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Amérique
Latine, sommaire
année 2010, page 5
1 -
Vidéo(s), avec Jose Aylwin, avocat de
la cause Mapuche, Pantuana TV
& - Liberté pour les prisonniers politiques Mapuches
du Chili
2 - Colombie
: Au sud, le conflit touche des milliers de personnes, CICR
3 - La conquête du
"désert" argentin, Stéphane Bürgi
4 - Venezuela
- La socialisation de l'économie, Fernando
Arribas García
5 - Chili
- Tremblement de terre politique et Chicago boys, Franck
Gaudichaud
6 - Colombie
et Venezuela, la réponse de
paix du président Chavez
7
- Colombie, un train peut en
cacher un autre !
8 - Mémoires
Argentines : Les disparus français de la dictature militaire
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M.
José AYLWIN a participé au début des
années
1990 à la Commission Spéciale des Peuples
Indigènes pour l’élaboration de
l’avant-projet de la Loi Indigène actuelle. Il a
été aussi le Directeur de l’Institut
d’Études Indigènes de
l’Université de
La Frontera (sud du Chili) entre 1994 et 1997 et le Coordinateur du
programme des Droits Indigènes de ce même Institut
entre
2002 et 2004. Actuellement, il enseigne le Droit Indigène
à l’Université Australe au Chili.
Il a effectué des études et des
enquêtes sur les
Peuples Indigènes d’Amérique du Nord
(Maîtrise de l’Université de British
Columbia,
Canada) et d’Amérique du Sud pour la Commission
Économique pour l’Amérique Latine
(CEPAL-ONU), pour
l’Institut Interaméricain des Droits de
l’Homme,
à l’Université du Montana, et pour
l’IWGIA au
Danemark. Il a participé à de multiples
rencontres
nationales et internationales sur divers projets dans les domaines des
Droits Indigènes et sur la thématique de
l’environnement. Il a écrit plusieurs ouvrages sur
ces
thèmes concernant le Chili et les autres pays.
Liberté pour les prisonniers
politiques Mapuches du Chili : Cliquez ici !
34
Prisonniers Politiques Mapuche sont en grève de la faim
depuis
plus de 70 jours. Le but est de briser le silence qui entoure cette
action ultime qu’ils mènent pour faire
connaître au
monde les revendications de leurs communautés et de leur
peuple :
- La fin d’utilisation de la loi 18.134, connue sous le nom
d’antiterroriste, appliquée tout
spécialement
contre le peuple Mapuche;
- La fin de la double procédure – civile et
militaire – imposé aux seuls
inculpés Mapuche
pour des délits relevant du droit pénal civil ;
- La révision de tous les jugements antérieurs
concernant
les membres de communautés Mapuche
condamnés au
titre de la loi antiterroriste.
- La reconnaissance de leurs droits environnementaux,
sociaux,
culturels et politiques, en accord avec la Convention 169 de
l’OIT approuvée par le Congrès chilien
et en
vigueur depuis septembre 2009. |
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Colombie : le
conflit armé dans le sud
continue de toucher des milliers de personnes |
par CICR, 6 septembre
2010
Les élections présidentielles de mai et juin ont
été précédées,
dans le sud du pays,
par une recrudescence des affrontements. Dans certaines zones rurales,
des milliers de Colombiens continuent d'avoir un accès
restreint
aux soins de santé, à l'éducation,
à
l'approvisionnement en eau et à l'assainissement. Le point
sur
l’action du CICR en Colombie de janvier à juillet
2010.
En Colombie, les élections présidentielles de mai
et juin
2010 ont été
précédées, dans le sud
du pays, par une recrudescence des affrontements entre les forces
armées et de sécurité (la «
force publique
») et les Forces armées
révolutionnaires de
Colombie – Armée du peuple (FARC-EP). Les
départements les plus touchés sont ceux de
Caquetá, Cauca, Guaviare, Huila et Nariño. Dans
certaines
zones rurales, les milliers de Colombiens qui doivent faire face aux
conséquences du conflit armé continuent d'avoir
un
accès restreint aux services de base que sont les soins de
santé, l'éducation, l'approvisionnement en eau et
l'assainissement. Le CICR déploie une grande partie de ses
opérations dans 25 zones rurales où le conflit
armé est particulièrement intense.
Activités
du CICR de janvier à juillet 2010
Cas de violations présumées du droit
international humanitaire
Entre janvier et juillet 2010, le CICR a consigné 315 cas de
violations présumées du droit international
humanitaire
(DIH) et d'autres règles nationales et internationales.
Afin de prévenir d'autres incidents, il a fait 138
interventions, dont neuf par écrit, rappelant aux parties au
conflit qu'elles ont l'obligation de respecter le DIH et les autres
normes du droit national et international, et que le DIH
protège
la population civile pendant les conflits armés.
De janvier à juillet 2010, le CICR :
- a payé les frais d'obsèques
à 55 familles
victimes de violations du DIH. Cette aide contribue à
réduire la vulnérabilité des familles
déjà très touchées par la
perte d'un de
leur membre ;
- a distribué une aide d'urgence à 280
personnes
menacées de mort et a fourni une aide financière
à
94 victimes pour qu'elles puissent s'installer dans un endroit plus
sûr en Colombie.
Aide
à la population dans les zones contaminées par
les armes
La contamination par les armes est un grave problème en
Colombie. L'utilisation, la présence et l'abandon de mines
antipersonnel, d'engins explosifs improvisés et de restes
explosifs de guerre, tels que des projectiles d'artillerie, des obus de
mortier et des grenades, tuent et blessent gravement des milliers de
personnes ; ils ont en outre un impact psychologique important et des
répercussions socioéconomiques
désastreuses pour
les victimes, leurs familles et de nombreuses communautés
dans
les zones rurales. La contamination par les armes empêche les
cultivateurs d'accéder aux champs, aux sources d'eau, aux
écoles, aux centres de santé, aux lieux de culte,
etc. Ce
fléau entraîne également le confinement
des
communautés qui, par peur, n'osent pas sortir de leurs
hameaux.
Pendant les sept premiers mois de l'année, des vivres ont
été distribués à plus de 3
400 personnes.
La plupart des bénéficiaires ont
également
reçu des articles de première
nécessité
afin de couvrir leurs besoins de base pendant le confinement.
Au total, plus de 7 200 personnes (dont des
déplacés
internes) vivant dans des régions reculées ou
contaminées par les armes, ont
bénéficié
des initiatives agricoles qui ont été mises en
œuvre en vue d'améliorer leur
sécurité
alimentaire et d'atténuer les effets des restrictions
imposées par les acteurs du conflit. Vingt-huit projets
d'agronomie ont été lancés afin de
favoriser la
sécurité des habitants de ces régions
et
éviter ainsi leur départ vers les villes.
Pendant les sept premiers mois de l'année 2010, le travail
de
construction et de réhabilitation des
établissements
scolaires a permis à 1 162 enfants des
départements
d'Arauca, Caquetá, Cauca, Meta et Tolima d'avoir un meilleur
accès à l'éducation.
Dans sa base de données EpiInfo, le CICR dispose
d'informations
sur 1 428 victimes civiles d'engins explosifs improvisés et
de
restes explosifs de guerre, qui ont été
enregistrées afin de mieux évaluer l'ampleur du
problème et d'améliorer ainsi les
réponses
apportées aux besoins de victimes. En avril 2010, le CICR a
croisé les informations dont il dispose sur les victimes de
la
contamination par les armes avec les données officielles du
Programme présidentiel pour une action intégrale
contre
les mines antipersonnel (PAICMA). Cet échange a permis
à
l'État colombien de recueillir des informations sur 194
victimes
qui n'avaient pas été recensées dans
le
système national.
En
outre, le CICR :
- a mené des activités de sensibilisation aux
comportements sans risque et sur les droits des victimes de la
contamination par les armes auprès de 1 700 membres des
communautés et représentants des
autorités
municipales dans les régions touchées par la
contamination par les armes. La Croix-Rouge colombienne, de son
côté, a animé des ateliers similaires
pour 1 000
autres personnes ;
- a conduit trois formations aux premiers secours dans des
communautés qui vivent dans des zones contaminées
par les
armes, afin que ces communautés puissent faire face
à une
urgence en l'absence de personnel médical et dans l'attente
d'une évacuation.
Amélioration
de l'accès aux services orthopédiques et
sanitaires
Pendant les six premiers mois de l'année 2010, le CICR a
dirigé 604 personnes vers six centres de soutien afin
qu'elles
suivent une réadaptation physique ou qu'elles
bénéficient de services de suivi tels que des
traitements
de physiothérapie. Le CICR contribue
financièrement aux
frais de transport, de logement et de nourriture de ces personnes
pendant la durée de leur prise en charge quand ces frais ne
sont
pas couverts par le système national de santé. Le
CICR a
également fait don de 78 appareils orthopédiques
(prothèses ou orthèses) et de 128 aides
techniques
(fauteuils roulants et déambulateurs) à des
personnes qui
n'avaient pas les moyens d'en obtenir.
L'institution a également organisé cinq missions
de
brigades de santé qui ont facilité
l'accès aux
services médicaux préventifs et curatifs. Le
personnel du
CICR a accompagné une équipe de santé
locale
à l'occasion de quatre de ces missions, et la
cinquième a
été entièrement conduite par du
personnel du CICR.
Au cours de ces cinq missions, les brigades de santé ont
examiné plus de 6 200 personnes ; elles en ont
vacciné
560 environ et en ont orienté 836 autres vers des postes de
santé ou des hôpitaux. Parmi ces
dernières, 732 ont
reçu un soutien financier du CICR pour que leurs frais de
transport, leurs besoins essentiels et leurs médicaments
soient
couverts pendant la durée de leur traitement.
Le CICR a également formé plus de 440 membres du
personnel médical travaillant dans 87 structures sanitaires
rurales, pour qu'ils puissent accéder plus facilement aux
zones
touchées par le conflit armé.
8 700 personnes de Barbacoas (Nariño), Montañita
(Caquetá) et Argelia (Cauca) ont
bénéficié
de meilleures conditions d'hygiène suite à la
réhabilitation de trois postes de santé et
l'amélioration des installations d'approvisionnement en eau
et
d'assainissement.
Quatre structures de santé ont été
dûment
marquées de l'insigne de la mission médicale,
conformément à la réglementation du
ministère de la Protection sociale de Colombie
(résolution 1020 de 2002).
Le CICR a également fourni un soutien économique
et des
conseils pour la prise en charge médicale et psychologique
de 72
victimes de violences sexuelles.
Assistance
aux déplacés internes
Pendant les sept premiers mois de l'année 2010, le CICR :
- a distribué à près de 23 000
déplacés internes des vivres ou des bons
alimentaires,
ainsi que des articles de première
nécessité, pour
répondre à leurs besoins pendant les trois
premiers mois
de leur déplacement, et même six mois dans le cas
particulier des foyers vulnérables ;
- a contribué à améliorer
l'accès
à l'eau, à l'assainissement de base et
à des
centres d'accueil temporaires, pour plus de 1 800 personnes
déplacées ;
- a amélioré les
possibilités de
réinsertion sociale de 162 (*) personnes
déplacées
à l'intérieur de leur pays, grâce au
soutien
psychosocial qu'il leur a apporté et à ses
projets de
génération de revenus ;
(*) Chiffres du 30
juin 2010.
