuée
d’idées porteuses et de personnalités
charismatiques crédibles. Simplement, ce que je veux dire,
c’est que la révolution bolivarienne ne fait plus
trop
rêver, ni au Venezuela ni ailleurs, qu’il y a
d’excellentes raisons à ce
désenchantement et
qu’on a là les prémisses
d’une crise de
légitimité dont les premiers symptômes
sont
déjà manifestes depuis au moins fin 2007.
Le
problème c’est
qu’effectivement, entre les dénonciations
libérales
hystériques de la menace « totalitaire »
chaviste
dans la presse dominante et les fables enchantées sur la
huitième merveille autogestionnaire du monde qu’on
rencontre dans certains médias de gauche ou alternatifs,
vous
aurez du mal à trouver des analyses sérieuses et
informées de ce processus complexe. Pour conclure sur ce
point,
je voudrais aussi ajouter une chose. S’il est vrai
qu’on
aimerait bien entendre les obsédés de
l’antichavisme dépenser autant de bile contre
certains
satrapes amis de l’Occident et nettement plus
antidémocratiques que Chávez, il faut bien dire
que la
mauvaise foi géopolitique et le regard
hémiplégique ne sont nullement le monopole de la
droite
ou de la gauche molle sociale-libérale. Un exemple :
j’imagine que les inconditionnels français de
Chávez trouvent, comme beaucoup de gens, que la nomination
du
fils de Sarkozy à la tête de l’EPAD est
pathétique et répugnante (elle l’est) ;
mais je me
demande pourquoi ils gardent silence sur les exploits du
père de
Chávez, un instituteur
démocrate-chrétien qui
n’est pas plus « socialiste » que mon
arrière-grand-père (un sympathique gendarme
à
cheval, paix à son âme…) et a
été
pendant dix ans – 1998-2008 – gouverneur de
l’état de Barinas, qu’il s’est
employé
gaillardement à mettre en coupe réglée
avec tout
le reste de sa petite famille [10]. Je suppose que tout ça
est
excusable parce que c’est au nom de la «
révolution
». On pourrait citer des dizaines d’exemples de ce
genre de
pantalonnades « bolivariennes ». Je ne sais pas non
plus ce
que penseraient les syndicalistes de lutte français
d’un
gouvernement bolivarien qui favorise la flexibilisation du travail
à travers une inflation de «
coopératives »
largement factices ou sous perfusion, se refuse a répondre
aux
demandes de renégociation de plusieurs dizaines de
conventions
collectives de travailleurs du secteur public, et dont le chef menace
ouvertement les ouvriers des entreprises d’État
mobilisés pour leurs revendications de leur lancer aux
trousses
la police politique du régime [11].
La
vérité, c’est que s’ils
avaient à les
vivre dans leur propre pays au jour le jour, la plupart des
thuriféraires français ou européens de
Chávez ne supporteraient pas plus de deux ou trois mois
l’écrasante ubiquité
politico-médiatique et
la logorrhée parfois pittoresque mais bien souvent ignare et
insultante du « commandant en chef ».
L’histrionisme
et le caporalisme narcissiques du leader suprême seraient
certainement perçus de ce côté de
l’Atlantique par la base de la « gauche de la
gauche
» comme tout à la fois clairement autoritaires et
de fort
mauvais goût ; mais sans doute d’aucuns
estiment-ils que
tout cela est parfaitement supportable par ces braves habitants du
tiers monde, qui ne sont pas comme nous, n’est-ce pas ?
C’est vrai, quoi, eux ils font la «
révolution
», et nous on s’ennuie ferme dans la Sarkozie et le
NPA
n’arrive même pas à vraiment
décoller pour
nous consoler. Alors voilà ce que j’ai envie de
dire
à tous les bolivariens par procuration de France et de
Navarre,
qui sont certainement au fond des gens fort bien
intentionnés :
« révolution », que de fantasmes
exotiques
compensatoires et d’hypocrisie idéologique on
laisse se
déployer en ton nom !
Passons
au pays de Lula qui, de manière globale, semble hausser le
ton
sur la scène régionale comme mondiale. Le
Brésil
cherche-t-il à se positionner comme la puissance dominante
du
continent ? Est-il en concurrence de « leadership »
politique avec le Venezuela, voire l’Argentine ou le Chili ?
La
montée en puissance du Brésil n’est pas
nouvelle,
mais ce qui est nouveau c’est qu’au cours des
derniers
mois, elle s’est affichée de façon
assez voyante,
alors que ce qui caractérise d’habitude la
diplomatie
brésilienne est plutôt une certaine
discrétion.
Cette visibilité est bien entendu liée
à
l’accélération du calendrier
diplomatique, avec une
conjoncture assez dense et critique (crise internationale,
consolidation du G 20, bases colombiennes, Honduras, etc.). Mais je
crois aussi que si Brasilia se permet de s’affirmer avec tant
de
force sur la scène internationale, c’est en raison
d’un sentiment de confiance lié à la
situation
intérieure. Jusqu’à il y a à
peine quelques
mois, le choc de la crise économique et
financière
internationale laissait redouter le pire pour le pays de Lula. De fait,
le quatrième trimestre 2008 avait mis un sérieux
coup
d’arrêt à une croissance qui flirtait
avec les 6 %.
