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Sommaire de la page,

1 - Jacques-Pierre Brissot dans la tourmente !
& extraits de ses mémoires apocryphes


2 - Chronologie détaillée d'octobre à décembre 1792 et sources complémentaires

3 - Réflexions sur la situation politique aux débuts de la Convention

4 - Jean-Baptiste Louvet et le Rolandisme : parcours d’un homme presque ordinaire

5 - Discours de Jacques Roux, en décembre 1792 Sur le jugement de Louis le dernier et les accapareurs.

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Brissot dans la tourmente !
Le peuple seul a le droit essentiel et exclusif de se gouverner et de régler son administration intérieure ; que tous les pouvoirs émanent de lui, qu'il a le droit d'élire ses officiers ; que chaque membre peut exiger de la société d'être protégé par elle dans la jouissances de sa vie, de sa liberté, de sa propriété, etc.

J.P. Brissot de Warville, Réflexions sur le code de Pensylvanie, 1783
Je suis resté un peu laconique, voire succinct sur Brissot, c’était pour mieux apprécier la nature de ses investissements politiques et avoir suffisamment de contenu historique susceptible de ne pas tomber dans une caricature. Il serait idiot de passer à côté de celui qui fédéra le camp des girondins, dont nous avons pu saisir qu’il fallait les nommer brissotins et jacobins. Jusqu’à son départ ou exclusion par absence au club. Depuis les débuts de la première législative jusqu’à octobre 1792, les couteaux s'affutèrent entre les deux camps  républicains (et plus). Dans moins d'un an, il sera mort. Que nous a-t-il laissé? Qui fut Brissot? Il a été un des grands contributeurs de cette révolution première et seconde.

Brissot n’est pas à classer dans la colonne des grandes plumes, cependant son style est sans lourdeur et agréable à la lecture, on sent facilement une distance avec ce qu’il écrit. Il ne cache pas, le peu d’évidence à laisser un ouvrage à l’Histoire, quand soi-même on y a participé. De nature modeste, ni tribun et un train de vie n’ayant rien de fastueux, la répartition des tâches au foyer bien assumée avec son épouse selon les mœurs bourgeoises de son époque, seule une nourrice fut au service de ce couple austère. Après sa décapitation sa
femme Félicité (traductrice née en 1759 et décédée en 1818) s’occupa du petit garçon né en pleine révolution. Il fut le seul enfant de cette union, et se nomma Anacharsis Brissot de Warville, il recueillit les écrits paternels, restant un sujet à caution, comme une bonne part des textes sous la seconde révolution.

Le vœu du couple Brissot, le plus cher eût été de s’installer outre Atlantique, de petite fortune, de son voyage aux Etats-Unis, Jacques Pierre en avait conservé l’idée d’une terre qui lui aurait permis de vivre selon ses valeurs. Ce fut une source d'inspiration et de rédaction sur la république étasunienne et en voilà un autre s’étant nourri à Rousseau, mais qui fut aussi félicité par Voltaire. Il a été l'un des fondateurs de la Société des amis des noirs en 1788 avec Condorcet, et un des promoteurs de l'abolition de l'esclavage. Comme tous les autres révolutionnaires non soumis à la corruption, il a eu de véritables ambitions collectives et a été dénoncé à tort comme un homme de Lafayette. Mais aussi comme espion de l’Angleterre, ou à la solde de celui qu’il nomme la bûche. Son jugement de Louis XVI à travers les manigances financières d’Omer Talon et de Mirabeau correspond pour une fois au portrait du monarque, qu’il a bien flairé dans ses ambiguïtés et de comment on a aussi tenté d’éliminer le duc d’Orléans physiquement et de soudoyer une bonne part de la place de Paris à coup de millions.

Cet apport est tiré des mémoires apocryphes de Brissot, il semble valoir d’être un peu mis en lumière, du moins ce qui fait écho avec la trame historique. Vous pourrez lire après un extrait à ce sujet, permettant de clore le débat d’un Louis Auguste Capet mollasson, finalement dépeint sous l’ombre d’un grand manipulateur. Avec la découverte de Roland Jean-Marie et de la révélation le 20 novembre aux conventionnels d’une armoire de fer contenant des secrets d’état, ne pouvait que conclure à ses trahisons répétées. Il fait aussi référence à Rivarol, et comment Mirabeau avait couru au secours des époux royaux et de leur manne financière visant à couler toute constitution un tant soit peu démocratique. Renvoyant à une question pourquoi une telle absence de gouvernabilité? et de contradictions fortes dans la répartition des pouvoirs, sorte de copier-coller des anciennes lois? du moins une continuité sans qu’on perçoive la fin du tunnel de l’ancien régime. Les derniers éléments de droits féodaux et titres en tout genre distinctif sont abolis à la fin de la Législative, comme elle commence à débattre du divorce. Certes la présence de Clavière et les théories des physiocrates pesaient dans la balance et donne un caractère plus social à l’aile gauche jacobine et cordelière, toutefois à quel prix et pour quel résultat?

A défaut de pouvoir soulever les tares de ce républicain anglophile ayant des vues pas si communes pour son temps sur les espaces géopolitiques et une idée de la citoyenneté puisée aux Etats-Unis, ce journaliste et patron de presse est finalement noyé entre apologie et discrédit, et par esprit de provocation ou de remise en cause, il aurait pu faire un très bon président de la république…? Il en avait l’étoffe, la droiture, mais il ne semble pas culminer dans le culte du narcissisme, ni de l’idolâtrie, un trait assez commun avec son ami Piéton de Villeneuve en plus populaire, et tout aussi honnis par la suite des événements. Si l’on doit à Marat, Robespierre, un génie politique et une honnêteté, qui fit dire à celui-ci que Marat aussi était "un incorruptible" à sa manière, Brissot et ses amis politiques ont dans l’ensemble pour seul crime d’avoir envisager toutes les possibilités d’une transition la moins chaotique possible. La république sans démocratie, sans exercice de contre-pouvoir ne pouvait que succomber à l’esprit démagogique et subir des renversements brutaux. L'année 1793 et suivante
seront riches en la matière...

Notes de Lionel Mesnard

Mémoires apocryphes de Brissot (*)

« On peut considérer les papiers trouvés aux Tuileries comme les pièces justificatives des dénonciations que les écrivains patriotes ont constamment portées au tribunal de l'opinion publique contre la cour et les agents d'iniquité. Ces pièces prouvent que Louis XVI n'a jamais marché de bonne foi dans le sens de la Constitution; qu'il était lui-même à la tête de tous les complots ourdis contre elle; que, tandis que ses frères préparaient au dehors une contre-révolution armée, il déployait au dedans un vaste plan de corruption, dont le but était de favoriser le succès de cette contre-révolution; qu'il entretenait de nombreuses légions de journalistes, d'espions, de motionnaires, d'applaudisseurs dans l'Assemblée Nationale, aux Jacobins, aux Cordeliers, dans les sections, dans les cafés, etc. Il ne s'agit, pour s'en convaincre, que de se rappeler les principales pièces, la plupart apostillées et signées de la main de Louis Capet.

La trahison de ce prince résulte, avec une évidence bien frappante, de la nature de ses rapports avec un intrigant très méprisable, et dès lors très méprisé : le soi-disant marquis de Rivarol. Les conseils donnés au monarque par ce prétendu gentilhomme montrent assez qu'en les donnant, il avait la certitude de s'a dresser à une âme profondément perverse. Louis XVI agréait de pareils conseils ; il les sollicitait, il les payait, et souriait avec complaisance quand son conseiller lui indiquait le moyen infaillible de se défaire de la maison d'Orléans. Il ne s'agissait rien moins que d'une émeute factice qui aurait fourni l'occasion de précipiter dans la Seine tous les membres de la branche cadette des Bourbons ; on aurait égorgé ceux qui auraient échappé à la noyade.

L'intrigue, pour arriver à ce dénouement, était fort spirituellement exposée dans cinq ou six mémoires qui ne se sont pas tous trouvés dans l'armoire de fer, mais que j'ai vus dans les mains d'un nommé Baccon, qui avait été au service du marquis en qualité de valet de chambre et de secrétaire. Rivarol termine ainsi l'un de ses projets de conjuration contre la famille d'Orléans : « Sans doute, Sire, Votre Majesté s'étonnera de l'énormité des résultats que je lui promets, si elle les compare à la modicité des sommes qu'il faudra dépenser pour les obtenir ; mais que Votre Majesté daigne réfléchir que les pyramides d'Egypte ont été construites avec des oignons ». Rivarol fait toutes espèces de gentillesses et de plaisanteries pour charmer l'esprit du bon roi, à qui il propose, sans façon, de faire égorger les citoyens les uns par les autres.

C'est horrible de voir comme il se joue dans le sang; il est plus horrible encore de songer que l'honnête Louis fondait l'espoir d'un règne paisible sur le meurtre de ses sujets. Louis, réputé débonnaire! quel fourbe! c'était le tigre sous la peau du mouton. Mais ce tigre était lâche et incapable d'aucune détermination. Aussi Rivarol (1) ne le pressait-il pas trop d'agir par lui-même; il voulait que toujours il se tint dans la coulisse et dirigeât les événements en sournois. A cette fin, il l'en gageait à accaparer les poumons qui dominaient les sections, tels que ceux de Danton et de quelques autres. Avec de l'argent et des dîners, Rivarol espérait mener à bien cette affaire. L'argent n'avait pas manqué : Laporte se plaint, et l'aveu est précieux, de n'avoir retiré aucun fruit des millions qu'il avait répandus dans les clubs, dans les sections, dans les tribunes,à l'assemblée, sur les places publiques et parmi les écrivains. Cela prouve en faveur de la nation.

L'armoire de fer était pleine de révélations qui mettent à nu le caractère de Louis XVI, et dévoilent les perfides menées de son entourage. Entre les pièces qu'elle contenait, et qui ont été inventoriées, car toutes ne l'ont pas été, se trouvait un mémoire du lieutenant civil Talon, où l'on voit que cet homme était le négociateur entre la cour et Mirabeau ; que Mirabeau avait conçu un vaste projet qui tendait à imprimer à Paris, ainsi qu'aux provinces, un grand mouvement favorable à la royauté. Talon était chargé de Paris, et Mirabeau des provinces. La mort de ce dernier fit échouer ce dessein. Ainsi s'expliquent ces paroles de Mirabeau sur son lit de mort : « J'emporte avec moi le deuil de la monarchie ».

On lit dans les lettres de Laporte, le proxénète en chef de Louis XVI, le récit d'une conférence avec ce marquis de Luchet dont j'ai parlé au commencement de cet écrit et qui était un des ouvriers dont Mirabeau employait la plume. Cette conférence avait pour objet de fixer le prix auquel l'orateur consentait à vendre son éloquence; et Luchet était d'avis de tout accorder parce que Mirabeau était l'homme qu'il fallait au Roi, le seul homme capable de combattre les deux Lameth et Barnave qui lui ont succédé dans la faveur populaire, et dont il désignait le triumvirat sous le nom de « trium-gueusat ». Quant à la lettre de Louis XVI à Lafayette,elle charge ce général, « qui ne peut suffire à tout », de se concerter avec Mirabeau pour le bien de l'Etat et le service de sa personne royale.

La corruption de Mirabeau est aujourd'hui un fait dont il n'est plus permis de douter : elle ressortait complètement du rapport que Rhul (député du Bas Rhin et doyen de l'Assemblée) fit à la Convention lorsqu'il fut question de décerner à l'orateur des honneurs qu'il ne méritait pas. Rhul démontra assez bien l'alliance de Mirabeau avec les contre-révolutionnaires; après la lecture de cette pièce importante, un député, dont je ne me rappelle pas le nom, proposa de vouer le traître à l'infamie, de briser sur-le-champ ses effigies qui se trouvaient placées dans la salle, et d'exhumer ses cendres du Panthéon. C'était le cri de la  vertu indignée ; il y eut de l'écho dans l'Assemblée; tout le monde appuya la proprosition. Manuel dit : « qu'avant tout, il fallait être juste, et qu'on ne devait pas traiter les morts avec plus de sévérité que les vivants » ; Mirabeau vivant eût été mis en accusation, on aurait voulu l'entendre avant de le condamner.

Avant de flétrir sa mémoire, il fallait donc procéder à une enquête par l'organe d'un comité. Au moment, ajouta Manuel, où l'on juge un Roi avec les formes de la loi, il ne faut pas condamner illégalement un homme de génie, dont la mémoire ne doit pas être moins respectée que la tête d'un Roi. Il était assez singulier que ceux qui naguère avaient été les moins indulgents envers Mirabeau fussent les premiers à parler en sa faveur; il ne l'était pas moins de voir quels hommes s'acharnaient maintenant contre lui. La Convention voulait renvoyer l'examen des pièces à un Comité d'instruction.

Camille Desmoulins, que la reconnaissance aurait dû engager à se taire, vint précipiter la condamnation en révélant un fait nouveau, et en attestant « qu'il pouvait, d'après sa propre expérience, déposer de la corruption de Mirabeau ». Il dénonça un plan de contre-révolution qu'il avait vu écrit de sa main, et qui, disait-il, avait été communiqué à Pétion. Il n'y avait rien de vrai dans cette dernière assertion : Pétion, j'en suis sûr, n'avait jamais vu ce plan ; mais il croyait à son existence parce que des personnes dignes de confiance, et auxquelles il avait été communiqué, lui en avaient parlé autrefois. Cette découverte avait mis le comble à son mépris pour Mirabeau ; aussi vint-il rappeler à la Convention que, seul de l'Assemblée Constituante, il avait refusé d'aller à ses funérailles et de porter son deuil.

Je veux à cette occasion révéler une anecdote qui appartient à l'histoire, et qui confirme les justes préventions de Pétion contre Mirabeau. Ce fut sur la motion de Robespierre que les honneurs du Panthéon furent décernés à ce dernier. Pétion lui en fit reproche le jour même, il lui en fit reproche en ma présence. « Je méprise, il est vrai, Mirabeau, répondit le vertueux incorruptible, je le méprise, je vous l'ai dit cent fois; mais les sections ont demandé cet honneur pour lui, et j'ai dû être l'organe du peuple ».

Ce mot met à nu Robespierre ainsi que la vertu de sa conscience populaire. Le trait suivant achèvera de le peindre. Le jour même du rapport de Rhul, les Jacobins brisèrent dans leur salle le buste de Mirabeau, ce fut sur la motion de Robespierre que cette exécution eut lieu, comme on l'avait auparavant porté au Panthéon sur sa demande. Ainsi les démagogues encensent les idoles populaires pour plaire aux adorateurs, et renversent ensuite ces idoles pour leur succéder. Au reste, Robespierre a pu, sans crainte, chasser Mirabeau du Panthéon : on n'usera jamais avec lui de représailles. (2)

Une autre anecdote que m'a racontée Carra, peut faire connaître avec quelle arrière-pensée Mirabeau était entré dans les affaires publiques. « Je dînais un jour (je répète les propres paroles de Carra) en tiers avec Mirabeau l'aîné ; c'était pendant le temps des élections des Députés de Paris, en mai1789. J'espère, me dit Mirabeau, que vous serez nommé à la députation, et que nous marcherons ensemble sur la ligne des grands principes de la liberté. Trop heureux répondis-je, de pouvoir être votre second dans la belle carrière que vous allez parcourir ; mais je prévois, ajoutai-je sur le champ, que la Cour ne manquera pas, en voyant le but où nous tendons, de chercher à nous corrompre l'un et l'autre ; quant à moi, si l'on m'offrait de l'argent, je sais bien ce que je ferais. - Et que feriez-vous, répliqua vivement Mirabeau?  - Je le prendrais.  - Vous le prendriez! reprit-il en me regardant fixement? - Oui, je le prendrais mais à l'instant même je le porterais sur le bureau de l'Assemblée des Etats Généraux, et je dirais à haute voix : voilà l'argent qu'on m'a donné pour me corrompre et m’engager à trahir ma patrie ; c’est untel que me l’a remis… Je le dénonce… Mirabeau m’interrompit et changea de conversation. Depuis ce temps, j'ai toujours pensé que la plus belle gloire qu'un mortel pût acquérir dans l'histoire des hommes et jusqu'à la postérité la plus reculée, serait celle de suivre l'exemple dont je donnais l'idée à Mirabeau. »

Après la mort de Mirabeau, Frochot qui avait été son ami, voulant lui faire une grande renommée de désintéressement, adressa à l'Assemblée Législative une pétition, où il déclara qu'il n'avait pas laissé de quoi subvenir aux frais de ses funérailles. C'était un point de ressemblance entre le grand homme du jour et quelques grands hommes de l'antiquité; mais un frère de Mirabeau s'empressa de répudier cette fiction dont la réalité aurait été si honorable pour notre temps; voici la lettre qu'il m'écrivit à ce sujet : « Veuillez bien, Monsieur, recevoir ma réclamation contre la qualification d'insolvable, donnée à M. de Mirabeau dans une pétition adressée au Corps-Législatif. Mon frère laisse des dettes, et son mobilier sera peut-être insuffisant pour les payer; mais tous les scellés ne sont pas encore levés, et l'auteur de la pétition, M. Frochot, qui se dit l'ami de mon frère, et qui est son exécuteur testamentaire, ne devrait pas ignorer que M. Mirabeau a été doté dans son contrat de mariage, de plusieurs terres existantes dans leur entier lors de sa mort, et d'une valeur bien au-delà des dettes : on dirait, à entendre le pétitionnaire, qu'il ne manquait plus à M. de Mirabeau pour être un grand homme, que d'être insolvable. Je lui demanderai s'il aurait osé tenir ce langage à mon frère vivant. M. Frochot aurait dû garder pour lui ses étranges idées de morale, respecter d'avantage les devoirs de l'amitié, s'en tenir à ses fonctions d'exécuteur testamentaire, et surtout se connaître assez en procédés pour ne pas faire une démarche aussi importante, sans l'aveu de la famille de M. de Mirabeau».
MIRABEAU DU SAILLANT, rue du Mont-Parnasse,   
hôtel d'Aragon. Le 25 octobre 1791   


(*) Apocryphe :  "dont l'authenticité n'est pas établie", à savoir qu'une bonne part des Mémoires de Brissot produites par son fils, notamment les correspondances ne sont pas reconnues comme sincères ou authentiques pour moitié d'entre-elles.


