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Sommaire, année 2009, page n°1
1 - Article et audio, Cinéma, "Témoin indésirable", un film de Juan Lozano
2 - Article, Colombie, vers une guerre de cent ans?
3 - Article, Noël Saez, émissaire de Sarkozy, manipulé par Uribe, Benito Perez
4 - Article, Accusations publiques et menaces contre Justice et Paix
5 - Article, Appel du Mouvement national des Victimes de Crimes d’État, PASC
6 - Article : Colombie: Ottawa cautionne des criminels, André Maltais
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Témoin
Indésirable
Après
le Canada et la Suisse en 2008,
Sortie en France le 15
avril 2009
Un film de Juan
Lozano
Distribué
en France par Eurozoom - Une production Dolce Vita Films et
Intermezzo Films
«
Témoin
indésirable » suit pas à pas le travail
du journaliste Hollman Morris(1), qui, à travers son
émission de télévision Contravia, se
bat pour dénoncer la barbarie du conflit qui frappe son
pays. Le journaliste colombien couvre depuis plus de 15 ans le conflit
armé interne, avec une attention toute
particulière portée sur le thème des
droits de l’homme. Depuis 2002, il est le producteur et
réalisateur de l’émission Contravia
(à rebours).
À travers des
dizaines de reportages de 25 minutes (2), Hollman Morris a
filmé les plus graves atteintes aux droits de
l’homme en Colombie, ce qui forme l’une des
archives audiovisuelles les plus importantes sur l’histoire
récente du pays.
Notes :
(1)
Hollman Morris, 39 ans, journaliste colombien. Il a reçu en
novembre 2007 : The Human Rights Watch Defender Award.
(2) CONTRAVIA
TV (site de la Fondation): http://www.contravia.tv/
"Médialogues"
reçoit Holman Morris et Juan Lozano
Document audio (environ 15 minutes)
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Colombie, vers une guerre de cent
ans ?
Lionel Mesnard, 11 avril 2009
Le
seul nom prononcé
de ce
pays provoque une part d’effroi, il y aurait comme une terre
maudite.
Plus largement, le fantasme sécuritaire est bien
ancré en France pour
faire de cette nation la terre de tous les dangers. Rassurez-vous, je
reviens entier et bien décidé à ne pas
objecter que la société
colombienne comporte un fort volume sécuritaire.
C’est même un des mots
d’ordre du président Alvaro Uribe, la politique de
« sécurité
démocratique ». Un mot d’ordre qui donne
à réfléchir sur le vécu
d’un
peuple empêtrer dans des mécanismes de
contrôle social, ou
l’autocensure prévaut comme comportement dans la
vie de tous les jours.
L’uniformisation des mentalités est presque un
impératif de survie.
Bon, on peut jouer des limites. Mais on ne plaisante pas vraiment avec
les bornes, quand elles mettent votre intégrité
physique en cause. À
ceux qui l’oublient, le pays est en guerre. Les menaces, les
injonctions ne sont pas à prendre à la
légère, chaque semaine à son lot
de macabres nouvelles.
Si, au mieux je remplis ma
démarche,
c’est pour restituer différents enjeux. La
première évidence, la
Colombie n’a pas besoin de bons sentiments. On ne relate pas
une
situation complexe sans en essayer de comprendre pourquoi, depuis plus
d’un demi-siècle, ce pays vit une situation
tragique et en apparence
singulière ? Je suis parti d’une
hypothèse. L’histoire contemporaine de
la Colombie et ce que subissent actuellement les Colombiens pose la
question de notre futur à l’échelle de
l’humanité. Nous sommes face à
des situations qui ne sont pas l’héritage
d’un autre âge. Il y a à
comprendre, ce en quoi ce pays est en fait l’annonce
d’un avenir
inquiétant. Si l’on cite et pour cause le Chili
comme ayant été un
laboratoire d’expérimentation
économique du néolibéralisme sous le
régime d’Augusto Pinochet. La Colombie porte en
elle, tous les
déséquilibres de ce que l’on appelle
depuis 1989 le nouvel ordre
mondial. La prépondérance de l’Empire
étasunien et l’imposition de son
modèle, à la fois comme
référence économique, social politique
et
militaire, condamne en l’état ce pays à
une guerre de cent ans.
La
surenchère sécuritaire n’a que pour but
d’imposer un ordre de terreur
et de déséquilibre, cela permet à
l’exemple colombien de traiter la
question des droits de l’Homme comme un enjeu subalterne. De
toute
évidence, les tristes records de la Colombie en
matière d’atteinte aux
personnes auraient du être depuis longtemps l’objet
d’une plus grande
attention en Europe. Depuis septembre 2001, l’on nous rabats
les
oreilles avec le terrorisme, tout en permettant de limiter en tout lieu
du globe les libertés publiques. Le discours
sécuritaire prédomine et
il est devenu l’objet d’une attention toute
particulière en matière de
législation. On veut en quelque sorte assurer notre
sécurité au
détriment de nos libertés. Ce climat purement
paranoïaque assure un
fonds de commerce à tous les démagogues du globe.
Ce sont les classes populaires
qui font en premier les frais de la violence. Parce que la
majorité des
victimes sont issues des milieux défavorisés. Et
au sein des états du narcotrafic, les mafias trouvent
aussi au sein des milieux populaires ses réseaux de base.
Les petites mains
générant les contrebandes (armes, drogues, ...)
et le banditisme
courant.
Le quotidien des Colombiens ne peut se
réduire à la
question des « otages », même si cela
permet de se prononcer sur
certains méfaits de la guerre. Les Colombiens ne sont pas
dupes, ils
rejettent significativement l’usage de la force. Il y a
matière et de
quoi nous aider à ne plus voir comme «
à la télévision » ce pays
comme
l’épicentre géographique du monde des
catastrophes naturelles, du
trafic de drogue, plus récurant ces dernières
années celui des otages.