En trois mois, l’activité avait chuté
de
près de 4 % et provoqué une hausse brutale du
chômage. Mais un an plus tard, les indicateurs sont au beau
fixe
et le Brésil paraît avoir dompté
à la crise
grâce à une série de facteurs externes,
comme la
relative rapidité de la reprise chinoise, mais aussi
grâce
à la solidité des paramètres internes,
le
dynamisme de son marché intérieur, la mise en
œuvre
de mesures contra-cycliques adéquates et le renforcement de
la
politique sociale. Avec 1,5 millions de postes de travail
créés en 2009, non seulement il est
prévu que le
déficit d’emplois accumulé fin 2008
soit
entièrement comblé, mais tous les secteurs de
l’économie, de l’industrie aux services
sont en
train de corriger leurs prévisions à la hausse et
le pays
anticipe une croissance de 5 % pour 2010. Sans compter la
découverte récente d’immenses
réserves
maritimes de pétrole dans les eaux territoriales
brésiliennes (on les estime entre 60 et 100 milliards de
barils,
soit au moins près de six fois le montant des
réserves
antérieures).
Bien entendu, non seulement
le
Brésil reste encore un pays marqué par de
très
profondes inégalités et par un taux de violence
urbaine
inquiétant, mais certaines caractéristiques
structurelles
de son économie, comme la dépendance excessive
à
l’égard d’un secteur agro-exportateur
hautement
concentré et capitalistique – une
dépendance dont
le Mouvement des Paysans sans Terre critique vigoureusement la logique
et les conséquences sociales – sont porteurs de
menaces et
de déséquilibres graves. Cela dit, les
progrès
réalisés en huit ans de mandat de Lula restent
notables.
Des programmes sociaux comme la fameuse « Bolsa
Família
», mais aussi des mesures d’amélioration
des
infrastructures économiques et sociales moins connues a
l’étranger comme le Programme
d’Accélération de la Croissance (PAC)
ou le plan
Territórios da Cidadania (Territoires de la
Citoyenneté),
ont eu un impact très important dans le niveau et la
qualité de vie de dizaines de millions de
brésiliens.
Outre la très forte identification sociale et
émotionnelle qui existe entre président
métallo et
les couches populaires, cela explique que Lula soit
aujourd’hui
de loin le chef d’État le plus aimé du
continent
sud-américain : entre 70 % et 84 % d’indice de
popularité selon les enquêtes.
Alors
oui, le Brésil se permet de « hausser le ton
». Cela
se manifeste sur le plan économique, avec des mesures de
représailles commerciales contre les États-Unis,
à
qui Brasilia reproche la concurrence déloyale que
constituent
les subventions (illégales d’après les
règles de l’OMC) versées à
leur secteur
agricole cotonnier. En août dernier, les
Brésiliens ont
annoncé qu’ils entendaient autoriser leurs
entreprises
pharmaceutiques à contourner les brevets
américains et
à produire des médicaments
génériques moins
coûteux. Il faut dire qu’en mars 2009, la Chine a
pour la
première fois remplacé les États-Unis
comme
premier partenaire commercial du Brésil et que des contrats
majeurs ont été signés
récemment entre les
deux pays (avec la Banque nationale de Développement social
brésilienne [BNDES], avec la compagnie
pétrolière
nationale Petrobras, etc.). Ce qui aide probablement au moment
d’affronter – poliment mais fermement –
telle ou
telle orientation de Washington.
Ce ton plus ferme
se manifeste
aussi sur le plan géopolitique et militaire. Lors de la
réunion de l’UNASUR (Union des nations
sud-américaines) à Bariloche, fin août
2009,
Brasilia a exprimé de façon assez vigoureuse son
extrême irritation face à l’annonce par
la Colombie
de l’installation des sept bases américaines sur
son
territoire. De fait, à Bariloche, selon les
témoins,
c’est Chávez qui fournissait le spectacle, comme
d’habitude, mais c’est le Brésil qui
rédigeait et contrôlait un scénario peu
encourageant pour Bogotá et Washington. Une semaine plus
tard,
Brasilia signait avec la France le contrat d’armement le plus
important de son histoire : 36 avions de chasse Rafale (près
d’un quart de sa flotte actuelle) et, en perspective,
sous-marins, frégates, hélicoptères,
missiles,
etc. Bien entendu, ce contrat n’est pas tombé du
ciel : il
est l’aboutissement de plusieurs années de dures
négociations où le Brésil a
exigé, et
obtenu, que Paris ne mette aucune limite aux transferts de technologie,
collabore dans la construction d’une usine de fabrication de
Rafale brésiliens, concède à Brasilia
le droit de
les commercialiser en Amérique latine et s’engage
à
acheter les avions de transport militaire KC-390 produits par la firme
Embraer (Entreprise brésilienne
d’Aéronautique).