Le CICR a contribué à l'amélioration
des services
de base fournis aux personnes déplacées. Il a
ainsi fait
don de matériel et de meubles de bureau à 20
Unités d'assistance aux personnes
déplacées
(Unidades de Atención Integral a la Población
Desplazada). Quatre de ces unités ont
été
rénovées et les installations d'une autre sont en
cours
de réhabilitation.
Personnes
portées disparues et familles
Le CICR a apporté son soutien à une initiative de
l'Institut national de médecine légale visant
à
améliorer la base de données utilisée
par tous les
services de médecine légale pour l'identification
des
cadavres, qui compte déjà 47 410 dossiers. Trois
experts
colombiens ont été invités
à suivre une
formation à Genève.
En collaboration avec le bureau du Haut Commissariat des Nations Unies
aux droits de l'homme (HCDH) en Colombie, le CICR a animé le
groupe de travail interinstitutionnel mensuel sur le soutien
psychosocial aux familles des personnes portées disparues.
En avril, le CICR a aidé des associations de familles de
disparus à organiser à Bogotá le
deuxième
Congrès mondial sur le travail psychosocial dans les
situations
d'exhumation, disparition forcée, justice et
vérité.
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La conquête du
"désert" argentin et la fin de la question
indigène
Etude
sur la justification idéologique d'une spoliation |
par Stéphane
Bürgi, mémoire année 2008
Présentation
Ce mémoire est l’aboutissement d’un travail
complexe de
recherches, de lectures, et d’écriture, qui
s’étale sur
environ trois ans. L’objectif de cette introduction est ainsi
d’amener le lecteur à comprendre comment à
partir
d’une perspective d’étude très générale : la
dénommée
conquête du « désert »- s’est
défini la
thématique précise de ce travail de mémoire de licence :
l’étude de la justification idéologique qui a soutenu cette
conqête, réalisée en 1879 sous les ordres du général
Julio
Argentino Roca. Autrement dit, le but est d’exposer au
lecteur
quels ont été les principaux obstacles rencontrés, les
interrogations que ces obstacles ont soulevées, et les choix
effectués en conséquence. De même, nous tenterons de
décrire
les questions survenues une fois le choix de cette thématique
effectué, ainsi que les limites qui se sont imposées
d’elles-mêmes ou que nous avons dû nous
imposer en
raison du genre de notre étude : un mémoire de licence.
Pour ce faire, nous décrirons premièrement et brièvement le
déroulement de notre travail de recherches. Certains problèmes
rencontrés durant l’investigation, mais plus encore ceux
issus
du résultat de celle-ci, ont en effet fortement orienté la
définition de notre thématique. Celle-ci a bien sûr aussi
été
définie par rapport à la littérature existante sur la question.
C’est pourquoi nous nous intéresserons en second lieu à
l’évolution historiographique de la littérature traitant de
la
conquête du « désert ». Parallèlement,
nous
décrirons et analyserons les principaux ouvrages nous ayant servi de
support durant notre travail.
Une fois cela fait, nous pourrons alors revenir sur le cadre
thématique. Nous verrons plus précisément comment les interrogations
soulevées par ces deux étapes initiales (la recherche et
l’étude de l’historiographie sur le sujet) ont
contribué
à donner certaines limites à notre thématique, ou au contraire
comment elles nous ont poussé à dépasser le cadre auquel nous
voulions nous tenir primitivement.
Finalement, et en guise d’avertissement au lecteur, nous
définirons notre position quant au choix de certains termes utilisés
tout au long de ce mémoire, termes qui sont à notre avis aussi
importants que récurrents.
Le
travail d’investigation
Lorsque nous sommes partis en Argentine pour y effectuer notre travail
de recherches, nous savions bien peu de choses sur la
conquête du
« désert ». Orienté sur ce sujet par Mme Aline
Helg qui
nous avait gracieusement prêté le deuxième tome
d’un
récit de cette conquête écrit par l’un de ses
protagonistes, le colonel Racedo, nous sommes alors partis à Buenos
Aires avec comme principal objectif de retrouver le premier tome de ce
récit, car nous pensions pouvoir baser essentiellement notre mémoire
sur ces deux sources. A notre grand bonheur, nous avons rapidement
obtenu l’opus recherché, et ceci malgré sa rareté dans le
commerce et dans les boutiques spécialisées en livres anciens.
Parallèlement à cela, nous étions aussi partis à la recherche de
documents d’archives, ainsi que d’une littérature
spécialisée. La recherche d’archives nous amena à
différents
endroits de la capitale, tels que la Bibliothèque du Congrès, le
Musée Roca (qui est aussi un centre de recherche historique), et les
Archives Générales de la Nation. Lorsque nous avons découvert en ce
dernier endroit la présence d’un dossier intitulé :
«
Documentos económicos. Colonización. Indios. Fronteras »,
nous
avons alors décidé d’investir la majeure partie de notre
temps
de recherche dans ces archives. Ce temps nous étant compté, nous
avons alors opté pour la numérisation de ces archives. Il nous était
en effet impossible de consulter ces nombreuses archives les unes
après les autres pour vérifier sur place si elles recelaient bien des
informations perspicaces pour notre sujet, et ceci d’autant
plus
que leurs contenus respectifs étaient très hétéroclites, et que la
plupart d’entre elles devaient être décryptées,
car
manuscrites. Nous avons donc constitué notre propre fond
d’archives numériques qui contient un peu moins de 1100
photographies.
La recherche bibliographique s’avéra également assez
fructueuse. D’une part, elle nous avait permis de rassembler
plusieurs ouvrages spécialisés d’importance, tels que ceux
de
Vanni Blengino, Enrique Hugo Mases, David Viñas, et Juan Carlos
Walther. D’autre part, nous avions pu compléter nos sources
avec
les récits contemporains de Lucio V. Mansilla, Manuel Prado, et avec
d’autres chroniques de la conquête écrites par des
acteurs
moins importants de celle-ci; sans oublier une importante compilation
de textes emblématiques de la pensée argentine de la deuxième
moitié du XIXe siècle, rassemblés par Tulio Halperín Donghi. En
outre, nous avions trouvé au Musée Roca deux albums photographiques
sur la conquête de la Pampa et de la Patagonie.
Nous sommes donc rentrés en Suisse avec un matériel de base abondant,
qui nous promettait une belle entrée en matière. Malheureusement,
plusieurs désillusions nous attendaient à notre retour. Tout
d’abord, l’étude approfondie de nos deux sources
principales s’avéra assez décevante.
Ces deux sources sont en effet composées des rapports quotidiens des
chefs des cinq divisions ayant participé à la conquête du
« désert ». Ecrits à la façon de
bilans, ces
journaux ne font que signaler répétitivement l’ordre du
jour,
les missions assignées aux subalternes (dont les rapports sont aussi
retranscrits) avec leurs résultats, les particularités topographiques
rencontrées, les problèmes liés à la troupe, etc. Lorsque survient
un combat avec des Indigènes, l’officier se contente
d’en
signaler le résultat comptable : mort, capture ou reddition de tel
cacique, total de morts et de prisonniers, nombres de captifs sauvés
et de têtes de bétail récupérées.
De façon très logique, il est assez rare de rencontrer des
commentaires vraiment personnels dans ces rapports militaires, et
lorsqu’il y en a, ils ne sont évidemment pas du genre à
remettre en cause l’entreprise à laquelle leurs narrateurs
participent. A l’opposé, nous pouvions donc espérer des
commentaires élogieux visant à glorifier, sur le mode de
l’épopée, cette conquête du « désert
» :
mais là aussi, les sources se sont avérées peu prolifiques de ce
style de prose. Dans l’ensemble des deux tomes, le style
télégraphique des journaux militaires ne laissait pas de place aux
ornements littéraires, et cela rendait ces sources très opaques à
une analyse historique telle que nous la concevions, et donc à
l’interprétation.
Outre ces rapports militaires, nous avions aussi en notre possession
les récits journaliers des missionnaires et des scientifiques ayant
accompagné l’expédition militaire du général Roca. Mais
à
l’instar de leurs collègues militaires, les hommes
d’église et de science ne font que rien d’autre
que
comptabiliser le nombre de baptêmes effectués ou
d’espèces végétales et minérales rencontrées.
Comptablement
très riches, l’ensemble de ces sources se révélait
paradoxalement assez aride, et nous ne voyions pas vraiment comment les
utiliser au sein d’un travail d’envergure.
Ensuite, l’étude des archives numérisées
n’apporta pas
non plus les résultats escomptés : une fois l’indexation de
celles-ci effectuée, leur contenu se révéla trop hétéroclite dans
la perspective d’une étude approfondie. Individuellement
parlant, ces archives n’étaient pas dénuées
d’intérêt, mais -de la même
façon que pour
les sources précitées- elles ne pouvaient servir de socle
suffisamment solide pour la construction de notre mémoire.
Après l’étude de nos principales sources, nous nous
retrouvions
donc dans l’impasse. La seule possibilité sérieuse
d’étude qui s’offrait à nous aurait été de nous
lancer
dans une étude comptable sur le nombre de prisonniers et de victimes
indigènes afin d’essayer de déterminer l’ampleur
du
génocide perpétré par l’armée argentine. Mais cette
tâche était difficile à réaliser depuis la Suisse car il
aurait fallu pouvoir comparer nos sources à d’autres. De
plus,
les évaluations chiffrées données ces dernières années
n’étaient à notre avis pas à remettre en question.
Il nous fallait donc orienter notre étude sur de nouvelles sources, et
c’est en lisant ce singulier ouvrage pour l’époque
qu’est Una excursión a los indios ranqueles que
l’idée de
travailler sur la justification idéologique de cette
conquête
commença à prendre forme plus nettement dans notre esprit.
Source : Section
d'Histoire de l'Université de Lausanne
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Vénézuéla - La
socialisation de l'économie
et la nouvelle bourgeoisie |
Fernando Arribas
García (*), le 14 août 2010
Toutes les définitions sérieuses du socialisme,
indépendamment des différences qu'il peut y avoir
entre
elles quant aux caractéristiques et aux modes d'organisation
et
de fonctionnement de la nouvelle société, se
rejoignent
en soulignant le trait principal du processus de construction du
socialisme qui est la socialisation croissante des moyens fondamentaux
de production des biens et des services.
Il y a accord sur le fait que cela rend nécessaire
l'élimination progressive de la
propriété
privée de ces moyens de production, afin de
libérer le
travailleur des conditions objectives dont découlent
l'exploitation et l'aliénation, et de libérer en
même temps les forces productives de la
société des
entraves que lui impose l'ordre capitaliste et qui les
empêchent
d'atteindre une expansion maximale.
L'expérience historique a démontré que
le
problème de la construction du socialisme est plus complexe
que
la simple élimination de la propriété
privée de la base économique de la
société.