Ce qui assez étonnant, c’est comment cette
question du rapt a permis
d’objecter tout le reste. Les médias de masse en
Colombie en font
beaucoup sur les personnes séquestrées, il y a
toujours une larme à
monnayer. Le négoce fonctionne comme si d’autres
évidences n’avaient
pas cours. La question de l’enlèvement
n’est pas à nier, c’est une
évidence, mais qui ne peut se comprendre
qu’à la lumière de l’ensemble
des horreurs que subit la société de toute part.
On ne peut réduire un
pays à une cause, quand elles sont nombreuses. Est-il
possible de
résumer la vie en France à des voitures
brûlant le soir du 31 décembre
? Non, pas plus que la Colombie ne se limite à ses otages.
Ils sont
réels, mais ils posent à la fois le
problème d’une forte criminalité ou
activité mafieuse (200 à 400
enlèvements par an), et les crimes
perpétrés par les différents groupes
armés (actuellement moins de 500
personnes aux mains des FARC, dont majoritairement des prisonniers de
guerre et des policiers). Concernant, les paramilitaires,
l’ELN et
autres groupes rebelles, jusqu’à
présent je ne dispose pas de chiffres
précis. Cependant toutes les bandes armées ont
été amenées à user du
rapt comme pression, en niant toutes l’existence des
conventions
internationales, quant au respect et à la protection des
populations
civiles. Mais le rapt, ou l’enlèvement
n’est pas le seul crime en
usage.
Les atteintes aux droits de l’Homme
vont au-delà de
l’entendement, du tolérable... Au moins, sur ce
registre les ONG
présentent en Colombie ne cessent de condamner les multiples
effets du
conflit armé. En décembre, elles ont pu se faire
entendre devant l’ONU,
même si le vice-président colombien Santos
n’a pas hésité en retour à
nier le sort des déplacés, en les comparant
à des populations en
migration. Il n’y aurait donc pas en Colombie, le chiffre de
4 millions
de personnes qui ont dû ces dix dernières
années fuirent les combats et
se réfugier dans les centres urbains. 700.000 personnes rien
que pour la capitale, soit
10% de sa population est en situation de déplacement, et
sans retour
envisageable à sa terre. À
l’échelle du pays, il est fait part de
400.000 déplacés pour la seule année
2008. Actuellement il est question
d’un millier de déplacé par jour. Et
l’horloge risque de continuer à ce
rythme dans les années à venir, si rien ne vient
arrêter une machine de
guerre ne se souciant pas des plus faibles. Le scandale des «
faux
positifs » à provoquer à
l’échelle du continent plus que des doutes sur
les vertus de l’armée nationale. Plus de
mille-cinq-cent de gamins rafler
dans les villes et éliminés pour faire du
chiffre, pose la question d’un
cynisme qui en dit long sur les intentions et la situation
réelle.
L’intervention
en décembre 2008 du président Uribe sur
l’intensification du conflit, à de quoi
inquiéter.
Cette fois, il souhaite porter les mêmes coups en 2009
à l’ELN, comme il l’a fait au FARC en
2008. Rien ne
présume que le flot
de réfugié va cesser. Au contraire les luttes de
positions pousseront
une fois de plus des populations notamment paysannes à
quitter
leurs
terres. Un processus qui vise à vider les campagnes
colombiennes
et
faciliter par la suite l’installation de grandes
exploitations au
profit d’une monoculture souillant les sols. Pour exemple,
les
ressorts
de l’huile de palme représentent un
mécanisme qui
tend à imposer un
modèle de monoculture. Sous la direction de holdings
colombiennes se
cache des multinationales peu vertueuses, mais soucieuses de leur
image. En attendant les petits exploitants sont priés de
rejoindre le
flot des villes, l’expansion agricole du pays passe par une
exploitation de ses terres à courte vue et au profit
d’une
économie
folle de notre monde. Ce que vit la population paysanne en Colombie
(plus d’un quart de la population), n’a aucune
justification.
L’imposition d’un modèle
économique ayant
pour appui des actions
authentiquement mafieuses devrait nous alarmer sur les
méandres
économiques à l’exemple de
l’affaire Madoff.
La
juxtaposition
d’un système légal et des
réalités
contraires à l’esprit même de la
légalité domine les circuits
économiques. Ceci
n’augure rien de bon en
pleine crise du capitalisme. Car ce système est
condamné
à favoriser
tous les types d’économies, économies
des mafias
incluses. Paradis
fiscaux, économies souterraines participent indirectement ou
directement aux richesses financières de nombreux pays et
principalement en faveur des économies dominantes. Les pays
producteurs
sont des aubaines, que l’on ne cherche pas vraiment
à
dénoncer ou même
chercher à savoir pourquoi. Il est plus rentable de cultiver
la
feuille
de coca, que de produire «des carottes ou du
maïs» ?
Ce non-sens économique
devrait soulève de nombreuses interrogations sur des
mécaniques qui
poussent notre Humanité à son suicide. L'objet
est d'imposer un ordre reposant
sur l’enrichissement d’une minorité en
défaveur de la très grande
majorité, en des schémas économiques
inappropriés et visant à une
rentabilité immédiate. La course à
l’argent
facile a poussé de nombreux
colombiens à croire que l’on pouvait gagner
beaucoup
d’argent en déposant ses économies dans
le
système des
pyramides. Au final, on dénombre plus de 4 millions de
personnes
grugées pour un peu plus de 800 millions de dollars. Une
chance
en
pleine crise économique, que de voir
l’épargne des
familles englouti
par un scandale qui restera dans les annales des arnaques
financières
mondiales. Le tout ayant pu servir au lavage de l’argent sale
des
contrebandes en tout genre. Bizarrement, l’on retrouve un
parent
de
l’actuel président colombien dans cette vaste
entreprise.