Les Brésiliens se sont aussitôt fait un plaisir
d’insister sur le fait que, malgré leurs
intentions
totalement pacifiques, il était temps pour leur pays de se
faire
respecter, en allusion directe et transparente au contentieux avec la
Colombie et son parrain étatsunien. Et la position de
Brasilia
à propos du Honduras est assez nette – elle
s’est
manifestée sans ambiguïtés dans
l’intervention
de Lula à l’Assemblée
générale des
Nations Unies – et vise clairement à forcer la
main
à Washington.
Plus globalement,
à l’occasion
de la visite de Sarkozy à Brasilia, le ministre des Affaires
étrangères Celso Amorim a expliqué que
son pays
partageait avec la France des « intérêts
similaires
au niveau de la géopolitique mondiale », dont la
«
vocation de défendre le multilatéralisme
». Quant
à l’alliance trilatérale Sud-Sud avec
l’Inde
et l’Afrique du Sud (dite IBSA), elle répond,
toujours
selon Amorim, à une « affinité de
conditions
économiques et de valeurs » entre «
trois grandes
démocraties multiculturelles » qui souhaitent
rompre
« les paradigmes traditionnels de la politique internationale
». Y a-t-il par ailleurs concurrence de leadership dans le
cadre
latino-américain lui-même ? Le Chili,
obnubilé par
son développement économique et plutôt
tourné vers le Pacifique et les États-Unis, est
un pays
de seulement 17 millions d’habitants qui n’a aucune
prétention de ce côté-là.
L’Argentine
en a près de 40 millions, mais elle est
considérablement
affaiblie et partiellement désindustralisée
depuis la
crise du tournant du siècle et se résigne
à
contre-cœur à ne plus guère nourrir
d’ambitions internationales substantielles. Et franchement,
entre
le Venezuela, pays mono-producteur de 26 millions
d’habitants, et
le géant brésilien (186 millions
d’habitants,
neuvième économie mondiale), qui
représente la
moitié de la population et du PIB de
l’Amérique du
Sud et fabrique des avions et des ordinateurs, il n’y a pas
photo
– et ce quel que soit le degré
d’agitation de
Chávez sur la scène internationale. De toutes
façons, vous savez, politiquement, Chávez a
besoin de
Lula, qui a contribué à lui sauver la mise en
l’approvisionnant pendant la grève
pétrolière de 2002-2003 et joue un peu le
rôle
d’« amortisseur » – dans les
deux sens –
entre Caracas et Washington. Lula, pour sa part, n’a
nullement
besoin de Chávez.
Notes :
[1]
A noter, Marc Saint-Upéry est également
journaliste
(Politis, Vacarme, Mouvements...), éditeur et traducteur (il
a
traduit, entre autres, Mike Davis, Robert Fisk, les Yes Men, notamment
à La Découverte et aux Prairies Ordinaires).
[2]
En Équateur, Marc Saint-Upéry a ainsi
contribué
à des ateliers de formation d’activistes paysans
et
indigènes et soutenu des formations politiques progressistes
locales.
[3] « Dix ans de vie en
Amérique du Sud,
quatre ans de voyages, des dizaines d’échanges
impromptus
et d’entretiens prémédités,
des milliers de
pages lues ont fourni la base de ce travail. », explique-t-il
également en introduction.
[4] Par mail,
évidemment.
[5]
Franck Poupeau, Carnets boliviens 1999-2007. Un goût de
poussière, Aux Lieux d’être, Montreuil,
2008.
[6] Chávez, Correa et Morales.
[7]
Luis Ángel Barreto, « No más
arrogancias. Miremos
hacia adentro, por favor », 6-12-2007, article disponible (en
espagnol) ici.
[8] Roberto Viciano Pastor,
« Venezuela y
sus contradicciones », Diagonal, n. 91, 11-12-2008,
l’article en espagnol est ici.
[9] Je cite
cette
confession assez stupéfiante aux pages 111 et 112 de mon
livre.
Un extrait : «On est venu me dire :
‘Président, si
le référendum avait lieu aujourd’hui,
vous
perdriez.’ Ça a fait sur moi l’effet
d’une
bombe… C’est à ce moment-là
que nous avons
commencé à travailler avec les missions, nous
avons
conçu la première et j’ai
demandé son aide
à Fidel. Je lui ai dit: ‘Ecoute, j’ai
une
idée, attaquer par en bas de toutes nos forces.’
»
[10]
L’état de Barinas est la terre natale de Hugo
Chávez, au sud-ouest du pays. Quatre des cinq
frères du
président, Argenis, Aníbal, Adleis et Narciso,
occupaient
également pendant cette même période
des postes
clés dans l’administration ou
l’économie
locale. Quant au cinquième frère Adán,
ex ministre
de l’éducation, il a succédé
à son
père au poste de gouverneur suite à sa nomination
fort
opportune comme candidat local du PSUV.