 
Notes de l'auteur  :                   

(1) Voici ce que l’on lit dans un billet de Dufresne Saint-Léon, « Un jour la reine allant à la messe, arracha un pistolet de la main d'un courtisan et le présenta au roi. Voici le moment d'agir, lui dit-elle; mais la bûche resta muette». (note de Brissot.)

(2) Pendant qu'on était en train de briser aux Jacobins, on brisa le buste d'Helvétius. Plusieurs bonnes gens, en voyant rouler les débris demandaient si c'était un membre de la faction de la Gironde. C'était un philosophe cela revient au même.

Source : Mémoires de Brissot par son fils, tome IV, de la page 3 à 9, chapitre I
annotés par M.F. De Montrol, publiées de 1830 à 1832 chez le libraire l’Advocat et à l'imprimerie David,
 4 bis bd poissonnière.  Disponible sur Google.com "Livre" au titre de la collection d'Alphonse Aulard.


Chronologie détaillée d'octobre à décembre 1792


IX - Le mois d’octobre 1792

1er octobre : En Champagne, l'armée Prussienne du duc de Brunswick se retire de la région. La Convention met en place la commission des « Vingt-Quatre », pour examiner les documents déposés au comité de surveillance de la Commune lors de la journée du 10 août. Elle sera supprimée en juillet 1793.

2 octobre : A la Convention, il est décidé que le comité de Surveillance existant depuis juin 1791 devient le comité de Sûreté Générale, il est composé de 30 membres. Cette commission prend en charge « tout ce qui est relatif aux personnes et à la police générale et intérieure », en particulier celle de Paris.

3 octobre : Le ministre de la guerre Joseph Servan est remplacé provisoirement par M. Lebrun-Tondu. Aux Jacobins, le titre l’ancienne société des Amis de la Constitution devient la « Société des Amis de la Liberté et de l’Egalité» (attention la date du 3 octobre est imprécise ou relative aux débats des Jacobins et la source due aux Œuvres de Robespierre, tome IX). En charge de toutes les positions ministérielles, est examiné ce jour aux jacobins les candidatures à la Mairie de Paris, le vote étant le 9 pour le remplacement de Pétion. Le député Bourdon après un appel à la candidature de Robespierre dit que le citoyen : « Moras insiste pour qu'on choisisse un homme à qui personne ne puisse refuser son suffrage, un homme connu de tous les citoyens ; (…) pour un tel choix, il faudrait avoir au moins le consentement de la personne sur qui il tomberait, et que pour lui, il ne connaît aucune force humaine qui puisse lui faire consentir à échanger la place de représentant du peuple contre toute autre, quelque importante qu'elle pût paraître. »

5 octobre, En Allemagne, nouvelle victoire des troupes du général de Custine à Worms. (ci-contre - en peinture) A la Convention, le député girondin Lajuanais reprend à son compte la proposition du 24 septembre de François Buzot sur le projet de constituer une garde pour protéger l’Assemblée nationale.

7 octobre : A Lille, devant la résistance de la ville, les Autrichiens se retirent en Belgique. Dans la capitale aux Jacobins, il est question des attaques autrichiennes après l’évacuation du camp Mauld survenue après le 9 septembre dans le Nord à Château l’Abbaye avec le 3° bataillon de la Côte d’Or et le 4° du Pas-de-Calais, provoquant la mort de 24 soldats et du commandant. 



Général Philippe de Custine 
Ce même jour dans le Mercure Universel (tome XX, pages 126 et 127), Robespierre intervient et dit : « Il a péri beaucoup de gardes nationaux avec Désavesnes (le commandant), il n'y a plus, de privilèges pour les colonels, ni les capitaines; je demande que leurs veuves soient également comprises dans le décret que vous allez rendre : soldats et capitaines ont tous les mêmes droits à la reconnaissance nationale. (…) Robespierre réclame aussi des secours pour les femmes et enfants des trois cents gardes nationaux qui ont péri à la levée de ce camp ». Il sera accordé à la seule veuve Désavesnes une pension de 600 livres à la Convention le 10 décembre, malgré son rapport au Comité de Législation sur ce partage équitable des honneurs.

Tableau de la résistance de Lille



8 octobre : A la Convention, le député
de l’Eure Buzot présente son rapport pour une garde nationale en protection de l’Assemblée au nom du Comité militaire et est renvoyé à discussion. Robespierre interviendra et répondra à ce sujet par la négative à la séance du 24 de ce mois et désignant le ministre de l’intérieur : « Que dis-je? qui peut songer aux circonstances qui ont accompagné et précédé le projet que je combats, sans voir qu'il ne fait que préparer celui de morceler l'état en républiques fédérées? Eh! que signifient donc ces déclamations intarissables contre l'esprit qui anime les citoyens de Paris ; contre tous les mandataires que cette ville a choisis? Que signifient ces suppositions éternelles de complots, dont on prétend qu'elle est le foyer ; ces dénonciations prodiguées à tous propos par un ministre » (Roland).

9 octobre : Dominique Joseph Garat, journaliste et philosophe remplace Danton au ministère de la Justice. La plume la plus bavarde de toute la seconde révolution. A la Convention, il est décrété que « Les émigrés pris les armes à la main seront livrés à l'exécuteur dans les vingt-quatre heures et mis à mort ».

10 octobre : A Paris, aux Jacobins, Jacques Brissot est exclu du club suite à ses absences répétées, et celui-ci demande à ses partisans de partir par moyens interposés. L’ami de coeur de Madame Roland le député de l’Eure, François Buzot reste membre. Les montagnards ou jacobins des Cordeliers deviennent maîtres des débats. Collot-d’Herbois deux jours après fait voter la parution de l’exclusion dans le journal des débats de la société.


11 octobre : La Convention désigne sur demande de Pierre-Joseph Cambon, député de l’Hérault, un comité de Constitution, formé de neuf membres : Sieyès, Condorcet, Thomas Paine, Brissot, Pétion, Bertrand Barère, Vergniaud et Gensonné. Ce jour, Dumouriez est présent à l’Assemblée nationale et se rend aussi aux Jacobins pour embrasser Robespierre, et se voit souhaiter la bienvenue par Danton. Marat de son côté va commencer à porter des accusations contre sa personne et l’attaquera de front le lendemain au sein de la « Société des Amis de la Liberté et de l’Egalité ».

12 octobre : Aux Etats-Unis est fêté pour la première fois le « Colombus Day » en hommage à Christophe Colomb découvrant l’Amérique 300 ans auparavant. Ce jour est aussi célébré en Amérique Latine sous domination coloniale espagnole comme celui de la « race ».

14 octobre : A Verdun, les Prussiens se retirent de la ville.

15 au 18 octobre : La Convention décrète la suppression de l’ordre monarchiste et militaire de la croix de Saint-Louis. Le lendemain, le député, plutôt méconnu de l'Yonne Pierre Bourbotte, siégeant du côté de la Montagne demande que Louis XVI soit condamné à la peine de mort, sans aucune forme de procès. Le 18, Elie Guadet devient le Président de l’Assemblée à la place de Jérôme Pétion. Son successeur sera Hérault de Seychelles, le 2 novembre. Au sein du Conseil exécutif, c’est l’arrivée de Jean-Nicolas Pache au ministère de la guerre, désigné par la Convention par 441 voix sur 560 votants, mettant fin à l’intérim de Lebrun-Tondu. Jean-Nicolas Pache personnalité montante était membre du cabinet et fonctionnaire du ministre de l’intérieur de mars à juin. Il avait été sollicité en août pour rejoindre le nouveau Conseil comme ministre de la marine et avait refusé, et conseillé Gaspard Monge à sa place. Proche un temps des girondins, il se rapprochera de la mouvance hébertiste en 1793.

19 octobre : A Paris, les travaux de protection de la ville sont arrêtés. Au club des Jacobins est constitué un comité auxiliaire de constitution chargé de surveiller l’élaboration de la nouvelle constitution avec Robespierre, Danton, Billaud-Varenne, Collot-d’Herbois, Couthon et Chabot.

21 octobre : Allemagne, à Mayence, les troupes françaises du général de Custine s’emparent de la ville.

22 octobre : A Longwy, les Prussiens s’en vont. A l'Assemblée, il est demandé le rattachement de la Savoie et de Nice à la France. A Chambéry, les Savoyards
« en assemblée nationale des  Allobroges» demandent le rattachement du duché à la France. Depuis Valenciennes, la première lettre du général Dumouriez au ministre de la guerre Nicolas Pache sur la situation des armées, où il est en « conférence avec le général la Bourdonnaye ». (source Archives.org - Correspondance du Général Dumourier avec le ministre de la guerre, pendant la campagne de Belgique en 1792, paru en 1793, chez le Libraire Denné, au n° 93 et 94 Palais de l’Egalité à Paris).

23 octobre : En Allemagne, c'est l'entrée des troupes françaises du général de Custine à Francfort.


24 octobre : Valenciennes, deuxième lettre de Dumouriez à Pache, il stipule que « Les Autrichiens ont abandonné les postes qu’ils avaient sur le territoire français. (…) J'espère que mes  ordres seront exécutés avec précision; s'ils ne l’étaient pas, j'aurais lieu de croire que le pouvoir  exécutif n'aurait pas expliqué correctement aux  généraux en chef d'armée, qu'étant responsable de cette guerre, je dois être obéi par eux, sans  qu'ils puissent mettre leurs combinaisons ou  leur amour propre en opposition avec mes plans. (…) Je vous prie de donnée des ordres très positifs, afin que je ne me  trouve pas dans le même embarras qui a pensé faire échouer ma campagne des Ardennes. En  voilà assez sur cet article, dont je ne vous parle que par pure précaution. Comme nous aurons  le 28, 75.000 hommes sur le  terrain ennemi, et hors de France, il faut penser sérieusement à les payer en numéraire. Il faut compter pour cela environ trois millions par  mois, à commencer du 28 octobre ». Le général rajoute que 20.000 soldats supplémentaires doivent arriver et qu’il faut compter sur 4 millions en tout pour les besoins financiers de ses effectifs par mois. Ce même jour sont émis 400 millions d'assignats.

Buste de Dumouriez par Houdon


25 octobre : A Paris, Danton est soupçonné d’avoir détourné 200.000 livres, il se trouve sur le gril au sujet de ses comptes ministériels, qu'il n'a pu ou surtout voulu fournir un état de ses dépenses. Il se voit couvert ou soutenu par les ministres Clavière, Monge et Lebrun. Valenciennes, quatrième lettre à Pache de Dumouriez sur le point d’entrer en Belgique avec 60.000 hommes et avec « une armée manquant de tout. (…) J'ai une dernière observation à vous faire à l'égard de ce marché, et vous voudrez bien la soumettre au citoyen Roland, ministre de l'intérieur, avec lequel j'en ai raisonné plusieurs fois ; c'est que tout marché qui nous fait venir des grains de l'étranger, fut-il même cher, nous est avantageux, parce qu'il arrête les accaparements qu'on doit craindre de la part d'une compagnie de régisseurs chargés de l'approvisionnement de toutes les armées ; c'est qu'il laisse dans le royaume tous les grains nécessaire pour la nourriture des habitants ; c'est qu'en coupant une branche du monopole des grains, il empêche l'inquiétude des départements et l'interception d'un département à l'autre, ou l'une ville à l'autre. C'est d'après ces principes que j'ai promis au citoyen Roland que, dès que je serai entré dans la Belgique, je tâcherai de faire rompre tous les marchés des Régisseurs, pour ne plus rien extraire du territoire de la France, pour vivre sur la Belgique même, pour la partie d'armée qui y sera. Tels sont les points dont nous sommes convenus le citoyen Roland et moi, et vous sentirez que le marché très utile, très urgent des citoyens Paulet et Fabre rentre dans les mêmes vues, puisqu'au lieu de faire une consommation des grains du pays, il nous fait entrer des grains de l'extérieur ».



26 octobre : Depuis Valenciennes, il est publié par Dumouriez un Manifeste aux peuples de la Belgique. Débutant par « Brave Nation Belge ! ». De son côté, présent aussi à Valenciennes, le général Miranda envoie un courrier au citoyen Pétion, membre de la Convention, il lui précise de prendre son temps, pour la lire d'une traite :

« Mon cher et digne ami, Vous serez peut-être étonné de n'avoir pas reçu de mes nouvelles depuis que j'eus le plaisir de vous écrire par notre mutuel ami le Général en Chef M. Dumouriez — le cas est que ma santé en a été un peu dérangé, (…) assez rétabli pour prendre le commandement de la 2ème division de l'armée que le Général en Chef a voulu bien me confier. — Enfin voilà notre avant-garde qui est entré sur le territoire ennemi avec succès ; et le reste de l'armée qui entrera après demain... nos Plans pour chasser les ennemis, et envahir les Pays-Bas Autrichiens. (…)  Je vous recommande une chose de ma part, sage Législateur, et ces sont les femmes... pourquoi dans un gouvernement Démocratique la moitié des individus ne sont-ils pas directe ou indirectement représentés ; tandis qu'elles sont également assujettie à la même sévérité des Lois que les hommes ont fait à leurs volonté? pourquoi au moins ne sont elles pas consultées sur les Lois qui les conservent (concernent) plus directement, comme sont celles du mariage, du divorce, éducation des filles etc? Je vous avoue, que toutes ces choses là me paraissent des usurpations criantes, et très dignes d'être prises en considération par nos sages Législateurs… Si j'avais ici mes papiers je trouverais quelques observations que j'y ai fait sur le même sujet en parlant avec quelques Législateurs d'Amérique et de l'Europe, qui ne m'ont jamais donné aucune raison satisfaisante, et la plus grande partie sont convenu de l'injustice, etc. — Enfin, mon cher ami, ne soyez pas si silencieux, dîtes un mot de temps en temps, ça réjouit infiniment ma pure amitié ... et ces sont des sensations bien douces. Mes compliments respectueux à Madame Pétion, au Petit, et tous nos amis.— Je vous embrasse et suis avec un attachement inviolable, "Le votre, Miranda". »
(Archivo del General Miranda, appendice aux lettres,
pages 453 à 456, tome 14, éd. Sur Americana - Caracas 1933)


27 octobre :  Les armées du général Dumouriez entrent en Belgique et marchent sur Mons (à l’époque les Pays-Bas Autrichiens en carte ci-dessus, source : Portail de la Wallonie.be).