Alvaro
Uribe est un homme rusé. Son discours souvent triomphaliste
n’est qu’en
parti que du bluff. Il a su s'imposer comme l’homme fort du
pays et trompé son monde. Il avait atteint des sommets
dans les sondages suite à l’opération
d’infiltration « Jaque ».
L’opération ayant permit la libération
de 15 otages, parmi lesquels 3
militaires étasuniens et la franco-colombienne Ingrid
Betancourt
(juillet 2008). Depuis septembre, en raison d’une crise
économique et
sociale importante, et du scandale des "pyramides", le
président
Uribe n’est pas arrivé cette fois-ci à
imposer sa réélection, ni en
2010, ni en 2014 devant le Congrès. Il fait mine de refuser
les appuis
internationaux pour la conduite d’un processus de paix, pour
ne pas
avoir de mauvaises relations diplomatiques, selon ses propos. Quitte
à
oublier le bombardement du territoire équatorien en mars
2008, et trois
ordinateurs devant tout nous dire sur les relations entre
l’état-major
des FARC et certains acteurs de la paix… Invité
au titre des
meilleurs amis de George Bush en janvier 2009, il sera
décoré.
Cependant le président colombien est en perte de vitesse. Il
perd un de
ses mentors. Pour le moment disparaît un appui politique et
financier.
Et pour une guerre sans réel résultat autre
qu’une montée en flèche des
atteintes aux droits de l’Homme.
En
attendant les menaces
pesant sur les populations civiles restent vivent. Je ne sais
s’il y a
à attendre d’un changement de président
à
Washington. L’homme qui a
probablement le plus mis la région à feu fut le
mari de
l'actuelle Secrétaire d’État Hillary
Clinton. Bill
Clinton fut le promoteur à
partir de 1998 du plan Colombie. Par la suite … Les
administrations
Clinton et Andrés Pastrana ont décidé
en 1999 de
mettre en œuvre
conjointement un « plan pour la paix, la
prospérité
et le renforcement
de l’État », (…). Le premier
objectif
déclaré était de mettre fin au
trafic de drogue dans ce pays en démarrant une vaste
opération de
fumigation des cultures de coca, notamment dans le sud de la Colombie,
région qui concentre une forte présence des FARC.
On a
découvert
ensuite que le Plan avait en réalité un objectif
supplémentaire, celui
de vaincre la guérilla. Cet aspect du Plan n’a
cependant
jamais été
reconnu par Washington à l’époque
où Bill
Clinton était en fonction
[1993-2001]. (…) C’est devenu toutefois plus
explicite
dans les
versions ultérieures du Plan conçues par
l’administration de George W.
Bush, qui a défini le « narco-terrorisme
» comme
étant l’objectif
principal à combattre, associant ainsi la lutte contre la
guérilla à la
guerre contre la drogue. Conçu et
rédigé en
anglais, sous l'œil
attentif des conseillers du Département d'État
américain, mais sans
consultation du congrès colombien, le Plan Colombie
prévoyait une aide
extérieure de 7,5 milliards de dollars à
Bogotá,
dont 1,3 milliard
d'aide américaine, essentiellement militaire. (source
Wikipédia).
Le
bilan à tirer depuis les dix dernières
années pour
la Colombie, c’est
que chaque jour ce pays s’enfonce un peu plus dans son
désarroi et que
personne ne peut parler de paix avec un pouvoir, qui ne croit
qu’en la
force des armes. Depuis « le plan Colombie » des
milliards
ont soutenu
le surarmement et ils ont servi à renforcer les moyens de
contrôles sur
les individus. La démocratie est devenue de plus en plus
relative,
quelque peu suicidaire si vous voulez faire reconnaître vos
droits
propres. Seulement 130.000 personnes ont demandé
réparation en justice
pour plusieurs millions de personnes concernées.
À
l’origine, « le plan Colombie » visait
à agir
contre la culture et la production de cocaïne. Dans les faits
rien
n’atteste un recul manifeste du trafic de drogue, au
contraire
elle a
connu une augmentation en 2008. La surface de plantation n’a
pas
vraiment varié et les labos continuent chaque
année
à produire un peu
plus de 800 tonnes de cocaïne. La question de la drogue colle
à la peau
de ce pays comme une plaie. Pablo Escobar assassiné dans des
conditions
pour parties connues, ne peut se dissocier d’une image
à
la fois
criminelle et machiavélique. La Colombie sans parrains et
cartels, peut
laisser rêveur. L’économie de la drogue
est toujours
aussi puissante.
La contrebande se dirige principalement vers les USA et
l’Europe
comme
marchés d’exportations. Cette économie
ne pourra
jamais vraiment se
démanteler tant que l’interdiction offrira
à ses
marchands des plus
values considérables. Les interdictions actuelles favorisent
l’économie
souterraine, comme la prohibition fut le nœud du trafic de
l’alcool aux Usa dans les années 1920.
Les drogues illicites comme financement représentent une
aubaine
dans
un pays en guerre. Le phénomène s'est
manifestement
enracinés depuis les années
1970, et il participe à ce que l’on nomme
l’économie globale ou plus
exactement les bases de l’économie colombienne,
alliant
une économie de
marché et de contrebande.