[11]
« Les propos
du président Chávez sont une
déclaration de guerre
contre les travailleurs », s’indignait ainsi en
mars 2009
Orlando Chirino, vieux combattant du syndicalisme de luttes de classes
au Venezuela et animateur de l’Union nationale des
Travailleurs
(UNT). Cf. cet article.
Source :
Article XI
|
|
|
|
|
|
La malédiction du
pétrole
par Moisés
Naím - 13 Octobre 2009
Rédacteur
en chef du
magazine Foreign Policy
L'or
noir et les autres matières premières
n'enrichissent pas
les pays sous-développés... au contraire.
Le
pétrole rend pauvre. Les diamants, le gaz et le cuivre
aussi. Les pays
pauvres dotés de ressources naturelles abondantes sont en
général
restés des pays sous-développés. S'ils
ont ce statut, ce n'est pas en
dépit de leurs richesses naturelles, mais bien à
cause de celles-ci.
Comment se fait-il que les ressources naturelles d'un pays puissent
perpétuer la pauvreté de la majorité
de ses habitants? Il existe un
phénomène qu'on a baptisé la
«malédiction des ressources naturelles».
Certains
pays réussissent à conjurer cette
malédiction. La Norvège ou les
Etats-Unis, par exemple, sont des pays développés
qui possèdent du
pétrole. Mais non seulement ce sont des exceptions qui
confirment la
règle, ils nous montrent qu'il existe des antidotes
efficaces: la
démocratie qui prévaut dans ces pays et leurs
institutions limitent la
concentration du pouvoir.
Pour éviter
cette malédiction, il est
également nécessaire de maintenir la
stabilité économique, de contrôler
la dépense publique, d'économiser pour faire face
aux années de vaches
maigres, d'empêcher la concentration des revenus en
diversifiant
l'économie et d'éviter que la monnaie du pays
n'ait trop de valeur
comparée aux autres devises. Les pays exportateurs de
ressources
naturelles qui n'adoptent pas ces mesures appauvrissent et maltraitent
la majeure partie de leurs citoyens. Seuls des
privilégiés minoritaires
échappent à ces effets pernicieux, et c'est
regrettable.
En
fait, la «malédiction des ressources»
s'apparente un peu à une
addiction. Ses victimes ne ressentent pas l'envie de se soigner. Dans
les sociétés concernées, les puissants
n'ont pas grand intérêt à lutter
contre les effets pervers d'une trop grande dépendance aux
ressources
naturelles. Ils ne sont pas touchés par ces effets, au
contraire, ils
en bénéficient.
Le
Vénézuélien Juan Pablo
Pérez Alfonzo, l'un
des fondateurs de l'Organisation des pays exportateurs de
pétrole
(OPEP), est le premier à avoir mis en exergue ce paradoxe.
Selon lui,
le pétrole n'est pas de l'or noir, c'est
l'excrément du diable.
L'intuition de Pérez Alfonzo s'est
vérifiée dans la réalité.
Depuis
1975, par exemple, la croissance économique des pays riches
en
ressources naturelles est plus faible que celle des pays dont
l'essentiel des exportations ne concerne pas les matières
premières.
Pis encore, dans les pays affectés par cette
malédiction, les bienfaits
de la croissance économique ne profitent qu'à des
groupes restreints:
politiques, militaires et commerciaux. De plus, leur monnaie se
valorise par rapport à celle des autres pays, ce qui
provoque un
ralentissement des exportations des autres biens que leurs
matières
premières. Par voie de conséquence,
l'économie de ces pays demeure non
diversifiée, ce qui les condamne à
dépendre de plus en plus de leurs
exportations principales, les ressources naturelles.
Dans
le cas
du pétrole, la croissance qu'il génère
ne crée pas d'emplois en
proportion de son poids dans l'économie. Ainsi, dans les
pays
exportateurs de brut, le marché pétrolier
représente plus de 80% du
revenu total du gouvernement, mais seulement 10% de l'emploi.
Inéluctablement, les inégalités
économiques s'en voient renforcées.
Dans
la mesure où le financement des gouvernements des pays
exportateurs de
matières premières ne repose pas sur les
impôts des citoyens, leurs
dirigeants se permettent le luxe de ne pas tenir compte de leurs
exigences et besoins. La population développe alors des
relations
délétères avec l'Etat. De plus, quand
l'argent public est contrôlé par
un petit groupe de personnes qui ne rendent pas de compte au reste de
la société, la corruption est monnaie courante.
Les points communs de
pays aussi différents que la Russie, l'Iran ou le Venezuela
ne sont pas
le fruit du hasard. Ils découlent de cette
malédiction.