Il est devenu évident que la socialisation de
l'économie,
en soi, ne garantit pas la construction et le développement
durable du socialisme. Mais il n'y a aucun doute quant au fait que
cette socialisation est le préalable objectif
inéluctable
de tout processus de construction socialiste.
Il est aussi indubitable que la persistance du régime de
propriété privée des moyens
fondamentaux de
production garantit la persistance de l'exploitation et, donc, du
capitalisme.
Par conséquent, elle est toujours la première
question
à prendre en compte dans n'importe quelle
définition du
socialisme, et la première tâche à
résoudre
dans le processus de construction de cette nouvelle
société.
En vertu de ce qui a été dit auparavant, une
société est plus proche d'établir les
prémisses matériels pour la construction du
socialisme
dans la mesure où elle fait avancer le processus de
socialisation des moyens fondamentaux de production de biens et des
services.
Nous pouvons mesurer objectivement l'avancée ou le retard
relatif d'une société donnée
à cet
égard, en observant les niveaux de socialisation et/ou de
privatisation de l'économie.
Pour cela, il faut observer l'évolution de la composition du
Produit Intérieur Brut (PIB) de la
société en
question, et déterminer trimestre après trimestre
et
année après année quel pourcentage du
PIB total du
pays est produit par le secteur privé et quel pourcentage
par le
secteur public.
Cela nous permettra d'établir le poids spécifique
de
chaque secteur dans la production totale de l'économie
national
à chaque moment, et aussi de déterminer la
tendance
historique qui se manifeste dans le pays.
Dans une société qui vit effectivement un
processus
révolutionnaire de transformation de son
économie,
c'est-à-dire, qui subit une transformation plus ou moins
rapide
et profonde de sa structure économique, de tels pourcentages
et
une telle tendance historique démontreront des changements
brusques et importants.
Ainsi c'est ce qui s'est passé, par exemple, en Chine: en
1952,
le secteur d'Etat contribuait seulement pour 19,1% du PIB et le secteur
privé contribuait pour 78,7%; mais en 1957, le secteur
d'Etat
contribuait à hauteur de 33,2% du PIB, les secteur
coopératifs et communaux pour 64%, et le secteur
privé
seulement 2,8%.
Autres exemples: en Yougoslavie, avec un modèle de
construction
du socialisme très différent de celui chinois, le
poids
spécifique du secteur privé est tombé
de 58,2% en
1947, à 28,3% en 1956, et à seulement 20,4% en
1964.
Et quelque de chose de similaire s'est déroulé
également dans le cas du Chili, malgré les
énormes
différences historiques, culturelles et politiques qui
existent
entre le pays sud-américain et les exemples
précédents: le poids du secteur privé
dans le PIB
non-agricole a chuté de plus de 85% en 1970 à 61%
après seulement trois ans de gouvernement d'Allende et
l'Unité populaire.
Il est clair qu'indépendamment du modèle de
socialisme
que l'on cherche à construire, et des différentes
voies
qui sont empruntées dans ce processus, dans tous les cas
cela
emmène à une diminution plus ou moins rapide et
soutenue
de la contribution privée au total de la production
nationale,
et à une croissance également rapide et soutenue
de
l'apport des formes économiques socialisées
Le
cas vénézuelien
Pourcentage du PIB
au Venezuela du secteur privé
Voyons ce qui s'est passé au Vénézuela
dans les 16
dernières années. Le graphique annexe montre
l'évolution de la participation en pourcentage du secteur
privé dans la composition du PIB national, trimestre par
trimestre depuis 1994, c'est-à-dire, depuis le dernier
quinquennat de la « IVème République
».
Les calculs ont été effectués
à partir de
chiffres empruntés à la Banque centrale du
Vénézuela (www.bcv.org.ve).
Ce graphique indique que, à la différence des
pays dans
lesquels ont eu lieu effectivement des transformations
révolutionnaires de l'économie en vue du
socialisme, au
Vénézuela il ne s'est pas produit
jusqu'à
maintenant une réduction importante et soutenue du secteur
privé.
En fait, le poids spécifique de cette secteur n'a pas fait
que
stagner depuis le début du gouvernement du
président
Chavez (premier trimestre 1999, quand il atteignait 65% du PIB total),
mais qu'il a eu tendance à croître et qu'il a
atteint ses
maximums historiques après huit années de
processus
bolivarien (72,4% au second trimestre 2007), dans des moments dans
lesquels le pays vivait une période de
prospérité
relative.
Il est certain qu'à partir de 2008, il y a eu une diminution
de
cette valeur, d'une part comme résultat de l'acquisition par
l'État de la place d'actionnaire majoritaire dans certaines
entreprises qui appartenaient jusqu'alors au secteur privé
(CANTV, Electricité de Caracas, BANVENEZ, SIDOR, CEMEX,
certains
sous-traitants et exploitants pétroliers etc.), et d'autre
part
comme conséquence de la chute de l'activité
privée
découlant de la crise économique mondiale.
Mais cela n'a pas évité que, au premier trimestre
2010,
le poids spécifique du secteur privé (65,9%) ait
été encore plus important qu'au début
du processus
bolivarien et même plus important que le minimum historique
atteint dans les dernières années de la
«
IVème République » (59,7% au second
trimestre
1996). Et cela n'a pas non plus modifié de
manière
significative la tendance générale à
la
consolidation de l'emprise du privé sur 2/3 du total de
l'économie nationale.
Dans l'ensemble, l'économie
vénézuelienne continue
à être aujourd'hui essentiellement
privée, et
même plus privée qu'avant le début du
gouvernement
bolivarien.
Cette tendance à la consolidation quantitative du secteur
privé pourrait être l'expression objective de
l'apparition
et du renforcement d'une « nouvelle bourgeoisie »
qui a
émergé dans l'ombre du gouvernement bolivarien,
et qui en
est venue à occuper certaines activités
économiques que la « vieille bourgeoisie
» a
dû abandonner totalement ou partiellement comme
résultat
de l'action du gouvernement depuis 1999.
La somme totale des reculs subis par la fraction historiquement
établie de la classe bourgeoise, plus les
avancées
obtenues par la fraction émergente de la même
classe,
laisse au secteur public dans son ensemble approximativement
à
un point similaire auquel il se trouvait il y a 11 ans, et en recul par
rapport à la situation d'il y a 14 ans. En d'autres termes,
il y
a eu une redistribution des postes, et de leurs poids relatif, entre
deux fractions différentes de la même classe
bourgeoisie,
Ce transfert partiel du poids spécifique qu'avait
l'entrepreneuriat privé qui dominait la «
IVème
République », non au peuple
vénézuelien ni
à l'État, mais au nouvel entrepreneuriat
privé qui
de plus en plus domine la « Vème
République
», paraît être conforme à la
composition de
classe du camp bolivarien et au rapport de forces existant en son sein.
Enfin, après tout, le processus actuel dominant la vie
politique
vénézuelienne, impulsé par une large
alliance de
classes et de forces qui comprend des secteurs émergents et
non-monopolistiques de la bourgeoisie, a un caractère
anti-impérialiste, anti-monopoliste et de
libération
nationale, mais ce n'est pas nécessairement porteur d'une
perspective authentiquement socialiste.
(*) Directeur de l'Institut d'études politiques et
sociales Bolivar-Marx (Caracas)
Source : publié
dans le numéro 178 de Tribuna Popular
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Tremblement
de terre politique
et retour des Chicago boys
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Franck Gaudichaud,
3 août 2010
Une défaite qui vient de loin
Jeudi
11 mars, le milliardaire Sebastian Piñera a
succédé officiellement à la
présidente
socialiste Michelle Bachelet. Elu chef de l’Etat, en janvier,
le
leader de Rénovation nationale (RN) conquiert la
première
magistrature au nom de la coalition « Alliance pour le
Changement
» (qui regroupe néolibéraux et
ultraconservateurs).
Ainsi que nous le rappelions au moment de
l’élection,
c’est un tournant historique et politique : le dernier
président de droite élu était Jorge
Alessandri,
en… 1958. Se référant à la
transition
démocratique qui mit fin à la dictature du
général Augusto Pinochet (1973-1989), certains
analystes
n’hésitent pas à parler d’une
«
deuxième transition ». Après dix-sept
ans
d’un terrorisme d’Etat
contre-révolutionnaire qui
mit fin à l’expérience de
l’Unité
populaire de Salvador Allende, et à deux
décennies
d’une démocratie sous tutelle issue
d’une «
transition pactée », conduite par la Concertation
des
partis pour la démocratie — coalition entre le
Parti
socialiste (PS) et de le Parti démocrate chrétien
(DC)
—, le peuple chilien connaîtrait
désormais les joies
de l’alternance…[1]. Face au terne
ex-président
Eduardo Frei (DC), le médiatique Piñera
– «
Berlusconi chilien » avec bronzage permanent et dents
éclatantes – a promis monts et merveilles
à grands
coups d’ingénierie marketing et
télévisuelle
: croissance soutenue de 6% destinée à faire
oublier la
crise capitaliste mondialisée, création
d’un
million d’emplois, combat de la pauvreté et
surtout,
accompagné d’un discours sécuritaire
bien
aiguisé, fin de la délinquance (du moins celles
des
classes populaires car les cols blancs ne seront sûrement pas
inquiétés…).
La défaite est amère pour la Concertation qui
croyait
pouvoir encore faire jouer la logique du « vote utile
»
face aux fantômes d’une droite marquée
au fer rouge
par son appui à la dictature. Mais Piñera,
s’affirmant « humaniste », a su
rappelé
qu’il avait voté « non »
à Pinochet en
1988, sans pour autant pouvoir se départir de son
passé
de nouveau riche issu du régime militaire, ni de son
alliance
avec l’Union démocratique indépendante
(UDI),
droite réactionnaire « pinochetiste »
(proche de
l’Opus Dei et première force au
Congrès). Les
députés du centre-gauche espéraient
que
l’imposante popularité de la Présidente
Bachelet et
ses récentes réformes en faveur des plus pauvres
pourraient faire oublier le passif de décennies de
social-libéralisme : justice pour les victimes de la
dictature
« dans la mesure du possible », alors que la loi
d’amnistie de 1978 est toujours en vigueur et que Pinochet
est
décédé sans avoir
été jugé ;
« économie sociale de marché
» où le
social est trop souvent un faire valoir destiné à
faire
accepter un projet macro-économique fondamentalement au
service
du grand capital ; absence de volonté politique au moment de
mettre définitivement fin à la constitution
autoritaire
de 1980 ; accords multiples avec la droite au Parlement ; politique
environnementale désastreuse car soumise au caprice des
transnationales ; répression non démentie des
revendications historiques du peuple Mapuche et autisme face aux
revendications étudiantes et salariales…[2].