Guerre et
trafics ne se
limitent pas
à la seule Colombie. D’autres conflits ont connu
ou
connaissent ce
moyen de financer les achats d’armes grâce
à la
vente de stupéfiant. Si
la Colombie est active dans ce domaine, elle n’est pas la
seule
à user
du complément substantiel. En l’état,
l’argent du conflit passe par
l’aide directe de Washington, et par l’apport
indirect de
l’économie
souterraine aux divers camps en présence : notamment
guérilleros et
armées mercenaires. Une différence pouvant
s’établir entre les réseaux
délinquants et criminels organisés et des
armées
rebelles prélevant un
impôt sur la culture, mais ne générant
pas en tant
que tel un marché souterrain. Le transfert le 12
décembre
2008 de Diego Montoya aux
États-Unis est un exemple d’une
inféodation aux
USA. L'état colombien en est au point
de ne pas condamner des prévenus sur son propre sol,
incapable
de faire
appliquer la sentence requise en Colombie. Selon la justice
colombienne, Don Diego était responsable de 60 à
70 % de
la cocaïne
exportée jusqu’à son arrestation en
2007. Dix
années de guerre contre
la drogue n’ont pourtant en rien affecté la
culture et le
trafic, mais a servi
de tristes desseins ou provoqué de vrais drames sanitaires
notamment
dans les campagnes. L’épandage de
produits toxiques
sur les cultures,
les bombardements aériens se traduisent par des morts, des
blessés et
des maladies dans un pays où il est quasi impossible hors
des
centres
urbains de disposer d’un espace répondant
à de
l’aide médical ou à des
soins. Il ne faut pas omettre, l’usage des mines
antipersonnelles
affectant lourdement le quotidien des localités rurales.
Dans un
conflit, il n’y a pas une dimension des
difficultés mais
un ensemble
dont les limites n’ont pas de toujours de fin, tant nous
baignons
dans
l’abjection la plus totale.
La Colombie
n’est pas un sujet
vendeur, tant il demande à se prendre par la main pour aller
voir
au-delà des apparences et silences médiatiques.
On peut reprendre
l’idée d’un iceberg, ou l’on
ne verrait que le haut des glaces. Le
tout posant la difficulté de décrire un univers
d’un genre particulier.
Il s’agit de pouvoir dépeindre un monde
étrangement paranoïaque. Ou
comment, par des mécanismes de peur, il est possible
d’imposer un ordre
de société. Soyez conforme ou
uniformisé, le mot d’ordre est la
sécurité. Un climat ou l’obsession tend
à désigner comme terroriste ou
ennemi tout ce qui n’est pas conforme aux yeux du pouvoir.
Quand par
ailleurs le pays est dans un état de délitement
social tel que l’on
peut se demander à ce quoi renvoie ce mécanisme
étrange de jouer avec
de fausses apparences. Si les Colombiens dans leur immense
majorité se
taisent, doit-on comprendre qu’ils ne pensent pas ? Au mieux,
ils
subissent, au pire, ils agissent dans une pénombre
sécuritaire causant
chaque année la disparition de milliers de personnes. Le
niveau de
criminalité est sans commune mesure et atteint en Colombie
des sommets.
Mais, il ne faut pas confondre homicides et crimes de guerre. Si les
homicides représentent un peu plus de 13.000 morts par an,
la
criminalité par des faits de guerre représente
plus de 2000 victimes
par an, et une partie des disparitions ne pourra jamais être
résolue,
sans la preuve des restes des corps. Triste dessein de
société ou dans
le monde agricole et forestier tout humain devient une cible, un otage
des systèmes. Car à quel système se
vouer, à l’ordre mafieux, à celui
de la militarisation de la société, à
celle de la contestation armée,
ou simplement à respecter le droit de chacun à
vivre en paix ?
Il
se dessine finalement une majorité méconnue de
colombiens
qui
souhaitent que les armes se taisent renvoyant, dos-à-dos les
acteurs du
conflit. Comme bon nombre de sociétés latines la
Colombie
est sourde à
la pesanteur de ses racines machistes, et pourtant comme ailleurs les
femmes sont le moteur d’un autre devenir. Il a
été
souvent fait part de
l’audace d’Ingrid Betancourt, moins connue la
sénatrice Piedad Cordoba
et la responsable amérindienne Aïda Quilcue
représentent actuellement
en Colombie une relève politique et sociale d’une
grande
force. Au-delà
de l’objet médiatique, s’il y a une
personne qui
déploie en Colombie
une ardeur pour trouver les clefs d’une
négociation de
paix, il faut se
référer ces dernières
années au travail de
Madame Cordoba-Ruiz. Élue du
parti Libéral, et relativement atypique au sein de sa
formation,
elle a
participé avec le président
vénézuélien Hugo Chavez à
la fin du
séquestre de 7 otages ou détenus politiques en
2007, et
de nouveau en ce début 2009 a donné lieu
à de
nouvelles libérations. Son travail de négociation
avec
les FARC a
permis d’instaurer un dialogue, et malgré toutes
les
attaques
auxquelles elle a dû faire face, la sénatrice a
ouvert une
voie
originale face aux seuls discours musclés du pouvoir
colombien.
Fortement soupçonnée d’accointance avec
les
rebelles « marxistes », mis
en cause dans de fausses correspondances numériques avec
l’état-major
des Forces armées Révolutionnaire de Colombie. La
sénatrice Cordoba n’a
pas renoncé à sa tâche et
engagé depuis
plusieurs mois un échange
épistolaire entre la société civile et
les
mouvements armés rebelles afin
de mettre un terme à 45 ans de conflit, et œuvrer
à
la libération de
nouveaux prisonniers (politiques et policiers). Finalement, Interpol a
conclu qu’il n’y a jamais eu de preuves de
correspondance
et les 3
ordinateurs de Raul Reyes s’avèrent moins bavards
que ce
qu’il fut
prétendu. Des écrits bizarrement mettaient en
cause de
nombreux acteurs
des négociations de paix (européens et sud
américains).