Il est
très difficile d'évincer les gouvernements des
Etats pétroliers qui
ont, par ailleurs, la possibilité d'utiliser leurs
ressources
financières considérables pour acheter ou
réprimer leurs opposants. Les
statistiques montrent que les pays pétroliers autoritaires
ont beaucoup
moins de chance de devenir des démocraties que les
dictatures qui ont
peu de ressources naturelles. Les statistiques confirment aussi que,
dans le monde entier, les autocraties pétrolières
ont un budget
militaire important et sont plus enclines à s'engager dans
des conflits
armés.
Pour autant, les pays pauvres qui
possèdent énormément de
ressources naturelles ne sont pas condamnés au
sous-développement. Le
Chili et le Botswana sont des exemples extraordinaires de pays parmi
les moins développés qui, bien qu'ils soient
exportateurs de matières
premières, ont échappé à la
malédiction.
Leur expérience
prouve
donc qu'il existe des moyens d'immunisation contre les effets
néfastes
liés à l'existence de ressources naturelles
abondantes. Mais, nul ne
sait pourquoi ces pays-là ont bien voulu se faire immuniser
et pas les
autres. Si quelqu'un trouve un jour la réponse, il faudra
lui décerner
le prix Nobel. Pas celui d'économie. Celui de la paix.
Source :
Texte traduit par Micha Cziffra - http://www.slate.fr
|
|
|
|
|
|
Lettre de Colombie
par le professeur MIGUEL ANGEL
BELTRAN
depuis la prison Modelo à Bogotá
- 20 Juillet 2009
Deux
mois se sont écoulés deux mois depuis ma
détention
arbitraire dans ce pavillon « de haute
sécurité
». Nous sommes actuellement 73 « internes
» (sur une
population de 6.102 prisonniers), nous qui sommes enfermés
dans
cette zone de la Prison Nationale Modelo, qui peut bien être
considérée comme « une prison dans la
prison
même » éloignée des autres
cours et où
nous avons seulement le droit à une heure quotidienne de
soleil.
Ici je partage non seulement le sort de commandants
guérilleros
mais, aussi, de narcotrafiquants reconnus et de chefs paramilitaires
qui comme « Zeus » et « Niche »
sont
accusés d'être les auteurs de nombreux massacres
d'hommes,
de femmes et d'enfants sans défense. Par chance ceux-ci se
trouvent dans un étage à part.
Chaque
fois que je
traverse les portes de cette institution
pénitencière
pour une audience ou un entretien avec les médias, les
dispositifs de sécurité impressionnants
révèlent que je suis
considéré comme un
inculpé de grandedangerosité par les
autorités de
la prison. « Le terroriste le plus dangereux des FARC
»
selon les mots même du président Uribe qui m'a
condamné, sans être entendu dans un
procès, et qui
a remercié le président mexicain Felipe Calderon
pour sa
collaboration dans ma capture, même si les juges de garanties
et
d'appel ont insisté que mon arrestation a eu lieu en
Colombie.
Quel
sarcasme ! Alors que le procureur promet pour moi une peine de plus de
quarante ans pour les délits de rébellion et de
concert
pour avoir commis un délit à des fins
terroristes, les
vrais criminels, qui ont semé la terreur dans tout le pays,
on
leur propose qu'ils purgent leurs dizaines d'homicides en 8 ans, en
échange de leur confession, protégés
par la
politique « justice et paix ». Dans d'autres cas,
la
justice ne s'est même pas occupée d'eux et ils se
restent
dans une impunité totale en occupant d'importants postes
publics
ou des postes élevés de direction dans les forces
militaires.
Dans ma procédure on ne
m'accuse pas d'avoir
dépecé des paysans à la
tronçonneuse, ni on
ne m'attribue pas l'assassinat de jeunes hommes provenant des classes
populaires qui sont présentés plus tard comme des
«
faux positifs » ; non plus de cruels traitements inhumains et
dégradants contre quelqu'un ; encore moins on m'inculpe des
délits de lèse humanité : au contraire
on m'accuse
« d'instigation au terrorisme » pour
dénoncer ces
faits et de mettre en avant la responsabilité de
l'État
Colombien et des Forces Militaires dans ces crimes : on m'accuse
d'être un terroriste pour soutenir dans mes
écrits, dans
des forums publics, que les FARC sont une réponse historique
aux
multiples violences de l'État, parce que dans ce pays, par
décret présidentiel il n'existe pas de conflit
armé, bien que le nombre de déplacés
par la
violence dépassent déjà les 4.000.000
personnes.
Le
fait que l'on cite mes activités académiques
comme des
indices pour m'inculper, démontre qu'il s'agit d'une claire
tentative de criminaliser un travail d'enseignant et d'investigation
inconfortable pour l'establishment.
Dans le
passé les
mêmes acusations ont été faites
à
remarquables professeurs universitaires comme le sociologue Alfredo
Correa que l'on a accusé d'être un «
idéologue des FARC » ; à cette occasion
les fausses
inculpations sont provenues des informations fournies par les
mêmes organismes d'intelligence de l'État,
concrètement du DAS, institution qui dépend
directement
de la Présidence de la République. Bien que dans
le
processus juridique on a pu vérifier son innocence,
l'État n'a pas garanti le droit à la vie au
professeur
Correa : peu de semaines après sa libération, il
tombait
assassiné dans les rues de Barraquilla.