28 octobre : Depuis Paris, le ministre de la guerre, sa deuxième lettre à Dumouriez : « En vous faisant part, général, de ce que j'avais appris des démarches du baron de Senfft fit des projets des Prussiens pour hiverner dans le pays de Liège, j'ai dû vous communiquer mes idées pour empêcher l'exécution d'un, dessein que je croyais intéresser votre gloire et celle de la république. J’ai rempli mon devoir comme ministre ; et je suis content. C'est sans doute à vous, général, à qui la conception, la gloire et la responsabilité du, plan que vous suivez appartiennent, à en diriger l'exécution ; et on ne peut être moins disposé que je le suis, à substituer mes vues sur les opérations militaires à celles du général qui en est chargé. Compté que j'emploierai tous les moyens qui sont en mon pouvoir, pour que votre armée n'éprouve aucun besoin. Je vous prie seulement d'exiger des officiers de votre état-major et de vos commissaires des guerres, un esprit de prévoyance qui les empêche de remettre, les demandes à l'époque même où le besoin se fera sentir » ; signé par Pache. Aux Jacobins, Robespierre dit l’aîné (son frère dit le « le jeune » est élu d’Arras), il fait une longue intervention « sur l’influence de la calomnie ».

Une journée parlementaire pas comme les autres !



Statue à l'intérieur du Panthéon dédiée à la Convention


29 octobre : A la Convention, après la présentation des dons envoyés à la chambre, vient à la barre  pour  la commune de Montréal (environ 3.400 habitants), Louis Maribon de Montaut, député du Gers. Il déclare être chargé « de déposer sur le bureau de la Convention nationale, son adhésion la plus formelle au décret qui abolit la royauté ; elle s'exprime ainsi : 
Le peuple souverain, indigné de la perfidie de Louis Capet, a désiré l'abolition de la royauté ; vous l'avez prononcée, vous avez rempli votre devoir. 
Je ne puis passer sous silence une circonstance qui me paraît remarquable, et qui peut-être sera digne de mériter votre approbation : les citoyennes de ce petit village, accourues pour entendre lire l'adresse qu'on vous envoyait, ont demandé d'être admises à la signer, et elles vous disent avec l'enthousiasme du patriotisme, qu'ayant vu partir d'un œil sec leurs époux, leurs enfants et leurs frères pour l'armée, lors même qu'il y avait un roi parjure à la tête de nos forces ; jugez, disent-elles, de notre contentement, lorsque nous avons appris que ce que nous avons de plus cher, va désormais combattre pour le bonheur de la République, car nous aussi nous étions républicaines avant le 10 août. 
La même commune a pris un arrêté en conseil général, pour vous inviter de vous occuper le plus promptement possible de l'instruction publique. Ces citoyens patriotes pensent que l'instruction du peuple est la première sauvegarde des lois, et le seul moyen qu'il y ait pour anéantir les tyrans. 
La commune de la Graulet, même district et même département, vous dit à peu près les mêmes choses. »

Le Président de l’Assemblée Guadet demande « que la Convention nationale, satisfaite du zèle et du patriotisme des citoyennes de Montréal, en décrète la mention honorable. 
Je pourrais même ajouter que ce petit village, quoique très peu fortuné, a fourni, lors de la formation des bataillons de volontaires gardes nationaux, une compagnie complète. On doit tout cela à l'énergie des citoyens patriotes et à la pusillanimité des gentillâtres de ces contrées qui ont tous émigré ».

Puis arrive Jean-Marie Roland, il fait une brève intervention précisant qu’il ne peut se faire entendre et remet un rapport au secrétaire de séance à Jean-Denis Lajuinais (député d’Ile et Vilaine) pour lecture. Il est question du Département et de la Commune de Paris, il dresse un état des difficultés et mentionne que le département fait bien son travail. Mais il se voit limiter dans son action par la commune et liste un état criminel des choses prouvant le manque de respects des lois et une grande désorganisation de la municipalité. Le tout s’interférant avec les sections, il demande la stricte application de la légalité et d’être informé des questions concernant les affaires criminelles. « J'avais dénoncé les meurtres prolongés des premiers jours de septembre et l'inutilité de mes réquisitions pour en arrêter le cours. Il n'est, pas douteux cependant qu'un grand nombre de bons citoyens aurait contribué avec zèle à la répression de ces excès : pourquoi donc se sont-ils commis sans obstacles? C'est ce que peuvent seules expliquer la désorganisation delà force publique, le défaut de volonté de ceux qui devaient l'employer, la terreur imprimée par l'audace du petit nombre, et l'inaction des autorités. Eh bien! cette erreur n'est plus sans doute; l'organisation de la garde nationale doit être faite; mais le défaut de volonté de ceux qui peuvent la requérir ou la commander, n'existe-t-il pas encore? car le service public se fait mal, malgré mes plaintes éternelles et mes réquisitions répétées ».

Le ministre de l’Intérieur fait était état en autres de l’affaire du garde de meuble et de plusieurs histoires criminelles touchant à la protection des biens nationaux ou de particuliers dans la capitale ou la région île de France, en clair une bonne part de ses attributions lui échappe et la situation criminelle est plus que confuse. La missive lue se termine par « Département sage mais peu puissant; commune active et despote ; peuple excellent, mais dont une partie saine est intimidée ou contrainte, tandis que l'autre est travaillée par les flatteurs et enflammée par la calomnie; confusion des pouvoirs, abus et mépris des autorités ; force publique faible ou nulle, par un mauvais commandement: voilà Paris.
 Plusieurs membres : Très bien, très bien, nous demandons une seconde lecture de cette phrase ». 
Le secrétaire de l’Assemblée. Lanjuinais, donne une seconde lecture de la phrase. La lecture du rapport continue, certaines pièces sont produites, et une voix dans l’assemblée se lève pour dire : « On empoisonne les sociétés populaires d'écrits incendiaires, je demande l'impression du mémoire du ministre Roland et je demande qu'il soit envoyé à tous les départements, à toutes les communes et surtout à toutes les sociétés populaires, car il importe au salut public qu'aucun français ne reste dans l'erreur ». 
A ce moment Maximilien Robespierre « demande à parler contre l'impression de ce rapport ».

Plusieurs députés refusent de l’entendre et ils insistent sur l'impression du document. Le député de l'Eure-et-Loir, Jean-François Delacroix « observe que l'on ne peut décréter une proposition avant d'avoir entendu celui qui veut la combattre ». Plusieurs interruptions suivent de rapides interventions de Robespierre, les députés François Rebecqui des Bouches du Rhône et Charles Barbaroux de Marseille lancent des mots d’accusations, et Louvet lui s’élance à la tribune et l’accuse à son tour.  Les débats sont à vif, et ce n’est que le début. Robespierre reprend à nouveau la parole et il conclut par : « Je demande qu'elle veuille bien, après avoir ordonné, si elle le veut, l'impression du mémoire du ministre, mais non pas l'envoi officiel aux 83 départements, fixer un jour où il soit permis de discuter ce rapport; car cette discussion franche doit dissiper bien des préventions, bien des erreurs, étouffer des haines funestes; et puisqu'un membre s'est présenté pour m'accuser, je demande qu'il soit entendu, mais qu'on m'entende à mon tour. 
Un grand nombre de membres : C'est juste ! ».

Le débat sur cette question est finalement ajourné et le rapport renvoyé sur le champ au Comité de sûreté. A souligner les propos de Danton sur Marat le présentant comme un être « acariâtre et asocial ». Maintenant vient à son tour le député
Louvet (et journaliste rédacteur de la Sentinelle), il se verra interrompu par Danton et utilisera la faille comme figure de style, pour s’en étonner et proférer des lourdes accusations contre Robespierre et ne nommant Marat sans le nommer ou presque. (Archives Parlementaires, tome 52, l’intervention in extenso de Louvet est en tome 53, de la page 170 à 190)


30 octobre : Depuis Paris, le ministre Pache (en portrait ci-contre)  rédige sa cinquième lettre au général Dumouriez : « et prend vif intérêt au succès de l’expédition que vous commencez » (…) « Je fais chercher des plans de Namur et de Huy et je les enverrai à Valence selon vos désirs. Je confèrerai demain avec le colonel Saint George pour vous envoyer promptement le corps qu’il commande. Je donne aux troupes que vous me demander. (…) Le ministre des Affaires étrangères m’apprend que l’avant-garde du général Clairfait est arrivée à Namur le 28, et qu’on y attend encore 12.000 hommes ».

XI - Le mois de novembre 1792

Jeudi 1er novembre : La Convention décrète la mise à la disposition de la nation des biens des émigrés.

2 novembre : Allemagne, depuis le quartier général de Mayence, le Général de Custine s’adresse par courrier au ministre de la guerre « Que faut-il faire aujourd'hui? il faut, dis-je, que cette armée (de la Moselle) marche vers Trêves. Avec les renforts qui m'auront été envoyés, j'attaquerai Rhinfeldt. Après cette prise, remontant vers Coblence, en même temps que l'armée qui sera à Trêves, et que le corps qu'elle aura fait marcher pour attaquer Traerbach, réglant ses mouvements sur ceux de l'ennemi, nos armées combinées attaqueront Ermansthein : elles seront à portée de se combiner pour cette attaque. Pendant ce temps-là, le général Dumouriez tiendra, vers Namur, les Autrichiens en échec. C’est en suivant la Meuse qu’il faut qu’il les attaquer ». A la Convention il est voté une loi punissant les émigrés rentrant en France et s'étend à ceux qui rentreraient dans les colonies.

3 novembre : Belgique : Le général Dumouriez est en manque de fourrage pour les besoins de l’armée et écrit au ministre à ce sujet une neuvième lettre. Le Conseil exécutif provisoire en séance « délibérant sur les règles à prescrire aux généraux des armées de la république française, relativement aux communications qu'ils sont dans le cas d'avoir avec les généraux et autres agent des puissances ennemies. Arrête que les généraux et chefs militaires ne pourront avoir avec les généraux ou autres agents desdites puissances, aucun pourparlers, écouter aucunes propositions, entamer ou suivre aucunes négociations relatives aux intérêts politiques; et qu'en conséquence, il leur sera prescrit par le ministre de la guerre de n'avoir d'autres communications avec les ennemis, que celles qui sont nécessitées pour les capitulations des places, cartels, échanges de prisonniers; et autres détails purement militaires qu'il est d'usage de traiter à l'amiable entre deux armées ennemies, suivant les règles du droit de la guerre ». Courrier signé par Grouvelle comme Secrétaire et Pache, le ministre.

4 et 5 novembre : A la Convention, une délégation de citoyens Niçois demande le rattachement de leur comté à la France. L’un des représentants est Jean Dominique Blanqui député extraordinaire de la ville et comté de Nice, et père de Louis Auguste. Il déclare à la barre : « Législateurs, depuis sa génération à la liberté, le peuple de Nice avait manifesté le désir d'envoyer auprès de vous des citoyens, pour vous exprimer des sentiments qui sont gravés dans son cœur; mais des raisons, aussi hautes qu'inconnues, en ont sans cesse retardé l'accomplissement ». (…) « Un avenir plus heureux nous attend ; notre confiance et votre générosité nous en sont un sûr garant. Prononcez cette réunion désirée; dites que nous serons portion de cette heureuse contrée que nous adoptons pour nouvelle patrie, et nous bénirons à jamais la générosité du peuple Français. (Vifs applaudissements). A son tour,
 « le citoyen Veillon s'exprime ainsi : 
Les sentiments des citoyens de Nice sont encore mieux gravés dans leurs cœurs qu'ils ne sont exprimés dans leur adresse que je vous présente ». L’adresse, c’est-à-dire un document manuscrit remis au Président de séance et lu par lui aux députés. 

Le 5, à la chambre des députés, sous la présidence de Hérault de Seychelles, Robespierre répond aux accusations de Louvet du 29 octobre, il s’exclame dans son intervention : Citoyens, vouliez-vous une révolution sans révolution? (page 161) après avoir fait état de sa rencontre avec Marat en janvier 1792 et de ses liens avec celui-ci. Il reprend les différents points exposés par Louvet et récuse en partie les accusations. Les débats sont moins tumultueux, mais tout aussi vifs que le 29 octobre et ce jour marque un point de rupture entre Robespierre et Pétion, qui dans un discours prend le parti de Louvet, ainsi que Jean-Baptiste Birotteau élu des Pyrénées-Orientales. Cette mise en doute est partagée par ceux que l’on désigne comme girondins, Barbaroux représentant de Marseille un des plus vindicatifs est l’esprit agité de la journée, tout en étant secrétaire de la séance. Il est aussi demandé la mise en accusation de Marat, la question est renvoyée au Comité de sûreté. (Archives Parlementaires, tome 53 : début de séance à la page 151, intervention de Robespierre de la page 158 à la page 165, à partir de la page 191 pour Birotteau et page 193, celle de Pétion).




6 novembre : Pays-Bas autrichiens (approximativement la Belgique), à Jemmapes (dessin illustrant les combats ci-dessus) les troupes du général Dumouriez remportent la victoire contre l’armée du duc autrichien de Saxe-Teschen. Le champ de bataille laisse 6 000 morts, dont 2.000 Français et 4.000 hommes des troupes autrichiennes. A la Convention, au nom de la commission des Vingt-quatre, le député Valazé donne lecture du rapport « sur les crimes du ci-devant roi, dont les preuves ont été trouvées dans les papiers recueillis par le comité de surveillance de la commune de Paris ». Ce même jour, il est décrété l’impression de 40 millions d’assignats en petite coupure de 20 sols.

7 novembre ; En Belgique, à Mons, c’est l’entrée des troupes françaises. A la Convention, le député de la Haute Garonne, Jean-Baptiste Mailhe présente au nom du comité de législation un rapport sur la mise en accusation de Louis XVI. « Louis peut être jugé, qu'il le sera par la Convention, que des commissaires pris dans son sein feront un rapport énonciatif des délits dont Louis XVI sera prévenu, que cet acte sera imprimé et que les originaux des pièces à charge lui seront communiqués et que la Convention fixera le jour où Louis paraîtra devant elle ; que Louis XVI présentera, par lui ou par ses conseils, sa défense écrite ou verbale ; enfin que le jugement sera porté par appel nominal » 
(…) 
« Vous aurez aussi à balancer les destinées du fils de Louis avec l'intérêt de la République ». (source : Biographies des parlementaires de l’Assemblée Nationale)

8 novembre : A la Convention, il est décidé l’envoi de nouveaux commissaires aux îles des Amériques, à l'exception de la colonie de Saint-Domingue. Colonies, à l’article 1er et suivant donne lieu à une accusation contre plusieurs officiers commandant dans les colonies, et à des mesures d'ordre et de police pour y rétablir la tranquillité.

9 novembre : Le général Montesquiou est destitué et mis en accusation pour avoir traité sans autorisation avec la république de Genève.

10 novembre : Belgique, le dixième courrier de Dumouriez à son ministre de tutelle affirmant son refus de combattre au-delà des frontières naturelles de la France : « Je suis très opposé à toute guerre offensive et extérieure, surtout à toute guerre qui nous porte au-delà de nos limites naturelles, c'est-à-dire du côté du midi, les Pyrénées et les Alpes, du côté de l'est et du nord-est du Rhin. Je serais même opposé à l'invasion des Pays-Bas, si je ne voyais pas dans la liberté de nos voisins une barrière plus solide que celle des places fortes, et beaucoup moins dispendieuse; qui ajoute en faveur de la guerre Belgique au motif de notre intérêt personnel, à celui dés progrès de la philosophie et de la raison. »

11 novembre : Belgique, le général français la Bourdonnaye et ses troupes entrent dans la ville de Gand.

13 novembre : En Belgique (ou Pays-bas Autrichien) se déroule la bataille d’Anderletch entre la France avec 35.000 volontaires et l’Autriche, relevant 400 morts et se faisant prendre des centaines de prisonniers. A la Convention, les débats sur le procès de Louis XVI sont ouverts. Antoine de Saint-Just déclare : « Pour moi, je ne vois point de milieu, cet homme doit régner ou mourir ». Aux Jacobins, l'on présente à l'examen de ses membres : « l’inviolabilité du roi ».



illustration de l'entrée des troupes françaises à Bruxelles

14 novembre :
A la Convention, il est décidé l’embarquement de troupes pour les colonies. MM. Sonthonax, Poverel et Ailhaud « Les commissaires nationaux civils envoyés à Saint-Domingue (...) écrivent et préviennent depuis Port au Prince, (...) que la volonté nationale est méconnue dans cette colonie, & que les esprits y sont tous dévoués au roi. Une insurrection a éclaté dans la ville de Saint-Marc, & les auteurs sont parvenus à s'échapper. » Ce courrier parviendra le 11 janvier prochain à l'Assemblée. En Belgique, entrée triophale des armées du général Dumouriez à Bruxelles et débandade autrichienne.