A ce rythme comment s’étonner qu’il y
ait toujours
plus de citoyens qui s’éloignent des urnes et des
grands
partis institutionnels (31 % des Chiliens en âge de voter,
soit
3,8 millions de personnes, ne sont même pas inscrits sur les
registres électoraux) et que ceux qui se
déplacent pour
mettre un bulletin dans l’urne aient majoritairement choisit
« l’original » (un patron milliardaire
ambitieux)
plutôt que pour « la copie » (un
sénateur DC
dont la présidence n’a pas laissé de
bons souvenirs
aux classes populaires et aux organismes de défense des
Droits
humains) ? Frei a bien essayé d’agiter un chiffon
rouge
entre les deux tours : « Au cours de la campagne, nos
adversaires
ont toujours dit que la Concertación est au bout du rouleau
parce qu’elle a déjà
gouverné pendant 20
ans. Mais eux-mêmes ont été au pouvoir
pendant 17
ans et le Chili s’est beaucoup mieux porté avec la
Concertación que durant leurs années [de
dictature, NdE]
». Cela n’a pas suffit, pas plus
d’ailleurs que
l’appui reçu du Parti communiste et de sa
coalition,
Juntos Podemos…
Le
dernier jour de Bachelet. Privatiser le littoral de la mer australe ?
Et s’il fallait essayer d’expliquer pourquoi la
Concertation est honnie de toute une partie du mouvement social et
critiquée par de nombreux militants de gauche (y compris du
Parti socialiste) ; s’il fallait tenter de montrer de quoi le
social-libéralisme est-il le nom au Chili, on pourrait alors
s’en tenir au denier jour de la présidence
Bachelet. Ce 10
mars 2010, c’est avec l’approbation du dernier
exécutif de la Concertation qu’est
paraphée la
réforme de la Loi générale de
pêche et
d’agriculture. L’objectif ? Tout simplement, venir
en aide
aux transnationales de saumon d’élevage qui ont
inondé les côtes du sud du pays depuis des
années
et connaissent de graves difficultés. Crise sanitaire tout
d’abord, conséquence d’un mode de
production
aberrant qui a dévasté une partie du littoral
à
coup de colorant, hormones, antibiotiques, surpêche (pour
nourrir
les saumons !). Crise économique ensuite. Alors que cette
industrie était censée être un des
moteurs de
l’économie, elle a été
engagée sur la
voix d’une rentabilité à tout prix,
basée
sur une exportation de masse aux quatre coins de la planète
(Japon, Etats-Unis, UE). Le développement exponentiel
d’un
virus (virus ISA) a affecté toute la chaîne, et
c’est ce modèle d’élevage
intensif
entièrement dépendant du marché
mondial
s’est affaissé violemment [3]. Cette «
agonie du
saumon » a provoqué une chute de la production de
plus de
30% entre 2007 et 2008 et le licenciement de milliers travailleurs
(plus de 15.000) [4].
Vues les conditions offertes, en 20 ans, les capitaux ont
afflué
de toute part, à commencer par la transnationale hollandaise
Nutreco (plus grosse productrice mondiale) mais aussi des entreprises
norvégiennes, japonaises, canadiennes et espagnoles. Le
patronat
chilien n’est pas en reste puisqu’il
détient 55% de
la filière. N’en déplaise aux
écologistes et
aux pécheurs artisanaux (dont la vie a
été
ruinée), le Chili est devenu le second producteur de la
planète, avec plus de 650 000 tonnes de saumon en 2007 et,
en
valeur, cette denrée représente le 4°
poste
d’exportation nationale [5]. Rapidement c’est un
véritable lobby du saumon qui a fait son apparition au sein
des
institutions et de la société civile. Ainsi,
alors que le
secteur affiche désormais une dette de deux milliards de
dollars, la proposition du gouvernement Bachelet a
été de
garantir le déblocage d’un fonds public de 450
millions de
dollars. Les banques restant méfiantes, le projet de loi
prévoit aussi une modification des règles de
production,
un meilleur confinement des poissons, une rotation
régulière dans les lieux
d’élevage
et… la concession de milliers d’hectares de mer et
de
terre ferme offerte comme garantie hypothécaire
auprès
des banques ! Comme le rappellent les responsables de la campagne
« Sauvons la mer chilienne », « Jamais
dans
l’histoire aucun pays n’avait permis
d’hypothéquer la mer. Ce n’est pas
seulement un
scandale, c’est aussi le renoncement de notre pays
à la
souveraineté sur son territoire » [6]. Au lieu de
s’inscrire dans le sillage d’Allende qui avait
exproprié les grandes compagnies de cuivre (“le
salaire du
Chili”), le gouvernement Bachelet se sera montré
beaucoup
moins glorieux aux yeux de l’histoire… [7]
Les
premiers jours de Piñera. Le retour des «Chicago
boys»
« Se van los capataces y vuelve el patrón
» : les
contremaîtres partent et le patron revient… [8].
C’est le sentiment d’une partie des citoyens avec
cette
élection. En effet, la majeure partie du personnel politique
de
la Concertation n’était pas issu du milieu des
affaires,
bien que ses membres dirigeants s’en soient rapidement
rapprochés au contact du pouvoir. Le président
socialiste
Ricardo Lagos n’avait-il d’ailleurs pas
été
proclamé, à la fin de son mandat, comme
l’un des
meilleurs hommes politiques du XX° siècle par le
syndicalisme patronal chilien ? Cependant,
l’arrivée de
Piñera représente la fin d’une
médiation
politique : désormais, c’est un capitaliste
décomplexé qui tient les rênes du pays.
Certes, ce
que certains sociologues nomment la démocratie «
des
compromis » ou encore « du consensus »
[9] va se
poursuivre, avec ses divers accords entre droite et gauche, alors que
« l’Alliance pour le changement » ne
possède
pas de majorité absolue au parlement [10]. Il
n’empêche : ce grand patron compte bien gouverner
pour les
siens. A la tête d’une fortune de plus
d’un milliard
de dollars et placé au 701ème rang du classement
Forbes
des personnes les plus riches du monde, son groupe est
présent
dans la télévision (Chilevision), la banque, la
santé, la grande distribution,
l’énergie, le
transport aérien (Lan Chile) et même le football
avec un
club très populaire (« Colo Colo »)
[11]. Grand
admirateur du Président français Sarkozy, S.
Piñera compte administrer l’Etat comme il
gère ses
entreprises, alors que la côte de ses actions en bourse a
connu
une envolée remarquée dès
l’annonce de son
élection. Si l’on regarde qui sont les actuels
ministres
[12], il est intéressant de noter que le nouveau
président a choisit de choyer avant tout les
élites
économiques plutôt que la droite politique. Pablo
Longueira, fondateur de la UDI, s’en est d’ailleurs
ému, ce qui pourrait laisser augurer des tensions entre
néolibéraux et ultraconservateurs dans un futur
proche.
« En effet, le nouveau cabinet ministériel
ressemble par
certains côtés à un
véritable conseil
d’administration du pays ! Le Président avait
beaucoup
insisté sur sa volonté de former un «
gouvernement
des meilleurs » […]. De fait, 13 des 22 ministres
ne sont
pas des militants. Cela ne veut pas dire qu’ils
n’ont pas
de conviction politique, mais au moins n’en ont-ils pas fait
leur
profession. Finalement, le politicien le plus aguerri est probablement
Jaime Ravinet, ancien de la Concertation (DC) qui redevient ministre de
la Défense […]. S’ils ne sont pas de
purs
politiques, d’où proviennent donc les nouveaux
ministres ?
Principalement du secteur privé et du monde universitaire.
Si ce
gouvernement n’incarne pas la
«transversalité»
annoncée, au sens de la représentation de
différentes sensibilités politiques, il est par
contre
généreusement équilibré du
point de vue de
la représentation des groupes et familles qui
pèsent dans
l’économie chilienne. Alfredo Moreno, membre du
directoire
de Falabella (grande distribution) et de Penta (banque), devient ainsi
ministre des Affaires Etrangères. Son expérience
en
matière de diplomatie est surtout fondée sur son
rôle dans l’expansion internationale de
l’entreprise,
notamment vers le Pérou. Laurence Goldborne, ancien
directeur
général d’un concurrent direct dans la
grande
distribution (Cencosud), hérite du ministère des
mines,
secteur clé dans le pays du premier producteur mondial de
cuivre. Magdalena Matte, issue d’une prestigieuse famille
connue
pour son opposition au gouvernement de Salvador Allende, occupera le
portefeuille du logement. Au Sernam (Service National de la Femme), on
trouvera Carolina Schmidt, qualifiée par le passé
par une
revue du monde des affaires de « première dame des
Luksic
», famille qui apparaît au 76ème rang du
classement
Forbes » [13]. Les autres responsables de portefeuille sont
des
universitaires (6 d’entre eux sont titulaires d’un
doctorat). 16 membres du gouvernement ont étudié
dans les
amphithéâtres de la très conservatrice
Université Catholique et une majorité exhibe
fièrement des diplômes
d’universités
étasuniennes, particulièrement
d’Harvard et de
Chicago. On assiste à une sorte de retour d’une
nouvelle
génération de “Chicago boys”,
prête
à perfectionner le modèle
débuté en
dictature par leurs prédécesseurs, nourris dans
les
années 70 au biberon des économistes Milton
Friedman et
Arnold Harberger, pionniers du néolibéralisme
[14]. Le
meilleur représentant de ces idéologues de combat
est
sans aucun doute Juan Andrés Fontaine, nommé
ministre de
l’économie. Directeur du Centre
d’études
publiques (CEP), l’un des principaux réservoirs
d’idée de la droite libérale, Fontaine
est
lié au groupe Matte et membre du directoire de plusieurs
grandes
entreprises. Ce gouvernement est ainsi formé par une
majorité d’hommes, sans presque aucune
expérience
politique mais qui représentent à merveille la
dimension
de classe qu’ils se proposent de défendre.
Quand
la terre tremble. Stratégie du choc
néolibéral contre reconstruction
démocratique et solidaire
A en croire que les dieux eux même en frémissent
de
colère ! C’est dans un pays partiellement
détruit
et une population mis à mal par un séisme (puis
un
tsunami) d’une magnitude exceptionnelle, que S.
Piñera a
dû assumer ses premiers moments de gouvernance. La droite
n’aura pas pu fêter trop ouvertement sa victoire.
Comme le
soulignait la journaliste Claire Martin : « Pas de cotillon
ni de
célébration. La prise de pouvoir de Sebastian
Pinera sera
ce jeudi 11 mars d’une sobriété
exemplaire ».
La tragédie qui a fait plus de 800 morts et
terrorisée
les habitants de la région du Maule et
Bío-Bío a
bouleversé l’agenda du président qui a
appelé à « sécher ses larmes
» et
à se mettre au travail.
L’exécutif a d’abord tout fait pour
étouffer
la défaillance complète de l’ONEMI,
organisme
lié au ministère de
l’intérieur et à
la marine qui est chargé d’organiser les
évacuations en cas de danger de tsunami. Les familles des
centaines de disparus et noyés crient pourtant au scandale
devant l’incompétence de
l’administration et
l’arrogance de l’Amiral Edmundo González
qui en est
responsable [15]. Selon certaines estimations, ce ne sont pas moins de
30 milliards de dollars qui devront être investis au cours
des
prochaines années pour reconstruire les infrastructures et
la
droite pourrait en profiter pour avancer une logique de «
stratégie du choc ». D’autant
qu’elle a de
l’expérience en la matière. Noami Klein
a
rappelé à quel point dans des moments de grande
vulnérabilité, de désorganisation
suite à
des catastrophes naturelles ou des coups d’état,
les
individus comme les sociétés peuvent
être plus
facilement soumis à des thérapies de choc
économique ou des formes croissantes
d’autoritarisme [16].