Malheureusement,
cette politique de harcèlement contre l'académie
Colombienne n'est pas une chose du passé, au contraire elle
se'est développée avec la mal-appelée
politique de
« sécurité démocratique
». William
Javier Díaz est un exemple de cela, un membre de l'Atelier
de
Formation Estudiantine Raíces (TJER), qui pendant plus d'une
décennie a développé des
séminaires de
pensée sociale à l'Université
Pédagogique
et l'Université du District « Francisco
José Caldas
», avec l'appui d'enseignants reconnus et de chercheurs
aujourd'hui victime d'un montage juridique similaire, où,
sur la
base de fichiers pourris d'un ordinateur supposé
récupéré de la guérilla, on
le
présente comme un militant des FARC.
De
cette
façon l'État cherche à punir ceux nous
qui
considérons que les étudiants doivent
être en
contact permanent avec les problèmes sociaux pas seulement
du
passé mais aussi du présent ; que les futurs
professionnels ont à être en contact avec les
réalités dures et bornées d'un grand
pays qui
semble s'éveiller aujourd'hui après de longues
années de léthargie.
L'université,
centre
par excellence d'une production et de circulation de la
pensée
critique, ne peut pas céder à cette intimidation,
en se
réfugiant derrière une supposée
neutralité
de la théorie, ni en se réfugiant dans la tour
d'ivoire
de la connaissance d'experts étrangère
à tout
engagement avec la réalité sociale, la
liberté de
pensée et d'expression - écrivait le professeur
universitaire et aussi un militant des droits de l'homme, Hector Abad
Gómez - « est un droit durement conquis
à travers
de l'histoire par des milliers d'êtres humains, droit que
nous
devons conserver. L'histoire démontre que la
préservation
de ce droit requiert des efforts constants, des luttes occasionnelles
et encore, parfois, des sacrifices personnels ».
En
Colombie, le Syndicat des Professeurs d'Université a
été un instrument de défense de ce
droit, en
préservant avec sa lutte l' « alma mater
», non
seulement des barbares qui cherchent à la faire taire en
recourant à la violence et à la menace, mais en
faisant
face aux politiques néolibérales qui cherchent
à
l'asphyxier budgétairement.
La
solidarité
généreuse que vous m'avez offerte pendant ces
deux longs
mois de réclusion, corrobore cet engagement que pendant des
décennies vous avez maintenu en l'honneur de la
défense
de l'éducation supérieure et situe dès
à
présent que cette lutte n'est pas seulement pour ma
liberté mais par la liberté et le respect du
travail
scientifique et intellectuel.
Depuis ces quatre murs
qui
emprisonnent mon corps, mais non ma pensée, je veux vous
faire
parvenir ma voix de reconnaissance sincère par ses gestes de
solidarité et ma conviction que dans cette lutte nous
arriverons
jusqu'à la fin, pour que dans le pays la pensée
puisse
librement circuler et ne soit pas menacée par ceux
insensés qui aspirent à revivre les temps de
l'inquisition, en condamnant au bûcher nous qui exprimons des
idées et opinions différentes.
Une
accolade fraternelle.
Notes sur
Miguel Ángel Beltrán Villegas
Il
est
né à Bogotá (Colombie) le 11 mai 1964.
Il est
diplômé d'une maîtrise de Sciences de
l'éducation avec une spécialité en
Sciences
sociales de l'Université Distrital en 1987, et en Sociologie
à l'Université Nationale de la Colombie en 1991.
Il
a suivi des cours en maîtrise d'Histoire dans
l'Université
Nationale de la Colombie, il a été un boursier
à
la faculté Latinoaméricaine de Sciences sociales
(FLACSO)
en étant diplômé d'un
Magistère de sciences
Sociales en 1994, par la suite il a suivi des cours en doctorat
d'Histoire à l'Université
Latino-américaine et en
doctorat d'Études Latinoaméricaines à
la
Faculté de Philosophie et Lettres de l'Université
Nationale Autonome de Mexico, où il a
été
diplômé avec la thèse "Le Mouvement de
libération National (MLN) au Mexique : Les vicissitudes d'un
chemin vers l'unité (1961-1967)", pour laquelle il a obtenu
une
mention honorifique en 2001. Le Dr. Beltrán
réalisait
depuis juin 2008 un séjour Postdoctoral au Centre
d'Études Latino-américaines - CELA - de la
faculté
de Sciences Politiques et Sociales de l'Université Nationale
Autonome du Mexique (UNAM) ; avec un projet de recherche sur la
succession présidentielle au Mexique, durant la
période
1933-1934.