15 novembre : A l'Assemblée Henri Grégoire est élu président de l’Assemblée. Il demande à nouveau la mise en jugement du roi, tout en se prononçant contre la peine de mort. Le ministre Pache demande dans un courrier un état sous 8 jours de l’armée en Belgique au général Dumouriez.

16 novembre : Depuis Paris, le ministre Pache adresse ses félicitations à Dumouriez pour avoir tenu parole et d’être dans les temps prévus. « La liberté des Belges sera due à vos talents et à votre courage » (14ème lettre).

18 novembre : Le serrurier Gamain révèle au ministre de l'Intérieur l’existence de l'armoire de fer de Louis XVI dans une suite des Tuileries. A la Convention, il est annoncé que l'on accordera fraternité et secours à tous les peuples qui veulent recouvrer leur liberté.

19  novembre : Devant l'Assemblée, Jean-Paul Marat déclare :
« Je ne croirai à la République, que lorsque la tête de Louis XVI ne sera plus sur ses épaules ». A Saint-Domingue, le commissaire L.F. Sonthonax adresse un courrier à la Convention (qui sera lu le 19 janvier 1793). Délégué aux îles Sous-le-Vent, il résume les événements qui se sont passés dans la colonie et demande des secours pécuniaires pour venir en aide aux habitants :

« La guerre contre les esclaves révoltés a été commencée avec succès par Rochambeau ; un poste essentiel, d'où dépend la communication avec les Espagnols, a été pris le 7, et j'espère que nous pourrons avoir de bonnes nouvelles à vous annoncer. La commission intermédiaire ayant pris plusieurs arrêtés urgents, je l'ai autorisée à les faire exécuter sur ma seule approbation. Douze prisonniers venus d'Ouanaminthe (commune proche de la frontière espagnole), ont été massacrés à vingt pas de ma porte ; le même jour une troupe de gardes nationaux réunis pour firûler un drapeau et un pompon blanc, a souillé cette fête par des excès coupables. Ces faits m'ont déterminé à faire une proclamation. Elle a d'abord excité quelques murmures, mais après quelques jours de reflexions, la société patriotique est venue rendre hommage à mes principes. Vous y verrez que j'ai renvoyé à la commission intermédiaire six des fonctionnaires proscrits par la commission du Cap et qui ont perdu la confiance publique. Il s'est passé dans l'Ouest quelques événements dont mes collègues vous feront part. L'état des finances de la colonie devient de plus en plus déplorable. Un autre objet essentiel est d'assurer à Saint-Domingue l'assurance du crédit qui lui a été ouvert sur les Etats-Unis ; toutes les traites de Philadelphie reviennent protestées depuis quelque temps. »

(Le Cap,19 novembre 1792 - Arch. Parl. tome LIX)
20 et 21 novembre : La Convention prend connaissance de l’armoire de fer par le ministre de l'intérieur, M. Roland (caricature ci-contre) : « Elles sont enfin trouvées ces preuves (...) Il ne s’agit plus seulement de soupçons ni de défiance : des pièces écrites, arrachées de ces archives du crime, vont enfin apprendre à l’univers entier ce qu’il devait penser de ces réclamations affectées de la Constitution et des lois ; de ces serments si complaisamment répétés ; de ces témoignages hypocrites d'affection pour le Peuple, à l’abri desquels on soudoyait des assassins, on payait des pamphlets, on décriait les assignats, on subornait des régiments, on dispersait nos armées, on ouvrait nos frontières, on préparait enfin le ravage de nos propriétés, le massacre de nos familles, la ruine de la liberté et des espérances de l’humanité entière. » Il est désigné une commission de 12 membres pour lister les pièces de son contenu. Après une intervention du député François Buzot contre les provocations au meurtre, plus une proposition de loi, Michel Lepeletier de Saint-Fargeau fait un discours sur le même sujet et la liberté de la presse, dont il fait l'historique depuis 1789. Les propositions de Buzot sont rejetées par la chambre législative. Le lendemain, il est décidé une nouvelle émission de six millions d'assignats.


22 novembre : En Beauce, la taxation des grains provoque une forte agitation. Le mouvement de contestation se propagera dans la région. A la Convention, il est procèdé à la nomination de 4 nouveaux commissaires pour les « îles du Vent » (Petites Antilles). Le résultat du scrutin désigne quatre commissaires, qui sont les citoyens Chrétien, de Périgueux ; Coroller, ex-constituant ; Jeannet et Antonelle, ex-législateurs.

23 novembre : Décret de la Convention nationale, sur la Formation des bataillons de gardes nationales destinés à l'augmentation des forces employées dans les îles du Vent. (Source : Archive.org)

24 novembre : Le député Couthon, dans une lettre à ses compatriotes, fait état d’un charivari  organisé à Londres, et en fait une satire : « Cinquante à soixante mille patriotes anglais ayant couvert un âne de tous les attributs de la royauté, manteau, sceptre, couronne, etc., etc., promenèrent le baudet ainsi arnaché dans toutes les rues de Londres : ils le conduisirent ensuite sur les bords de la Tamise ; et là, après l’avoir décapité, ils jetèrent le tout dans la rivière, en disant hautement que c’était ainsi qu’il fallait traiter les rois. Le Gouvernement n’a rien osé dire, et le Roi et sa famille, effrayés de ce préliminaire, partirent secrètement pour Windsor » (Source : F. Mège, Correspondance inédite de G. Couthon, député du Puy-de-Dôme à la Législative et à la Convention nationale (1791-1794), Paris, 1892, p. 269)

27 novembre : A la Convention, la Savoie annexée devient le quatre-vingt-quatrième département, sous le nom de département du Mont-Blanc. Le département compte 7 districts et de nombreux cantons.


28 novembre : Belgique, les armées françaises entrent dans Liège. A Tours, il éclate une révolte de la population locale touchant au blé.

29 novembre : A l'Assemblée, une députation du Conseil général de la Commune de Paris est admise et présente un pétition sur les subsistances. A ce sujet, Antoine de Saint-Just intervient sur la question et les raisons de leur accaparement et conscient de la pmisère des plus humbles :
« Je ne suis point de l'avis du Comité, je n'aime point les lois violentes sur le commerce. (...) Il est dans la nature des choses que nos affaires économiques se brouillent de plus en plus, jusqu’à ce que la république établie embrasse tous les rapports, tous les intérêts, tous les droits, tous les devoirs, et donne une allure commune à toutes les parties de l’État. Un peuple qui n’est pas heureux n’a point de patrie ; il n’aime rien ; et, si vous voulez fonder une république, vous devez vous occuper de tirer le peuple d’un état d’incertitude et de misère qui le corrompt. Si vous voulez une république, faites en sorte que le peuple ait le courage d’être vertueux : on n’a point de vertus politiques sans orgueil ; on n’a point d’orgueil dans la détresse. En vain demandez-vous de l’ordre ; c’est à vous de le produire par le génie des bonnes lois. » (Source : Archive.org, Opinion du citoyen Saint-Just, sur les subsistances : imprimée par ordre de la Convention nationale, pages 1 et 3)

30 novembre : Belgique, c’est l’entrée des troupes françaises à Anvers. A Paris aux Jacobins, François Buzot après un rapport sur des troubles en Eure-et-Loire, en raison du prix des subsistances et une disette, demande à envoyer des commissaires. Robespierre dit que ses propos méritent attention, expliquant que ce n’est pas à la Convention de s’exposer à la colère populaire, pouvant s'avérer dangereuses pour les envoyés. La Convention ordonne le dépôt et l'impression de tous les discours relatifs au procès de Louis XVI. A la Convention il est décrété en huit articles sur la suppression du tribunal extraordinaire criminel du 17 août, et la mesure sera effective dès le lendemain.

XII – le mois de décembre 1792

Samedi 1er décembre :
Le roi d'Angleterre Georges III, par deux proclamations, ordonne de mettre la milice sur pied, et il convoque le Parlement pour le 16 décembre et sont mis en cause les écrits de Thomas Paine. A la Convention, il est décrété la peine de mort contre qui proposerait de rétablir la royauté en France, ou tout autre pouvoir attentatoire à la souveraineté du peuple. Dans la capitale Jacques Roux s'exprime sur la fin du roi et les accaparements devant la section de l'Observatoire (Section du député Louvet en 1791). Lire le dernier texte sur cette même page.

2 décembre : En Belgique c’est la reddition de la ville de Namur par les troupes de Dumouriez et s’engage à arrêter l’offensive. En Allemagne, l’armée française du  général de Custine est chassée de Francfort par les troupes prussiennes de Brunswick. A Paris, en remplacement de Jérôme Pétion est élu le troisième maire de la capitale, Nicolas Chambon de Monteaux, médecin de la Salpêtrière et auteur de traités médicaux. Il fera un mandat très court jusqu’en février 1793. Dans le renouvellement des élus, l’on remarque l’élection de nombreux hébertistes et également Hébert, tout comme Chaumette et le curé radical Jacques Roux. Aux Jacobins, une nouvelle intervention de Robespierre sur les subsistances se trouve en contradiction avec la position de Saint-Just exposée avant lui.

3 au 7 décembre : A la Convention, au sujet du procès de Louis XVI, Robespierre se prononce pour la mort du roi. Le 4 à la chambre se présente une délégation Belge, elle vient réclamer l’indépendance. Il est décrété, la peine de mort contre ceux qui proposeraient de rétablir la royauté en France. Le 5, à l’Assemblée suite à l’examen des pièces contenues dans l’armoire de fer, Talleyrand est mis en accusation, il est en Angleterre avec des papiers fournis par l’ancien ministre de la justice Danton. Il ne reviendra pas avant la fin de l'année 1796, après deux ans de séjour aux Etats-Unis.
Depuis la salle des jacobins Robespierre fait enlever le buste de Helvétius et déclare : « Helvétius doit tomber, Helvétius était un intrigant, un misérable bel esprit, un être immoral, un des plus cruels persécuteurs de ce bon Jean-Jacques Rousseau. Si Helvétius vivait encore, nous le verrons avec son bel esprit et sa sublime philosophie grossir la masse des intrigants. » Jour suivant, le 6 au Parlement, le député Bourbotte propose la comparution du roi à la barre de l’Assemblée. Une commission dite des « vingt et un » (sont nombre de membres) est chargée de présenter « l'acte énonciatif des crimes de Louis Capet. » M. de Valazé, élu de l’Orne est son rapporteur. Il est décidé ce même jour à la demande de Marat que chacun des députés soit appelé individuellement (vote nominatif) et se prononce à voix haute. Le Lendemain, le député Philippe Rhül du Bas-Rhin intervient ce jour sur les documents contenus dans l’armoire de fer des Tuileries et en fait la lecture, entre autres une lettre d’Omer Talon. En annexe, des archives parlementaires toutes les pièces sont présentes par numérotation de 1 à 297, tous les courriers pour autant ne seront pas des charges et Dumouriez cité dans la liste par Rhül n’est pas impliqué dans la correspondance à titre personnel, c’est un simple échange sans compromis. (Archives Parlementaires BNF-Stanford - Deuxième annexe à partir la page 429 jusqu’à la page 649, suivie d’une liste de signataires de la Ville de Rouen).

  Vers la fin de la séance vient à la barre, Me Roland, épouse du ministre de l’intérieur. Compromise dans une déclaration d’Achille Viard, est mandée à la barre (7 décembre 1792).

 Le président des séances lui demande  : « Quel est votre nom ? 

»

La citoyenne Roland :
« Roland, nom dont je m'honore, car c'est celui d'un homme de bien. (Vifs applaudissements) 
Le Président: « Connaissez-vous le citoyen Viard? 
La citoyenne Roland. Je ne connaissais point Viard, lorsque je reçus, il y a huit jours, une lettre où le citoyen qui signait ce nom m'annonçait qu'ayant la confiance du citoyen Lebrun, ministre, des affaires étrangères, et étant sur le point de partir pour l'Angleterre, où il avait découvert une grande conspiration contre la République, il avait à communiquer au citoyen Roland des choses très intéressantes pour lui et pour le citoyen Lebrun, mais qu'il n'avait pu lui en faire part à cause de la multiplicité de ses affaires. Il me priait de lui ménager un moment d'entretien. Je lui répondis par un billet non signé que, s'il s'agissait d'affaires publiques, je m'en tenais à mon rôle de femme, que je n'en voulais pas faire d'autre et que sa lettre me prouvait qu'il partageait avec beaucoup de personnes une erreur semée par la malignité ou l'envie. Il faut vous adresser, lui dis-je, au citoyen Roland. J'ajoutai cependant que, si la chose intéressait sa personne, je serais visible le lendemain depuis dix heures jusqu'à onze.

Je reçus une seconde lettre, par laquelle on m'informait qu'invité par le citoyen Lebrun à un rendez-vous très important, on ne viendrait pas le lendemain, mais seulement le surlendemain. Je jugeais dès lors que les choses importantes n'étaient pas d'un intérêt tel que je les avais pensé d'abord. Le surlendemain, je vis le citoyen Viard, que je reconnais. Il me raconta ce qu'il avait vu à Londres. Je le laissai parler autant qu'il voulut. Je lui témoignai mon étonnement sur ce qu'ayant des choses intéressantes à communiquer au ministre, c'était à moi qu'il s'adressait plutôt qu'à lui; je lui renouvelai ce que je lui avais écrit ; qu'apparemment il était dans une erreur que partageaient plusieurs personnes. Il me dit que le ministre était, si surchargé d'affaires, qu'il ne pourrait lui indiquer qu'un rendez-vous fort éloigné; que mon intervention pourrait en rapprocher le terme. Je lui répondis que je n'étais qu'à côté des affaires, que ce n'était pas à moi à disposer du temps du citoyen Roland, qu'il savait trop bien diriger l'emploi de ses moments, pour que je pusse m'en mêler; que, d'ailleurs, comme fonctionnaire public, il s'en tenait à l'usage de n'entendre les personnes qui ont des affaires à lui communiquer que dans l'ordre de la date de leur présentation. Il se retira. 
Sans avoir l'œil très exercé, j'ai cru voir dans Monsieur, un homme qui venait pour observer ce qu'on pensait, plus que pour toute autre chose ».
(On applaudit à plusieurs reprises. Quelques rumeurs se font entendre à l’extrême gauche. 
Plusieurs membres demandent que les honneurs de la séance soient accordés à la citoyenne Roland). 


Le Président :
« Citoyenne, la Convention nationale, satisfaite des éclaircissements que vous venez de lui donner, vous invite aux honneurs de la séance ». 
(La citoyenne Roland traverse la salle au milieu 
des applaudissements de la grande majorité de l’Assemblée).

Bib. de Stanford - Archives Parlementaires, pages 422 et 423, tome 54

10 au 12 décembre : Depuis son lieu d'internement Louis et le dauphin jouent aux quilles, imperturbable l'ex. roi gagne les parties (selon le témoignage du valet, Jean-Baptiste Cléry). A la Convention, Robert Lindet, pour la commission des 21, présente l'acte énonciatif des crimes de l’ancien roi avec 33 chefs d'accusations. Le lendemain, Louis Capet comparaît à la barre et s'assied. Le député Barère, président fait donner par le secrétaire M. Mailhe lecture de l’acte d’accusation, ensuite comme président il lui pose des questions : « Louis, vous allez répondre aux questions que la Convention nationale me charge de vous faire. Louis, le peuple français vous accuse d'avoir commis une multitude de crimes pour établir votre tyrannie, en détruisant sa liberté. Vous avez, le 20 juin 1789, attenté à la souveraineté du peuple en suspendant les assemblées de ses représentants et en les repoussant par la violence du lieu de leurs séances. La preuve en est dans le procès-verbal dressé au jeu de Paume de Versailles par les membres de l'Assemblée constituante. Qu'avez-vous à répondre? » Réponse de Louis : « Il n'y avait aucunes lois dans ce temps-là qui existassent sur cet objet. » Le surlendemain, l'ex. roi Louis, désigne ses défenseurs : MM. Trochet et Malesherbes.

13 décembre : En Martinique, l’Assemblée coloniale déclare la guerre à la République. Depuis Londres, le Parlement aide aux préparatifs d’une guerre contre la France sous la gouverne de William Pitt, dit le jeune.