La montagne a
t'elle accouché d’une souris...?
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Noël
Saez, émissaire de Sarkozy, manipulé par
Uribe
28 Mars
2009
BENITO
PEREZ, le Courrier (Genève)
NOTE DE LECTURE - Le
compère de
Jean-Pierre Gontard témoigne de leur combat commun pour
faire libérer les otages des FARC.
Les
Suisses connaissent surtout son acolyte, Jean-Pierre
Gontard. Pendant six ans, le Français Noël Saez a
pourtant sillonné la
jungle colombienne au côté de l'envoyé
helvétique à la recherche d'un
improbable accord négocié entre le gouvernement
et la guérilla. Huit
mois après la libération d'Ingrid Betancourt et
l'interruption de la
facilitation franco-suisse, L'Emissaire (1) décrit les
péripéties d'une
médiation impossible. Un témoignage
teinté par l'amertume, mais
diablement précieux si l'on veut comprendre les logiques
internes au
conflit colombien. Diplomate expérimenté,
Noël Saez dirige depuis peu
le consulat français, lorsque les Forces armées
révolutionnaires de
Colombie (FARC) prennent en otage la candidate du petit parti vert
à la
présidentielle. Cet ancien militaire a fait sa connaissance
dans un
cocktail, et n'est pas insensible à cette «femme
au caractère bien
trempé (...) convaincue d'avoir une mission qui changerait
le destin de
son pays».
Son pedigree de
diplomate de choc – cultivé du Chili
d'Allende-Pinochet aux conflits du Salvador ou du Mozambique
– convainc
alors Paris de lui confier la responsabilité de la
négociation avec les
FARC. D'autant que Noël Saez –
«008», persiflent les mauvaises langues
– dispose de contacts noués lors de son
précédent poste à Caracas.
Sa
première rencontre, au Mexique, avec Olga Lucía
Marin, la
fille de Manuel Marulanda, chef et fondateur des FARC, est tendue.
Méfiants, les guérilleros ne comprennent pas
l'intérêt de la France
pour cette petite politicienne bourgeoise qui a eu le front de leur
faire publiquement la morale.
Il faudra
d'innombrables séjours dans la jungle colombienne pour
que Noël Saez et Jean-Pierre Gontard parviennent à
rompre la glace. Une
plongée au coeur du «système
FARC» que le diplomate décrit dans sa
rudesse mais aussi avec ses racines populaires. De la
défense paysanne
contre l'oligarchie à l'industrie de
l'enlèvement, la guérilla apparaît
comme une société complexe, ambivalente. Une vie
éreintante, faite de
courses-poursuites incessantes, a éloigné les
FARC du reste du pays,
mais leur maintient une petite base parmi les démunis. Une
vie
militarisée, où règne discipline et
esprit de corps, la guérilla prend
soin de ses hommes (et de ses femmes, recrutées en
priorité pour leurs
qualités morales). Elle dispose même de
«camps de vacances» au luxe
tout relatif.
Quant aux blessés, ils sont bien
soignés... pour autant
que leurs séquelles ne les empêchent pas de
combattre. Dans la jungle,
les émissaires craignent surtout de tomber sur les
paramilitaires. Etre
capturé avec un de leurs guides, c'est la certitude d'aller
au poteau:
contrairement aux FARC, les «paras» ne font pas de
prisonniers.
Plus étonnant: malgré le soutien formel du
gouvernement à leur
médiation, Bogota se refuse à interrompre ses
actions militaires durant
les missions annoncées par le duo franco-suisse. Par deux
fois, le
campement où ils négocient avec Raúl
Reyes, no 2 des FARC, est bombardé
par l'armée! Une curieuse façon d'appuyer le
travail des médiateurs...
Comme en 2005, lorsque le président Alvaro Uribe leur
demande
d'inpecter une zone envisagée pour recevoir des pourparlers,
puis y
envoie un bataillon faire la chasse aux insurgés.
Las
de ce double discours, les émissaires ont «la
désagréable
impression qu'Uribe se sert de nous» pour repérer
les guérilleros: «A
continuer de la sorte, nous risquons de perdre la confiance des FARC,
qui observent avec scepticisme qu'après chacune de nos
incursions dans
leurs zones, leurs campements sont
bombardés.»
La
situation paraît alors bloquée,
désespérée. Jusqu'au virage de
2007. Sous la pression internationale, les FARC comprennent que la
libération des otages constitue leur dernière
carte pour laver leur
image de «terroristes» et espérer
obtenir le statut de «force
belligérante». Février 2008: le
président colombien paraît à son tour
prêt à rallier l'option
négociée et prie les émissaires de
prendre
contact avec Raúl Reyes. On touche au but: le no 2 des FARC
promet de
libérer rapidement Ingrid Betancourt. Un rendez-vous est
même fixé au 4
mars pour en décider les modalités. Mais la
rencontre n'aura jamais
lieu: le 1er mars, l'armée colombienne bombarde le campement
de Reyes
en territoire équatorien. «Une fois de plus,
l'objectif d'Uribe était
de nous utiliser, afin de localiser l'endroit exact où
Raúl Reyes
allait nous rencontrer, d'arriver avant nous et de
l'abattre», admet
Noël Saez.
Au passage, il ironise sur
l'ordinateur personnel du guérillero
qui aurait été «retrouvé
miraculeusement intact près du corps
déchiqueté de Raúl Reyes» et
dont le contenu, assure-t-il, a été
«largement retouché» par les services de
renseignement. Comment
comprendre le piège tendu par Alvaro Uribe? Pour le
diplomate, il n'y a
aucun doute: cet homme «qui dirige la Colombie comme son
hacienda» ne
peut accepter d'autre issue à la guerre que
l'écrasement des FARC.
