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Sommaire de la page,

1 - L'Hôpital Général et Rapport sur la mendicité à Paris

2 - Chronologie de juin à décembre 1790 et sources complémentaires :

- Organisation de la fête de la Fédération
- La fête de la Fédération du 14 juillet
- Mémoires de Lafayette sur l'affaire Bouillé
- Adresse, sur l'émission des assignats
- Intervention d'Andrea Pozzo di Borgo
- Administration de la police parisienne


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L'Hôpital général
et Rapport sur la mendicité à Paris


Entrée de l'hôpital de la Salpétrière à Paris

L’administration des Hôpitaux généraux dit Hôpital général fut un vieux rouage administratif, né en 1656, dont l’activité tout au long du dix-huitième siècle ne fit que croître, et à lui seul l'Hôpital général aurait pu contenir une bonne part des colères populaires. Mais le mécanisme était tellement huilé et accepté dans la société bourgeoise et aristocratique, que le rapport remis à l’Assemblée par le duc de La Rochefoucauld-Liancourt pouvait sembler convenu. Bien qu'il importe de reconnaître au duc de Liancourt un travail parlementaire d'une grande qualité. Et avec la dizaine de membres du comité de mendicité, dont M. Guillotin, jusqu'à la fin de la Constituante, ils ont accompli des travaux d'une importance certaine et ils ont visité les différentes structures hospitalières de la capitale.

Le titre d’hôpital est à mettre entre parenthèse ou de nombreuses guillemets, la nature des soins était très relative, il s’agissait surtout d’espaces asilaires et carcéraux, pour tous âges et de tous sexes, et qui intégrèrent, en plus, toute la structure d’accueil des enfants abandonnés qu’avait mis en place l’abbé Vincent de Paul vers 1640 : les « Enfants-Trouvés ». A Paris, il a existé environ une dizaine de structures dépendant des codifications de l’Hôpital général, avec plus de 300 lieux d'acceuil ; et qui pouvait concerner annuellement plus de 35.000 personnes adultes et enfants, dont environ 15.000 hommes et femmes pour les seuls hôpitaux généraux parisiens.

A ce titre, ce fut longtemps le plus grand « hôpital » d’Europe, du moins dans cet ensemble administratif était la Salpêtrière, se situant de nos jours dans le 13ème arrondissement, elle se trouvait à la limite de l’enceinte d’entrée sur la capitale, mais hors des barrières d’octroi. L’on retrouvait en ce lieu une population féminine quasi exclusivement, environ 7 à 8.000 femmes (et/ou des mères et leurs enfants des deux sexes), dont un grand nombre de prostituées. Le processus historique remontait à Louis XIV, et selon les vues de l’époque, pauvreté et oisiveté se nourrissaient au même sein, et surtout les autorités ne pouvaient contrôler une masse sans travail et vagabonde. L’on avait tout simplement et rapidement enfermer plus de 1% de la population parisienne, avec des actes de supplices pour les plus récalcitrants, et plus tardivement la mise en œuvre de travaux forcés.

En matière d’expérimentation de la charité et de ses œuvres, l’on a tout simplement inventé un système coercitif ou d’exclusion d’une rare violence. Il n’est pas possible de faire un résumé d’une longue histoire des relations des pouvoirs avec la pauvreté, depuis l’ouverture du « Grand Bureau des Pauvres » de la capitale au XVIe siècle. L’enjeu en serait de narrer le quotidien de ces lieux, leurs évolutions respectives. Mais en quelques lignes expliquées au moins 150 ans d’une mécanique si complexe, il faudra se fier à ce qu’en dit ici en des termes très moraux le rapporteur devant l’Assemblée, le 30 mai 1790, M. de La Rochefoucauld-Liancourt en charge et membre du comité de mendicité. Cette instance déboucha sur la création des ateliers de secours, qui furent pris en charge par les municipalités. C’est ainsi que l’ensemble des responsabilités qui étaient attribuées à la Lieutenance générale de Police se virent transférer aux départements et aux communes, tout comme l'approvisionnement des villes.

Voici ce que dit le duc de Liancourt « des visites faites dans divers hôpitaux, hospices et maisons de charité de Paris » :

« En terminant cette longue énumération d'abus dont nous avons supprimé beaucoup de détails, qu'il nous soit permis de rapprocher le tableau de Bicêtre et de la Salpêtrière, tel que leur comparaison nous le fait voir. Dans la première de ces maisons, le despotisme des subalternes est plus calme, plus voilé, ce sont des hommes qui commandent. Dans la seconde, il est plus actif, plus tracassier, plus dur même ; des femmes ont l'empire. La fainéantise, le vice et la scélératesse sont réfugiés à Bicêtre, l'aigreur, l'envie et la corruption sont sans cesse en action à la Salpêtrière. L'oisiveté énerve les hommes à Bicêtre, le travail forcé tue les enfants de la Salpêtrière. La malpropreté est partout la même, mais elle est d'une bien plus dangereuse conséquence pour la santé des femmes ; enfin l'aspect de Bicêtre est plus horrible, celui de la Salpêtrière plus dégoûtant. Dans ces deux maisons, le nombre des employés n'est dans aucune proportion avec la nécessité du service; ils appauvrissent, si l'on peut parler ainsi, les pauvres mêmes, et l’Administration qui ne voit en eux que des protégés, les conserve, et par bienfaisance, et par habitude ».

Source : Gallica-Bnf, Rapport sur la mendicité à Paris, page 88

L’étendue ne serait-ce qu’à l’échelle de la France ne mènait qu’à dresser l'état d'un ensemble hospitalier plutôt calamiteux. Quand l’hôpital de l’Hôtel-dieu organisait la redirection de ses malades, dits « incurables et insensés » (ou aliénés), ou des patients atteints de symptômes contagieux ou de nature sexuels ; hommes et femmes se voyaient envoyer dans ce qui ressemblait à des grands mouroirs ou des « camps de la mort » à feux lents (?) et selon son sexe. Et l’on ne distinguait pas non plus les malades mentaux qui pouvaient croupir enchaînés dans des soupentes putrides de la prison de Bicêtre, pour exemple.

Ceci n’est qu’une part infime du mauvais traitement des malades ou de la pauvreté, tous mélangés parfois avec de vrais criminels. La partie hospitalière a été plus que problématique et lors de la Révolution première, elle démontra ses limites et ses grands manquements. Et comme le précise le texte de la Rouchefoucauld-Liancourt, une baisse des revenus de cet ensemble social ne pouvait que rendre la situation encore pire pour ses résidents. Sans omettre que tout cela a été aussi l’objet de nombreux trafics et de rentes pour certains économes, ou administrateurs religieux, qui se tenaient à la Salpêtrière. S’il ne décrit pas en toutes lettres et en toutes formes l’horreur, l’entendu est assez implicite. Un texte d’une assez grande honnêteté, qui permet d’avoir un état de la situation des hôpitaux à la fois prisons et asiles des anciens nécessiteux.

Note de Lionel Mesnard

 
Rapport, fait au nom
    du comité de mendicité,
   
 
 
des visites faites dans divers hôpitaux,
hospices et maisons de charité de Paris


      "Résumé général" fait par M. de la Rochefoucauld-Liancourt, député de l’Oise
« En considérant l'ensemble de l'Hôpital général, la réunion des secours de toute espèce qu'il donne, la masse de revenus dont il jouit, on ne peut se refuser à rendre hommage aux vues grandes et bienfaisantes qui ont rassemblé dans ce centre commun tant de moyens d'affilier la misère et de consoler le malheur. Aucun autre lieu du monde ne donne l'exemple d'un établissement charitable d'une aussi grande étendue, et qui, dans l'intention de sa fondation, doive pourvoir aussi complètement aux besoins de ceux qu'il assiste.

En effet, l'Hôpital général doit, par la lettre même des fondations particulières, des dons royaux, des lois qui règlent son institution, ses devoirs et ses ressources, élever les enfants pauvres ou abandonnés dès leur naissance, pourvoit à leur nourriture, veiller à leur santé, leur éducation, les former au travail, les mettre en état d’exercer un métier, les surveiller dans leur apprentissage, les suivre dans les premiers temps de leur jeunesse, marier les filles ou les placer, recueillir et soigner toutes les infirmités, accueillir la vieillesse pauvre, la consoler, répandre enfin des secours et des adoucissements sur toutes les infortunes.

Jamais dans aucun des titres qui ont fondé ou réuni à l'Hôpital général les différentes Maisons dont il est composé, il n'est parlé de pension, de ventes d'aucune espèce, de secours mis à prix d'argent ; ils doivent être tous gratuitement donnés aux pauvres, et l'économie de l'Administration y est toujours expressément ordonnée. Ainsi, cet immense établissement a été formé dans les vues les plus positivement exprimées de bienfaisance, de prévoyance et de charité; mais il portait dans son étendue, dans la nature et les formes de son Administration, le germe de tous les abus qui s'y sont introduits, et qui ne pouvaient point n’en pas détériorer bientôt les intentions.

L'Administration supérieure était, comme nous l'avons dit, composée de l'Archevêque de Paris, des Premiers Présidents des Cours Souveraines, du Procureur général du Parlement de Paris, du Lieutenant de Police, du Prévôt des Marchands, de toutes personnes enfin qui ne pouvant, par l’étendue de leurs occupations personnelles, se livrer des examens partiels, ne connaissaient que les résultats des comptes , n’étaient appelés à prononcer que sur des affaires majeures ; et leurs décidons, toujours préparées, et maîtrisées en quelque sorte par les détails dont ils n'étaient pas instruits, se trouvaient dictées toujours aussi d'avance par ceux mêmes qui les provoquaient.

Les Administrateurs gérants eux-mêmes, chargés souvent, comme nous l'avons dit, de fonctions publiques, occupé de leurs affaires particulières, ne pouvaient donner une attention de tous les moments à une Administration aussi immense, aussi compliquée, qui demande et des soins au dehors, et: une continuelle surveillance intérieure. La partie des subsistances, des approvisionnements, régie par les Administrateurs, en occupe elle seule plusieurs qui s’y consacrent presque entièrement. Sans doute on peut dire, et il nous a semblé à nous-mêmes que ce mode d'Administration, le plus embarrassé de détails, le plus complique, le plus nécessaire à surveiller sans celle, et par conséquent le plus susceptible de gaspillage et d'abus de toute espèce, n’était pas même le plus économique, qu'il ne convenait pas surtout à l'approvisionnement d'un aussi grand nombre de maisons considérables ; mais il existe, et ces détails, encore une fois immenses, exigent une correspondance, des soins, une prévoyance continuelle, et servent à prouver que l'Administration active de toutes les parties de l'Hôpital général est au-dessus des moyens d’hommes qui, s'y livrant gratuitement, doivent conserver quelques moments à leurs intérêts particuliers et à leurs autres devoirs.

De là il est arrivé qu'ils ont dû donner leur confiance entière aux Economes, et Supérieures des différentes Maisons ; que plus ils ont apporté, dans leurs fondions, d'amour du bien, de bienfaisance et de charité, plus ils ont dû facilement séduits par ceux qui leur en faisait entendre le langage. De là on voit comment, séduits par l’opinion du mérite des personnes dans lesquelles ils avaient placé leur confiance, les représentations, les plaintes, la vérité pouvaient difficilement leur parvenir; comment la proposition d'une dépense, d'un changement, d'un Règlement nouveau qui leur était présenté avec l'apparence dune amélioration dans le sort d'une classe de pauvres ou de quelques individus, ne trouvant pas de contradicteurs, devait être promptement consentie par eux, et comment ainsi, avec les intentions les plus pures, ils autorisaient souvent un abus en croyant ordonner une institution secourable.