En déployant plus de 10 000 militaires dans le sud du pays
et en
déclarant l’Etat de siège dans
certaines
régions au nom de la lutte contre les « saccages
»,
à grand renforts de reportages
télévisés,
le signal est clair. La priorité a été
donnée à une intervention sécuritaire
musclée défendant la grande
propriété
privée, notamment celle des chaînes de
distribution (telle
Líder qui appartient à Wall-Mart), alors que dans
de
nombreuses zones affectées, souvent très pauvres,
aucune
action publique d’urgence n’avait
été mis en
place et que les services de base (comme l’eau potable ou
l’électricité)
n’étaient pas encore
rétablis. Le chaos, une assistance défectueuse
produit du
modèle semi-public chilien, les manques de ravitaillement et
la
spéculation de certains commerçants peu
scrupuleux ne
pouvaient manquer de favoriser les comportements d’angoisse,
y
compris de violence. Mais certaines scènes de pillage ou
d’achat compulsif, y compris dans le grand Santiago (pourtant
peu
affecté par le séisme), ont aussi mis en
lumière
certains comportements collectifs marqués par le «
chacun
pour soi » d’une société
éclatée et anomique, dont le terreau est
composé
d’un mélange toxique de valeurs
ultraindividualistes,
d’appels à la consommation permanente (mais
à
crédit) combinés avec une brutale fracture
sociale et un
passé autoritaire, toujours présent en filigrane
[17].
Sans aucun doute, il faudra dans les mois à venir prendre
plus
de temps pour décrypter ce qu’il s’est
passé
durant ces journées, mais il n’est pas
exagéré d’affirmer, qu’une
fois de plus, le
mythe du « jaguar » de
l’Amérique du sud,
celui du pays riche et « développé
», a
été mis à nu dans toutes ses immenses
contradictions : le Chili reste l’un des dix pays les plus
inégalitaire de la planète.
Dans ce contexte, Piñera s’apprête
à
appliquer une politique de « capitalisme du
désastre
» (Noami Klein) où les discours «
d’union
nationale » sont au service d’une perspective de
reconstruction qui se fera au profit de la bourgeoisie [18].
Déjà les grandes manœuvres on
débuté.
Au sein du cercle proche du pouvoir ont retrouve plusieurs personnages
clefs des entreprises de construction du pays. Certains
d’entre
eux ont mené par le passé des actions
immobilières
importantes avec le groupe de l’actuel président,
dont
l’intendant (préfet) de la région Maule
(l’une des plus touchées par la catastrophe), le
ministre
de l’économie et l’intendant de
Santiago. Fernando
Echeverría est d’ailleurs passé
directement de la
Chambre chilienne de la construction (syndicat patronal) à
l’intendance de la région
métropolitaine ! Pour les
spéculateurs immobiliers les plus en vue (dont
l’ami
d’enfance de Piñera, Carlos Alberto
Délano) les
prochaines années s’annoncent on ne peut plus
juteuses,
même si par « malchance » leur
responsabilité
pénale est actuellement engagée du fait de la
mauvaise
qualité des édifices construits (et qui ont mal
résisté au tremblement de terre)… Des
projets
fleurissent de partout et aiguisent les appétits, ainsi dans
l’historique quartier Brésil de Santiago. Le
Ministère des travaux publics (MOP) est quant à
lui aux
mains du lobby de l’Association des concessionnaires
d’œuvres et d’infrastructures publiques
(COPSA).
« Nous voulons parler un peu avec le nouveau ministre et avec
le
Président Piñera pour que toutes ses routes, mais
aussi
ces écoles, hôpitaux, prisons et
bâtiments publics
qui se sont écroulés, soient
transformés en
concessions » a déclaré le dirigeant de
la COPSA
(et cousin de Piñera). Ce à quoi
répondait le
lendemain matin le ministre du MOP : « Le processus de
concessions a aidé au développement du pays et je
crois
qu’il pourrait aider désormais à la
reconstruction
» [19]. Dans un Chili où quasiment tous les champs
sociaux
sont déjà dominés par le secteur
privé et
des logiques de rentabilité immédiates, de telles
déclarations donnent le tournis.
Reconstruire
les alternatives
Face à ce scénario du pire où la
catastrophe
géophysique rétroalimente le tremblement de terre
politique, plusieurs lueurs d’espoirs pointent le bout de
leur
nez. Certes, le mouvement ouvrier, la Centrale unitaire des
travailleurs, la gauche radicale, les associations de quartiers ne sont
plus que l’ombre de ce qu’ils étaient
avant le coup
d’Etat de 1973. Cependant, depuis le début des
années 2000, la « gueule de bois » de la
transition
pactée semble s’éloigner et une
nouvelle
génération de militants se mobilise et renouvelle
les
répertoires de l’action collective, en lien avec
l’expérience des plus anciens. De multiples
initiatives de
solidarité active parcourent le pays, bien loin du show
télévisé du «
téléthon
», sponsorisé par les mêmes entreprises
qui pensent
s’enrichir grâce au séisme. Syndicats,
collectifs
étudiants, associations de femmes ou indigènes,
militants
de gauche tentent, à contre-courant, de montrer que la
notion de
solidarité est encore possible face à la morgue
du
« tout marché » [20]. Ainsi que le
déclare
Carlos Gajardo, dirigeant social de la commune de La Florida
(Santiago), « L’heure est à la
réflexion
lorsqu’on parle de reconstruction. Voulons-nous reconstruire
un
pays où prédominent les décisions de
quelques uns,
l’emploi précaire, le clientélisme, la
corruption ?
Ou bien faire ce qui correspond à un peuple digne : exiger
la
reconstruction du pays sur les bases de la solidarité, la
justice sociale et la souveraineté nationale ? »
[21].
L’alternative se pose effectivement en ces termes : choc
néolibéral par en haut ou reconstruction
solidaire par en
bas ? Néanmoins, pour que le retour en fanfare de la droite
ne
soit qu’un mauvais souvenir et qu’il
n’annonce pas un
retour de bâton plus ample sur le plan régional,
ce
gouvernement et ses alliés devront être combattus
sur leur
terrain : celui de la lutte des classes.
Il faudra ainsi poser la question de la reconstruction politique
d’une gauche populaire et combative : une
«politique de
l’opprimé» (selon la belle formule de
Daniel
Bensaïd), qui ne renonce pas à son
indépendance
devant les atermoiements de la Concertation et qui sache briser la
fatalité de la fragmentation en proposant des alternatives
concrètes. Nul doute qu’un gouvernement
progressiste
aurait pu mettre en branle un autre projet de reconstruction,
financé notamment par une taxe immédiate
(royalty) sur
les entreprises minières transnationales, qui exploitent les
multiples concessions sans quasiment rien laisser. Une telle
fiscalité, pourtant très
modérée,
rapporterait au bas mot la coquette somme de 2,5 milliards par an [22].
Plus largement, c’est une véritable
re-nationalisation du
cuivre sous contrôle des salariés, comme des
services de
base (eau, électricité, communication,
transports) qui
devrait être annoncée comme mesure
d’urgence sociale
et nationale. Une décision de salut public soutenue par une
imposition sur les revenus des transnationales, des classes
aisées et à la mobilisation du mouvement social
et
syndical pour défendre une telle politique. Cette dynamique
suffirait à démarrer une reconstruction
gérée alors au travers d’un organisme
public ad
hoc, sous contrôle des populations concernées et
favorisant les multiples initiatives d’auto-organisation qui
ont
surgit çà et là. Cette
épreuve que traverse
le peuple chilien serait, dans ces conditions, une
opportunité
de refondation démocratique et, pour les gauches sociales et
politiques, l’occasion de reprendre le chemin des ouvriers
des
cordons industriels lorsqu’ils clamaient durant
l’Unité populaire : «Créer,
créer,
pouvoir populaire !».
Notes
:
[1] Pour une analyse de l’élection : F.
Gaudichaud,
« Un entrepreneur multimillionnaire à la
tête du
Chili », Le Monde Diplomatique, 19 janvier 2010,
www.monde-diplomatique.fr/ca... et pour plus d’informations,
voir
la sélections d’articles que nous avons
réalisé (avec Mario Amoros) pour Rebelion.org :
«
Elecciones Presidenciales 2009-2010 », www.rebelion.org/
[2] « Le Chili. Un pays modèle ? » in F.
Gaudichaud
(dir.), Le Volcan latino-américain. Gauches, mouvements
sociaux
et néolibéralisme en Amérique latine,
Paris,
Textuel, 2008, pp. 315-336.
[3] Voir le dossier « Industria salmonera en Chile
» de
l’OLCA (Observatorio Latinoamericano de Conflictos
Ambientales),
www.olca.cl/oca/chile/region....
[4] Darío Zambra B., « La agonía del
salmón », La Nación Domingo, 15 mars
2009.
[5] Arnaldo Pérez Guerra, “Chile : Salmoneras,
crecimiento
a cualquier costo”, 28 août 2003, www.ecoportal.net/
[6] Cette loi pourrait d’ailleurs être
déclarée inconstitutionnelle puisqu’un
recours a
été présenté par 34
députés
et 12 sénateurs devant le tribunal constitutionnel.
[7] Certains journalistes et militants ont même eu le mauvais
gout de faire le parallèle avec le
Général
Pinochet qui avait lui aussi la veille de son départ, fait
passer subrepticement (et en dictature) une loi léonine
favorisant les intérêts de
l’éducation
privée dans le système scolaire du pays.
[8] M. Bercerra, « Se van los capataces y vuelve el
patrón », www.elciudadano.cl/
[9] M. A. Garretón, Alfredo Alejandro Gugliano (coord.),
Democracia en las Américas : desafíos, peligros,
expectativas, Editora Universidad Católica de Pelotas,
Brasil,
2003.
[10] La droite obtient 55 députés sur 120 et 17
sénateurs sur 38 : http://especiales.americaeconomia.com
[11] Piñera a annoncé qu’il pensait se
séparer des propriétés qui pourraient
représenter un conflit
d’intérêt avec son
rôle de Président de la République,
à
commencer par ses actions au sein de Lan Chile. Une annonce qui
mérite d’être suivie de
près…
[12] Pour voir la composition complète du gouvernement :
www.elciudadano.cl/
[13] Antoine Maillet, « Nouveau gouvernement chilien : le
monde
des affaires au pouvoir ? », www.opalc.org, 15
Février
2010. Voir également C. Rivas Arenas, « Asesor de
A.
Edwards y ejecutivo de Falabella es el nuevo canciller », El
Mostrador.cl, 10 de febrero 2010.