«Avec Uribe, on ne dialogue pas, car il ne supporte pas la
contradiction», juge Noël Saez.
Son triomphe, le président colombien commence à
l'entrevoir depuis peu.
Quelques semaines avant l'assassinat de Reyes, la compagne de Cesar,
chef du front 1 des FARC et geôlier d'Ingrid Betancourt, est
arrêtée.
Dès lors, les services colombiens vont s'attacher
à «retourner» Cesar,
tandis que le gouvernement prépare le show de
l'opération Jaque destiné
à déguiser la trahison.
A
nouveau, les deux
émissaires
vont être
mis involontairement à
contribution. A la fin juin, tandis qu'ils tentent de renouer les fils
du dialogue au fin fond de la jungle, les médias colombiens
laissent
laissent entendre que le nouveau chef des FARC, Alfonso Cano, serait
favorable à une libération de Betancourt avec le
concours du CICR.
L'information se révèlera vraie, mais
à ce moment elle sert d'abord à
justifier l'arrivée du fameux faux
hélicoptère humanitaire, le 2
juillet, dans le camp dirigé par Cesar.
«Pris
de vitesse», les deux émissaires ne sont pas
dupes: «Après
vingt-six ans de guérilla, Cesar se serait laissé
berner de la sorte?
Si les guérilleros ont pu tomber dans le piège,
Cesar certainement
pas.»
S'il ne cache pas sa joie
de voir Ingrid Betancourt libérée de
quelque façon que ce soit, Noël Saez met en garde
contre l'illusion
créée par l'opération Jaque.
«En dépit des défections et des
trahisons,
il demeurera toujours un vivier de jeunes gens dans les campagnes pour
rejoindre» les FARC. Des zones, où la
misère se nourrit de la
distribution inégale des terres, insiste l'ex-militaire au
coeur
pacifiste: «Dans cette guerre fratricide, il n'y a ni bons ni
méchants,
mais des hommes tous marqués par un passé qui a
décidé de leur destin.
L'action armée n'a jamais été, ni ne
saurait être la solution. (...)
Tant que les dirigeants n'envisageront pas une meilleure
répartition
des richesses, il y a fort à parier que le pays continuera
à vivre au
rythme des assauts de la guérilla».
Note
:
(1)
Editions Robert Laffont, Paris, mars 2009.
Source : Le
Courrier
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Accusations publiques
et menaces contre Justicia y Paz
20 mars 2009
Accusations
publiques et menaces contre la Comision de Justicia y Paz. De nouveaux
montages judiciaires se préparent…
RÉSUMÉ
:
Par
le biais d’articles de presse, de menaces paramilitaires et
de
déclarations du Vice-Président de la
République, on est en train de
créer une ambiance qui justifiera de nouvelles attaques
contre des
membres de la Comision de Justicia y Paz.
FAITS
: Jeudi le
5 mars au matin, dans le cadre d’une entrevue à la
W radio, le
Vice-Président de la République de Colombie,
FRANCISCO SANTOS, a pointé
du doigt des membres de la société civile
colombienne reconnus, parmi
lesquels le défenseur de droits huamisnde la Comision de
Justicia y Paz
DANILO RUEDA, les accusant de faire campagne contre le
Président ALVARO
URIBE dans différents le cadre de conférences aux
Etats-Unis
Le
samedi 7 mars, le journaliste Raúl E. Tamayo Gaviria a
publié un
article intitulé “Defensores de
Indígenas” dans le journal El
Colombiano où il tente de délégitimer
la récente « Consultation des
Peuples » qui fut réalisée au
Jiguamiando lors de laquelle les
autochtones, afro-descendants et métisses se sont
prononcés
démocratiquement et unanimement contre le projet
d’exploitation minière
Mande Norte de la compagnie Muriel Mining. Des observateurs
internationaux et des organisations de défense de droits
humains
colombiennes, telle que la Comision de Justicia y Paz y ont
participé
en tant que témoins et garants du processus.
L’article
pubilé
dans le journal El Colombiano affirmait sans fondement que les
communautés autochtones du Jiguamiando au Bajo Atrato
étaient «
contentes de la présence de la compagnie internationale
(Muriel Mining)
et que ce n’est que lorsque sont arrivés les
ennemis du processus comme
le sont les ONG Justicia y Paz et Brigade de Paix Internationale (PBI)
afin de promouvoir l’exode des autochtones pour les faire se
confronter
à ceux qui sont vra8ment de la région et qui
avient acceptés les
travaux miniers de la Muriel Mining Corp.(…) »
Raúl
E. Tamayo
Gaviria termine son article en formulant une séri de
questions qui
laissent clairement entendre que selon lui la Comisión de
Justicia y
Paz et Peace Brigades International travaillent de concert avec la
guérilla des FARC.
Toutes ces accusations
coincident
malheureusement avec les déclarations hors contexte et sans
fondements
réalisées par le Vice-president FRANCISCO SANTOS
au sujet des
promoteurs de la paix et des droits humains qui se trouvaient aux
Etats-Unis, parmi lesquels se trouvaient un membre de la Comision de
Justicia y Paz. Ceux-ci étaient alors en tournée
afin de partager les
initiatives des victimes et expériences de la
société civile face au
conflit armé, aux droits humains et aux territoires.
Ces
accusations publiques prononcées par de hauts fonctionnaires
du
gouvernement laissent présager la possibilité de
nouveaux montages
judiciaires à l’encontre de membres de Justicia y
Paz. Elles démontrent
la peur qu’a l’État colombien de la
vérité et des réclamation de
justice de milliers de victimes de l’expropriation violente
de leurs
terres par les opérations militaires et paramilitaires ou la
peur à ce
que les droits des victimes puissent êtres un jour
restitués
pleinement. (pour la suite, se rendre sur le site de PASC, ci-desous).