Nous sommes loin de vouloir faire entendre que les personnes dirigeant aujourd’hui ces grandes maisons, nous aient paru remplir imparfaitement leurs fonctions ; plusieurs même nous ont semblé très occupé du soin des pauvres, très pénétrées de leurs devoirs y nous avons seulement voulu faire connaître combien, par la nature des choses, les Administrateurs les mieux intentionnés trouvent d'obstacles à faire de bons choix. Cette confiance, nécessairement aveugle, des Administrateurs, ceux qui font en première ligne au-dessous d’eux, a dû encore entourer ceux-ci de séduction, d'hypocrisie, et produire ainsi un mauvais choix de seconds employés ; car les âmes honnêtes sont généralement fières, et se prêtent peu aux moyens si familiers à l'intrigue, qui se retrouvent partout où il y a à obtenir, et d'autant plus dangereusement pour celui qui distribue les faveurs, que toujours ils prennent ses couleurs.

De là l’énorme disproportion d'emplois avec les pauvres à assister, elle est de plus d'un sur cinq ; de là le traitement plus considérable de ces employés, l'abondance de leurs commodités, d'une sorte de luxe qui contraste douloureusement avec l’insuffisance du secours des pauvres, de là le choix, souvent mauvais, des Gouvernantes qui, prises dans les élèves de la Maison, et n'en connaissant que les usages, en enseignent et en perpétuent nécessairement l'ignorance et les abus ; de là cette charité peu réfléchie qui, entassant dans les maisons un beaucoup plus grand nombre de pauvres qu'elles n’en peuvent contenir, nuit à la santé, au bien-être de tous, et augmentent à un point considérable la chance des mortalités : de là enfin cette indifférence pour les malheureux, vice véritablement capital de cette grande Administration, et par lequel aucune classe n'étant encouragé au travail, les pauvres âgés y végètent malheureux, et enfants y prennent le germe de tous les vices qui prédestinent en quelque sorte le reste de leur vie au malheur, à la misère et au crime.

Les mêmes causes influent aussi impérieusement sur la nature des dépenses. Le revenu de l'Hôpital général s'élève à environ 3.600.000 livres, sans compter celui des Enfants Trouvés, qui se monte annuellement à près d'un million, et dont l’administration est distincte : il doit faire face à la dépense des maisons de la Salpêtrière, de Bicêtre, de la Pitié, du Saint-Esprit, de Scipion ; il ne fournit que les comestibles aux trois maisons des Enfants Trouvés, et il n'en fait que l'avance à Sainte-Pélagie.

Les comestibles de ces maisons sont estimés à environ 110.000 livres ; le reste n’a donc pour objet que les dix maison est  de mille neuf cent soixante-neuf individus secourus dans les quatre maisons où ils sont admis. Nous prenons pour nombre absolu, le nombre actuel, quoique les circonstances le rendent plus considérable qu'il ne l'est ordinairement, et nous distrayons de la totalité des individus trouvés dans la maison, les employés supérieurs des deux sexes, qui ne peuvent être compris dans la classe des pauvres, où nous laissons les employés subalternes : et nous trouvons ainsi, que la partie de la dépense, affectée particulièrement aux pauvres, c'est-à-dire, la nourriture et l'habillement, ne s'élève qu’à un million cinquante-cinq mille livres, sur trois millions six cent mille livres ; les frais d'administration, engagements, rentes à payer (et il y en a pour environ 100.000 livres), et particulièrement les réparations et les bâtiments, consomment tout le reste (1 – le tableau ci-après).

Cette disproportion est effrayante : cette dépense énorme pour des objets étrangers au véritable objet des revenus, au soulagement direct des pauvres, est encore un vice inhérent en quelque sorte à un établissement aussi considérables. Peut-être eût on pu mettre clans les bâtiments moins de magnificence, n'en pas faire construire en aussi grand nombre, y employer plus d'économie : comme nous ne sommes entrés dans aucun de ces détails, nous ne pouvons avoir à cet égard un avis bien arrêté. Mais toujours est-il vrai qu'il fallait des infirmeries, des salles, des cuisines ; qu'un hôpital qui a près de 4.000.000 livres de revenus, n'apporte nécessairement pas dans l'emploi des fonds la même économie qu'une maison dont les revenus et l’administration sont bornés ; que les mêmes Administrateurs, remplis de vues sages de bonnes intentions, mettent cependant dans la dépense qu'ils ordonnent supérieurement une sorte de faiblesse et de complaisance, quand les comptes ne sont rendus qu'à un bureau qui n'a pas le loisir d'en vérifier les éléments, que s'ils devaient être rendus publics et fournis à l'approbation et à la censure de tous leurs Concitoyens, et qu'enfin la grandeur vraiment monstrueuse de cet établissement, se trouve presque toujours la première cause, la cause presque nécessaire des abus.

N'étant pas chargés par l'Assemblée de présenter des vues d'amélioration sur les maisons de Charité de Paris, nous nous bornerons seulement à dire que si le système des secours à domicile prévalait, système qui présente entre autres avantages précieux, celui de répandre les bienfaits sur toute la famille du secouru, de le laisser entourer de tout ce qui lui est cher, et de resserrer ainsi, par l'assistance publique, les liens et les affections naturelle, l'économie qui en résulterait serait très considérable, puisqu'une famine beaucoup moins considérable que la moitié de celle que coûte aujourd'hui le pauvre de l'Hôpital, soutiendrait suffisamment l'individu secouru chez lui, et que sur près d'onze mille pauvres, ce mode de secours pourrait avoir lieu pour plus de huit milles, c'est-à-dire, pour les enfants et les personnes des deux sexes qui ne sont pas prisonniers, insensés ou sans familles : le reste des individus qui ne pourraient être assistés que dans des Hôpitaux, divisés dans plusieurs maisons, recevraient des secours plus entiers, une assistance plus personnelle, plus consolatrice. L'Administration, moins étendue, serait plus susceptible de perfection, et les Administrateurs bienfaisants et vertueux qui en seraient chargés, seraient plus complètement récompensés de leurs peines, par le spectacle du bonheur des pauvres confiés à leurs soins, et qui serait leur ouvrage.

Avant de terminer ce long Rapport, nous croyons devoir fixer l'attention de l'Assemblée sur la diminution qu'éprouve l'Hôpital général,dans ses revenus. La suppression des indemnités qui lui avaient été accordées par le Gouvernement, en remplacement de la franchise des droits d'entrée, lui enlève 308.000 livres ; la diminution de la recette des droits d'entrée perçus en sa faveur est, pour les six premiers mois de cette année, de 400.000 livres. Sans doute cette perte qui ne sera pas la même à l'avenir, ne peut pas être évaluée constamment à 800.000 livres ; mais toujours sera-t-elle diminuée, et, pour cette année , elle l'est de cette somme. Les droits sur les Spectacles sont réduits, pendant ces mêmes premiers six mois, de 30.000 livres

La destruction si légitime des privilèges pour l'impôt, coûtera à l'Hôpital, en vingtièmes et en taille pour ses biens de campagne qui en étaient exempts, plus de 40,000 livres. On peut donc estimer à 1.200.000 livres environ la perte qu'éprouvera cette année l’Hôpital général dans ses revenus, et à 800.000 livres au moins sa perte des années suivantes.

Une Administration plus éclairée et plus vigilante, un ordre de choses meilleurs dans ce grand établissement, pourront probablement rendre à l'avenir ces revenus suffisants pour le nombre de pauvres qu'ils doivent assister, et ils pourront encore en recevoir un meilleur et un plus heureux traitement, condition nécessaire ; mais il faut arriver à ce terme, et la position actuelle de cette branche de revenu des pauvres sollicitera l'attention de l'Assemblée. La déclaration solennelle qu'elle a faîte de mettre au rang de ses premiers devoirs les secours et la protection à donner à la classe malheureuse, doit ôter toute inquiétude à ceux auprès de qui les ennemis de la chose publique voudraient employer encore ce moyen d'alarme et de mécontentement».
Source : Rapport, fait au nom du comité de mendicité – Le député de La Rochefoucauld-Liancourt – une édition de l’Assemblée Nationale de 1790. Gallica- Bnf.

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Chronologie de l'année 1790,
de juin à décembre



Gravure - représentant la ville de Nancy, le 3 août 1790

VI – Le mois de juin 1790

Mardi 1er juin : Parution du premier numéro de l'Ami du roi, des Français, de l'ordre et surtout de la vérité, rédigé et dirigé par l'abbé Royou alias Monjoye. A partir de ce jour, le comte de Mirabeau est en contact régulier avec la Cour.

2 juin : A l’Assemblée, un décret ordonne des poursuites contre les individus soulevant le Peuple et donne leur caractéristique. L'évêque de Rodez rend compte de sa visite à l'Hôtel-Dieu devant le comité de mendicité du 21 mai. Jean-Paul Marat lance un nouveau journal Le Junius Français, journal politique et édite son premier numéro. Mais ce périodique de huit pages ne durera pas, le dernier numéro sera le 24 juin et il sortira de manière épisodique.

3 juin : A la Martinique, à Saint-Pierre après la messe et une procession, les "libres de couleur" (les affranchis dont souvent des métis) porteurs de la cocarde tricolore sont pourchassés, sept personnes se font tirées dessus et décèdent et sept autres sont pendues. A Paris, c'est le jour de la Fête Dieu, dès le matin les députés sont invités à la messe donnée à Saint-Germain-de-l'Auxerrois et une procession est organisée, le tout en présence de la famille royale.

4 juin : A la Société des Amis des Noirs est présenté un plan de travail en six points : « l°. Tableau de l'Afrique ; 2°. Tableau de la traite des noirs ; 3°. État des noirs esclaves dans les îles ; 4*. Etat des colonies, et conséquences pour leur commerce de l'abolition de la traite ; 5°. De l'état des esclaves chez les anciens et parmi les nations européennes actuelles ; 6°. Méthode pour amener graduellement et avec fruit l'abolition de l'esclavage. Cinq membres de la société ont entrepris cette tâche immense. Chacun se dévoue à en exploiter une branche, d'après un plan commun de travail ». Signé par MM. Piéton de Villeneuve, président et Brissot de Warville, secrétaire, et extrait de l'Adresse aux amis de l'humanité . (Source : Gallica-Bnf, 4 pages)

5 juin : Parution du Journal de la Société de 1789 de Condorcet, « Ainsi, la société de 1789 doit être considérée comme un centre de correspondance pour tous les principes généraux, et non pas comme un foyer de coalition pour des opinions particulières. Ce n'est ni une secte ni un parti, mais une compagnie, d'amis des hommes, et, pour ainsi dire, d'agents du commerce des vérités sociales ». (Source : Gallica-Bnf) Le traitement des ministres est porté à 100.000 livres, celui des Affaires étrangères à 180.000 livres par an. Sans parler des fonds secrets et douceurs du pouvoir. A l’Assemblée, M. Bailly (ci-contre) le maire de la capitale propose :


« L'idée de fédérer toutes les fédérations particulières dans une grande cérémonie nationale, qui aurait lieu dans la capitale le jour anniversaire de la prise de la Bastille, fut exprimée par Bailly dans une adresse qu'il présenta à la Constituante, le 5 juin 1790, au nom de la municipalité parisienne. Déjà la division des provinces ne subsiste plus, disait Bailly, cette division qui faisait en France comme autant d'états et de peuples divers. Tous les noms se confondent dans un seul ; un grand peuple ne connaît plus que le nom de Français. » La Fédération générale ne serait pas seulement un acte de communion en la Patrie, elle aurait encore un triple but : « défendre la liberté publique, faire respecter les lois de l'empire et l’autorité du monarque ». Dans ces derniers mots se révèle la pensée politique de Bailly et de son parti. Effrayés par la continuation des troubles, par l'indiscipline croissante de l'armée, par les revendications des citoyens passifs qui ont trouvé un organe éloquent dans Robespierre, les bourgeois révolutionnaires croient le moment venu de réveiller le sentiment monarchique en le faisant servir à la défense de leurs conquêtes politiques : « le roi verra un grand nombre de ses enfants, terminait Bailly, se presser autour de lui, élever un cri de vive le roi, prononcé par la liberté, et ce cri sera celui de la France entière. Il s'agissait donc d'attacher le roi à la Révolution et la Révolution au roi ».