[14] F. Marin, « El regreso de los Chicago Boys »,
www.elciudadano.cl/
[15] T. Tricot, « El criminal “error” de
la Armada », Barómetro Internacional, 18 mars 2010.
[16]
N. Klein, La Stratégie du choc, Actes Sud, Paris, 2008.
[17] Voir les textes que nous avons réunis (avec Mario
Amoros)
pour Rebelion.org sur ce sujet : « Un terremoto destruye el
mito
chileno », www.rebelion.org/
[18] « La tempestad social que se aproxima »,
Editorial de
la revue Punto Final, edición Nº 705, 19 de marzo
2010 et
V. Haya de la Fuente, « Que el terremoto no sea excusa
»,
Le Monde diplomatique (Chili), N° 106, avril 2010.
[19] Francisca Skoknic y Juan Pablo Figueroa « Los hombres
del
Presidente. Los vínculos de Piñera con las
empresas de
los edificios dañados », CIPER Chile, 18 mars 2010.
[20] Parmi de nombreuses autres, citons les initiatives en faveur de la
reconstruction des locaux de syndicats portuaires, notamment du port de
Talcahuano, très touché par le tsunami qui a
aboutit
à la création du Regroupement des syndicats pour
la
reconstruction de Talcahuano (voir aussi l’action
lancée
par l’ONG « Plataforma Nexos » :
www.plataforma-nexos.cl).
[21] Carlos Gajardo Álvarez, «A reconstruir un
Chile solidario», 25 mars 2010, www.rebelion.org/
[22] C Cademartori, « El royalty de la minería del
cobre
debe financiar la reconstrucción », 25 mars 2010,
www.rebelion.org/
Source :
Diffusion de l'Information sur l'Amérique Latine
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Menaces
de guerre entre la Colombie et le Venezuela,
la réponse de paix du président Chavez |
Hugo Chavez Frias, Caracas (*), le 1er août 2010
«Tout au long de cette semaine, nous avons lutté
activement pour la paix. Pour arrêter la folie
guerrière
qui s'est emparée du palais présidentiel
colombien de
Nariño. Nous, nous sommes fixés un objectif
suprême
: empêcher le gouvernement servile d’Uribe, proche
de la
sortie, qu’il ne perpètre, un ultime crime et le
plus
néfaste : entraîné un conflit guerrier
entre deux
peuples se sachant et se sentant frères de par Bolivar.
Nous revendiquons pour le peuple colombien les mêmes droits
que
nous revendiquons pour notre peuple et à tous les peuples de
notre Amérique : le droit de vivre en paix. Tel que le
chantait
le grand troubadour chilien Victor Jara, avec tant de force et tant de
beauté.
Lamentablement, l’horrible équilibre
laissé par
l’occupant indigne du Palais présidentiel n'est
rien
d'autre que cela, l'exacerbation de la violence qui définit,
depuis plus de 60 ans la douloureuse évolution historique de
la
Colombie. Un devenir douloureux et tragique que synthétisent
les
paroles du grand chanteur colombien Renán Vega. "Si, il
était fait une minute de silence pour chacun des morts, des
torturés et disparus au cours des 60 dernières
années en Colombie, nous aurions deux années
consécutives à rester silencieux".
Ces réflexions nous guident, notamment, pour saisir la
gravité de ce qui se passe entre le Venezuela et la
Colombie,
pour mettre noir sur blanc notre volonté politique
déterminée et signer. Le dilemme est entre les
mots ou la
mitraille, c’est-à-dire, ou bien, parvenir
à la
table du dialogue des peuples du Sud pour l’exercice de la
paix
dans la région, ou bien, maintenir une atmosphère
d’une haute dangerosité belliqueuse.
Il ne s’agit pas, ni même, de la vieille
controverse du
XIX° siècle, qui opposa civilisation et barbarie. Il
s’agit, dans cette conjoncture, d’un autre type de
polarité : la sagesse et la prudence pour politique, contre
l'irrationalité et la violence militariste. Nous savons,
à ce stade, de quel côté a
été le
gouvernement de la Colombie au cours des huit dernières
années.
Il ne suffit pas seulement de constater les taux
élevés
de violence subis par le noble peuple de la Colombie, mais aussi le
résultat d'une crise interne dont seul le gouvernement
d'Uribe
est responsable. Egalement, nous avons été
confirmé, à travers les médias, du
caractère de la meute, de la gestualité et des
inflexions
verbales, pour ne rien dire du contenu des mensonges des
représentants uribistes sur la scène diplomatique
internationale. Les deux aspects sont sans doute la
conséquence d’une cause identique : son pari, la
permanente agression comme stratégie d’Etat pour
résoudre les problèmes touchant la
société
colombienne.
Le peuple colombien doit comprendre, qu’au Venezuela
bolivarien,
nous n'avons pas de syndicalistes tués ou des
déplacés, ou des forces insurgées
à travers
le pays, nous n'avons pas des groupes paramilitaires, ou des
étendues de terre au service de la production de drogues ou
de
bases militaires étasuniennes, ou des charniers remplis de
cadavres. Personne ne peut (NDR - ne devrait) ignorer cela, ils sont
les éléments définissant la
réalité
colombienne.
Le chemin pris par le Venezuela est autre, bien distinct,
même au milieu des difficultés, et ce qui nous
reste
à conquérir. Ici, nous nous dirigeons vers un
monde plus
juste, plus égalitaire et incluant la paix et
attachés
à l'esprit et à la lettre de notre Constitution.
Nous sommes préoccupés par la mascarade
d’Uribe,
dansant les dernières mesures de musique et sonnant depuis
le
Nord, mais, au-delà de la préoccupation, ce que
ne
peuvent pas permettre de ce côté du monde les pays
souverains, et dignes de le partager en tout respect, est cette
nouvelle escalade qui vise à étendre le Plan
Colombie
hors du territoire colombien. Nous n’oublions pas, que le
Plan
Colombie fut ainsi conçu par l'Empire, expliquant la
servilité du Palais de Nariño.
Patients nos efforts ont été, intenses et
laborieux, pour
relever, dans tout dans ce scénario, les drapeaux de la
paix.
Tel a été l'objet, cette semaine la
tournée
sud-américaine de notre respecté Nicolas Maduro,
ministre
des Affaires étrangères ; - et notre comparution,
jeudi
à Quito au sommet des ministres des Affaires
étrangères de l'UNASUR, réunis, il
faut s'en
souvenir, à la demande du Venezuela. Lors de ce sommet,
comme
nous l'avons toujours fait, nous avons promu le dialogue, la
compréhension et la coexistence pacifique.
Nous ne relâcherons pas nos efforts pour obtenir des
relations
décentes et respectueuses. Même si de l'autre
côté de la frontière, ils continuent en
tendant des
pièges. Nous accompagnons notre grand et merveilleux peuple,
qui
ces jours-ci a été mobilisés en
soutien à
la Révolution.
Comme l’a dit en toute simplicité,
l’apôtre de
l’indépendance cubaine José
Martí :
«L'avenir est la paix».
Irrémédiablement, de
tant d'amour que nous avons pour elle, le sort de la Colombie nous
blesse tous et toutes, quand nous devrions additionner le meilleur de
nos vœux pour que vienne enfin une paix durable et fiable.
Nous
espérons, que comprenne le nouveau gouvernement de la
Colombie,
que nous ne sommes pas animés d’autre
intérêt
ou souhait.
Aujourd'hui, je veux réitérer, ce que j'ai fait
depuis
quelque temps, l'appel, aux forces insurgées en Colombie
pour
trouver les voies de la paix. Je sais que les voies sont complexes et
difficiles, mais elles valent la peine : il s'agit d'une
quête
pour la vie et la dignité de la Colombie et des Colombiens.
Je me souviens, une fois de plus, le verbe du Libérateur
(Simon
Bolivar), comme une source d'inspiration: «La paix, sera mon
port, ma gloire, ma récompense, mon espérance,
qui
m’est et au combien, précieuse en ce
monde».
(…)
Je
le dis avec le poète: J'avoue que j'ai vécu !
J’entonne avec la chanteuse (Violeta Parra) : Merci
à la vie,
qui m'a tant donné, qui m'a donné le sourire et
m'a donné de pleurer. "
(…)
Nous
gagnerons ! ».
Texte et extraits des
Lineas de
Hugo Chavez
Note
:
(*) Président de la République Bolivarienne du
Venezuela
Traduction libre de
Lionel Mesnard
Cet article est sous la mention
tous droits
réservés
et ne peut faire l'objet d'une reproduction sans autorisation
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Trois
billets pour le prix d’un seul…
Colombie, un train peut en cacher un autre ! |
Lionel Mesnard, le 24
juillet
2010
Il
s’agit de trois billets écrits depuis
l’élection de Juan Manuel Santos, au fil des
actualités récentes et inquiétantes se
déroulant en Colombie.
Colombie,
un train peut en cacher un autre… (Premier billet)
La Colombie est repartie pour une nouvelle mandature de quatre ans,
Juan Manuel Santos dauphin d’Alvaro Uribe a
été
élu avec soixante-neuf pour cent des voix, et sera investi
au
mois d’août 2010 comme nouveau président
de la
République de Colombie. Ce vote n’est pas en soit
une
surprise, elle était largement prévisible en
raison du
résultat du premier tour (46%). Sur le fond devait-on
s’attendre à un changement dans un pays
enraciné
dans la violence guerrière et sociale ? Pas vraiment et il
s’agit de comprendre pourquoi la surprise qui devait sortir
de
ces élections, ne l’a pas
été ?
D’abord comment ne pas narrer cet incroyable raté
des
institut de sondages colombiens, quelques jours avant le premier tour
du 30 mai, le candidat écologiste de centre droit, Antanas
Mockus se voyait crédité
jusqu’à 37 %,
résultat au final, il enregistrera 21% des votes
du
premier tour. De mémoires de sondeurs, un tel
écart
mériterait que l’on se penche sur la nature des
ratés et la fiabilité des enquêteurs,
bien que de
nombreux soupçons reposent sur
l’honnêteté
globale du scrutin, ils n’en expliquent pas moins la raison
d’un écart aussi énorme. Les instituts
de sondages
en Colombie prennent en compte principalement un public urbain, que
l’on devine jeune issue des classes moyennes, et
susceptible de déposer un bulletin dans une urne
dans un
pays où l’abstention est forte (40% aux
législatives et sénatoriales de mars 2010 et
49,5% au
premier tour des présidentielles du 30 mai). On aurait pu
expliquer un engouement mais une telle débâcle des
sondages pas vraiment, sauf à savoir, si
l’objectif
était d’éliminer dès le
premier tour le
candidat naturel de la gauche colombienne en lui substituant un
candidat de circonstance et de préférence
à user
jusqu’à la corde ?