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Appel
du Mouvement national
des victimes de crimes d’État
5 mars
2009
Journée
internationale d’action
et de
dénonciation des
exécutions extrajudiciaires
Unis pour
récupérer la mémoire, pour une
Colombie sans oubli
Hommage
national et
international aux victimes des exécutions extrajudiciaires
commis par les forces armées colombiennes. Nous
dénonçons les « faux positifs
», une pratique qui consiste à tuer des civils. Il
s’agit, en général de paysans et de
jeunes des quartiers populaires, qui sont ensuite
présentés comme des combattants morts au combat
dans la « guerre contre le terrorisme ». Cela
permet aux militaires colombiens d’obtenir des primes et de
gonfler les statistiques de la guerre, encouragés en cela
par des directives officielles de l’état.
Ces
crimes ont été dénoncés et
reconnus officiellement lors de la disparition de 19 jeunes qui
habitaient Soacha, un quartier de Bogota. Ils ont
été retrouvés dans une fosse commune
dans la campagne à plus de 500 kilomètres de
Bogota en septembre 2008.
Ce
procédé n’est pas récent,
des organisations telle que l’ONG de défense des
Droits de l’Homme, Coordination Colombie Europe Etats-Unis a
dénombré plus de 1400 de ces cas depuis
qu’en 2002 la politique de sécurité
démocratique a été mise en place. Les
« faux positifs » sont reconnus dans le droit
international comme des exécutions extrajudiciaires.
Celles-ci font partie de la réalité colombienne
depuis plus de vingt ans.
La Colombie vit
l’une des crises humanitaires les plus graves de la
planète, comme en témoignent les 3000 fosses
communes, les plus de 30000 disparus, les 4.2 millions de
déplacés au sein même de la Colombie et
les 23000 otages pendant les 11 dernières années.
Ces chiffres font percevoir la dimension du conflit.
Le
REDHER, Réseau Européen de Fraternité
et de Solidarité avec la Colombie, se solidarise avec les
victimes du paramilitarisme, de la parapolitique et il
dénonce les crimes commis par l’État
Colombien. Le REDHER exige du gouvernement colombien :
*
L’arrêt immédiat des poursuites
à leur encontre ainsi que l’emprisonnement des
militants des organisations sociales, des syndicalistes, des
défenseurs des Droits de l’Homme, des
journalistes, des étudiants, des paysans, des
indigènes et des membres de l’opposition
démocratique.
* La
vérité, la justice, la réparation et
l’arrêt des crimes abjects qui vont à
l’encontre de toute dignité humaine.
*
Nous en appelons à tous les colombiens et à la
communauté internationale pour faire écho de
cette clameur et ainsi contribuer à construire une
société réellement
démocratique, basée sur la paix, la justice
sociale et le respect plein et entier des Droits de l’Homme.
LES EXÉCUTIONS
EXTRAJUDICIAIRES SONT DES CRIMES D’ÉTAT
VÉRITÉ,
JUSTICE ET RÉPARATION POUR LES VICTIMES DU TERRORISME
D’ÉTAT EN COLOMBIE
UNIS POUR
RECUPERER LA MÉMOIRE POUR UNE COLOMBIE
SANS OUBLi !
MOVICE : http://www.movimientodevictimas.org
Sources :
Projet Accompagnement Solidarité Colombie (traduction)
- Mouvement national des Victimes de Crimes d'État (Movice)
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COLOMBIE : OTTAWA
CAUTIONNE DES CRIMINELS
21
janvier 2009
André Maltais
Alors
que la
guérilla des FARC est soi-disant affaiblie, les
événements de l’automne dernier
montrent que, pour autant, la population civile colombienne est loin
d’être plus en sécurité.
En
octobre, un rapport d’Amnistie internationale
révélait d’abord que 305 000 personnes
ont été déplacées et 190
autres disparurent, dans la seule année 2007.
Une
semaine plus tard, le Chilien Jose Miguel Vivanco, directeur de Human
Right Watch pour les Amériques, publie à son tour
un rapport accusant le gouvernement Uribe de nuire au travail de la
justice lorsque celle-ci enquête sur la mafia paramilitaire.
Le
rapport mentionne une campagne permanente pour discréditer
la Justice, des réformes constitutionnelles visant
à soustraire les enquêtes de la
compétence de la Cour suprême et une
résistance aux initiatives du Congrès pour se
libérer de l’influence des paramilitaires.
Il
cite également l’extradition aux
États-Unis des chefs paramilitaires «
démobilisés », interrompant les
enquêtes en cours au moment où ces criminels
commencent à « trop parler ».
Vivanco
exhorte la communauté internationale à faire
pression sur Uribe, car, dit-il, « en Colombie, il se commet
en une seule année autant de violation des droits humains
que pendant toute la dictature chilienne d’Augusto Pinochet
».
Alvaro Uribe avait
à peine
fini de traiter Vivanco de « complice des FARC »
que le procureur général de la Colombie, Mario
Iguaran, révélait à son tour avoir
reçu, depuis le début de 2008, plus de mille
plaintes pour meurtre de civils par l’armée
colombienne.
Pour sa part, le Défenseur
du peuple du gouvernement colombien signalait pas moins de 5522 cas de
disparitions, toujours seulement depuis 2008!
Un
mois auparavant, une coalition regroupant plus de 1200 organismes
colombiens, révélait que, depuis
l’arrivée au pouvoir du président
Uribe, en 2002, et jusqu’en décembre 2007, la
violence sociopolitique a tué 13.634 civils colombiens en
dehors du conflit armé.