    Les Grandes journées de la Constituante d'Albert Mathiez
6 juin : Fête de la Fédération et le mouvement fédératif à Lille : « une sorte d'exaltation populaire qui n'a pu se maintenir » : Une fête révolutionnaire provinciale et ses aménagements : la Fédération de Lille de Me Odile Lesaffre-Ramette (Source : Persée.fr, 16 pages)

7 juin : Paris, place de l'hôtel-de-ville, la Garde du Roi composée de cent soldats Suisses avec à leur tête M. de Brissac prêtent le serment civique en allemand. Sont présents à cette cérémonie le commandant-général M. de Lafayette et le maire de la capitale, M. Bailly.

8 juin : A l'Assemblée, l'on adopte l'article 8 du projet de décret sur l'organisation du clergé.

9 juin : A la Martinique, la guerre civile éclate, les troupes venues de Fort-Royal encerclent la ville et le gouverneur prêt à ordonner l'assaut. Les propriétaires ou « Békés » de Saint-Pierre ont tout fait pour attiser la colère des autorités. L'affaire remonte au 3 juin, à l'occasion de la fête-Dieu, les « gens de couleurs » voulaient organiser des manifestations égalitaires. Le refus des planteurs a fait dégénérer la cérémonie en une sanglante chasse à l'homme noir, au cours de laquelle les békés ont perdu toutes mesures dans la haine raciale. L’on a pu constater Les corps des hommes pendus ce jour à l'entrée de la ville. En France, les dépenses royales  sont réduites à 25 millions de livres au lieu de 31 millions en 1789. Sur la demande de Louis XVI, la part de Marie-Antoinette est fixée à 4 millions. Le Châtelet de Paris se prononce par défaut sur la séparation de corps et d'habitation des époux Sade et décide la restitution par le marquis de la dot de 160.842 livres. A l'Assemblée se concrétise le mouvement fédératif, en décidant qu'il y aura une fête de la Fédération ou célébration patriotique à Paris, le 14 juillet prochain.

 
La fête de la Fédération :
son organisation et sa préparation




Préparation de la fête de la Fédération - Champs de mars

« L'idée de fédérer toutes les fédérations particulières dans une grande cérémonie nationale, qui aurait lieu dans la capitale le jour anniversaire de la prise de la Bastille, fut exprimée par Bailly dans une adresse qu'il présenta à la Constituante, le 5 juin 1790, au nom de la municipalité parisienne. « Déjà la division des provinces ne subsiste plus, disait Bailly, cette division qui faisait en France comme autant d'états et de peuples divers. Tous les noms se confondent dans un seul ; un grand peuple ne connaît plus que le nom de Français. » La Fédération générale ne serait pas seulement un acte de communion en la Patrie, elle aurait encore un triple but : « défendre la liberté publique, faire respecter les lois de l'empire et l’autorité du monarque». Dans ces derniers mots se révèle la pensée politique de Bailly et de son parti. Effrayés par la continuation des troubles, par l'indiscipline croissante de l'armée, par les revendications des citoyens passifs qui ont trouvé un organe éloquent dans Robespierre, les bourgeois révolutionnaires croient le moment venu de réveiller le sentiment monarchique en le faisant servir à la défense de leurs conquêtes politiques : « le roi verra un grand nombre de ses enfants, terminait Bailly, se presser autour de lui, élever un cri de vive le roi, prononcé par la liberté, et ce cri sera celui de la France entière ». Il s'agissait donc d'attacher le roi à la Révolution et la Révolution au roi.

Le décret du 9 juin ordonna que chaque garde nationale choisirait 6 hommes sur 100 pour se rendre au district. Les députés des gardes nationales ainsi choisis choisiraient à leur tour un homme sur 200 pour se rendre à Paris le 14 juillet. La dépense serait supportée par le district. L'armée de ligne serait représentée comme la garde nationale. On espérait ainsi faire cesser les divisions qui s'étaient souvent manifestées entre les citoyens soldats et les soldats tout courts. Chaque régiment députerait à Paris l'officier le plus ancien de service, le bas officier et les 4 soldats dans le même cas. La Fédération devait avoir lieu sur les bords de la Seine, au Champ de Mars, qu'on se hâta d'aménager par des corvées patriotiques et volontaires.

Les travaux de préparation dans la capitale

Il faut voir cette fourmilière de citoyens, cette activité, cette gaieté dans les plus durs travaux ; il faut voir cette longue chaîne qu'ils forment pour tirer des charrettes surchargées ; des pierres énormes cèdent à leurs efforts, ils entraîneraient des montagnes. Il n'est point de corporation qui ne veuille contribuer à élever l'autel de la patrie : une musique militaire les précède ; tous les individus se tiennent trois à trois, portant la pelle ou la pioche sur l'épaule ; leur cri de ralliement est ce refrain si connu d'une chanson nouvelle qu'on appelle « le Carillon national ». Tous chantent à la fois : « Ça ira, ça ira, ça ira » : oui, ça ira, répètent tous ceux qui les entendent. Personne ne se croit dispensé du travail par son âge, son sexe ou son état : on a vu passer les tailleurs, les cordonniers, ayant à leur tête les frères tailleurs et les frères cordonniers. L'école vétérinaire, les habitants des villages très éloignés sont accourus, ayant à leur tête le maire avec son écharpe, la pelle sur l'épaule.

Tous ont des drapeaux ou des enseignes. Sur celui des charbonniers on lit : Le dernier soupir des aristocrates... Les bouchers avaient sur leur flamme un large couteau et l'on lisait dessus : Tremblez, aristocrates, voici les garçons bouchers. D'énormes monceaux disparaissaient sous leurs bras vigoureux. Les ouvriers de la Bastille ont amené dans les charrettes tous les instruments qui ont servi à la démolition de cette forteresse. Les employés des postes, ayant à leur tête M. d'Ogny, les domestiques de l'enceinte des Italiens, les acteurs de Mademoiselle de Montansier, conduits par leur directrice, sont venus contribuera cette œuvre patriotique... Les chartreux conduits par dom Gerle ont quitté eux-mêmes leurs cellules pour venir participer à ces travaux civiques. Le roi est venu jouir de ce spectacle nouveau ; soudain la pelle et la pioche sur l'épaule, les citoyens ont formé autour de lui une garde d'honneur. Il a visité tous les ateliers. »
Les Grandes journées de la Constituante – Pages 81 et 82
Albert Mathiez – Les éditions de la passion


10 juin : A Paris, Louis-Ange Pitou, journaliste au Journal général de la cour et de la ville, se rend au palais des Tuileries à la demande de Marie-Antoinette, qui le congratule pour sa fidélité envers le roi et ses prises de position, notamment dans l'affaire Favras. Elle lui fait don de son portrait en miniature et d'une somme d'argent. Louis-Ange Pitou par la suite de cette rencontre se consacrera à défendre la monarchie et devenir un actif propagandiste.

11 juin  : A Paris, il parvient la nouvelle de la mort de Benjamin Franklin, la Constituante ajourne ses travaux en signe de deuil, un service funéraire est improvisé devant son portrait au café Le Procope. Intervention du comte de Mirabeau devant les parlementaires :

« Franklin est mort... (Il se fait un profond silence.) II est rétourné au sein de la Divinité, le génie qui affranchit l'Amérique et versa sur l'Europe des torrents de lumières ! Le sage que deux mondes réclament, l'homme que se disputent l'histoire des sciences et l'histoire des empires, tenait sans doute un rang bien élevé dans l'espèce humaine. Assez longtemps les cabinets politiques ont notifié la mort de ceux qui ne furent grands que dans leur éloge funèbre; assez longtemps l'étiquette des cours a proclamé des deuils hypocrites : les nations ne doivent porter que le deuil de leurs bienfaiteurs ; les représentants des nations ne doivent recommander à leurs hommages que les héros de l'humanité. Le congrès a ordonné, dans les quatorze États de la confédération, un deuil de deux mois pour la mort de Franklin, et l'Amérique acquitte en ce moment ce tribut de vénération et de reconnaissance pour l'un des pères de sa constitution. Ne serait-il pas digne de vous. Messieurs, de nous unir à l'Amérique dans cet acte religieux, de participer à cet hommage rendu à la face de l'univers, et aux droits de l'homme, et au philosophe qui a le plus contribué à en propager la conquête sur toute la terre? L'antiquité eût élevé des autels au puissant génie qui, au profit des mortels, embrassant dans sa pensée le ciel et la terre, sut dompter la foudre et les tyrans. L'Europe, éclairée et libre, doit du moins up témoignage de souvenir et de regret à l'un des plus grands hommes qui aient jamais servi la philosophie et la liberté. Je propose qu'il soit décrété que l'Assemblée nationale portera pendant trois jours le deuil de Benjamin Franklin (La partie gauche applaudit avec transport). »

Source : Bib. de Stanford, Archives Parlementaires, page 170 et 171, tome XVI

11 et 12 juin : A Avignon, ville et résidence papale, les Avignonnais proclament leur volonté d'être rattachés à la France. Le lendemain, les élus Avignonnais mandent au représentant du pape de quitter la ville, puis ils procèdent à l'élection d'ecclésiastiques et décident de rejoindre le royaume français. A l’Assemblée, le service dans la garde nationale est rendu obligatoire pour l'exercice des droits de citoyen actif. Dans la capitale les ossements trouvés depuis mai dans les souterrains de la Bastille sont transférés au cimetière de l'église St-Paul, et une plaque est apposée au frais de Pierre-François Palloy. La Cour à l'annonce du décés de la duchesse douairière de Bavière prend le deuil pour sept jours.

13-17 juin : A Strasbourg, l’on fête la Fédération. Pendant plusieurs jours à Nîmes, de nouveaux des troubles surviennent, des groupes armés entrent dans la ville. Des protestants, des catholiques, des républicains et des royalistes se font face et entrent en conflit. Le désordre est général, il y a de nombreux tués, et les heurts réguliers. La Bagarre de Nîmes en est le final, le 14 et 15 juin, quand les protestants, appuyés par des renforts Cévenols s'affrontent dans des combats de rue aux catholiques contre-révolutionnaires. Ces troubles d'une grande violence laisseront pour bilan, la mort de plus de 300 personnes. Le 17, c'est progressivement le retour au calme et l'ordre public fini par régner selon le Récit des événements arrivés à Nîmes envoyé par l'administration du département du Gard à l'Assemblée nationale et à l'ordre du jour du 26 juin. (Source : Persée.fr, 2 pages)

Samedi 14 juin :
A Saint-Domingue, l'Assemblée coloniale arrête les décisons suivantes : « Nous déclarons que nous ne pouvons ni ne devons proposer à l'assemblée nationale que le décret suivant, conforme aux ordres de nos commettants : L’assemblée nationale, considérant la différence absolue du régime de la France à celui des Colonies, déclare par cette raison, que son décret des droits de l’homme ne peut ni ne doit les concerner, décrète qu’il n'y sera pas promulgué sous quelque prétexte que ce puisse être ; décrète encore qu’elle reconnaît aux Colonies françaises le droit de faire elles-mêmes leur constitution, qui sera envoyée à leurs députés pour être présentée à la sanction nécessaire. » Toujours au nom de la colonie, il est précisé : « Et si l’horrible scission doit avoir lieu, vous lèverez au moins des mains pures, et vers la mère-patrie, dans vos derniers adieux, en la quittant pour jamais, et vers les colonies qui vous bénissant à votre retour, vous diront vous avez fait votre devoir sans pouvoir faire des heureux, c’est à nous de vous consoler. »  Selon Julien Raimond sur ses Preuves complètes et matériellles etc. de 1795. Le tout signé, par MM. Cocherel, le citoyen Ogormaud, Mangalon et Daugé, et MM. Brulley, président et Thomas Millet secrétaire. (Extraits de la Gazette imprimée à St-Domingue, à la rubrique Nouvelles Diverses, n°51, du samedi 28 juin 1790, imprimé arrêté de l'assemblée coloniale)

15 juin : Manche, le journal l'Argus ou l'homme aux cents yeux fait paraître son premier numéro, c'est le citoyen Pierre-Charles-François Mithois surnommé le "Marat coutançois" qui est à l'initiative de sa parution. Ce périodique est imprimé à Coutances.