14 décembre : Il est lu à la Société d'histoire naturelle de Paris un rapport : Sur la nécessité d'établir une Ménagerie :
« La société a demandé à nous, A.L. Millin , Pinel et moi (A. Brogniart), notre opinion sur la proposition faite par Henri-Bernardin de saint-Pierre, d'établir une Ménagerie au Jardin national des plantes. Une Ménagerie, telle que les princes et les rois ont coutume d'en entretenir, n'est qu'une imitation coûteuse et inutile du faste asiatique : mais nous pensons qu'une Ménagerie sans luxe peut être extrêmement avantageuse à l'histoire naturelle, à la physiologie et à l'économie ; et que les avantages, que la nation en doit retirer, la dédommageront amplement des dépenses quelle fera pour l'établir. » (Source : Gallica-Bnf, 4 pages) Il est procédé à une nouvelle émission de 300 millions d'assignats.

15 au 17 décembre :
A la Convention, le décret sur l'administration révolutionnaire française des pays conquis à la demande de Pierre Joseph Cambon est approuvé. Il est prescrit aux généraux de proclamer la souveraineté du Peuple dans les pays occupés par l'armée française. Allemagne, Dumouriez annonce par courrier à son « citoyen ministre » qu’il entrera demain dans Aix-la-Chapelle et sera occupé par 12 bataillons et autres stationnements des troupes. Le lendemain, il est décrété la peine de mort contre quiconque proposerait de rompre l'unité de la République. Le surlendemain, le Parlement autorise la nomination de l'avocat Raymond de Sèze comme son troisième conseil du roi à la demande de ses deux défenseurs Malesherbes et de Tronchet.

Mi-décembre : Arrivée à Paris de Mary Wollstonecraft (1759-1797), écrivaine, elle est la mère de l'auteure de Frankenstein, Mary Shelley née en 1797 (retour en Angleterre en avril 1795). Cette "féministe" anglaise fréquente les milieux étrangers dans un premier temps comme auteure, son livre est traduit à Lyon la même année pour son ouvrage : Défense des droits des femmes (wikisource).Mary Wollstonecraft rédige une dédicace accidulée à l'ancien évêque d'Autun (ou Talleyrand) pour ses prises de position sur l'éducation des filles, et une critique très sévère de Jean-Jacques Rousseau et sa relation aux femmes : « Mais toutes les erreurs de Rousseau prirent leur source dans sa sensibilité, et les Femmes sont toujours prêtes à pardonner à ceux à qui leurs charmes ont tourné la tête. Il se passionna, quand il aurait dû ne tenir que le froid langage de la raison, et la réflexion enflamma son imagination, au lieu d’éclairer son jugement. » (page 221)

18 décembre : Depuis Liège, Dumouriez annonce par courrier à Pache après 2 campagnes consécutives d’avoir un besoin impérieux de repos se sentant au bout de ses forces. (31ème lettre) Le Mercure universel publie une lettre de M. de P.A. Caron de Beaumarchais à sa famille datée du 8/12 depuis Londres, ci-après :

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L'exil forcé de M. Caron de Beaumarchais  (1732-1799)



« Sans la liberté de blâmer, il n'est point d'éloge flatteur »

Note : Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais (ci-dessus en gravure) a été un personnage d'une très grande ambiguïté, et une des grands auteurs de son siècle, le dix-huitième. A la fois dramaturge à succès (le Barbier de Séville) et censuré un temps (le mariage de Figaro), espion de Louis XVI et embastillé en 1785, éditeur de Voltaire, puis administrateur des Eaux de Paris, sans oublier négociant d'armes et spéculateur peu scrupuleux... Voilà un homme avec un parcours pas vraiment courant, sa propre histoire est un véritable roman, dont il est difficile de tirer tous les bons cordons. Depuis 1787, il résidait non loin de la prison de la Bastille, dans une belle maison décorée avec grand soin avec un grand jardin. A 60 ans bien sonné, il est embarqué dans une histoire d'achat ou de trafic d'armes de 60.000 fusils achetés en Hollande, Beaumarchais voit son entreprise ruinée et dans l'obligation de fuir en Angleterre. En France, il va être considéré comme un "accapareur" et décrété traitre à la patrie. Il n'est plus vraiment souhaité aussi à Londres, a-il cherché à rentrer sans trop de dommage avec ce courrier? Il partira finalement à Hambourg et ne remettra pas les pieds en France avant l'année 1796, où il décédera 3 ans plus tard.

Beaumarchais à sa famille

« Ma pauvre femme, et toi, ma charmante fille ! Je ne sais où vous êtes, ni où vous écrire, ni même par qui vous donner de mes nouvelles ; lorsque j'apprends par les gazettes, que le scellé est mis une troisième fois, depuis quatre mois, sur ma maison de Paris, et que je suis décrété d’accusation pour cette misérable affaire des fusils de Hollande, à laquelle on a joint une abomination d'un genre plus sérieux, pour aller plus vite avec moi.

Je charge donc tous les honnêtes gens qui lisent les gazettes étrangères, d’avoir l'humanité de vous dire, ô mes chères tendresses ! que c’est de Londres, de cette terre hospitalière et généreuse, où tous les hommes persécutés dans leur patrie trouvent en abri consolateur ; que je vous prie de ne point vous affliger sur moi. Je vois vos douleurs à toutes ; les larmes de ma fille me tombent sur le coeur et le navrent ; mais c'est mon unique chagrin.

La convention nationale, trompée car le plus cruel amphigouris qui soit jamais sorti de la bouche d'un dénonciateur a conclu contre moi sur la foi de Lecointre, à un décret d’accusation ; mais ceux qui ont trompé Lecointre, sentant bien qu'une pareille attaque ne soutiendrait pas huit minutes d’examen, ont imaginé de jeter une si grande défaveur sur moi, qu'elle fit couler rapidement sur tout le reste. Ils m’ont fait dénoncer comme ayant écrit à Louis XVI, et m’ont rangé parmi les grands conspirateurs unis, contre la liberté Française.

Mais cette accusation plus grave que la première, a encore moins de fondement. Soyez tranquille, ma femme et mes deux sœurs ; sèche tes larmes ma douce et tendre fille, elles troublent la sérénité dont ton père a besoin pour éclairer la convention nationale sur des graves objets qu’il lui importe de connaître, et faire rentrer avec opprobre toutes ces lâches calomnies dans l'enfer qui les enfanta.

Je n’ai jamais écrit au roi Louis XVI, ni pour, ni contre la révolution ; et si je l’avais fait, je serais glorieux de le publier hautement ; nous ne sommes plus au temps où les hommes de courage avaient besoin de s’amoindrir, lorsqu’ils écrivaient aux puissances : à la hauteur des événements, j’aurais dit à ce prince de telles vérités, qu'elles auraient pu détourner ses malheurs, et surtout prévenir les maux qui déchirent le sein de notre malheureuse France.

Les seules relations directes que j’aie jamais eues avec ce roi, par l'intervention de ses ministre, remontent à la première année de son règne, il y a 18 ans, au moment qu’il s’élevait à ce trône, d’où un caractère trop faible, bien des fautes et la fortune, viennent de le faire choir si misérablement. Je suis bien éloigné de trahir ma patrie, pour la liberté de laquelle j'ai fait longtemps les vœux, et depuis de grands sacrifices ; et toutes ces viles accusations qui se succèdent contre moi à la convention nationale, seraient la plus terrible des abominations, si elles n’étaient en même temps la plus stupide des bêtises.

Mais le sénat qu’on a surpris est juste, et je n’ai pas été entendu. L’espoir de tous mes ennemis sans doute, était que je ne le serais jamais. En m’arrêtant en pays étranger, ils se flattaient que ramené dans ma patrie avec l’odieux renom d’avoir trahi sa cause, des assassins gagés auraient sur moi les scènes du 2 septembre, ou que le peuple même indigné de ma trahison supposée, m'aurait sacrifié en route avant qu'il fut possible de le désabuser. C'est la cinquième fois depuis quatre mois, qu'ils ont tenté de me faire massacrer ; et sans la générosité d’un magistrat de la commune, que je nommerai dans mon mémoire avec une vive reconnaissance, et qui vint me tirer de l’Abbaye six heures avant que toutes les voies en fussent fermées ; j’y subissais le sort de tant de victimes innocentes !

Si je ne prouve pas sans réplique, au gré de ma patrie et de l’Europe entière, que toute cette affreuse trame, n’est qu'une vile scélératesse pour tacher d’arriver à une grande friponnerie, et s’il y a une ligne de moi écrite au roi Louis XVI depuis 18 années, je dis anathème sur moi, sur ma personne et sur mes biens, et ]e cours me livrer au glaive de notre justice.

Je fais ma pétition à la convention nationale, pour la prier de distinguer la ridicule affaire des fusils, de la très grave accusation d'une coupable correspondance : avant de me purger ce la première, je dois être lavé ou mort sur mon travail de la seconde. Mais, au nom de Dieu, chère femme, si tu veux que j’aie toute ma tête, défends à ta fille de pleurer.

Londres, le 7 décembre 1792. »

Source : Retronews - Mercure universel du mardi 18 décembre 1792

20 décembre : La Convention décide l’adoption des principes de l’unité et de la gratuité de l’éducation.

21 décembre : Belgique depuis Liège, Dumouriez suite à un courrier de Pache, lui répondant ne pas avoir reçu suffisamment de circulaire sur la décision du 15 décembre et qu’il fait en sorte de le traduire et « de le réimprimer en grande quantité et en forme d’affiche en français, flamand, liégeois, et en allemand ». (32ème lettre)

22 décembre : A l'Assemblée, il est adopté une loi sur le libre commerce, notamment sur la vente des grains ou farines, qui fait suite à la loi du 8 de ce mois relative à la libre circulation des grains farines et légumes secs, dans l'étendue du territoire de la république. Les contrevenants à la libre circulation seront passibles de la peine de mort. Les lois de libre commerce ne seront pas ou peu appliquées dans la capitale en raison d'un système de maintien des prix, mais entraîneront des disettes dans le pays en février de l'année prochaine, qui aboutira à la loi du Maximum (votée en mai 1793).



25 au 27 décembre : A la Convention se produit une nouvelle attaque du député Chabot contre Jean-Paul Marat. Louis Auguste Capet rédige son testament. Le 26, Marc-Antoine Jullien fait une motion contre le général de Montesquiou, que « tous les soldats de son armée regardaient comme un traître ». Seconde comparution de Louis Capet à la barre de l’Assemblée nationale, de Sèze donne lecture de sa plaidoirie achevée pendant la nuit sous les yeux du monarque destitué. Une demande de parole de Pétion est refusée, celle-ci provoque un tumulte et des protestations de Marat, puis elle est finalement accordée : « Ce n'est pas avec ces violences et ces personnalités que nous pourrons prononcer sur le sort des personnes et des choses. Il est impossible maintenant d'aborder cette tribune sans être en butte aux calomnies les plus atroces. A chaque moment est un mauvais citoyen, un ennemi de la liberté si on n'est pas de telle ou telle opinion dominante. Est-ce ainsi que nous donnerons la liberté aux autres, si nous n'avons pas nous-mêmes celle d'expliquer nos opinions? Est-il convenable que dans des questions de cette importance, lorsque l'on veut prévenir les écarts d'une délibération tumultueuse, aussitôt oh soit un mauvais citoyen, un ennemi de la liberté, un royaliste Quoi c'est ainsi que nous nous persécutons, que nous nous outrageons nous-mêmes nul n'a le droit d'accuser ainsi ses collègues car, pour faire une accusation de cette nature, il faudrait avoir des preuves d'autant plus frappantes, d'autant plus évidentes, que le délit serait plus grave. Nous avons tous juré que nous n'aurions pas de roi ; quel est celui qui fausserait ses sermons? Qui voudrait un roi? Non, nous n'en voulons pas ». Réponse de l’assemblée : « Non, non, jamais! »  et se lève tout entière. Philippe Égalité, et d’autres soulèvent leurs chapeaux ou coiffes, en soutien à la protestation de Pétion. Le jour suivant, le girondin Salles souhaite faire appel au peuple et le choix des assemblées primaires pour juger Louis Capet, Saint-Just s’y oppose avec force et intervient deux fois sur le jugement du roi. Dans la capitale se joue une création au théâtre de la République Catherine ou la Belle Fermière, de Julie Candeille, l’accueil est excellent et c’est un triomphe. Si l’activité des théâtres parisiens dans tous ses détails n’a pu être véritablement intégrée à la chronologie, cependant son activité fut aussi, voire plus puissante que la presse. Dans l’année se sont créés 12 théâtres, rien qu’à Paris. Sans parler des comédiens ambulants et chanteurs de rue.

28 décembre : La Convention reçoit un courrier transmis par le consul espagnol Ocariz via le Premier ministre et prenant la défense du roi déchu, les élus sont indignés. Dans son intervention le ministre des relations extérieures Lebrun-Tondu signale que la neutralité de l’Espagne dépendra du sort réservé à Louis Capet. Intervention de Robespierre sur le jugement du roi (second discours).



Samedi 29 décembre :  En Guadeloupe depuis 9 jours ont éclaté des émeutes, les royalistes sont chassés de Pointe-à-Pitre, et se traduit par un ralliement de la population à la République, du moins ses débuts. L’île résistera aux tentatives d’invasion et ne sera pas annexée par la Grande-Bretagne. A la Convention, les dépenses sont fixées pour 1.200 hommes de troupes pour les îles sous le Vent (petites Antilles).

30
et 31 décembre : A la Convention, un membre de la Diète polonaise menacé vient demander secours. Le lendeman à la chambre, Marat dénonce les intrigues de Dumouriez, celui-ci venant d'arriver à Paris, il serait selon le député de Paris « appelé par les chefs de la faction Roland » (Rolandin ou rolandiste selon les appellations).

à suivre...

Quatre petites notes complémentaires


ou réfléxions sur la situation politique
aux débuts de la Convention

Note une – Louis XVI pour forme de procès…

Vous ne pouvez aborder un personnage historique en ne faisant qu’un procès à charge, cette méthode est très à l’œuvre chez des auteurs contre-révolutionnaires, et notamment anti-républicains. Mais le problème peut aussi se poser en sens inverse, à finalement ne pas s’interroger aussi bien, en pour, qu’en contre, à charge ou à décharge, il y a de grandes chances de rater l’essentiel. On ne peut s’accommoder dans un portrait, plus encore une analyse en n’en montrant que la part négative ou sombre.

Avant toute chose, si l’on objecte ou ignore certains faits, vous pouvez broder un tissus d’ânerie, car la réalité est toujours plus complexe. Même s’il faut rester prudent sur la question de l’objectivité, l’exercice critique se fait partant d’un positionnement politique. Je ne crois pas à une objectivité de la pensée, nous sommes en principe les dépositaires de nos choix. Ils transparaissent, que nous le voulions ou pas ou selon le vieil adage populaire, comme un cheval le naturel revient au galop. Toutefois le travail de l’historien n’est pas de planter un décors, où il serait amené à ne pas tenir compte que dans tout individu entre le discours et ce que l’on suppose le réel, les marges peuvent être grandes. Les erreurs de même.

Le sujet de cette fin d’année 1792 sera la condamnation du roi, plusieurs mois plus tard celui de Marie-Antoinette. Je n’ai aucune hostilité, à priori contre ce couple, et je n’ai pas cherché outre mesure à les comprendre, sauf à savoir dans quel environnement social ils ont vécu. L’objet n’est pas de leur nier des affects, ou de savoir s’ils furent bons ou mauvais, il faut pouvoir les juger dans l’autorité qu’ils ont ou pas exercer. Que dire de ces jeunes gens catapultés à la tête du royaume et dans un univers feutré, surprotégé, ce qui n’exclut pas les souffrances personnelles, mais ils sont jusqu’à la seconde révolution dans un monde doré.

Quelque part la révolution les humanise, et que de chances ont-ils eu de rester si longtemps sur le trône, ils auraient pu être destitué un an auparavant. La fin des débats sur la première constitution de France ne pouvait se solder que par un échec, quelque part les feuillants ont tout fait pour faire reculer l’échéance, d’une chute attendue. L’enfermement dans le mensonge, plus les stratégies face à une réalité plus politique qu’un jeu de pouvoir et d’argent. Bien avant l’ouverture de l’armoire de fer, les transmissions de sources militaires et plans de renversement et d’invasion du pays n’ont qu’un nom. Cela s’appelle des actes de trahison. En raison des égards dû à une fonction qui supposait un souverain protecteur et attentif aux destinées de son pays.