De la même manière,
il a
été enseignant dans les universités du
Cauca et
d'Antioche, et il est actuellement professeur associé
à
temps complet de l'Université Nationale de la Colombie. Il
est
coordonnateur du département des théories
sociologiques
et du groupe de recherche de la même université ;
"l'Amérique Latine : des transformations, des dynamiques
politiques et une pensée sociale", et il a
également fait
partie du groupe de de recherche de l'Université Antioche ;"
Une
culture, une politique et un développement social",
avalisé par Colciencias, organisme qui mène les
politiques d'Investigation dans la Science et la Technologie.
Le
professeur Dr. Beltrán Villegas, a obtenu la "Distinction
à l'Excellence Enseignante" à
l'Université
d'Antioche (2002). Son activité d'enseignant et de chercheur
a
été marquée par la discipline, la
rigueur,
l'exigence académique et la pensée critique,
donc,
l'accuser de terroriste, guérillero et intellectuel des
Forces
armées Révolutionnaires de la Colombie (FARC) est
une
affirmation qui manque de fondement. De la même
manière,
il a été professeur de diverses
matières dans le
domaine de la sociologie et l'histoire de différentes
générations d'enquêteurs, qui ont du
professeur
Beltrán un référent
académique.
|
|
|
|
|
|
|
AK-47 est l’arme la
moins réglementée au monde
par Amnesty
International Belgique, juin 2006
Nouveau
rapport de la campagne Contrôlez les armes : Amnesty
International, Oxfam International et le Réseau
d’action
international sur les armes légères (RAIAL)
Selon
un nouveau rapport, l’AK-47 est l’arme la moins
réglementée au monde. Le
général
Kalachnikov se joint aux appels en faveur de contrôles plus
stricts sur les armes
Au cours des vingt prochaines
années au minimum, le fusil d’assaut Kalachnikov
restera
l’arme la plus utilisée dans les zones de conflit,
car il
fait l’objet d’une piètre
réglementation,
selon un nouveau rapport de la campagne Contrôlez les armes
publié aujourd’hui à
l’occasion de
l’ouverture, à New York, de la
Conférence mondiale
des Nations unies sur les armes légères et de
petit
calibre.
Depuis son invention il y a soixante ans,
la
Kalachnikov n’a jamais été
fabriquée dans
autant de pays ni causé autant de souffrances
qu’à
l’heure actuelle. Elle tue des milliers et des milliers de
personnes chaque année. Selon le rapport,
intitulé AK-47
: The World’s Favourite Killing Machine, cela
s’explique
par le fait que sa production, sa commercialisation et son utilisation
ne sont presque pas contrôlés au niveau
international.
Les
auteurs du rapport estiment qu’il existe
aujourd’hui
environ 100 millions d’AK-47 et de modèles
dérivés à travers le monde. Ces armes
se trouvent
dans les arsenaux publics d’au moins 82 pays et sont
produites
dans au moins 14 pays. Les chiffres devraient d’ailleurs
augmenter, car le Vénézuéla a
récemment
signé un contrat aux termes duquel des Kalachnikovs seront
assemblées sur place, ce qui constitue une
première aux
Amériques.
Le grand nombre
d’unités de
production dans le monde, l’existence de surplus de
Kalachnikovs
et l’absence de normes internationales
réglementant leur
transfert sont autant de raisons qui font que ces armes tombent
facilement entre les mains de courtiers peu scrupuleux, de milices
armées et de criminels.
Le
général
Mikhaïl Kalachnikov, l’inventeur de l’arme
qui porte
son nom, demande même un durcissement des
contrôles. Dans
une déclaration diffusée aujourd’hui
pour la
campagne Contrôlez les armes, il explique :
«
Comme
il n’y a pas assez de contrôles internationaux sur
les
ventes d’armes, les armes de petit calibre arrivent
facilement
dans n’importe quelle région du monde,
où elles
sont utilisées à des fins de défense
nationale
mais aussi par des agresseurs, des terroristes et toutes sortes de
criminels [...] Quand je regarde la télévision et
que je
vois des armes de petit calibre de la famille AK entre les mains de
bandits, je n’arrête pas de me demander : comment
ces gens
ont-ils fait pour se les procurer ? »
Les
responsables de
la campagne Contrôlez les armes vont remettre
aujourd’hui
la plus importante pétition visuelle jamais
réalisée au monde, la pétition du
million de
visages, au secrétaire général des
Nations unies,
Kofi Annan, à New York. La pétition demande des
contrôles plus stricts sur les armes et contient les photos
ou
portraits d’un million de personnes de plus de 160 pays. Ce
chiffre d’un million représente le nombre de
personnes
tuées par des armes de petit calibre depuis le lancement de
la
campagne en 2003.
« L’AK-47, qui
est hors de
contrôle et non réglementé, a
été
utilisé pour assassiner et mutiler, ce qui a
également
aggravé les conflits et la misère dans les pays
les plus
pauvres de la planète. Un million de personnes, à
travers
le monde, ont signé la pétition pour demander des
contrôles plus stricts sur les armes. Pendant la
conférence des Nations unies, les gouvernements doivent
convenir
de règles internationales sur les ventes d’armes
de petit
calibre et contribuer à mettre fin à ces
souffrances
», a déclaré Jeremy Hobbs, directeur
d’Oxfam
International.