16 juin : La municipalité d'Avignon demande son rattachement au royaume. A Besançon, l’on fête la Fédération.

17 juin : M. de Villette, ancien protecteur de Voltaire fait une motion au club de 1789. (Source Gallica-Bnf, 1 page)

18 juin : En Espagne, à Aranjuez, le Secrétaire d'Etat (équivalent à un premier ministre), le comte José de Floridablanca est victime d'un attentat perprétré par un français, nommé Perret avec un couteau, et il échappe de peu à la mort.

19 juin : A l'Assemblée, il est approuvé un décret abolissant la noblesse héréditaire, les titres de prince, duc, comte, marquis etc., ces nominations disparaissent des actes, seule le vrai nom de famille est accepté. On ne pourra plus dire majesté, son excellence, etc... On ne pourra plus faire porter des livrées à ses serviteurs, ni posséder des armoiries. Et « que l’encens ne sera brûlé, dans les temples, que pour honorer la Divinité, et ne sera offert à qui que ce soit... »

20 juin : Au champ-de-Mars, dans la matinée, Louis XVI passe en revue 1.500 hommes de la Garde nationale.

21-26 juin : Rome, le pape Pie VI ayant refusé de céder à ses sujets, les Avignonnais renouvellent leur demande de réunion à la France. La Constituante est en pleine délibération sur la Constitution civile du clergé, et réserve sa réponse.



22 juin : Paris, plan de la ville et des faubourgs divisé en 48 sections (ci-dessus, au lieu de 60 districts), il est décrété par l'Assemblée nationale et sanctionné par le Roi. (Source : Galllica-Bnf)

23 juin : Louis XVI signe le décret qui met fin à la noblesse héréditaire, elle est abolie
"pour toujours" en France. La mesure concerne environ 400.000 personnes et va être très contestée dans les milieux conservateurs et monarchistes.

24 juin : A Nantes, la première pierre de la « colonne de la liberté », un monument dédié au roi et à la Révolution est posée.

25 juin : A Paris, M. Etienne de Polverel, juriste, livre son Opinion sur l'aliénation et l'emploi des biens nationaux, et sur l'extinction de la dette publique. Lue à l'Assemblée de la Société des Amis de la Constitution (Source : Numelyo, 62 pages)

26 juin : A l'Asssemblée, il est pris un décret sur les principes constitutionnels de la marine, un rapport fait au nom du Comité de la marine, par M. de Curt, député de la Guadeloupe et secrétaire du comité. (Source : Gallica-Bnf, 15 pages)

27-28 juin : 
A la Constituante, il est promulgué un décret portant règlement de l'organisation municipale de Paris, sa composition : Un maire, seize administrateurs, trente-deux membres du Conseil, quatre-vingt-seize notables, un procureur de la Commune, deux substituts. Sinon est aussi publiée la Proclamation du Roi relative aux opérations préalables à l'élection des maires et officiers municipaux de Paris, ordonnée par les lettres patentes (Source : Gallica-Bnf, 4 pages) Le village de Montmartre est incorporé à la commune de Paris. Le 28, devant l'Assemblée lors de la séance du soir, M. Paul Nairac, député de Bordeaux, dans un discours expose ses motifs, sur le commerce de l'Inde. (Source : Gallica-Bnf, 15 pages)

29 juin : Rouen, l'on fête la Fédération. Monseigneur Boisgelin, évêque d'Aix, reconnaît au pape, en bon gallican, une primauté, mais pas d'avantage.

30 juin : A l’Assemblée, il est approuvé un décret prescrivant la nomination immédiate des directoires de département et de district.

VII – le mois de juillet 1790


Jeudi 1er juillet : Brest, un vaisseau de guerre est lancé et vient de voir le jour à l'arsenal de la ville. Le navire Etat-de-Bourgogne est le premier-né d'une série de nouveaux vaisseaux de 118 canons et de 64 mètres long. Une fois mis en service, il transportera plus de 5.000 tonnes avec une voilure de 4.640 mètres carrés et 1.100 hommes d'équipage.

2 juillet : Le garde du corps de Louis XVI, ​M. Lefèvre de Luberque reçoit la croix de Saint-Louis, suite à une blessure reçue lors des journées des 5 et 6 octobre 1789 (Il émigrera le 5/09 prochain à l'étranger).

3 juillet : Entrevue secrète entre Mirabeau et Marie-Antoinette au château de Saint-Cloud. En rapport avec Louis XVI par courrier depuis quelques semaines, Mirabeau aurait dit de cette rencontre avec la Reine : « Elle est bien grande, bien noble et bien malheureuse, mais je la sauverai. Rien ne m’arrêtera, je périrai plutôt que de manquer à mes promesses » Nicolas de Condorcet publie dans le Journal de la Société de 1789 (n°5) un article Sur l'Admission des Femmes au Droit de Cité, où il « demande maintenant qu’on daigne réfuter ces raisons autrement que par des plaisanteries et des déclamations ; que surtout on me montre entre les hommes et les femmes une différence naturelle, qui puisse légitimement fonder l’exclusion du droit. » (Source : Gallica-Bnf, texte intégral).

3-9 juillet : A Toulouse l'on fête la Fédération, les manifestations et réjouissances attirent près de 100.000 personnes. Le serment est prêté le 4/07.

4, 6, 8 et 9 juillet : A la Constituante, il est promulgué un décret sur l'organisation des forces navales du royaume. Le 6, il est pris un autre décret qui approuve l'organisation provisoire des archives de l'Assemblée. Le 8, on examine un nouveau projet sur l'ordre judiciaire, et sur les juges de paix en particulier, et, le 9, il est décidé d'un décret réglementant l'aliénation des biens nationaux.

6 juillet : Il est publié un pamphlet, le Grand diner des conspirateurs : (...) dans la salle des Cordeliers, rue de l'Observance : lettre de l'auteur du Journal du diable à M. de Lameth.  Après avoir écrit quelques méchancetés sur Marat, Robespierre, le duc d'Orléans, etc., nous avons les portraits plutôt cinglants, en voici 2 courts extraits : « Est-ce-un Desmoulins? Celui-là, c’est autre chose. Comme il dit indistinctement du mal de tout le monde, et que quelquefois il a de l’esprit, il a encore auprès d’une certaine classe un certain crédit. (...) Danton, direz-vous? Danton ah! monsieur, permettez-moi de rire un instant sur une pareille idée. Danton! Il est plaisant celui-là. Danton, mais que diable a-t-il donc tant fait? Il a manié le district des Cordeliers comme il a voulu, il fait tous les jours des motions sur la terrasse des Feuillants. Voilà en vérité de belles promesses pour être mis au premier rang. » Ce texte serait de Jean-Lambert Tallien, journaliste, il se rapprochera du parti Dantoniste, et siégera à la Convention avec cette mouvance. (Source : Archive.org, pages 3 et 4)

7 juillet : Dans une lettre, la reine informe son frère, l’empereur Léopold II, de sa rencontre avec le comte de Mirabeau.

10 juillet : A Paris, après des pressions populaires François-Noël Babeuf - alias Gracchus à partir de 1793 - est libéré et se trouve à la tête d'une publication, Le correspondant Picard (40 numéros jusqu'en 1791). Après avoir été l'auteur de deux numéros dans la capitale du Journal de la Confédération, le dernier titre a été publié le 3 du même mois.

11 juillet : Jean-Paul Marat remarque dans son journal l’utilisation qu'en retire Lafayette du serment auprès des Gardes nationaux : « Il surprit leur consentement à des ré̀glements captieux (spécieux ou fallacieux) dont ils n’étaient capables, ni de sentir les conseéquences, ni de pré́voir les suites ; il les lia par le serment, il les plia en vils mercenaires à la discipline militaire comme à̀ l’unique règle de leurs devoirs, il leur inspira la funeste manie de ne reconnaître que les ordres de leurs chefs etc. » (numéro 159, de L'Ami du Peuple)



Légende : Le dégraisseur patriote. Patience Monsieur votre tour viendra - Le Pressoir - Il n'a plus de remède

12 juillet : A l’Assemblée, c'est le vote final sur la Constitution civile du clergé. Curés et évêques seront désormais élus : un évêque par département au lieu des 139 évêchés.

« ART. 21. — Avant que la cérémonie de la consécration commence, l'élu prêtera, en présence des officiers municipaux, du peuple et du clergé, le serment solennel de veiller avec soin sur les fidèles du diocèse qui lui est confié, d'être fidèle à la nation, à la loi et au Roi, et de maintenir, de tout son pouvoir, la constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le Roi ».

« ART. 38. — Les curés élus et institués prêteront le même serment que les évêques, dans leur église, un jour de dimanche, avant la messe paroissiale, en présence des officiers municipaux du lieu, du peuple et du clergé. Jusque-là, ils ne pourront faire aucune fonction curiale ».

Source : Gallica-Bnf - Lucien Misermont - Serment à la constitution civile du clergé.
Le serment civique et quelques documents inédits des archives vaticanes. Page 9 - Paris 1917

13 juillet : Adresse au Roi prononcé par M. de La Fayette à la tête d'une députation (avec la réponse du Roi) :

« Sire, Dans, le cours de ces événements mémorables qui nous ont rendu des droits imprescriptibles, lorsque l'énergie du Peuple et les vertus de son Roi ont présenté aux Nations leurs Chefs de si grands exemples, nous aimons à révérer en votre Majesté le plus beau des titres, celui de Chef des Français et de Roi d'un Peuple libre. Jouissez, Sire, du prix de vos vertus, et que ces purs hommages que ne pourrait commander le despotisme soient la gloire et la récompense d'un Roi citoyen. Vous avez voulu que nous eussions une Constitution fondée la liberté et l'ordre public. Tous vos voeux, Sire, seront remplis : la liberté  nous est assurée, et notre zèle garantit l'ordre public. Les Gardes nationales de France jurent à votre majesté une obéissance qui ne connaîtra pas de bornes que la Loi, un amour qui n'aura de terme que celui de notre vie. »

Source : Gallica-Bnf, Adresse au Roi, prononcée par M. de La Fayette (Evreux, 1790)


14 juillet :
En Corse, après vingt ans d'exil à Londres, Pasquale Paoli arrive à Macinaggio, il est de retour dans sa patrie et à la descente du navire, il embrasse le sol. A Paris, c'est le fête de la Fédération nationale, ci-dessous, « L'assemblée nationale, en expliquant son décret du 8 juin dernier, décrète que la municipalité de Paris est autorisée à remplir les fonctions du directoire de district, par rapport aux biens ecclésiastiques, non-seulement dans la dite ville, mais encore dans toute l'étendue du département de Paris ; et ce, provisoirement, jusqu'à ce que l'administration du dit département et de ses districts, ainsi que leurs directoires soient en activité. Sanctionnée le premier août 1790. » (Nouvelle législation ou collection de tous les décrets – édité en 1792 chez Devaux) Au théâtre de la Nation,en soirée l'on joue la première représentation, de la pièce en un acte et en vers, Le journaliste de l'ombre ou Momus aux champs Elysées de M. Joseph Aude. (Source : Gallica-Bnf, 84 pages)


CAMP FÉDÉRATIF de PARIS
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Champ de Mars - fête de la Fédération


Du mercredi 14 Juillet 1790.