L’État
serait responsable des trois quarts des meurtres, soit par
perpétration directe de la police et de
l’armée (17.5%) soit par tolérance ou
appui à des groupes paramilitaires (57.9%).
La
coalition signale aussi une augmentation de 67,1% des
exécutions extrajudiciaires perpétrées
par les forces publiques colombiennes durant le quinquennat Uribe (1122
cas) par rapport à la période 1997-2002 (669 cas).
Au
cours de la dernière année et demie, dit, pour sa
part, la Coordination des droits humains Colombie-Union
européenne-États-Unis, les Forces
armées colombiennes ont commis 535 exécutions
extrajudiciaires!
Cette avalanche de critiques, tant
de la part d’organisations nationales et internationales que
de la justice colombienne, a forcé la démission
du chef des Forces armées, Mario Montoya.
Montoya
était l’exécuteur principal de la
politique de « sécurité
démocratique » d’Uribe et du Plan
Colombie. Il était aussi le héros des
récents « coups » infligés
aux FARC comme le bombardement du camp de Raul Reyes, en
Équateur, et l’opération
illégale « Jaque » qui a
libéré Ingrid Bétancourt et quinze
autres otages.
Le Washington Post accuse Montoya
d’avoir armé un groupe de paramilitaires qui, en
mai 2002, avait mis à feu et à sang un petit
village du département du Choco.
Cinq
mois plus tard, le même Montoya aidait une offensive
paramilitaire visant à éliminer les
guérillas des quartiers pauvres de Medellin. Cette
opération a tué quatorze civils et fait des
dizaines de disparus.
Mais le scandale qui a
vraiment emporté le général est sans
doute celui des « fausses pertes »
infligées aux FARC par les militaires. Cela a
obligé le président à mettre
à la retraite une quarantaine de militaires (dont 27 hauts
gradés) accusés du meurtre de onze jeunes des
faubourgs de Bogota.
Selon
l’enquête officielle, les onze victimes ont
été enlevées par les militaires, en
janvier 2008. On ignore encore quand et comment elles ont
été tuées mais, en octobre dernier,
l’armée les classait « morts au combat
» dans le département de Santander, à
800 kilomètres de chez eux!
L’interrogatoire
de 3000 membres des Forces armées a rapidement
gonflé à une centaine le nombre de ces faux
guérilleros exécutés.
L’enquête
sur le massacre de Bogota révèle aussi
qu’afin d’augmenter
l’efficacité de sa politique de
«sécurité
démocratique», le
président a instauré un système
d’obligation de résultat. Celui-ci attribue des
incitatifs économiques aux Forces armées pour la
présentation de «pertes ennemies».
Cela,
écrit Matias Mongan, de l’Agence de presse du
Mercosur, crée un « marché de la mort
» qui opère dans les couches sociales les plus
marginales. Depuis longtemps, certains éléments
de l’armée sont soupçonnés
de procéder à un « nettoyage social
» de style nazi contre les malades mentaux, mendiants,
homosexuels, prostituées et handicapés.
Le
successeur de Montoya est le général Oscar
Rodriguez, actuel commandant de la région Nord, à
la frontière vénézuélienne,
là où sont concentrés de nombreux et
nouveaux groupes paramilitaires.
Au moment
où Barack Obama arrive à Washington, ces
dénonciations répétées
mettent sérieusement en danger la relation
privilégiée d’Uribe avec les
États-Unis.
«Le
président Uribe est dans une situation difficile, dit le
sociologue Alfredo Molano, car, en plus des dénonciations
provenant de toute part sur les droits de l’homme, la crise
financière états-unienne affecte sa base
électorale des classes moyennes… et limite ses
dépenses militaires astronomiques qui atteignent4,6% du
PIB».
«Il y aura davantage de
demandes sociales, ajoute Molano, et moins de soutien des
États-Unis».
La vague de
grèves (employés du ministère de la
Justice, camionneurs, enseignants, etc.) et de manifestations qui ont
marqué l’automne dernier semble donner raison
à Molano.
Les coupeurs de canne sortent
tout juste d’une grève de deux mois qui a
obligé le gouvernement à importer du sucre de
Bolivie et de l’Équateur (deux régimes
que Uribe n’aime pas trop!), paralysé la
production d’éthanol et fait bondir le prix de la
gazoline.
Le 23 octobre, les syndicats colombiens
ont décrété une journée de
grève nationale dont le succès avait
été sans précédent depuis
des années.
Les indigènes ont
aussi beaucoup dérangé le gouvernement.
Menés par la communauté Nasa, ceux-ci sont,
depuis le 12 octobre, en état de « mobilisation
collective pour les valeurs de la vie ».
Ils
organisent de longues marches à travers le pays et de
spectaculaires occupations de tronçons
stratégiques d’autoroutes, exigeant de «
renverser la situation » de la centaine de groupes ethniques
du pays.
L’assassinat de vingt leaders
indigènes depuis le début de cette mobilisation,
a rapidement fait grossir les rangs de ses sympathisants parmi une
population fatiguée de la violence gouvernementale.
Mais,
en ratifiant un traité de libre-échange avec la
Colombie, le gouvernement canadien fait comme s’il
était normal que, dans un pays démocratique,
70.000 civils aient été tués au cours
des vingt dernières années, incluant 500 leaders
syndicaux sous la seule présidence d’Alvaro Uribe.
La
récente crise politique canadienne a toutefois
ajourné indéfiniment l’adoption par le
Parlement de ce traité qui bénéficie
surtout aux compagnies minières canadiennes qui, en ce
moment, surveillent attentivement les débats du
Congrès colombien autour d’une réforme
du Code des mines qui cherche à livrer à
l’exploitation minière près de la
moitié du territoire national colombien.
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