Il y a bien eu un phénomène avec
l’écologiste Antanas Mockus, il n’est
pas à
négliger, quelque chose à bouger dans la
société colombienne en faveur d’un
candidat qui
n’entrait pas dans les jeux et les classiques de la
politique, au
demeurant un homme intègre mais baignant dans un lit de
piranhas, faut-il préciser. Face à Juan Manuel
Santos et
dans l’ombre d’Alvaro Uribe, le gentil
universitaire et son
tournesol a séduit, mais il n’a pas pu ouvrir la
moindre
brèche dans l’édifice uribiste, sauf
à
torpiller son allié le plus naturel de la Gauche
Démocratique et Alternative, Gustavo Petro et lui prendre
une
partie de son programme. Avec un peu plus de 9% des votants,
le
PDA se retrouvant ainsi à la troisième place a
subi un
échec, et il se trouve en net repli par rapport au scrutin
de
2006. Les divisions apparues en septembre 2009 lors de la
désignation de Gustavo Petro font de nouveaux jours, il est
fortement question d’un congrès extraordinaire
avant la
fin de l’année. La campagne de Gustavo Petro a
été marquée par son
adhésion au dogme de la
sécurité démocratique (Antanas Mockus
de
même), seuls les programmes de
l’éducation et de la
santé ont suscité une adhésion
dépassant
les espaces électoraux du candidat de la gauche. Avec 21%
pour
Mockus et 9% pour Petro et un second tour (ce qui ne fut pas le cas en
2006) le chemin est encore lointain de voir une alternative
démocratique et pourquoi pas écologiste de
prendre le
pouvoir, néanmoins l’addition des voix des Verts
et du PDA
prouve que cette alternative existe mais n’a pas su trouver
ses
marques.
Juan Manuel Santos a eu droit aux félicitations du
président étasunien, français et
même
vénézuélien. Il a invité
son homologue
vénézuélien et
équatorien à
venir à Bogota pour sa journée de prise de
fonction.
Comme quoi le « réalisme » en politique
préfère toujours les vainqueurs aux vaincus, et
dans le
cas du nouvel édile, il n’y a pas vraiment
à
s’attendre à un changement de cap. Si
l’on tient
compte des forces en présences, de droite, du centre et
même de gauche, elles sont restées engluer dans le
piège de la « sécurité
démocratique
», le fameux poncif des 8 ans de présidence
d’Alvaro
Uribe. Car à ce niveau de cynisme, nul ne fut meilleur que
lui,
et Uribe a même su sortir comme d’une
pochette-surprise la
libération de quatre nouveaux otages aux mains des Forces
Armées de Colombie entre les deux tours. A chaque faux pas
et
ils ont été nombreux, le président
Uribe a su
rebondir : l’élimination des faux-positifs,
l’affaire des pyramides, les scandales à
répétition de la narco-politique, les
écoutes
illégales et multiples atteintes aux droits de
l’Homme, et
affaires d’espionages. Le moindre président
d’un
état démocratique aurait pu sauté
plusieurs fois
(au sens figuré) ou être obligé de
démissionner et surtout à rendre des comptes
à la
justice, il n’en fut rien. Il envisage même
à
présent se présenter à la Mairie de
Bogota.
Peut-on dans ce cas présumé d’un
changement de
politique qui mettrait fin à la terreur subie par les
populations civiles en Colombie, en l’état seule
une
mobilisation de l’opinion publique mondiale pourrait
infléchir le cours des choses.
Colombie,
un train peut en cacher un autre… (Deuxième
billet)
L’assassinat récent de sept membres du
Pôle
Démocratique et Alternatif rouvre certaines plaies du
passé et doit mettre en alerte les forces
démocratiques
et internationalistes face à un retour des assassinats
politiques des opposants de gauche en Colombie. Sept meurtres ces trois
derniers mois et en pleine période électorale ne
doit pas
nous faire oublier que fondamentalement rien ne change, que tout
continue sans que jamais les blessures ne puissent vraiment se
fermer. Face à des mécanismes de
répétition, la Colombie est un exemple signifiant
de
comment jamais n’est pris en considération le
passé, il s’y répète
inlassablement les
mêmes scénarios, les mêmes travers, les
mêmes
abjections depuis des décennies. Néanmoins ce
pays
n’est pas figé et ne relève en rien de
la fiction,
il baigne en plein dans les réalités communes de
ce
monde, il est même très attractif à
bien des
égards. Ses ressources ne se limitent pas à ses
richesses
minérales et vivrières, elles sont aussi humaines
et
cette nation n’a rien à envier aux autres pays du
continent. Pour ce qui est de la créativité, des
richesses intellectuelles, il mérite même un
sérieux détour. Mais l’objet de ce
texte
n’est pas de vendre une destination mais de
s’interroger
pourquoi ce pays vit un tel chaos et devrait être un peu plus
pris en considération?
Le but n’est pas de faire un texte où il suffirait
de
cogner contre les médias, le constat est pourtant
affligeant. En
ce domaine, la presse francophone est très mauvaise. La
Colombie
n’est pas un sujet vendeur, peu de plumes, beaucoup de notes
des
agences de presse réécrites à la
va-vite, ou le
plus souvent un regard très dogmatisant sur ce qui se passe
en
Colombie. Et pas grand-chose venant mettre en avant les contradictions
sociales et un fait évident, une guerre qui depuis plus de
60
ans pose des problèmes majeurs, non seulement en interne,
mais
aussi avec de lourdes conséquences pour ses
voisins. Au
déséquilibre est venu se surajouter depuis au
moins 30
ans la question du trafic de drogues et des maffias qui perdurent
malgré les accords de 1998 entre Andrès Pastrana
et Bill
Clinton, puis entre George Bush et Alvaro Uribe (plan Colombia). En une
génération, les cartels se sont même
emparés
d’une partie des pouvoirs politiques et cela n’a
rien de
très mystérieux en Colombie. Le passage de
témoin
qui va s’opérer le 7 août 2010 du
président
Alvaro Uribe à Juan Manuel Santos ne va surtout rien
changé, il faut même s’attendre
à quelques
retours de bâtons et possiblement de graves crises
diplomatiques.
Juan Manuel Santos est un pur produit de l’oligarchie
colombienne, patron de presse, ministre depuis 1998 et surtout ancien
ministre de la défense et « héros
» de la
libération d’Ingrid Betancourt et 14 autres
captifs de
l’opération « Jaque ». Le
futur
président colombien donne le là d’une
continuité certaine. Un avantage sur son
prédécesseur, il ne semble pas marqué
directement
avec les maffias, mais il est toutefois membre d’une
coalition
très marquées ces dernières
années par les
affaires des liens entre narcos et politique et la question du
paramilitarisme. Le plan Justice et Paix qui visait principalement
à la démilitarisation des forces
d’extrêmes
droites a été une ficelle habile du
Président
Uribe, mais si elle a possiblement permis à certains de
poser
les armes, les milices n’ont pas disparu et continuent de
sévir. La guerre, pour ne pas dire les guerres qui
alimentent ce
pays ne sont pas sans conséquences, cela nourrit chaque
année un flot de réfugié et une liste
où
l’on tente de dénombrer le nombre réel
de victimes.
Beaucoup d’ONG ou organismes internationaux des droits
humains
disposent de chiffres très alarmant sur le nombre de
disparitions civiles forcées, 38.000 rien que les trois
dernières années. Il serait temps de tenir compte
que les
premières victimes du conflit sont des civils et que cette
violence se concentre dans les campagnes et sur une large partie du
territoire. Si indéniablement, la
sécurité a fait
des progrès dans les centres urbains, elle est en partie
artificielle et ne prend pas en compte les
inégalités
sociales. Pour que même Madame Clinton en vienne donner un
chèque obole de 20 millions de dollars à Bogota,
on peut
tout à fait comprendre que les
inégalités sont du
domaine de l’injustifiable.
Colombie,
un train peut en cacher un autre (troisième billet)
Il n’aura pas fallu longtemps pour que les tensions se
réactivent entre la Colombie et le Venezuela en ce mois de
juillet 2010. Cette nouvelle n’est pas en soit une surprise,
depuis janvier-février 2005 les crises diplomatiques et
incidents frontaliers se multiplient. Et les différents
n’ont pas commencé de sitôt tant la
perméabilité des deux états est
grande. Plus de
2000 kilomètres de frontières communes donnent
une
idée approximative de la situation, nous sommes à
la fois
et de chaque côté face à un monde peu
urbanisé (en particulier les plaines marécageuses
ou
llanos et la partie amazonienne) et disposant d’importantes
richesses fossiles et minières de part et d’autre.
Mais
aussi et surtout, il y a une guerre civile en Colombie qui oppose le
gouvernement colombien et les deux mouvements de guérillas
l’ELN (Armée de Libération Nationale,
guévariste) et les FARC (Forces Armées
Révolutionnaires de Colombie, marxiste-léniniste)
depuis
le milieu des années 1960, et des forces ou milices
paramilitaires tout aussi anciennes. Vient se surajouter la question
des trafics en tout genre et notamment de drogue, pour comprendre
l’amplitude des problèmes et en quoi
l’accusation
portée par Bogota à l’encontre du
Venezuela a
quelque chose de surréaliste.
Il existerait des campements des FARC et de l’ELN sur le
territoire vénézuélien, preuves
à
l’appui et plaintes devant l’OEA
(l’Organisation des
Etats Américains), Bogota a incriminé
l’état
vénézuélien comme servant de base
arrière.
Il n’y a pas si longtemps, ce même pays
dénonçait d’étroites
relations entre de
multiples personnalités européennes et
latino-américaines et les FARC. L’ordinateur de
Raoul
Reyes saisi lors de l’assaut en territoire
équatorien par
l’armée colombienne (en 2008),
c’était
d’abord multiplié par trois, puis devait
révéler de très nombreuses
correspondances. Pour
sa fin de mandat Alvaro Uribe semble vouloir partir en
beauté,
mais c’est à se demander s’il ne
s’agit pas
d’un nouvel écran de fumée de sa part ?
Plutôt que d’affronter les
réalités internes
n’est-il pas mieux de créer un contre-feux et Hugo
Chavez
n’est-il pas une cible idéale ? Cela permet
d’occuper la presse plutôt que de faire un bilan
des
années écoulées sous son mandat.
On peut reprocher à Hugo Chavez maintes choses, mais de
là à faire de son pays un état
criminel,
c’est à la fois inconcevable et très
loin de la
vérité. Inconcevable parce que même en
bombant le
torse, le président
vénézuélien ne dispose
pas des moyens militaires de son voisin colombien. De plus sa
stratégie a été toujours
défensive, et il a
à chaque fois chercher à calmer les tensions,
face
à la volonté claire de saper à tout
prix les
relations, dont l’un des plus agressifs fut le ministre
colombien
de la défense, Juan Manuel Santos (le futur
président
à partir du 7 août 2010). Peu de semaines
écoulées ou de nouveau les relations semblaient
au beau
fixe entre les deux pays, le château de carte s’est
écroulé. La réaction de
Chavez vient
ouvertement d’un trop plein et sur le fond de la
volonté
délibérée de déstabiliser
Caracas. Doit-on
y voir une menace pesant sur le régime bolivarien, tout est
possible à quelques mois des élections
législatives au Venezuela.