Note : Fait de huit feuillets au prix de 2 sols, ce journal probablement unique (?) présente ou explique le déroulement de la journée de la fête de la Fédération au Champs de Mars.

La cérémonie du serment fédératif a eu lieu dans le plus grand appareil, et sans aucune espèce  d’accident.

Le Champ de Mars était entouré de quarante rangs de gradins. Au pied de l’Ecole militaire, était une tribune d’environ quarante pieds de largeur et de la longueur de la façade de ce bâtiment. Au milieu de cette tribune, s’élevait un trône magnifiquement sculpté et doré, surmonté d’une aigle, destiné pour le Roi. A droite était un riche fauteuil pour le Président de I’Assemblée. Au-dessus de cette tribune était celle préparée pour la Reine, M. le Dauphin, Madame Royale, Monsieur, Madame, Madame Elisabeth et quelques Dames de la Cour.

En face de cette tribune, et à l’autre bout du Champ de Mars, s’élevait majestueusement un arc de triomphe avec trois portes, sur lesquelles on lisait d’un côté les quatre inscriptions suivantes :

La Patrie ou la Loi peut seule nous armer,
Mourons pour la défendre et vivons pour l’aimer.
Consacrés au grand travail de la Constitution,
Nous la terminerons.

Le pauvre sous ce défenseur,
ne craindra plus que l’oppresseur ;
Lui ravisse son héritage.

Tout nous offre d’heureux présages,
Tout flatte nos désirs ;
Loin de nous écartez les orages,
Et comblez nos plaisirs.

De l’autre côté , on lisait les quatre inscriptions qui suivent :

Nous ne vous craindrons plus subalternes tyrans,
Vous qui nous opprimiez sous cent noms différents.

Les droits de l’homme étaient méconnus depuis des siècles, ils ont été rétablis pour l’humanité entière. Le Roi d’un peuple libre est seul un Roi puissant.

« Vous qui chérissez cette liberté, vous la possédez maintenant, montrez-vous dignes de la conserver ».

Au milieu du Champ de Mars était élevé une superbe autel, soutenu par quatre colonnes, dont chaque face portait la même inscription :

Les mortels font égaux, ce n’est pas leur naissance.
C’est la seule vertu qui fait la différence.

De Tous cette inscription, on lisait ces mots :

La loi dans tout Etat doit être universelle,
Les mortels, quels qu’ils soient sont égaux devant elle.

On lisait de l’autre côte le serment civique, décrété par l’Assemblée :

Nous jurons de rester à jamais fidèles à la Nation, à la Loi et au Roi, de maintenir de tout notre pouvoir la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale, et acceptée par le Roi ; de protéger conformément aux Lois, la sûreté des personnes et des propriétés, la circulation des grains et des subsistances du Royaume, la perception des contributions sous quelque forme qu’elle existe, & de demeurer unis par les liens indissolubles de la fraternité »,

On lisait sur le derrière des colonnes :

« Songez aux trois mots sacrés qui garantirent les décrets, la Nation, la Loi et le Roi. La Nation c’est vous, la Loi c’est encore vous, c’est votre volonté, le Roi c’est le gardien de la Loi. La colonne qui faisait face à l’arc de triomphe , portait l’emblème de la liberté avec les attributs qui la caractérisent, celle qui lui était parallèle portait l’emblème du génie avec ce mot : Constitution.

Le Roi est arrivé entre trois & quatre heures ; Sa Majesté est venue occuper le trône qui lui avoir été préparé. Le président de l’Assemblée s’est assis sur le fauteuil qui était à fa droite ; suivaient les Députés ; à la gauche du Roi était la Commune de Paris.

Tous les Gardes nationaux des Provinces, pêle-mêle avec ceux de Paris, occupaient les deux premiers gradins autour du Champ-de-Mars ; les autres étaient occupés par les spectateurs.

La première décharge de canon a été faite au moment où la marche est sortie de la place de Louis XV ; la fécondé, lorsqu’elle est entrée au Champ-de-Mars, la troisième, lorsque M. de La Fayette a paru ; la quatrième, lorsque le Roi est arrivé.

Le Roi placé, M. l’évêque d’Autun est monté à l’autel, où il a dit la messe accompagnée d’une musique superbe. Ce prélat patriote avait braqué sur lui tous les yeux des amis de la révolution. Il avait pour ceinture des rubans aux trois couleurs de la Nation ; les prêtres qui l’aidaient dans ces fonctions sacrées, portaient les mêmes ceintures. Après la célébration de l’office divin, on a béni les Enseignes, sur lesquels étaient écrits ces mots :

Confédération du 14 Juillet. Département du....

Cette cérémonie achevée, M. de La Fayette a prêté le serment au nom de tous les Confédérés, et au bruit du canon ; après lui M. le président de l’Assemblée Nationale s’est levé, a salué le Roi, et l’a prêté au nom de l’Assemblée. Les Membres de l’Assemblée, la Commune de Paris, et 300.000 personnes ont répété au même instant ces mots : je le jure ; chacun levait les mains au ciel ; c’était un spectacle ravissant que de voir dans le même moment 600.000 bras en l’air, et un peuple entier demandant à Dieu d’être propice à ses vœux.

Le serment prêté par le président, le Roi s’est levé ; on a observé le plus religieux silence, et Sa Majesté a lu son serment avec une dignité et un attendrissement qui s’est communiqué à tous les spectateurs à portée d’entendre ce généreux prince.

Après Sa Majesté, M. le Dauphin, que la Reine tenait dans ses bras, a agité ses petites mains ; il les a tendu vers le ciel, et a prêté son serment de la meilleure grâce du monde ; le serment était répété au même instant par son auguste mère. Moniteur, Madame, & Madame Elisabeth.

Le peuple n’a cessé d’applaudir cette auguste famille.

La cérémonie du ferment achevée, le Te Deum a été chanté au son des tambours, des timbales, et au bruit d’une salve d’artillerie, dont le service  a fait l’étonnement des gens de l’art ; le Roi est parti comblé de bénédictions ainsi que l’Assemblée, et les Gardes nationales ont défilé dans le meilleur ordre.

Les députés de la ville de Lyon sont arrivés samedi et à cinq heures du soir sur la place d’armes devant l’hôtel-de-ville. Leur bonne contenance et l’air martial des Lyonnais a fait le plus grand plaisir. Le tambour-major, par sa taille, figurait parfaitement bien à la tête des tambours et des musiciens, qui étaient en grand nombre.

On a remarqué qu’il était, et à juste titre, le plus richement vêtu des autres tambours-majors de toutes les députations. Son habit galonné en or sur toutes les coutures, semblait rappeler qu’il faut ne pas abandonner entièrement un usage qui soutient de fortes manufactures, et fait vivre une infinité d’ouvriers. Le présent destiné pour M. de Lafayette faisait un très-bel effet à côté du drapeau. Chacun lisait avec plaisir l’inscription.

Cives Lugdunenses optimo civi.
 (Les citoyens de Lyon sont les meilleurs citoyens)


Les députés des campagnes de Lyon présentaient une autre compagnie en tout aussi bon ordre et avec un air non moins martial. On a remarqué que celui qui portait l’emblème du Lyon avec l’inscription : Campagnes de Lyon, était en bas de soie blancs, par analogie aux fabriques de soieries dont cette partie de la France est occupée. — Les Bretons sont arrivés une heure après les Lyonnais.

Les Bretons sont arrivés samedi soir au nombre de six à sept cents hommes ; leur premier mouvement a été de rendre hommage au Roi. Lorsqu’ils se sont trouvés en face du pont Royal, on a donné des ordres pour les faire passer par la porte des Tuileries, qui est de ce côté. Ils ont traversé le jardin devant le château. Un d’eux a complimenté le Roi, qui a paru très-sensible aux cris d’allégresse de ces amis de la liberté.

Le Roi a passé en revue, hier matin, trois divisions de la Garde nationale. Les soldats citoyens qui composaient ces divisions, ont pris un arrêté dans leurs districts respectifs, pour inviter leurs frères confédérés de vouloir bien assister à cette revue et de partager avec eux les gardes d’honneur chez le Roi.

C’est à M. Charton qu’on doit les premières sollicitations pour parvenir à effectuer cette fête mémorable qui était dans l’idée de tous les bons citoyens. M. Charton est président de la fédération.




On assure que M. de La Fayette est nommé par le Roi, major-général de la fédération ; M. de Gouvion, aide-major général.

Un noble d’ancienne souche, déchu des titres par le décret du 18 juin dernier, parcouru toutes les études de MM. les notaires de Paris, pour faire accepter le dépôt de sa protestation ; mais en vain : il a été obligé de la rédiger lui-même. On ajoute qu’il est parvenu à le faire constater sur les registres du contrôle du domaine ; mais c’est un fait qu’il faudrait vérifier.

M. Philippe d’Orléans est arrivé dans la nuit du samedi à dimanche, à deux heures du matin. Il s’est présenté au Roi lorsque Sa Majesté a été de retour de la revue, et de là s’est rendu à l’Assemblée nationale.

Le premier mouvement des députés qui arrivent à Paris, est de se porter rapidement sur les ruines de la bastille ; ils descendent dans les cachots et payent un tribut de sensibilité aux victimes qui ont été dévorées dans ces gouffres ténébreux ; on voit plusieurs arracher les dernières pierres pour les emporter chez eux.

Les dernières lettres de Genève nous annoncent qu’il y a un parti fort nombreux dans cette ville qui, à l’exemple d’Avignon, veut se donner à la France. Ce parti fait tous les jours des prosélytes, au point qu’il n’y aurait rien d’étonnant qu’avant peu on ne vît arriver ici des députés de Genève, chargés d’offrir que cette ville fasse partie de l’empire Français.

A Paris, de l’Imprimerie du Patriote Français


15 juillet : A l'Assemblée, le duc de la Rochefoucauld-Liancourt au nom du comité de mendicité mettait au courant les parlementaires sur l'état de la législation sur la mendicité et les hôpitaux, la répartition des secours par département, puis districts et municipalités, et sur les visites effectuées dans les hôpitaux, hospices et maisons de charité de Paris et de ses alentours.

16 juillet : Aux Etats-Unis,  la ville de Washington District of Columbia est fondée ou formalisée par le Residence Act. Deux états, le Marynland et la Virginie ont donné des terres, près de 200 kilomètres carrés pour que se construise le district fédéral, à ne pas confondre avec l'état de Washington en bordure du Canada. Sinon la ville nouvelle est bordée du fleuve Potomac.

17 juillet : En Ecosse, à Edimbourg décède le philosophe Adam Smith, auteur des Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776). A Paris, l'on joue une pièce de M. Collot d'Herbois en deux actes et en prose, La famille patriote ou la Fédération, au théâtre de Monsieur (n'existe plus, et s'est appelé aussi théâtre Feydeau, au 19-21 de la rue du même nom et proche de l'Opéra ou la salle Garnier).