En supposant que le monarque eut été un grand mou, il aurait tout accepté comme d’un bourgeois frileux. Comme le donne à croire nombres d’histoires, qui semble commettre là une erreur d’appréciation, elles sous-estiment sa résistance à la somme des échecs. A n’avoir pas su imposer les réformes de Turgot et des suivants, tout en leur assurant le beurre et l’argent du beurre, le roi s’était heurté aux demandes générales de la population. Il s’en est tenu à ce qu’il avait été et souhaitait retrouver, c’est-à-dire l’antérieur, au prix de quelques rafistolages. S’il se fit traiter de despote jusqu’en 1792, même s’il en avait perdu les charges, il ne faut pas oublier que c’est au bout de 15 années de despotisme accompli qu’il se vit déposséder d’une telle concentration de pouvoir. Et que l’on ne pouvait faire oublier aux Français de 1792 plus de cent années de pouvoir sans partage et relevant du divin.
 
Un pouvoir par définition totalitaire et un système inégalitaire par excellence. Il est sûr que sur le plan des conjonctures, qui n’avaient rien d’astrales, le ciel de 1789 et 1792 était plombé, et à son but le changement provoqua un séisme. Le plus et le pire par rapport à 1789, la nation française était entrée en guerre. Au cas où le roi avait été un homme de mesure, son veto dans ce cas aurait changé toutes les configurations désastreuses. Mais il n’a pas hésité à signer l’acte contre l’Autriche Hongrie avec qui les époux avaient échafaudé les plans pour un renversement et un retour auprès des autocrates dits éclairés d’Europe. Une grande supercherie, qui après le 10 août, journée sanglante, sera vécue comme un nouvel affront. Et jusqu’au bout il trouvera des défenseurs qui feront tout pour lui sauver sa tête, au prix des pires compromis ou renoncement?

2 - De quoi est le symptôme d’une étude au fil des années de la Révolution?

De
sa profusion, de ses enchevêtrements propagandistes et ses erreurs d’appréciations cumulées font de ce mouvement populaire quelque chose d’assez opaque. L’on voudrait traiter la question des masses populaires, mais avant d’y parvenir, il faut arriver à éviter les pièges. En l’état, ce que je peux écrire sur Jacques Roux est à prendre avec prudence, précurseur de l’anarchisme ou du communisme libertaire? L’aile la plus à gauche fut disparate et ne se limitant pas à ce curé qualifié de «rouge», ni à Robespierre ou Marat, ni Hébert ou Danton, sauf à décrire cinq courants de pensée n’étant pas du même tenant, ou ne défendant pas la même stratégie ou ambition collective.

Le constat est à peu près identique pour les Girondins, pourquoi ce manque de nuance? Parti du postulat que Robespierre avait été l’objet des outrances et porteur de tous les mots de la présumée "Terreur" ou de la République première, Marat n’a pas été mieux logé. Il fut tout autant l’objet de manipulations, de faux en écriture, bien avant la chute des robespierristes. Un détail conséquent sur les quatre premières années du régime monarchique et constitutionnel, Marat allait en passer trois dans la clandestinité et chargé de tous les maux, car l’agent du mot « dictature ». Que l’on colle à Robespierre, comme l’on voudrait mettre la "Terreur" jamais décrétée ou légalisée, simplement énoncée, sur le dos du journaliste, quarante jours après son décès… Quel terrain de confusion, surtout que l’objet n’est pas de refuser la critique sur tel ou telle, mais de trouver dans cette nuit caverneuse, un peu de sens ou de cohérence.

Je ne dis pas que la lumière est au bout, une fois les couches enlevées, les chimères démasquées, l’on découvre d’autres personnes, des motifs d’autres natures. S’il n’y avait pas eu l’espace politique comme lieu de rencontre et d’échange, toutes ces individualités ne se seraient pas rencontrées. Ce qui a de commun chez les deux hommes phares de la Révolution, a été leur peu d’intérêt pour l’argent, une place très forte de l’écriture dans l’articulation de leurs pensées respectives. Ce qui est rarement expliqué et donne une lecture fort peu classique. Marat et Robespierre n'ont professé la moindre haine religieuse, ils s’attaquaient aux responsables, désignant la tête des pouvoirs et leurs responsabilités. Marat fut même outragé par ce qui donna lieu à la vente des biens du clergé. Et il y a de quoi le comprendre dans sa défense acharnée des plus pauvres.

Nombre de lieux de culte auraient pu servir de lieu d’accueil aux plus pauvres et pas au profit d’entrepôts commerciaux, comme dans la crise d’approvisionnement du sucre en janvier. Soit, comme ce fut le cas dans les tous les quartiers, les églises servaient de même, de lieux de réunion et de bureaux pour les sections. Où s’organisa une bureaucratie locale, et par ailleurs une haine allant au-delà, non seulement de la raison, mais bien alimentée par un athéisme très en vogue dans les classes les plus lettrées et bourgeoises de la société française, et même au sein du clergé et qui plus est assermenté. Et antérieurement et postérieurement à la révolution, si l’anticléricalisme n’a été qu’exclusion de ce qui pensait différent, cela devint un dogme face à un autre, et l'histoire des relations des pouvoirs entre eux. Dans un monde où tout le monde n’était pas en mesure de faire la part entre la pensée magique et la raison, chacun avec sa dogmatique sous le bras, n’aida pas à la tolérance, si chère et trompeuse de Voltaire, qui ne l'était point en méthode ou bassesse.

Jean-Paul
Marat, le nouveau député de Paris en septembre 1792 était en opposition forte aux thèses radicales de Jacques Roux, tenant d’une démocratie directe. Ce dernier s'en réclama et récupéra en 1793 le titre de l’Ami du Peuple peu de temps après sa disparition. Autre point à spécifier, les Cordeliers désignent fin 1791, le quartier, la section ou le club, d’où proviennent Marat ou Danton, de quoi comprendre certaines confusions de lieux ou de noms. Pour précision, comme aux Jacobins, après le 17 juillet et les crimes du Champ de Mars s’opèra en fin d’année une scission au sein de la société des Cordeliers (Amis des Droits de l'homme et du citoyen), depuis quelque temps installée ou sise en rive gauche, à une traversée de pont de l’Assemblée nationale, rue Dauphine.

3 - Les "Officieux" ou la domesticité silencieuse?

Drôle de terme pour désigner un ensemble de métiers liés aux valets, aux servants, cochets, et laquais, cuisiniers, etc… pendant le processus révolutionnaire. Et pose pour toile de fond la question de la servitude? L’on doit pour Brissot, à Necker un décret mettant fin à la livrée, et amène le girondin à apporter son avis à ce qui ressemblait à une forme d’esclavage. C’est-à-dire tous les reproches que l’on peut tenir à l’encontre d’une dépendance à l’égard d’un maître. Sans contrat et à la merci, et notamment de la maîtresse de maison, ce pouvoir sur les domestiques pouvait s’étendre à tout ce que peut supposer une demeure aristocratique ou bourgeoise, en ville ou dans les campagnes. En haut de la pyramide, ce que pouvait représenter le service et le cérémonial primait, où les petits bras s’agitaient en coulisse pour répondre au besoin du roi et de sa cour.


« Sous l’ancien Régime, c’est-à-dire sous la Royauté avant la révolution de 1789, malgré l’apparente division des ordres, la société est bien plus mélangée que par la suite. La conception de famille et d’intimité, qui donne une place différente à ces membres et aux domestiques, n’a pas encore émergée. A ce moment, la vie professionnelle, privée et mondaine n’est pas séparée. 

Les valets et femmes de chambre dorment près de leurs maîtres. Les enfants jouent avec les serviteurs dans une grande familiarité. Le mépris des tâches matérielles n’a pas cours dans un quotidien qui en dépend entièrement.
Les domestiques représentent une catégorie sociale importante (par leur nombre, leur rôle, leurs liens étroits avec leurs maîtres) et diversifiée. Aux gens de maison : laquais, valets et femmes de chambre, cuisiniers, cochers, lingères, palefreniers, gouvernantes, intendants, secrétaires, précepteurs, majordomes... s’ajoutent la domesticité agricole : valets de labour, filles de ferme, vachers, bergers, charretiers... ». (Source extraite de Personnel de maison sur free.fr)

Il existe peu d’informations sur la domesticité au moment de la Révolution, la nature des écrits tient au siècle des Lumières et à l’ancien régime principalement. A partir, des décrets, de lois consacrées à cette servitude, il existait toute une codification, pour exemples, seuls les serviteurs du roi pouvaient portés une livrée de couleur bleu, ou bien il était interdit de porter des épaulettes ou galons sur les tenues, réservés aux gens en armes. Les distinctions étaient nombreuses et en particulier pouvaient se manifester en son sein par le mépris des laquais employés par des aristocrates envers les serviteurs affectés aux maisons bourgeoises. Encore faut-il partir à la recherche de documents spécifiques, comme les témoignages dans les procès avec des gens de maison, pour découvrir cet univers très confiné, dont on devine les multitudes de conversations, mais sans véritablement donner un retour, sur des vies humaines confrontées à une logique de caste, une sorte d’intouchables. Dans les ressorts de l’esclavage humain le problème est loin d’avoir disparu !

La littérature ou même les analyses ne sont pas nombreuses. Pourtant ce corps de profession estimé entre un et deux dixième de la population représentait une somme non négligeable des forces sociales, les seuls chiffres trouvés, mais non vérifié ou suffisant serait d’un peu plus d’un million de serviteurs en 1789, dont 800.000 hommes. A Paris, le départ de nombreux maîtres pour l’émigration a possiblement provoqué sur certains aspects de l’économie un manque à gagner et aussi moins d’emplois dans ce secteur d’activité recherché, du moins convoité pour l’assurance d’être logé nourri, vétu
et blanchi. Un plein exemple de ce que pouvait représenter, se soumettre, tout en assurant l’usuel, nous sommes dans une société de survivance, chacun bien coincé dans sa case d’aliéné et dans son entendement social. La perte de l’emploi pouvant s’avérer une catastrophe dans un monde où le travail n’avait aucune permanence, voire de reconnaissance établie, autre que le foyer ou l’administration.

Ce fut un système hautement hiérarchique, du valet, en passant par le cochet, tout plein de petites mains étaient à la tâche, mais tout dépendant de la richesse du noble ou du bourgeois fortuné. La servante, à l’exemple de Toinette (le malade imaginaire) ou d’autres personnages comme Scapin et ses fourberies chez Molière. Ce sont des gens de maison, vivant sous un même toit, tout cela génère des histoires de vie au quotidien. Si cette familiarité est sous le coup de la comédie et du théâtre et des pièces rédigées plusieurs décennies auparavant, il faut plus que tempérer cette proximité et tenir compte de la richesse des maîtres et comment s’organisait la répartition des travaux ménagers ou agricoles, et les nombreux serviteurs travaillaient au sein des dépendances.

La hiérarchie supputant une direction ou un encadrement pour une flopée de petits métiers, l’on trouvait en haut de cette grille, les maîtres d’hôtel et la « Femme de chambre ». Terme qui n’a rien de générique et n’entre pas dans le langage courant comme usuel. Cette Femme de chambre, devait pouvoir répondre à un travail d’intendant, chose importante savoir lire, écrire, danser, jouer de la musique et parler l’anglais comme un must. A la cour les Dames de compagnies étaient prises au sein de l’aristocratie, mais n’entraient pas dans les tâches courantes ou d’entretiens, tout ce monde invisible qui dans les champs et les cuisines travaillaient, ou ce que l’on nommait les communs dans une bâtisse n’ont pas vraiment d’histoire et pourtant. Et au sein de la Révolution relever du débat sur l’esclavage.

Quel sort a été administré ou réservé à ces officieux? Peut-on estimer que la domesticité n’a plus lieu et n’a plus à avoir entre citoyens égaux en droit? Il semble qu’une complexité échappe, et ne permet pas de dire qu’ils ont disparu pour autant, et il faudra attendre 1795, pour que toutes références à ce type de servitude se voient évincer des textes légaux. Même quand on rétablissait leur existence, les contraintes des maisons étaient rayées de toute mention. Un changement légal surprenant, mais demandant à plus d’examen.

4 - Le retour des "Mouches"?

Ce nom de mouche est ce qui nommait sous l’ancien régime les mouchards, cet agent  fait son retour à l’occasion de la création du «Comité de sûreté générale» début octobre 1792, venant remplacer l’éphémère Comité de surveillance créé à la fin de l’année 1791. C’est ni plus, ni moins que le retour du système de délation qui avait tenu la population parisienne sous le joug du Lieutenant général de Police, il est difficile d’y voir autre chose qu’un calque. Justement se met en place un nouveau système policier. Pour différence majeure, si la mouche se faisait payer pour les services rendus ou travaillait directement pour les services concernés, là s’organisait un système de délation publique d’un type nouveau. Cette relation à la dénonciation n’est probablement pas une particularité française, mais son histoire coïncide avec des périodes douloureuses et sombres.

Un mécanisme ancien et plutôt annonciateur de régime aux pouvoirs exclusifs et autoritaires. Le sentiment de peur est très présent depuis le début de la révolution dans les esprits, il va s’amplifier devant les menaces d’une invasion et dans l’après 10 août produire son lot de bruits. La rumeur ou ce qui peut s’apparenter à une fausse information est une grosse problématique, mais notre objet ne se situe pas dans la fabrication des nouvelles, mais dans la source du renseignement et de comment opère un espion. Qui par excellence ne le chante pas sur les toits, l’espionnage étant un des maillons d’explication pour comprendre comment fonctionne une société en temps de guerre.

Il faut pouvoir distinguer l’aspect interne de surveillance de la population et externe par l’entremise des services de renseignements étrangers. A ce sujet, la Grande-Bretagne, mais pas seulement, va utiliser jusqu’en 1792 son ambassade pour collecter des informations stratégiques, et l’on peut considérer que l’ambassadeur est un coordinateur des espions de la couronne de fait, comme tous les pays pouvant avoir un siège dans le royaume de France et sa capitale. Mais avec le départ le 22 août des ministres des pays étrangers, les agents à la solde vont plutôt prospérer et s’infiltrer dans les lieux de pouvoir. En parallèle, la méfiance à l’égard des étrangers devenir une donnée du repliement de la France sur elle-même pour cause de conflits notamment avec l’Autriche et la Prusse dans une première étape.

Avec la création du Comité de sûreté et les mesures prises en matière pénale se dessine une mécanique policière la faisant entrée dans l’ère contemporaine comme un rouage du quotidien. Si l’on s’en tient à ce qu’a pu écrire Pétion maire de la capitale sur sa police, la chute de l’absolutisme avait participé de la dislocation de la Lieutenance générale, et les gardes nationales avaient partiellement remplacé cette autorité disparue. Ce qui en restait était ballotté au gré de l’administration municipale ou départementale, en matière de répartition des pouvoirs que de confusions entre les conseils généraux et locaux s’adaptant aux rapports de force politiques en présence et la mise en place d’une nouvelle administration pénale.

Seule en matière de police, mais restant de nature militaire, la gendarmerie avait été réorganisée et ne pouvait être qu’une force supplétive. Néanmoins, le Comité de sûreté n’est qu’à ce stade qu’un embryon de police et avec des volontés délatrices affichées, mais qui a accès à de telles informations donne pour effet de l’utiliser et devenir une arme de pouvoir redoutable sur la vie de tout à chacun. S’il y a lieu de se gausser des comploteurs, de très habiles politiques pendant le processus révolutionnaire vont s’emparer de ses outils de surveillance et sous un régime républicain. Quand il faut en quelque sorte tout rebâtir ou créer au jour le jour en fonction de l’existant, détruire pour reconstruire un ordre similaire ne laisse pas présumer d’un meilleur.

Notes de LM


Jean-Baptiste Louvet et le « Rolandisme »,

parcours d’un homme presque ordinaire

« Ici, comme là-bas, le temps me manque. Je jette des notes, et voilà tout. Qu'on ne s'attende ni à la concision du style, ni à l'abondance des détails. A vrai dire, je n'écris ni l’histoire, ni même ce qu'on appelle des mémoires. Je consigne des notes qui puissent m'aider, si quelque jour de vrais loisirs me sont donnés, ou aider quelque autre, si je ne puis jamais reprendre la plume ».