Seuls ont à gagner de cette discorde l’oligarchie
colombienne et l’administration étasunienne. Ils
visent de
nouveau à affaiblir et favoriser les divisions politiques au
Venezuela et vont principalement renforcer la chute des
échanges
commerciaux et industriels entre les deux nations. Ce qui
économiquement va affecté aussi bien les
colombiens, que
les vénézuéliens. Par ailleurs, il
faut arriver
à démontrer coûte que coûte
qu’il vaut
mieux investir en Colombie, qu’au Venezuela, pays peu stable
et
pays dirigé par qui vous savez… Cette
stratégie a
fonctionné sous Bush, elle reste de mise. On aurait pu
attendre
de la nouvelle administration, c’est-à-dire en
premier
lieu de Barak Obama une autre politique en Amérique Latine,
il
n’en sera rien ou pas grand-chose. Si cette fois et
à
juste raison Hugo Chavez met les pieds dans le plat c’est
qu’il faut savoir de quoi nous parlons, ou comment garder son
calme face à un état résolument
narcotrafiquant et
propagateur de guerre.
N’est-ce pas la présence et
l’arrestation de 80
paramilitaires colombiens près de Caracas dans la villa
d’un patron vénézuélien qui
avait mis le feu
aux relations en 2005 ? On veut accuser un pays voisin et normalement
frère de faire la part belle aux mouvements rebelles, quand
on
connaît les nombreuses incursions et présences
manifestent
de miliciens colombiens d’extrême droite dans des
départements du Zulia et du Tachira au Venezuela,
frontaliers de
la Colombie. Quand on connaît les conditions de
déplacement entre les deux pays, un tantinet sa
géographie et ses réalités politiques
régionales, oui le Venezuela supporte les
conséquences
d’un pays qui depuis 1948 n’a pas su trouver la
moindre
concorde civile et empoisonne l’ensemble des pays limitrophes
à la fois pour des raisons militaires et en faveur des
économies souterraines.
Il suffit que Chavez rappel à l’ordre
républicain
une télévision connue pour ses multiples
dérapages
et appels aux meurtres pour que les médias de masses titres
sur
le dictateur, car petit problème concernant Hugo Chavez, on
ne
lui connaît pas de crimes contre
l’humanité ou de
guerre, ou de prisonniers politiques d’opinions à
faire
valoir contrairement à son homologue colombien. Il faut bien
dans ce cas lui faire porter la responsabilité
d’un
conflit dont il serait le premier à vouloir s’en
défaire sur son territoire.
De mémoire, il fut le
premier
président dans les années 2000 à avoir
proposé et mis en oeuvre concrètement un dialogue
de
paix. Il s’est retrouvé du jour au lendemain
remercié pour ses bons offices et par la suite faussement
accusé lui et bien d’autres de soutenir la cause
des FARC,
simplement pour avoir chercher les voies du dialogue. Ce qui
n’est pas dans le camp de Monsieur Uribe et Santos est
obligatoirement un terroriste. Cette logique sans mesure est
déjà en application en Colombie et condamne
chaque
année des milliers d’innocents à une
mort certaine.
Pendant que certains sont toujours à la recherche des
goulags
vénézuéliens, ils risquent de ne
jamais rien
trouver qui puisse faire de Chavez un tortionnaire, et nombres
d’espaces médiatiques continuent à se
voiler la
face devant les crimes commis par l’état colombien
depuis
des décennies.
Si tout à chacun était à partir
d’éléments
vérifiés amené
à faire une dissertation sur Alvaro Uribe et Hugo Chavez, la
thèse et l’antithèse seraient
évidentes. Et
il ne s’agirait pas de se référer de
simples
antagonismes politiques, mais bien y voir deux manières
d’agir, et de comparer les résultats. Chavez, lui
a agi en
faveur d’une redistribution des richesses, Uribe de son
côté n’a rien fait pour
améliorer
l’un des salaires ouvrier les plus bas de toute
l’Amérique Latine, et un des salariats les plus en
proie
aux inégalités et violences sociales sur
l’ensemble
du continent.
Ces dernières années en Colombie,
les
profits accumulés n’ont, en aucun cas, permis un
recul de
la misère. À l’opposé, de ce
que le
Venezuela connaissait et mettait en œuvre avec de lourds
investissements en faveur de l’école et des soins
médicaux. Il n’y a pas photo entre le
supposé
dictateur et celui qui voudrait incarner la fine fleur de la
démocratie, il y a comme une erreur dans les
légendes… Le problème c’est
que l’un
triche et l’autre pas, que l’un est aux ordres de
l’Empire et que l’autre non seulement
résiste mais
en plus ne peut se plier à des manipulations
grossières.
Des clichés sur des campements des FARC au Venezuela, il est
tout à fait possible d’en produire depuis au moins
quarante ans, il y a quelque chose du scoop raté ou du plat
que
l’on vous ressert. C’est tellement
énorme que
l’on voudrait y croire mais c’est absurde en tout
point.
A Hollywood le
scénario finirait possiblement à la poubelle
et pourtant la télénovela Uribiste fonctionne
à plein.
Epilogue,
un train qui peut en cacher un autre en Colombie…
Tout le monde comprendra facilement que l’on ne va pas vers
un
apaisement du conflit interne en Colombie, tout au contraire, on se
permet même de pousser l’espionnage un peu loin. Il
n’y a plus de mystère, quant au rôle des
ambassades
colombiennes de surveiller ses ressortissants à
l’étranger, l’on découvre pan
par pan de
comment en Colombie et dans le monde se comporte les services de
renseignements colombiens.
Si les écoutes
illégales ont
pu toucher des personnalités politiques, sociales et
journalistiques avec le scandale des Chuzadas, l’on sait
depuis
peu que le président équatorien et son entourage
ont
été l’objet d’une attention
toute
particulière des services de renseignement du
président
colombien, le DAS (Département d’administration de
la
sécurité). Il est donc impossible pour le futur
ancien
président de la République de Colombie et pour
son
suivant d’ignorer les implications du DAS en interne comme en
externe. Et au fil des actualités récentes
comment les
James Bond du DAS semblent avoir sévi de même sur
le sol
de l’Union Européenne, pour fin, que rien ne
puisse
empêcher la signature de l’Accord de Libre Echange
(Tratado
de Libre Comercio) lors de la conférence de Madrid en mai
2010.
Une plainte émanant du groupe Gauche Unie
Européenne a
depuis été déposée sur les
agissements des
services secrets colombien sur le territoire de l’UE, par
Monsieur Paul Emile Dupret.
Ce même Monsieur Paul Emile Dupret avait connu pour
mésaventure de voir en août 2009 son vol
détourné des USA vers une autre destination,
petite
mésaventure qui s’est produite aussi quand le
journaliste
colombien et exilé politique Hernando Calvo Ospina a
survolé les Etats-Unis en avril 2009. Et rebelote et dix de
ders
avec le réalisateur colombien Hollman Morris qui
s’est vu
refusé en juin 2010 un visa, il devait pour crime recevoir
un
prix au sein d’une université nord
américaine et
salué son travail d’enquête
journalistique sur les
crimes commis en Colombie (depuis le visa a été
enfin
accordé grâce aux pressions internationales).
Nous
ne
sommes pas soumis au jeu du hasard, il y a bien des faits qui
démontrent le haut niveau de nuisance de cet état
policier et pas seulement à l’échelle
locale. Toute
la question résiderait à faire
connaître les liens
étroits, économiques principalement entre la
première puissance du monde et une Colombie au prise avec
des
mécanismes féodaux et maffieux. L’objet
est de
mettre à bas le décor et l’hypocrisie
qui
s’est construite autour de cette nation malade à
en
sacrifier ses forces vives. Les colombiens sont confrontés
à des problèmes très contemporains, la
vie
d’un homme face à une bananeraie ou des plants
d’huile de palme ne pèse pas lourd. Pour son
malheur et
comme tout pays très riche en ressources minières
tout
participe à lever toute hésitation aux
investisseurs
prédateurs. Qui choisir entre un pays qui vous offre ses
terres
sur un plateau et un autre qui entend rester maître en sa
demeure
? Comment alors ne pas s’appuyer sur les milices locales qui
feront taire à tout jamais quelques syndicalistes
récalcitrants, si cela rapporte sonnant et
trébuchant, le
calcul est déjà fait.
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sous la
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Les
disparus français de la dictature militaire |
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Plaque apposée à la mémoire des Français victimes de la
dictature militaire (1976-1983)
à
l’entrée de l’ambassade de France à Buenos Aires
La mer n’a pas pu effacer les preuves du crime, rejetant
quelques
corps afin qu’ils témoignent de l’horreur.
L’un
d’eux est celui de notre compatriote Léonie Duquet. Symboles
parmi les symboles, les autres corps déposés par la marée sur les
rives de l’Atlantique sud sont ceux de mères qui
recherchaient
leurs enfants et de personnes qui les accompagnaient.
C’était le
cas des religieuses françaises Alice Domon et Léonie Duquet.
L’identification des restes de Léonie Duquet et des
premières
Mères de la Place de Mai ravive les douleurs du passé, mais elle
maintient aussi allumée la flamme de la recherche de la vérité.
Trente ans après, les victimes et leurs proches continuent à
réclamer que justice soit faite, que les responsables soient jugés et
punis, et que cela n’arrive plus jamais. En France, les
proches
des 18 Français victimes de la dictature militaire qui a
sévi
de 1976 à 1983 rendent hommage à ces Mères Courage qui reposent
dorénavant dans les jardins de l’église Santa Cruz à
Buenos
Aires et, à travers elles, à tous les détenus-disparus
d’Argentine. Aujourd’hui et toujours, lorsque nous
nommons
les 18 Français disparus ou morts en Argentine, nous nous
souvenons de toutes les 30.000 personnes disparues dans ce pays.
Marcel
Amiel, Robert Boudet, Jean-Yves Claudet Fernández,
Françoise
Dauthier, Yves Domergue, sœur Alice Domon, sœur
Léonie
Duquet, Andrés Roberto Duro, Marie-Anne Erize, Maurice Jeger, Mario
Roger Julien Cáceres, père Gabriel Longueville, Pierre Pegneguy, Juan
Roger Peña, Jean Marcel Soler et les frères Marcel, Paul et
Raphaël Tello
Que soient ici remerciés pour leur contribution inestimable à la
reconstruction de la vérité historique tous ceux qui, par leur
travail et leur dévouement dans la lutte pour la justice et contre
l’impunité, permettent de reconstruire des histoires et de
faire
le deuil : organisations des droits de l’homme, autorités,
juges, avocats, la communauté de Santa Cruz et, tout
particulièrement, l’Equipe argentine
d’anthropologie
médicolégale.
L’Association
des parents et amis des Français disparus en Argentine :
TOUTE
INFORMATION SUR L’UNE OU L’AUTRE DE CES PERSONNES
PEUT SIGNIFIER UNE ÉTAPE IMPORTANTE
DANS LA RECHERCHE DE LA VÉRITÉ ET DE LA JUSTICE.
PRIÈRE DE LA FAIRE PARVENIR À L’ASSOCIATION DES PARENTS
ET AMIS DES FRANCAIS DISPARUS EN ARGENTINE :
écire
à : "francaisdisparusargentine(at)gmail.com"
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