Façade du théâtre Monsieur, ci-contre


18, 19  et 20 juillet : Louis XVI signe le décret du 10 juillet « sur les biens des non-catholiques qui se trouvent encore aujourd’hui entre les mains des Fermiers de la Régie aux biens des Religionnaires (protestants), seront rendus aux héritiers, successeurs ou ayans droits des dits fugitifs, à la charge par eux d’en justifier, aux termes et selon les formes que l’Assemblée nationale aura décrétés, après avoir entendu à ce sujet l’avis de son Comité des Domaines. Le Roi a sanctionné et sanctionne le dit décret, pour être exécuté suivant sa forme et teneur. » Est édité et prononcé le Discours à la Reine de M. Joseph Delaunay d'Angers, au nom de la Garde nationale du Maine-et-Loire. Et à cette occasion, M. Palloy, en charge de la destruction de la Bastille tresse des louanges au Peuple français (ci-dessous). Pendant 3 jours, à partir du 18, ont lieu des fêtes et illuminations, des réjouissances sont offertes dans la capitale, comme un repas dans tous les districts parisiens par les Gardes nationales, ou bien entre le pont-Neuf et le pont-Royal est organisée une joute avec lance qui se tient sur la Seine. Le soir, les Champs-Elysées sont illuminés, et, à la place libérée par la forteresse de la Bastille durant 3 soirées se tient un bal et une illumination champêtre... (Sources : Gallica-Bnf, Musée Carnavalet, Bib. de Stanford)

Fêtes exécutées en mémoire de la Fédération générale : joute sur l'eau, ci-dessous




Fêtes et illuminations aux champs-Elysées, ci-dessous



Estampes de Pierre-Gabriel Berthault,  graveur - Armand-Parfait Prieur, dessinateur

21 juillet : Éloge civique de Benjamin Franklin, prononcé par M. l'abbé Fauchet, en présence de MM. les députés de l'Assemblée nationale, de MM. les députés de tous les départements du Royaume à la Confédération, de M. le Maire, de M. le Commandant-général, de MM. les représentants de la commune, de MM. les présidents des districts, et de MM. les électeurs de Paris ; plus une note du Roi sur Franklin. (Source : Gallica-Bnf, 50 pages)

22 et 23 juillet : Le Roi, sur les conseils des prélats, accepte la Constitution civile du clergé, mais demande un délai avant de la promulguer (la loi sera sanctionnée favorablement fin décembre). Le lendemain, Louis XVI reçoit des « lettres confidentielles » du pape, des archevêques de Bordeaux et de Vienne, datées du 10 juillet, qui condamnent la loi civile du clergé.

24 juillet : A Paris, l'Assemblée fixe les traitements du clergé et renforce les dispositions du serment de la loi civile (lire le 27 novembre).

25 juillet : Gers, le dernier intendant de la ville d'Auch transmet ses pouvoirs à M. Jean Moysset, le premier président du Conseil-général gersois. Ce département s'est appelé un court temps département de l'Armagnac...

26 juillet : A Lyon, la contre-révolution s'organise. A la Constituante est réduit le pacte de famille avec l'Espagne. Jean-Paul Marat lance un appel, dans non pas, L'Ami du Peuple, mais un journal de 8 pages qu'il nomme exceptionnellement : C'est en fait de nous. Il demande aux citoyens à ramener de Saint-Cloud le roi et le dauphin au plus vite, de mettre sous-clef la reine et son beau-frère (le comte de Provence), de s'armer dans chaque district et de couper la tête à cinq ou six-cent personnes pour assurer le repos, la liberté et le bonheur ; et pour éviter l'effusion de sang à venir... (Source : Gallica-Bnf)

27 juillet : Est signé le traité de Reichenbach entre la Prusse et l'empereur d'Autriche, laissant à ce dernier le champ libre pour réprimer le soulèvement belge. La Révolution des Français commence à inquiéter les souverains européens.

28 juillet : L'Assemblée refuse de laisser passer par le territoire français des troupes autrichiennes envoyées pour réduire l'insurrection belge.

29 juillet : Au sein de la Constituante, depuis six mois, les députés discutent de l'importance des effectifs et de la nature des troupes. Le comte de Latour du Pin, ministre de la guerre, a défendu son projet, il a exposé que la défense des frontières exigerait 250.000 hommes, pouvant être ramenés à 150.000 en temps de paix. Lameth, au nom du comité militaire, estime qu'une réserve de 50.000 pour un effectif de paix de 150.000 soldats suffit amplement. Suisse et Italie, les émigrés présents à Chambéry et à Turin tentent d’obtenir l’aide du roi de Sardaigne dans leur lutte contre la France.

30 juillet : Dans la Meuse, il éclate une insurrection du régiment de la Reine-cavalerie à Stenay.

31 juillet : A l'Assemblée, M. Malouet reprend le contenu violent des déclarations de Marat dans son édition du 26/07 et dénonce un complot contre le roi, etc.. « Eh bien, c'est sous vos yeux, c'est à votre porte, que des scélérats projettent et publient toutes ces atrocités ; qu'ils excitent le peuple à la fureur, à l'effusion du sang ; qu'ils dépravent ses mœurs et attaquent, dans ses fondements, la Constitution et la liberté. Les représentants de la nation seraient-ils indifférents, seraient-ils étrangers à ces horreurs? Je vous dénonce le sieur Marat et le sieur Camille Desmoulins. » Après quelques échanges, il est voté un décret proposé par M. Malouet et son projet est adopté en ces termes :

« L'Assemblée nationale, sur la dénonciation qui lui a été faite, par un de ses membres, d'une feuille intitulée : C'en est fait de nous, et du dernier numéro des Révolutions de France et de Brabant, a décrété que, séance tenante, le procureur du roi au Châtelet de Paris sera mandé, et qu'il lui sera donné ordre de poursuivre, comme criminels de lèse-nation, tous auteurs, imprimeurs et colporteurs d'écrits excitant le peuple à l'insurrection contre les lois, à, l'effusion du sang et au renversement de la Constitution ».

VIII – Le mois d’août 1790


Dimanche 1er août : A Nancy : les grenadiers du roi de protestent contre l'emprisonnement d'un de leur camarade, le militaire participait aux séances du club des Jacobins local et y réclamait sa solde. Le commandement de la place, de Noue, le suspend de toute fonction dans la compagnie des grenadiers Suisses de Châteauvieux (Loir-et-Cher), les cavaliers de Mestre de Camp se solidarisent avec elle.
« Dans un climat tendu par le contentieux des masses régimentaires, les soldats se révoltent contre une punition infligée à l'un de leurs camarades. De Noue, commandant en chef de la garnison de Nancy, veut imposer une sanction géné́rale. Les soldats se rebiffent et réclament la vérification des comptes. De Noue n'insiste pas. » A Grenoble, Antoine Barnave est élu maire. Mais il démissionnera en novembre.

2, 3 et 4 août : A la Constituante, M. de Noailles demande la permission de se retirer à Nemours, où ont été observés des troubles, il reçoit l'autorisation de partir. J.P. Marat dépose ses hommages et remet un plan de législation criminel à l'assemblée. Le président ordonne la lecture de la lettre signée par M. Desmoulins, celui-ci demande que soit établi un rapport sur ce qu'il a pu écrire d'incriminant dans son journal Les révolutions de France et de Brabant au numéro 35. Présent dans l'hémicycle Camille Desmoulins est demandé à la barre pour s'expliquer et qu'il soit arrêté, mais après l'intervention de MM. Malouet et Robespierre, Desmoulins s'est éclipsé... Le 3, il est décidé la suppression des pensions existantes au 1er janvier 1790, ainsi que la règle à observer par les intéressés pour son rétablissement (sic), et création des « récompenses nationales ». A la séance du 4, qui commence à neuf heures du matin, il est fait état du bulletin de santé du roi (depuis le château de Saint-Cloud). M. Jacques Guillaume Thouret, député du Tiers de Rouen et rapporteur, mène les débats autour du nouvel ordre judiciaire et aborde les titres IV, V et VI et enchaîne les articles les uns après les autres. Cela commence par le transfert des affaires d'un tribunal pour cause d'appel d'un district à un autre, et le dernier article examiné de la journée est consacré aux greffiers, à leur nomination et durée dans l'emploi.

5 août : A Paris, un administrateur au département de police dénonce l'enfer des femmes à la Salpêtrière. Le plus grand lieu de réclusion des femmes en Europe (environ 8.000 personnes) appartient à cet ensemble administratif né sous le roi Louis XIV sous le titre « d’Hôpital général ». Ce n’était pas précisément un hôpital, mais un espace d’enfermement des plus pauvres ou déviants, et concernant la Salpêtrière l’on y trouvait notamment les prostituées ainsi que leurs enfants en bas-âge. Les Hôpitaux généraux deviendront plus tardivement au mitan du XIXe siècle l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP).

6 août : A l'Assemblée, l’on condamne les mutins comme des traîtres à leur patrie, mais se propose d’écouter les doléances des soldats.

7 août : Le nom de « Secrétaire de la Maison du roi » est changé en ministère de l'Intérieur.

8 août : A Saint-Domingue, l'assemblée des colons est dispersée par la force sur les ordres du gouverneur. Le même jour, le vaisseau le Léopard est en rade de Saint-Marc. Le navire a embarqué les 85 membres de l'assemblée coloniale auto-proclamée de Saint-Marc et fait route sur Brest, suite à une mutinerie de l'équipage. Ils seront nommés les « Léopardins ou la faction des 85 ».

9 août : A Nancy, pour réponse à la condamnation du 6 août, la garnison n'apprécie pas, elle se mutine contre les officiers et contrôle les caisses de son régiment pour pouvoir être payée.

10 août : Suite au décret du 31 juillet dernier sur la presse de M. Malouet, Jacques-Pierre Brissot écrit dans Le Patriote français du jour, que pour « Punir la calomnie, sans blesser la liberté de la presse, est le problème le plus difficile à résoudre en politique. »

11 août : Au bois de Boulogne, les députés Barnave et Cazalès se battent en duel au pistolet. Trois coups sont tirés, deux sans effet et une troisième balle effleure le bord du chapeau de M. Cazalès. M. Barnave considère l'offense réparée.

12 août : La Constituante donne aux directoires départementaux le pouvoir d’annuler ou refuser les actes inconstitutionnels des municipalités, ainsi est étendu le contrôle de légalité des actes administratifs à son contrôle de constitutionnalité.

13 août : Le Roi fait une proclamation sur le décret pris ce jour, qu'il n'y aura plus d'apanages (*) réels et révocation de ceux-ci. (*) Ce sont des biens concédés à un ou des enfants en compensation à un renoncement, et pour assurer leur train de vie son sens premier, par exemple à des enfants nés hors mariage, comme le fit Louis XIV.

14 août : A l'occasion de la signature de la paix avec la Russie, le roi de Suède, Gustave III, évoque une croisade contre-révolutionnaire.

15 août : A Nancy, les soldats Suisses en garnison du régiment de Châteauvieux se révoltent contre leurs officiers.

16 et 17 août : A l'Assemblée,
sont créées les justices de paix et  la vénalité est abolie (ce qui peut être vendu) des offices de « jurication » (ce qui détermine le territoire). La justice sera rendue gratuitement. Le lendemain, il est approuvé que les excès commis par les soldats révoltés seront punis comme  « crimes de lèse-nation ».

18 août : Dans la région ardéchoise se trame une conspiration royaliste à la Commanderie de Jalès. La contre-révolution s'organise un peu plus. Nous sommes sur une terre traditionnelle des guerres de Religion, 20.000 hommes se sont rassemblés dans le sud de l’Ardèche. Des nobles et des gardes nationaux hostiles à la Révolution, pour eux l'Assemblée est une chose monstrueuse. De même, l'oeuvre de la Constitution est tenue pour nulle et ses membres sont regardés comme des criminels de « lèse-majesté ». En liaison et accord avec le comte d'Artois et les émigrés, les fédérés du camp de Jalès sont bien résolus à soulever tout le midi de la France.