JB Louvet depuis le Jura en 1794
Le « rolandisme ou les rolandistes », parfois avec deux «L», sont les termes que l’on usait pour désigner les amis ou les proches des époux Roland. Ou pour reprendre la terminologie courante, ce que l’on nommait une fraction d’un des partis ou factions en présence, mais dont les contours relevaient plus d’un cercle d’ami(e)s ou de proches ayant les mêmes convictions et objectifs politiques, ou presque. Ce que Louvet nommait  « les purs jacobins » ne furent avant d’être conduit vers la sortie du club à l'exemple de Brissot, selon lui, ils n'étaient plus qu’une trentaine de ces « purs » à être membre des Jacobins en octobre 1792. Quelques intellectuels nourris aux auteurs de leur siècle et par lesquels la discorde entre Gironde et Montagne va venir mettre de l’huile sur un braisier. Ils furent, un peu le prototype de l’intello rive gauche..., les Roland et leurs alliés étaient très axés sur les valeurs libérales, quand ces dernières appartenaient au camp du progrès social et économique. Ce n’est pas totalement le hasard qui m’a mené à discerner, un autre honnête homme, un littéraire dont le renom mériterait un peu plus de place.

Jean-Baptiste Louvet de Couvrai est une figure découverte au cours des recherches chronologiques. Bien que l’auteur ait été connu sous l’ancien régime pour son roman Les Amours du chevalier de Faublas, son rôle politique pourrait passer inaperçu ou d’une importance secondaire. Il aurait dû faire partie des guillotinés girondins en 1793, il fut un des rares à en réchapper. Cet homme reste un sujet assez difficilement identifiable, non du fait de son métier de plume, mais de son histoire personnelle. C’est même son côté attachant, un être fidèle à ses amours comme à ses convictions premières, Louvet ne fut pas un louvoyant pourrait-on dire, il est en quelque sorte l’antithèse des arrivistes. Ambitieux toutefois, il s’est vu un temps ministre de la justice, son nom a circulé, tout comme Collot-d’Herbois au même poste. Il eut un rôle de second couteau aux Jacobins derrière Brissot en janvier 1792 avec son entrée sur la scène politique.

C’est Manon Roland, encore elle, qui avait repéré cet homme brillant, mais dont l’aspect physique était loin du personnage de son roman Faublas inspiré de son existence, hors des conventions maritales et un brin libertin. Sa vue n’en faisait pas un bellâtre, petit et sec et mal fagoté, son esprit lui donnait un visage s’éclairant à la lueur de ses mots. C’est ainsi le résumé en quelques mots ou que le présenta l’historien Alphonse Aulard dans un ouvrage sur ses mémoires dans la préface (source Gallica-Bnf). Originaire du Poitou, d’un père marchand de papier, il naquit dans la capitale en 1760 et y mourut en 1797. S’il connut quelques affres dans l’enfance, il était issu d’un milieu de la moyenne bourgeoisie. Louvet s’élança dans la vie à 17 ans et devint le secrétaire de M. Dietrich (proche de Lafayette), minéralogiste pas encore maire de Strasbourg, puis a été commis d’un libraire le poussant à vivre de sa plume.

Son grand roman Faublas publié en trois volumes, le dernier tome étant achevé en 1789, lui permettra, à partir de cette date, de devenir indépendant, son vœu ou son souhait premier. Pour ainsi se donner une particule face à un aîné prédominant (Pierre Louis), et être un auteur reconnu. Dans le premier chapitre de ses mémoires annotées, nous découvrons l’écrivain et un dramaturge, il cite les différentes pièces qu’il a pu rédiger pendant les débuts de la révolution et Alphonse Aulard marque son attention sur « Émilie de Varmont ou Le divorce nécessaire et les amours du curé Sevin », en trois tomes.

Louvet prendra pied en politique véritablement en 1791, et va être le rédacteur d’abord d’affiches ou de placards colorés, puis du périodique la Sentinelle financée en mars 1792 par Dumouriez ministre des affaires étrangères, puis devenir l’organe de presse des amis de Jean-Marie Roland. Il devint membre du club des Jacobins, pour avoir rédigé un texte en soutien à la marche des femmes des 5 et 6 d’octobre 1789 contre les propos du député M. Mounier et son manifeste. Naît de là un succès d’estime. Membre de la société jacobine il entrait à son comité des correspondances, avec le très fidèle ami des Roland, M. Bosc, le futur administrateur des Postes après le 10-08. Et il fut le remplaçant au passage de Choderlos (ou Chandernos) de Laclos, l’auteur des Liaisons dangereuses.

« A peine je descendais dans la carrière et déjà mes périls commençaient. Une chose digne de remarque, c'est que je n'ai jamais pu savoir s'il est vrai que la popularité a quelques douceurs. Dès que j'ai servi le peuple, on m'a calomnié près de lui, et plus je mettais d'ardeur à soutenir ses intérêts, plus il me poursuivent de sa haine. Il est bien vrai qu'après mes deux discours aux Jacobins, imprimés et envoyés partout à leurs frais, j'allais rapidement au secrétariat de la Société et à sa vice-présidence. Il est assez piquant de remarquer à cet égard que les députés seuls pouvaient être présidents, et que celui qui le fut en même temps que j'étais vice-président, c'était Basire. Ainsi, si les purs Jacobins avaient emporté la vice-présidence, la présidence était échue aux Cordeliers ».

En janvier 92, il devient vice-président de la société des amis de la constitution. Notre écrivain va occuper au côté de Brissot au sein du club une place de contradicteur à ses opposants et être un orateur de qualité, mais avec certaines failles dans les discours politiques. Il fit rire les membres des jacobins, quand il annonça son refus de prendre du sucre tant qu’il ne serait pas à 20 sols la livre, au début de l'année. Il fut surtout le représentant de sa section (des Lombards) le 25 décembre 1791 à la Législative  préconisant une déclaration de guerre à l’Autriche, « Que des millions de nos soldats-citoyens se précipitent sur les nombreux domaines de la féodalité, qu'ils ne s'arrêtent qu'où finira la servitude et que les palais soient entourés de baïonnettes ». Empire sur lequel il va mettre de nombreuses responsabilités dans l’échec de l’assemblée législative et plus. Et son opposant ou contradicteur être ni plus, ni moins Robespierre, qu’il dénonça le 29 octobre 1792 frontalement et vigueur avec le jeune Charles Barbaroux et le député Rebecqui comme « accusé ». C’est Marat qui était visé à l’origine et Robespierre prit sa défense et demanda à répondre, se sentant menacé selon Louvet.

Cette dénonciation publique fut à la fois puissante et maladroite. C’est-à-dire, politiquement explosive, ses littéraires ardeurs, plus quelques contradictions, comme Jean-Marie Roland sa technicité, si l’argumentation déployée soulève et révèle, les aspects sombres des trois tribuns de la Montagne (Danton, Marat et Robespierre). S’en prendre indirectement à Robespierre en voulant faire comparaître Marat, la zizanie montait d’un cran. Dans le rôle de la victime, Robespierre avec maîtrise va démonter "l’intrigue", son mot fétiche, en usant des faiblesses de Louvet, le 5 novembre 92. Pour autant a-t-il répondu sur le fond? Il a joué sur les formes et même si les maladresses de Louvet sont évidentes, l’honnêteté semble primer? A savoir que l’adhésion républicaine n’a jamais été prise en considération véritablement avant août chez Robespierre. Celui-ci n’était pas lointain de Desmoulins, en rejetant Brissot et son républicanisme en avril. Ceci doit interroger sur les manœuvres s’étant déployées?

A un moment la coupe fut pleine, pour des raisons diverses. Se trouver dans la situation d’être le Cassandre de service, le vrai ou l’authentique impliquant de se mettre à découvert et servir de cible fut un suicide politique. A tort ou avec raison? un excès de légalisme ou la faute de loi agraire? Les choix économiques laissant à prévaloir que tout ce légalisme ne fut que prétexte, et une bonne part des  girondins avant le 2 septembre n’ont pas été des héros le jour du 10 août, pas plus que les trois tribuns. Ils se sont pliés aux réalités et pour certains dans une grande confusion quand on découvre la demande de passeport de Nicolas Condorcet pour les Etats-Unis auprès du ministre étasunien, M. Gouverneur Morris (tout en bloquant la demande).

Il existait au moins deux catégories d’âmes, les vertueux, républicains convaincus, et révolutionnaires sans compromissions apparentes, et se trouvant horrifiés par ce qui se passa la première semaine de septembre 1792. Puis la deuxième, les tueurs, les hommes du métier. Avec lesquels se sont mis en oeuvre des mécanismes destructeurs. Ce que l’on peut nommer la froideur du politique et le cynisme à son état primaire. Avant de naître la République sociale se rompit elle-même le cou. A gravir toutes les échelles d’un seul coup, on ratait une, voire toutes les marches pour accéder à la démocratie et à l’expression du plus grand nombre. Ne parle-t-on pas de la Révolution comme ayant mangé ses propres enfants? et mot du député Vergniaud. Quand une partie de ses pousses ont fermé les yeux sur l’horreur.  Notre petit monde va finir par s’entretuer, fraction par fraction, plus dans une logique anthropophage que fraternelle. Un outil de propagande de première, pour les puissances assiégeantes. Dans l’Angleterre faussement bienveillante, ses autorités iront se raidissant face à cette déferlante meurtrière, et allant devenir, grâce à la guerre et le retard économique de la France des rentiers et spéculateurs, la puissance dominante du XIXe siècle.

Louvet est à ce titre très intéressant, il est le révélateur de l’«anarchie» ambiante n’ayant pas que des réalités nationales et il ouvre des perspectives ou hypothèses nouvelles à bâtir. Cependant, l’on découvre avec ce qu’il a pu écrire ou penser notre rolandiste. Ses propres arguments vont se retourner contre les girondins et devenir suspect de royalisme, accusation fallacieuse mais qui fonctionnera. Les confondants avec les Orléanistes, et un régent potentiel qui attendait son heure en coulisse. Le dénommé Philippe Egalité, allant avoir en 1789, comme en 1792, un rôle très souterrain avec l’appui ou la complaisance des pays allant se coaliser contre la nation française. Rien de très initiatique, ou de maçonnique. L’idéal pour brouiller les pistes et les esprits, à minima un double jeu diplomatique et une grosse affaire d’espions dans un nid de frelons et de félons.

L’accusation et le front contre Robespierre fut assez grossier et mal mené. Toutefois, il existe un fond de vérité, c’est ce qui est troublant. Les mémoires d’un homme ne sont pas des preuves, ni des éléments à charge. Certaines bêtises de Louvet, non pas dans son goût pour la littérature, ou les scènes antiques, comme le pensa l’historien Aulard. Louvet oubliait que lui-même avait défendu plus de pouvoir pour les sections avant le 10/08, et autres points qui favorisèrent des incompatibilités entre les structures d'organisation et des insurrections populaires sans fin, ou servant de pression sur les armatures institutionnelles du pays. On ne pouvait avoir une Convention établie, et désigner dès le 2 septembre, Brissot et Roland, ses propres alliés républicains en traître à la patrie. Cette anguille sous roche apparaît comme patente.

Que l’on ait voulu mettre en prison un certain nombre de contre-révolutionnaires ou feuillants, c'est plus que possible, mais une fois le retour au calme, le droit et la justice pouvaient officier, et Louvet a sur ce point et les autres sa cohérence. Les septembriseurs n’ont pas rassemblé les foules prétendues ou supposées, selon lui. Cela aurait concerné quelques centaines de personnes, tout au plus et ce fut tout sauf un mouvement spontané. Mais, en parti financé et par diverses sources, un grand cafouillis dans lequel beaucoup ont adopté la position de s’en laver les mains. L’ennemi avait ses agents sur place, des agents locaux français et les puissances ennemies avaient tout à gagner d’une telle désorganisation (Autriche, Prusse et Espagne, puis le Royaume Uni, etc.). Nous sommes face à des entreprises de noyautage. Alors comment établir une vérité dans un ordre si peu conforme à ce qu’il devait édifier? être d’une seule et même patrie, une République fraternelle et non sur le mode de la légende biblique de Caïn et Abel…?


Brissot fit une confidence en juillet à Robespierre. Il lui avoua que dans ses plans, il aurait bien vu le dauphin anglais sur le trône de France. Ce qu’écrira l’autre journaliste girondin Gorsas publiquement. Ce qui ne plaira pas du tout à Marat et Robespierre qui cherchaient à faire tomber les traîtres potentiels, plus inquiets des menaces internes qu’externes. S’ils n’étaient pas déjà les prochains à abattre. A ce jeu de fléchette ou de renversement de pouvoir, la Gironde jacobine comptait ses jours. Il n’y avait pas d’ambiguïté chez Marat. Il voulut une dictature et un homme fort, une république autoritaire. Robespierre a eu l’attitude de la chèvre face aux choux, sa volonté d’éliminer les ennemis de l’intérieur a tourné en manoeuvres avec des visées épuratrices dont il fut le dernier rouage à évincer, en attendant le sauveur suprême... Le monde de la suspicion, ou une société en prise avec la frénésie de vengeance creuse ses propres malheurs, et pertes d’influences. L’universalisme s’effondrait avant même d’exister et l’on peut saisir pourquoi notre pays n’a jamais fêté la venue de la première République, histoire officielle oblige.

Avec gentillesse, le professeur Aulard classifie Louvet dans la case des doux rêveurs. Il est à ranger dans celle des amoureux et des gens de coeur. Et c’est ce qui lui donne sa part authentique, sa relation avec une femme qu’il surnomma « Lodoïska » (Marguerite Denuelle, son grand amour). Son histoire intime va probablement le sauver dans sa fuite avec Pétion, Barbaroux et Vergniaud jusqu’à Bordeaux, qu’il accompagna présumant un départ aux Etats-Unis. A Saint-Emilion, les chemins se séparèrent, et Louvet fut le seul survivant du groupe. Cet amour fusionnel et déçu à l’adolescence, puis des retrouvailles en l’attente d’une loi sur le divorce, lui permettra de vivre avec sa femme, le ramenant à Paris avant de s’enfuir de nouveau et se cacher dans le Jura, jusqu’à la chute de Robespierre. Il fut l’un des 22 proscrits à faire tomber, le rescapé. Chiffre qui le marquera dans la composition des hommes à abattre. Listé il semblerait bien avant la fin mai 1793, marquant la chute des dits Girondins, ou l’histoire d’un coup d’état?

La fameuse accusation de fédéralisme, selon Louvet ne sera que le poteau cachant la prairie, pour bien comprendre, le rapport de force n’était pas du côté des élus girondins et les Rolandistes, ont été une des causes de l’échec (ou du divorce) de l’unité nationale qui aurait dû prévaloir en temps de guerre. Les amis des Roland furent vertueux, conformes à leurs idéaux, mais sur un terrain glissant, leurs responsabilités étaient tout aussi grandes. Ils n’ont pas vu l’orage venir, et rarement les bons sentiments sont vainqueurs. Il ne restait plus qu’une idée, celle du sacrifice ou de la fuite, à mettre en action.

Jean-Baptiste Louvet fait état des hommes « de principes » et « de couteaux », cela peut  servir à cerner le rapport de force entre les deux camps républicains et ce qu’il restait de démocratie à entrevoir? A l’exemple de son intervention dans une ambiance chaotique le 29 octobre, mettant le feu, le pousse à certains moments dans ses mémoires et ses interventions à l’exagération. Tout en amenant des éléments propres de ce qu’il a pu rencontrer au cours de cette année 1792. Tout n’est pas à rejeter, c’est toute la question des mémoires, qui sont là pour expliquer un point de vue, mais rarement de manière équitable.

Ce qu’il faut retenir de sa plume est la fuite de Louvet et de sa compagne depuis le 31 mai 1793, dont le récit est narré au quotidien, nous permet de découvrir la France de ces années. A découvrir avec Quelques notices pour l’Histoire et le récit de mes propres périls.

Source : Gallica-Bnf, le premier tome, à lire ici !
Mémoires de Louvet de Couvrai. En deux tomes, avec préface, notes
 par Alphonse Aulard - à la Librairie des bibliophiles (Paris-1889)

Texte de Lionel Mesnard



Sur le jugement de Louis le dernier



Jacques Roux,
discours prononcé le 1er décembre 1792

« Sur le jugement de Louis le dernier, sur la poursuite des agioteurs, des accapareurs et des traîtres; Prononcé dans l’Assemblée Générale de la Section de l'Observatoire, le jour de sa translation dans la ci-devant l’Eglise des Ursulines. Electeur de la Section des Gravilliers, membre du Conseil Général provisoire de la Commune, et de la Société des Droits de l'Homme et du Citoyen  imprimé et envoyé d'après l’arrêté de l'Assemblée Générale, aux 47 Sections, à la Commune de Paris, à l'Assemblée Electorale, aux Sociétés des Amis de la Liberté et de l’Egalité,  des Droits de l'Homme et du Citoyen, et à toutes les Sociétés Populaires.