Les nombreuses
possibilités
d’accès à l’AK-47 et
à ses
dérivés sont un héritage de la Guerre
froide.
À l’origine, le gouvernement soviétique
avait
encouragé la production de l’AK-47 par ses
alliés,
mais il ne contrôlait quasiment pas les accords de licence et
dans certains cas il n’y avait même pas
d’accord de
licence. Des millions d’AK-47 ont également
été fournis à différents
régimes
pendant cette période et sont toujours en circulation. Ces
armes
sont aujourd’hui vendues par un grand nombre
d’entreprises
et de gouvernements du monde entier. « L’AK-47
illustre la
manière dont le commerce des armes est devenu fou,
détruisant des vies et des moyens de subsistance. Seules des
règles internationales permettant de contrôler qui
produit
les armes et à qui elles sont vendues pourront garantir
qu’elles ne tombent pas entre de mauvaises mains »,
a
déclaré Irene Khan, secrétaire
générale d’Amnesty International.
«
La
prolifération incontrôlée de
l’AK-47, comme
celle d’autres armes à feu et armes
légères,
a provoqué la mort de millions de personnes et des
souffrances
généralisées,
particulièrement dans
certaines des régions les plus pauvres du monde. La
prochaine
réunion internationale sur les armes de petit calibre
n’aura lieu que dans cinq ans. Si les gouvernements ne
saisissent
pas l’occasion qui se présente
aujourd’hui pour
empêcher que les armes à feu ne tombent entre de
mauvaises
mains, celles-ci tueront encore 1,8 million de personnes avant
qu’une nouvelle chance se présente de prendre des
mesures
», a déclaré Rebecca Peters, directrice
du RAIAL.
Différentes
images vidéos sont disponibles : des séquences
filmées au Libéria, en Ouganda et en Inde, qui
montrent
des armes et leurs effets ; des entretiens avec des survivants ; la
collecte de signatures pour la pétition du million de
visages ;
un message de l’archevêque Desmond Tutu et la
publicité Amnesty Teleshop.
La campagne
Contrôlez
les armes est une initiative menée conjointement par Amnesty
International, Oxfam International et le RAIAL. Elle a pour objectifs
de limiter la prolifération et l’utilisation
abusive des
armes à feu, et de convaincre les gouvernements
d’adopter
des principes réglementant au niveau mondial les transferts
d’armes et un traité contraignant sur le commerce
des
armes.
Statistiques D’après les
tendances
actuelles, environ 12 000 personnes seront tuées par des
armes
de petit calibre durant les deux semaines que durera la
Conférence mondiale des Nations unies sur les armes
légères et de petit calibre. Un AK-47 ne
coûte que
30 dollars (24 euros) dans certaines régions
d’Afrique. On
estime qu’il y a 100 millions d’AK-47 dans le
monde.
D’après les estimations, 50 à 60 p.
cent des armes
utilisées dans le conflit qui frappe l’est de la
République démocratique du Congo sont des AK-47
ou des
modèles dérivés. L’AK-47 est
présent
dans les arsenaux publics d’au moins 82 pays. La production
de
l’AK est 10 fois supérieure à celle du
fusil
d’assaut M-16, son concurrent le plus proche.
L’AK-47 peut
tirer 600 balles par minute. La Kalachnikov est produite dans au moins
14 pays, sur quatre continents.
|
|
|
|
|
|
Cet
espace
d'expression citoyen n'appartient à aucune organisation
politique, ou entreprise commerciale. Le contenu est sous la
responsabilité de son créateur, en tant que
rédacteur.
|
|
|
Page d'entrée : |
|
|
|
|
|
Courrier
électronique : |
lionel.mesnard(AT)free.fr |
|
|
Archives
Amérique
Latine : |
Autres pages à consulter : |
Amérique Latine
depuis 2005
|
Henri
Laborit : L'esprit
du grenier |
Colombie, Venezuela, Chili, ... |
Eduardo Galeno : Un autre regard |
Archives
La Question "Psy" : |
Sigmund
Freud : Biographie |
La Question "Psy"? |
Jacques
Hassoun : Bio(s),
textes |
Psyché, Inconscient, Résilience |
Antonin
Artaud : Bio(s),
textes |
Archives
Histoire de Paris : |
Média
: Une
télévision bien? |
Histoires
et légendes urbaines |
Alice
Miller : Mais qui est
donc AM? |
Origines,
Moyen-Âge, Commune |
Boris
Cyrulnik : Un
homme intègre |
Archives
Violence et Éducation : |
Chili
: Peuple
Mapuche en danger |
Éducation
et violence |
Venezuela : Le
retour de l'Histoire |
Enfermement, droits de l'Enfant, |
|
|
Dernières
modifications : 30/11/2009 |
|
|
|
|
| | |