19 août : Comme a pu l'écrire l'historien Albert Soboul, « ainsi débutèrent les relations de Saint-Just et de Robespierre », par une lettre envoyée par le jeune citoyen au député, Saint-Just s'adresse à Robespierre par courrier pour lui demander à ce que Blérancourt, là où il demeure ne perde pas son marché. Robespierre conservera longtemps cette lettre sur lui, l'hommage d'un jeune inconnu de 23 ans. « Vous qui soutenez la patrie chancelante contre le torrent du despotisme et de l’intrigue, vous que je ne connais que, comme Dieu, par des merveilles ; je m’adresse à vous, monsieur. » (...) « Je ne vous connais pas, mais vous êtes un grand homme. Vous n’êtes point seulement le député d’une province, vous êtes celui de l’humanité et de la République. » (Source : L'ARBR, extraits de l'Oeuvre complète de Saint-Just)

20 août : Première Adresse des officiers du Jardin des plantes et du Cabinet d'histoire naturelle, lue à l'Assemblé́e nationale :
« tous les Français sont admis dans les Cours que l'on donne au jardin des plantes, mais encore les étrangers y forment une partie considérable des auditeurs ; il n'est pas rare de trouver parmi eux des Péruviens, des Brasiliens, des Anglo-américains, et même des Asiatiques que l'étude de l'histoire naturelle attire et retient pendant très longtemps en France ; et l'établissement du jardin des plantes n'augmente-t-il pas ainsi la prépondérance et la gloire de la Nation, par un des moyens politiques les plus nobles et souvent les plus avantageux? Le jardin des plantes et le cabinet d'hittoire naturelle sont donc de la plus grande utilité pour toutes les parties de l'empire. » (Source : Gallica-Bnf, 80 pages)

21-22 août :  Le Constituante se consacre au droit d'association, elle autorise par la loi aux citoyens le droit de s'assembler et de former entre-eux des sociétés libres. Le lendemain, il est reconnu aux fonctionnaires de l'état le droit d'avoir une retraite.



23 août : Brevet de volontaire de la Garde nationale Parisienne attribué à M. Jean Leguy (ci-dessus, source Musée Carnavalet)

24 au 26 août : A l’Assemblée, est terminé l'examen de la loi fondamentale en matière de justice et mettant fin aux pratiques du passé (charges, torture, etc...). Il est instauré la séparation entre les deux ordres de juridictions un ordre judiciaire et un ordre administratif, le principe de l'égalité devant la justice et de la gratuité, le droit de faire appel, le jury populaire en matière criminelle, la professionnalisation des magistrats, et comme principes : la simplification admnistrative, l'indépendance de la magistrature et la protection des intérêts privés et de la personne humaine (source Ministère de la Justice - 2007).  Le même jour des déclarations contre la censure au théâtre sont menées par Joseph Chénier et Robespierre. De son côté, le roi sanctionne le décret sur la Constitution civile du clergé. Deux jours après, l’on aborde la réorganisation de la direction des Postes et Messageries.


27 août : Au Palais Royal, le roi, devant l'impuissance des autorités ou leur refus de ramener l'ordre, nomme le marquis de Bouillé (ci-contre) pour faire appliquer le décret du 16 août. Le député et abbé duc de Montesquiou présente un rapport à l'Assemblée sur l'état des finances, la dette de l'état est évaluée à plus de 4 milliards de livres françaises, ou l’équivalent de ce qui va être mis en circulation comme assignats pour renflouer les caisses et les remettre à zéro. Résultat, si 600 millions ont pris déjà la route de l’exil avec les émigrés, le cours de cette monnaie va être soumis à une rapide dépréciation. Il est aussi décidé la transformation des assignats en papier-monnaie.

28 août : Proclamation du Roi sur le décret de l'Assemblée nationale, qui désigne les villes où seront placés les tribunaux de districts. (Source : Gallica-Bnf, 25 pages et villes classées par département)

29 août : A l'Assemblée, il est voté une loi sur les postes et messageries, où le facteur ne peut prendre ses fonctions qu’après avoir prêté serment spécifié par la loi concernant le secret des correspondances. « Je jure de remplir fidèlement mes fonctions, de garder et observer exactement la foi due au secret des lettres et de dénoncer aux tribunaux toutes les contraventions qui viendraient à ma connaissance ».


MÉMOIRES, CORRESPONDANCE ET MANUSCRITS DU GÉNÉRAL

LAFAYETTE, PUBLIÉS PAR SA FAMILLE. (1837)

« Mais c'est en vain que les ennemis publics espèrent, en multipliant les fatigues de la garde nationale, de décourager son activité et sa constance. Voués par nos principes comme par nos serments au maintien de la constitution et de l'ordre public,sûrs (le commandantgénéral est autorisé à le déclarer en leur nom, d'être soutenus par toutes les gardes nationales de France , nous ferons notre devoir avec un zèle inaltérable,et, s'il le faut, avec une inflexible et sévère fermeté. »
Les détails de cet ordre du jour ont rapport à l'exécution des différents arrêtés du pouvoir civil. Depuis longtemps on cherchait à exciter l'indiscipline dans les troupes et la désunion entre les soldats et les officiers ; c'était un des grands moyens sur desquels la contre-révolution fondait son espoir. Les histoires du temps ont consigné le triste événement de la révolte de la garnison de Nancy, réprimée par les gardes nationales et les troupes de ligne aux ordres du général Bouillé (1). Les patriotes sentirent, pour la plupart, le besoin de lui donner l'appui de l'assemblée, et dans la séance du 30 août, Lafayette prononça ces paroles. :
Les informations que vous avez ordonnées nous feront connaître, je l'espère, les auteurs des troubles dans les garnisons et les livreront à la rigueur des lois. Mais il s'agit de la crise actuelle : elle est pressante, notre situation est délicate ; et c'est pour cela même qu'un bon citoyen n'hésite pas à donner son avis. Je sais, Messieurs, que M. de Bouillé portera, dans l'exécution de vos décrets, son énergie, ses grands talents, et cette loyauté qui le caractérise;  il vous demande, et votre comité vous propose un témoignage, que vous ne pouvez trop vous hâter de lui donner. Je le réclame pour lui, pour les troupes obéissantes qui concourront avec leur général à supprimer la rébellion ».
L'Assemblée adopta dans cette séance le décret proposé dans le même sens par Barnave. La rébellion fut réprimée, et le général Bouille reçut, sur la proposition de Mirabeau, les remerciements de l’assemblée (2).

Notes de l'extrait :

(1) A la suite de graves désordres dans une partie de l'armée, l'assemblée nationale avait rendu, le 6 août, un décret qui prohibait dans les régiments toute association délibérante, autre que le conseil d'administration, établissait des inspecteurs extraordinaires nommés pas le roi pour vérifier les comptes de chaque régiment, en présence d'un certain nombre d'officiers, sous-officiers et soldats, etc. Ce décret fut violé à Nancy, par la rébellion de trois régiments qui arrêtèrent leur inspecteur, M. de Malseigne, et un commandant, M. Denoue. Le 16, l'Assemblée décréta de nouvelles mesures pour réduire les rebelles ; en conséquence, le 31, M. de Bouille, à la tête d'un corps composé de troupes de ligne et de gardes nationales, entra de vive force à Nancy, et après un combat sanglant, y rétablit l'exécution des lois.

(2) « L'insurrection de Nancy, provoquée par l'aristocratie des officiers, n'en était pas moins une rébellion très dangereuse contre le gouvernement national et contre le décret de l'assemblée. Je contribuai beau coup à faire donner au roi, et au général Bouillé, les moyens de la réprimer ; je traitai les intérêts de M. Bouillé avec les chefs jacobins d’alors; j'invitai les gardes nationales à se joindre à lui ; je me joignis à Mirabeau,ou pour mieux dire, je lui inspirai sa motion pour faire remercier M. de Bouillé et ses troupes; en un mot, je servis avec zèle, non seulement l'ordre public, mais le général, qui dans ses Mémoires regrette de n'avoir pas profité de ces avantages pour trahir plutôt la cause constitutionnelle ».

Note du général Lafayette

31 août : A Nancy, le marquis de Bouillé entre dans la ville après de durs combats faisant plus de 300 morts, la répression est sanglante et forte : une trentaine de soldats suisses sont roués ou pendus, plus de 40 sont condamnés aux galères, et la Garde nationale est réorganisée. Suite à cette répression, par M. de Bouillé, de la rébellion de Nancy, l'Assemblée lui adressera des remerciements, puis les annulera suite au rapport du député Sillery, et Louis XVI rédigera un courrier de félicitations (début septembre).

IX – Le mois de septembre 1790

C'est en septembre ou durant l'été 1790 que commence à paraître : Je suis le véritable Le Père Duchesne, foutre de Jacques-René Hébert pour contrer Lafayette. En novembre apparaît en première page le dessin ci-contre. Ce périodique bi-hebdomadaire de huit pages ne sera pas numéroté avant le mois de janvier 1791 et il paraîtra jusqu'en 1794. Le journal est imprimé en 1790 chez le sieur Tremblay au sein de la rue basse Saint-Denis (*), les années suivantes rue des Filles-Dieu chez le même imprimeur. (*) Proche du boulevard Bonne-Nouvelle dans l'actuel dixième arrondissement de Paris. (Source : Gallica-Bnf)


Mercredi 1er septembre : Le duc de Liancourt fait connaître au comité de mendicité, les résultats de sa visite avec M. Decretot au Mont-de-Piété, considéré comme une annexe de l'Hôpital général. A Brest, 2.000 ouvriers des arsenaux se mettent en grève.

2 septembre : Un décret de l'Assemblée nationale supprime le costume traditionnel des compagnies judiciaires. Les travaux du comité sur la mendicité sont repoussés d'un mois à la demande de M. Prieur « pour donner le temps de connaître les ressources des hôpitaux et autres établissements de charité, et préparer un travail complet sur cette partie. » Dans la capitale, il éclate une émotion en faveur des Suisses. A l'annonce de la répression sanglante des mutineries de Nancy, des Parisiens se sont rassemblés. Cinq-mille personnes en début d'après-midi du Palais-Royal se dirigent vers l'Assemblée. Arrivés aux Tuileries, l'on dénombre quarante mille citoyens devant la salle du Manège criant : Les ministres à la lanterne! Cette foule en colère réclame le renvoi de MM. Necker et de La Tour du Pin (ministre de la guerre). Puis il est proposé d'aller à Saint-Cloud, où se trouve le roi lui-même, mais cela reste sans effet. La rapidité avec laquelle s'est organisée le rassemblement et son ampleur surprennent. Il sera dit que ces manifestants n'avaient rien de spontanés et que des meneurs issus des Jacobins auraient été la cause de l'agitation d'aujourd'hui.

3 septembre : A l'Assemblée, l’on réduit le budget de la bibliothèque du roi de 140.000 à 110.000 livres.

4 septembre : Démission et départ de M. Necker, son remplaçant aux finances est M. Claude-Guillaume Lambert, baron de Chamerolles (jusqu'au 4 décembre). Favorable à l'emprunt et refusant d'emettre des assignats, est la raison officielle de la décision du départ de Jacques Necker de son poste de ministre. A l'Assemblée, le citoyen anglais et lieutenant au régiment Royal-Higland, M. Jean Oswald, membre de la société des amis de la Constitution, offre une ode rédigée par ses soins : le Triomphe de la liberté (en anglais), pour honorer la Révolution. Et un exemplaire sera déposé aux archives. La Constituante s'attribue la direction du Trésor public.