CITOYENS RÉPUBLICAINS,

« Si le despotisme et l'hypocrisie décernaient autrefois des couronnes, civiques aux tigres royaux qui dévoraient les peuples ; si le crime et l'orgueil élevaient des pyramides en l'honneur des tyrans qui fondaient, des bastilles, qui propageaient l'empire du fanatisme et de la stupidité ; à quelle gloire n'ont pas lieu de prétendre les citoyens qui s'assemblent pour défendre les droits du peuple, éclairer et rendre heureuse l'humanité?

Mais, je ne m'arrêterai pas à prodiguer de vains et de stériles éloges. Les belles actions sont les véritables richesses. Le patriotisme vous applaudira, et déjà la liberté qui fixe ses regards sur le nouveau local ou vous tenez vos séances, pour le prix du zèle qui vous dévore, vous a mis au rang de ses enfants. Ce titre flatteur est l'hommage le plus pur, le plus solennel, le plus fait pour parler au coeur des hommes qui se consacrent, sans réserve, au bonheur de leur pays, qui n'ont d'autre ambition, que de se rendre utiles par l'éclat des talents, et par l'ascendant des vertus.

Quelle est donc grande, citoyens, quelle est donc noble la carrière que vous allez parcourir? Discuter les lois, répandre la lumière sur celles qui sont déjà faites, surveiller les fonctionnaires publics, dénoncer les traîtres et les conspirateurs, poursuivre le crime jusque dans son dernier retranchement, étendre le feu sacré de la patrie, de la liberté et de l'indépendance, défendre la cause de l'innocent opprimé, assister l'indigent, visiter les peuples assis dans l'ombre de la nuit et de l'esclavage, perfectionner, en un mot, la raison humaine, faire de dignes choix des magistrats, étendre l'empire des moeurs, inspirer l'amour des vertus publiques, telles sont les fonctions importantes auxquelles vous allez vous livrer. Voilà les devoirs honorables et pénibles que vous allez épouser.

Mais des Républicains ne seront pas effrayés des obstacles inséparables d'une si auguste mission : que la calomnie s'attache à leurs pas, qu'ils soient placés sous les poignards, qu'ils soient avilis, si l'homme de bien pouvait l'être, par d'insolents démagogues dont tout le talent est de faire des placards, de dominer par l'intrigue, la terreur et la corruption, qu'ils soient exposés à la haine, à la jalousie, à toutes les passions des petits factieux pour qui les vertus des hommes à grand caractère sont des crimes ; rien, j'ose le présumer de votre courage, ne sera capable d'amollir votre âme, et d'arrêter le cours de votre sainte doctrine. Vous opposerez au fer des assassins, aux armes familières aux brigands et aux lâches, les vertus d'un Républicain, et les principes de la justice éternelle. Si les traîtres ne palissaient pas à l'aspect de la déclaration des droits sacrés de l'Homme, qui a jeté des laves enflammées sur le trône des rois, qu'ils soient frappés par le glaive de la loi, de cette loi suprême qui est le salut du peuple.

Ce n'est, citoyens, que par des mesures promptes et sévères, ce n'est qu'en vous tenant continuellement debout que vous vous élèverez à la hauteur de vos destinées... Eh! quoi balanceriez-vous de faire éclater la foudre de la liberté, lorsqu'au sein du sénat Français la vertu est à peine en sûreté, lorsqu'une faction perfide prépare des coups mortels à la liberté publique, lorsque les défenseurs incorruptibles du peuple sont obligés de garder le silence, lorsque des législateurs impies s'entourent d'une force armée, pour tenir sans doute, impunément des lits de justice, et pour absoudre Louis XVI, le bourreau des Français.

Cependant, les Romains, nos modèles en fait de révolution, n'hésitèrent pas de faire un exemple terrible sur les sénateurs qui avaient usurpés les deux pouvoirs. Maelius qui brava au milieu d'une force armée la puissance publique fut massacré… Les chefs du peuple, après l'abolition de la royauté étant devenus plus impérieux, plus insolents, furent frappés de mort. Les Athéniens ne firent pas de grâce aux trente administrateurs qui leur forgeaient des fers. Le despotisme, en effet, qui se propage sous le gouvernement de plusieurs, le despotisme sénatorial est aussi terrible que le sceptre des rois, puisqu'il tend à enchaîner le peuple, \sans qu'il s'en doute, puisqu'il se trouve avili et subjugué par les lois qu’il est censé édicter lui-même.
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Mais, Citoyens, vous n'aurez pas secoué le joug delà race des Bourbons, vous ne vous serez pas soustrait à l'humiliante domination des rois, pour plier sous le joug des agents prévaricateurs. Après avoir franchi irrévocablement l'intervalle immense de l'esclave à l'homme, vous ne souffrirez pas que vos mandataires portent la moindre atteinte à la légitimité de vos droits ; qu'ils s'écartent de l'opinion publique, qui seule dicte des lois, et qui est toujours droite et toute-puissante ; que pour leur confection ils emploient d'autre force que celle des génies bienfaisants. L'exercice de la souveraineté n'étant délégué que pour l'avantage de celui qui s'en dépouille, vous ne souffrirez pas que des mandataires profondément corrompus, puissent ailleurs que dans les principes de la philosophie éternelle, les bases delà prospérité publique ; qu'ils oublient, un seul instant, que leur devoir est de consulter les voeux du peuple, de lui rester fidèle et de le sauver. La loi ne doit fixer nos hommages que lorsqu'elle ne contient pas des moyens d'oppression ; le précepte d'amour et de reconnaissance envers ceux qui nous la donnent n'est plus obligatoire, lorsqu'ils creusent le tombeau de l'esclavage, et plongent la Nation dans un abyme de vice et de malheur.

Ah Citoyens, si dans l'Assemblée constituante, dont la grande majorité corrompue par l'or de la liste civile, avait rétabli le despotisme sous le nom de Monarque ; si dans le corps législatif qui s'était agenouillé en esclave devant la cour, et qui avait absout un dictateur insolent, coupable du crime de lèse Nation, vous eussiez constamment déployé un courage égal à la vertu, si vous eussiez répudié ce code barbare fait par des scélérats, proclamé sous le drapeau de la loi martiale, vous ne seriez pas réduits a lutter contre d'orgueilleux tyrans, et de farouches satellites. La bannière de la Déclaration des droits de l’Homme n'aurait pas été insultée. Vous ne seriez pas affamé, ruiné, désespéré, empoisonné par des reptiles venimeux, de spéculateurs parasites, par des vampires, qui, par une combinaison meurtrière du monopole, s'emparent du commerce des comestibles, dévorent les propriétés, les manufactures, la liberté, et nous font arriver, par des trafics usuraires, au port de la contre-révolution.

Le salut de la patrie, le sentiment de vos devoirs, la solennité de vos serments vous imposent donc l'obligation sacrée de vous raidir, sans relâche, contre les fourbes, les, hypocrites, les médiants qui abusent de l'autorité dont ils sont investis pour vous forger de nouveaux fers ; contre les médiants qui, la liberté sur les lèvres, mais l'esclavage dans le coeur, boivent goutte à goutte le sang des citoyens; contre les mandataire lâches et pervers, qui sollicitent l'indulgence et la générosité de la Nation envers un tyran constitutionnel digne de tous les supplices, puisqu'il donna le signal de massacrer le peuple.

C'est à l'approche de ce jugement qui va fixer la destinée suprême de tous les peuples, que vous devez vous montrer grands, fiers, inexorables et terribles, en déclarant une guerre implacable, non seulement aux accapareurs et aux agioteurs, à tous ceux qui, par le commerce de l'argent, discréditent nos assignats, et portent les denrées de première nécessité à un prix excessif ; mais en demandant que la tête de l'assassin des Français tombe, au plutôt, sous le glaive de la loi... il est temps d'apprendre aux peuples de la terre que les Nations ne sont plus la propriété des Rois, que la vertu seule rend l'homme inviolable, et que le crime conduit les tyrans à l'échafaud. La liberté ne sera jamais qu'un vain fantôme, lorsque vous ne ferez pas éclater la foudre de l'égalité sur un monstre détrôné, qui est le point de ralliement des contre-révolutionnaires, qui, dans la prison, conspire encore contre la liberté publique. Les Rois sont dignes de mort, du moment qu'ils voient le jour. Quelle peine ne subira pas celui qui a surpassé en scélératesse les Médicis et les Néron, à en juger par les massacres de Nancy, de Montauban, de Nîmes, des Colonies, de la Chapelle, du Champs de Mars, il en juger par le sang qui a coulé par le fer des satellites de François II, par les cris des victimes qui, du fond de leur tombe, demandent la tête de leur bourreau commun?

Il ne fallut chez les Romains, pour frapper un traître, que la liberté de la République : chez le Français régénéré, chez le Français le plus libre de tous les peuples, le tyran ne doit pas survivre à la tyrannie. Il faut écraser, sans pitié, l'hydre qui nous dévore, et les Rois ne doivent désormais exister que dans l'histoire qui retrace leurs forfaits.

Recueillons donc tout ce qui est de force et de faculté en nous, pour dire à nos mandataires, que s'ils ne sont pas des esclaves, des stupides adorateurs des crimes d'un monstre roi, s'ils n'ont pas reçu à l'avance un or corrupteur pour l'absoudre, qu'ils se hâtent de prononcer la mort du traître et du parjure Louis. Disons-leur, que si les constituants, leurs prédécesseurs, dans la bassesse de leur admiration, osèrent proclamer un Monarque inviolable, le peuple incorruptible ne reconnut de sacré que la vertu ; et le sceptre et la couronne ne donnèrent jamais le droit de faire massacrer les peuples. Disons leur, que s'ils invoquent une constitution où le mensonge composa avec la vérité , où les droits sacrés de la Nation furent sacrifiés à l'ambition d'un seul homme, pour arracher à l'échafaud celui à qui le ciel refuse la lumière, et que la terre ne supporte plus qu'à regret : disons leur que le peuple est debout ; que s'ils ne frappent pas un tyran au milieu de ses forfaits, la Nation souveraine les citera devant son tribunal suprême. Le peuple, en effet, ne délègue pas l'exercice de sa puissance pour éponger les crimes des Rois.

La tête de Louis tombera, où nous nous ensevelirons sur les débris de la République. Les Rois cimentèrent le despotisme par l'effusion injuste du sang des peuples; il est temps que la liberté des peuples soit consolidée par l'effusion légale du sang impur des Rois. L'Angleterre ne balança pas de conduire Charles Stuart à l’échafaud. Rome frappa de la hache des consuls les fils même de Brutus. Des prêtres et des évêques citèrent devant leurs tribunaux, et déposèrent le descendant de Charlemagne, comme ils avaient déposé le descendant de Clovis; et, la Nation française, promenant ses regards sur les rives ravagées de la Meuse et de la Moselle, sur des monceaux de cadavres, sur des villes réduites en cendres, la Nation française entendant de toute part les cris des pères, des mères, des enfants noyés de larmes, ne prendrait pas, dans la trempe du malheur, une fermeté qui étonne, en jugeant un Roi qui a été pris les armes à la main, et que chaque citoyen avait droit de massacrer dans la journée du 10 août.

Le seul moyen, cependant, d'étouffer les conspirations, d'en imposer aux traîtres, aux tyrans subalternes, c'est d'ôter la clef de la voûte de la contre-révolution, en frappant du glaive de la loi le premier fonctionnaire publique. La sévérité et la justice sont les vertus principales d'un Républicain. Pour ne pas gémir sous le sceptre sénatorial, pour ne pas se laisser museler par des mandataires prévaricateurs, poursuivez les scélérats sous la pourpre royale, faites le procès à Antoinette; que les législateurs, les juges, les commandants, les officiers publiques qui ont serré la main du peuple, et reçu les assignats de la Cour, soient conduis, avec pompe, au supplice. Le salut du peuple est la suprême loi : la résistance à l'oppression est le plus saint des devoirs. Citoyens, vous n'êtes pas dignes de la liberté, lorsque vous ne foulerez pas sous vos pieds les monstres qui ont formé le projet d'égorger la moitié de la Nation, et d'enchaîner l'autre.

Après ces réflexions que me suggère mon dévouement à la chose publique purgeons la terre des monstres qui la souillent. Le modérantisme perd la chose publique, il creuse pas à pas le tombeau de l'esclavage ; et, c'est en temporisant, que la Hollande perdit la liberté. Au reste, lorsque des mandataires profondément corrompus ne s'empressent pas de sauver la République, la Nation doit se sauver elle-même... Qui ne repousserait pas la tyrannie, lorsque les enfants de la patrie sont massacrés au-dehors, lorsqu'au dedans ils sont assiégés par la famine et la misère ; lorsque les lois ne répriment pas le brigandage des accapareurs et des monopoleurs? Certes, il y a de la lâcheté à tolérer ceux qui s'approprient les produits de la terre et de l'industrie, qui entassent dans les greniers de l'avarice les denrées de première nécessité, et qui soumettent à des calculs usuraires les larmes et l'appauvrissement du peuple.

Il est encore de mauvais citoyens, sur lesquels il n'est pas moins essentiel d'appeler la sévérité de votre justice; j'entends parler des serpents qui sont dans votre sein. Car les ennemis les plus redoutables ne sont pas ceux du dehors ; la bannière de la déclaration des droits de l'homme n'a eu qu'à paraître, le houlan farouche (Ndr : ou bien s’écrit hulan, « Cavalier armé de lance, dans l'armée autrichienne », d’après le dictionnaire Littré), et l’automate Prussien ont fuit comme l'ombre devant les couleurs nationales. La liberté fera la conquête du inondé, et déjà nous ne trouvons d'esclaves que dans les palais des rois. Mais les ennemis les plus dangereux sont les tigres cachés sous le masque et le manteau de la religion, qui s'attendrissent sur le sort des traîtres et des parjures, et qui ne versent jamais une larme sur l'humanité expirante sous le couteau de la tyrannie ; ces hommes mielleux, qui en parlant de liberté qui expire toujours sur leurs lèvres, aiguisent les poignards, et préparent, en secret, la honte du nom Français ; ces lâches adulateurs qui caressent le crime, et tuent la vertu, qui endorment la nation afin qu'elle se réveille enchaînée; ces modérés, enfin, qui joignant la férocité des tyrans à la bassesse des esclaves, détournent habilement le glaive de la loi de la tête des grands coupables pour le laisser tomber sur la faiblesse et l'innocence ; intimident, calomnient et dégradent le peuple, afin de le corrompre et le mieux dépouiller.

Voilà, Citoyens, ce que mon amour pour la liberté m'inspire de vous dire. Je suis prêt à répandre jusques à la dernière goûte de mon sang pour défendre les principes que j'ai développé dans cette Assemblée. Puisse cette enceinte ne retentir désormais que des vérités de cette importance! Puissiez-vous ne vous occuper, dans le sein du  calme et de la paix, que des moyens de rendre le sort du peuple doux!.... l'obéissance à la loi, le respect pour les autorités constituées, est le premier de nos devoirs. Mais en protégeant les propriétés et des personnes, je ne serai pas assez fanatique pour défendre celle des tigres, des brigands et des accapareurs. Cette opinion paraîtra dure aux Citoyens dont le coeur ne bat pas pour la liberté ; mais il n'est pas en mon pouvoir de composer avec les principes de la justice. Celui qui n'a pas le courage de dire la vérité aux hommes qui sont indignes de l'entendre, n'est pas digne de défendre la cause du peuple. Comme je ne prétends à d'autre gloire qu'à celle de sauver la patrie, je braverai la mort pour dénoncer les abus en tout genre. Le courage et la vertu vengent l'Homme libre des poursuites des méchants. L'estime de l'homme de bien, la calomnie des traîtres seront, en tout temps, ma liste civile.
Extrait du registre des délibérations de l’Assemblée Générale de la Section de l’Observatoire, du samedi 1er décembre 1792, premier An de la République française. Plus, il a été arrêté que lecture en serait faite, deux fois par semaine pendant un mois.

Pour copie conforme, Président, DUPOUX et Secrétaire, DROUET.

Source : Gallica-Bnf, à lire ici, en date du 1er décembre 1792


Suite sur la Révolution française :
La chute annoncée des Girondins, janvier 1793

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