5 septembre : M. Michel Roussier démissionne de son poste de député. « Il y joua un rôle assez effacé, fut adjoint au doyen des communes, fit partie du comité des subsistances, prêta le serment du Jeu de paume, et ne prit qu'une fois la parole pour proposer une définition du gouvernement monarchique (...) et ne reparut plus dans les assemblées parlementaires. » (Source : Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889, d'Adolphe Robert et Gaston Cougny)

6 septembre : A Angers, les femmes réclament la diminution du prix du pain, elles sont suivies par les ouvriers des carrières. La troupe tire et tue : 45 hommes, 4 femmes et 2 enfants. A Brest, 2.000 marins des navires le Léopard en provenance de Saint-Domingue et l'America, plus le Majestueux se révoltent  et parmi leurs doléances portées à l'hôtel de la ville, ils demandent de ne plus porter le pavillon blanc, mais un drapeau tricolore, rouge, blanc, bleu de manière verticale (à l'inverse de celui des Hollandais).

7 septembre : A la Constituante, l’on promulgue un décret sur l'organisation des Archives nationales.

8 septembre : Marat dans L'Ami du Peuple (n° 215) après avoir rapporté en quoi consiste le décret sur le "bouton d'uniforme" et l'importance du sujet en réponse à une lettre sur l'affaire de Nancy, il remarque « avec quel soin les ministériels qui l’ont forgé ont supprimé de la légende la nation qui seule peut vous rappeler la patrie, pour ne laisser que la loi et le roi. Ils ont beau vous crier la loi, c’est la nation, et la nation c’est vous, ils mentent impudement, tant que vous n’aurez pas fait la loi et tant que la loi sera faite par eux, qui sont vos plus mortels ennemis. » Cette fois, c'est la tête des ministres qu'il souhaite couper... et demande à se hâter. (Source : Gallica-Bnf, page 6)

9 septembre  A Paris, la Section de l'Oratoire fait une adresse sur l'émission des assignats-monnaie, ci-après :

0
Adresse de la Section de L'Oratoire (*)
à l'Assemblée nationale

*
Sur l'émission des assignats-monnaie

 

(*) Paris en rive gauche ou nord  - quartier du Louvre


Ce n'est pas par des opérations partielles (et l'expérience l'a prouvé) qu'on remédie à de grands maux ; vous en étiez convaincus, lorsque vous avez commencé le glorieux monument de la constitution, qui, malgré les clameurs des ennemis de la liberté, et les transes des êtres liés à l'arbitraire de l'ancien régime, s'élève néanmoins et atteindra dans peu la perfection et l'immuabilité, unique but de vos travaux et de nos vœux.

Ce que vous avez fait pour les lois, Messieurs, vous le ferez pour les finances, autrement l'intérêt qui nous mine finirait par tout absorber. Vous admettrez, Messieurs, l'émission des assignats-monnaie, idée conçue parmi vous, idée simple et grande en même temps, qui, exposée depuis quelque-temps à l'opinion, ne trouve guère de contradicteurs que ceux qui, vivant et s'enrichissant de la variabilité des effets publics, n'en peuvent voir l'extinction sans angoisses.

Si vous ne leur donnez la chance des inquiétudes et des hasards ; si vous ne commettez des fautes qu'ils convoitent, et dont ils puissent commercer, pouvez-vous aspirer à leurs éloges? Redoutez-les plutôt, Messieurs, et permettez à une assemblée primaire, placée au centre du commerce de cette capitale, qui recueille l'opinion publique dans sa véritable source, de vous exposer ce qui la détermine : en effet, il existe des agioteurs qui préfèrent un projet de quittances portant intérêt à celui qui opère à jamais le paiement réel de la dette exigible ; l'Assemblée ne doit-elle pas être frappée d'une préférence aussi bizarre qu'alarmante? mais quelques soient les talents et l'éloquence, les défenseurs de ce projet répondront-ils à cette simple objection qui s'offre à tous les esprits?

Il grève l'état de cent vingt millions net à payer aux porteurs. Or, quiconque a la moindre connaissance de l'impôt, de ses frais de perception, du déficit nécessaire qu'il éprouverait, conviendra que pour lever encore une somme aussi prodigieuse sur des contribuables déjà exténués, il faudrait la porter au double ; tel est le premier fléau de cette opération ajouté gratuitement à nos misères; qu'on ne croie pas non-plus qu'il soit momentané, il doit finir par tout engloutir.

Quel serait effectivement dans les premières années, le porteur un peu garni de ces quittances, qui voulût échanger un effet qui, sans soins, sans inquiétude, lui rapporte un intérêt qui lui convient, contre un bien-fonds qui communément en rapporte un moindre?

Il le gardera dans ses mains, et laissera les biens-fonds aux amateurs de l'agriculture, qui seront ses fermiers. Mais, dira-t-on, n'est-il pas juste que les créanciers soient remboursés, et qu'ils ne soient pas contraints d'employer leurs capitaux à un usage déterminé qui soutient le contraire? Les porteurs d'assignats ne seront-ils pas maîtres de les échanger, d'en disposer comme bon leur semblera? ces billets ne seront-ils pas une véritable monnaie? Veut-on conclure que de ce que les créanciers auront avec ces titres une faculté exclusive d'acheter des domaines nationaux, ce privilège qui enrichit l'effet, nuise à la volonté du porteur?

Tel est cependant un des grands arguments des antagonistes des assignats ; mais ce n'est plus aux gros capitalistes qu'il faut parler. Qu'est-ce qui les touche? Le gain immodéré. Quelle est leur patrie? La bourse. Quels sont leurs vœux? La baisse, quand ils veulent acquérir ; la hausse, quand ils veulent revendre. C'est à ceux qui, vivant du revenu modique de leurs fonds, n'ont d'espérance qu'en eux ; et mesurant habituellement l'avenir avec tranquillité, formés dès longtemps à l'inaction, à mettre la recette de leurs rentes au nombre de leurs plus grandes fatigues, ne sont plus faits pour se charger des soins innombrables des propriétaires : ils n'acquerront pas, s'ils ne prennent pas ce parti ; croient-ils que les gros capitalistes, qui convoitent d'avance leurs titres, le fassent? Ceux-ci n'y penseront que lorsque l'état, incapable de payer avec l'impôt, épuisé d'obligations, sera contraint de leur tout abandonner.

Pendant ce cours de calamités, les bien nationaux seront usurpés, dégradés, les intérêts de ces titres sans paiement ; et alors, à quelle triste situation ne sera pas exposée cette classe de porteurs de quittances, la seule inquiétante? Ils n'auront plus pour eux que la pitié des premiers, qui, concentrant dans une seule place les effets décriés, en deviendront propriétaires au prix qu'il leur plaira de fixer.

Et si cependant, à travers mille dangers, l'état parvenait à s'acquitter aux dépens de sa propriété et des impôts avec ces accapareurs de quittances ; tant de crises, tant de peines, tant de sacrifices ne serviraient, comme l'a dit un de vos célébrés orateurs, qu'à créer un nouvel ordre de grands propriétaires fonciers, qui, donnant plus au luxe et à la ruine des campagnes qu'à l'art de fertiliser la terre et d'étendre les bienfaits de l'agriculture, empêcherait la division des propriétés, fondement inébranlable de l'a- abondance, mais devenue désormais impossible par cette malheureuse catastrophe.

Mais quel contraste dans le tableau offert par l'émission des assignats-monnaie. Ce n'est pas l'imagination qui aime à se dégager d'images nombres par d'agréables chimères ; c'est un avantage manifeste d'abord, ensuite des résultats heureux appuyés par l'expérience.

Au moment où vous acquittez la dette exigible, une levée de cent vingt millions net, dégagée des pertes et des frais qu'elle entraîne, disparaît, et rend les autres impositions plus légères et plus sûres, détermine le paiement de la rente constituée à sa véritable époque, dégage des entraves du malaise l'état, et les contribuables qui s'acquittent avec ponctualité.

Dès-là que ces dépenses sourdes et cachées, et les prodigalités avouées deviennent désormais impossibles, tout engorgement cesse, l'ordre et le crédit qui le suit immédiatement renaissent.

Par rémission des assignats, voyez les capitalistes, ces hordes d'agioteurs, sont contraints d'employer leurs fonds innombrables, grossis des fortunes des particuliers et de la misère publique, à acquérir des biens, ou dans les manufactures, tous ceux qui habituellement plaçaient dans les emprunts, ouverts par le gouvernement, subissant la même loi, versant leurs économies de plusieurs années sur ces objets intéressants, et soutenir de tous leurs efforts ce qu'ils calomnient aujourd'hui ; vous verrez, Messieurs, si leur dépit tiendra contre leurs intérêts, et si au plaisir de se nuire à eux-mêmes, d'enterrer un numéraire qui n'aura plus d'aliment, ils ne préféreront pas un emploi profitable.

Mais n'a-t-on pas eu la stupide audace de comparer les assignats futurs aux billets du système, et l'impudeur d'en faire sortir des décombres où ils étaient ensevelis, pour les montrer au public, comme des garants du sort futur des assignats. Mais les bases chimériques des premiers peuvent-elles être opposées à celles de l'émission actuelle, à ces possessions superbes, qui, enviées depuis tant de siècles, couvrent la France d'un bout à l'autre, et frappent et charment tous les regards. Eh quoi! jadis sur le simple préambule d'un édit, sans autre sûreté que ses phrases, vous portiez en foule votre argent, vous le précipitiez à force ouverte dans les coffres d'un gouvernement dissipateur, et aujourd'hui, vous ne voudriez pas d'un effet avec lequel vous pouvez à l'instant commercer, acquérir, payer, qui vous offre toutes les ressources, qui a pour garant des biens innombrables, une nation pleine d'honneur, dont le premier cri et la première loi furent la probité, qui ne succombe sous le faix (lourd fardeau), et n'a recueilli que pour vous. Mauvaise foi insigne! craintes artificieuses, dont le fondement nous à coûté si cher!

Vous rendrez nulle, Messieurs, cette coalition formelle entre les marchands d'effets, et ceux dont l'intermédiaire, devenu moins utile dans l'intérieur du royaume d'abord, ensuite au dehors par l'émission des assignats, doit nécessairement être réduit aux seules affaires du crédit.

A tous les motifs de presser cette opération salutaire, se joint le retour de l'hiver, si redoutable dans les temps de détresse ; les ateliers de charité, qui en sont le signe évident, vont entasser à grands frais les malheureux ouvriers des manufactures languissantes, en occuper l'activité à des travaux inutiles, et ces hommes précieux peut-être n'y pourront tous être admis. Que deviendront-ils?

Ne levez plus vos yeux de ce tableau, Messieurs, fait pour émouvoir ; puisse-t-il vous déterminer à ce qui nous amène devant-vous! Vous vous opposerez à cette voracité funeste qui peut tout engloutir ; vous daignerez condescendre à nos vœux, consignés dans un arrêté que nous vous présentons avec confiance ; nous croyons qu'il n'en est aucun qui n'ait pour motif le bien commun de la France ; s'il en est d'erronés, votre sagesse saura les connaître. Par cette opération, l'aisance s'introduisant dans les classes les moins aisées, y ramènera le calme et la circulation, qui sont leur seule ambition ; tout refleurira dans l'empire que vous avez reconstruit, et l'étranger accourant se fixer dans la plus belle contrée de l'univers, au milieu d'un peuple heureux et libre, vous proclamera les libérateurs du monde, et c'est alors qu'au sein de l'allégresse universelle, vous jouirez de vos travaux immortels et de vos sacrifices.

Aubriet Commissaire - Rédacteur.

EXTRAIT du registre des délibérations de la Section de l'Oratoire.

Du 9 Septembre 1790


En l'assemblée générale de la Section convoquée en la maniere accoutumée, pour délibérer sur le projet d'une nouvelle émission d'assignats-monnaie, pour acquitter la dette exigible. Après avoir entendu, pendant deux séances consécutives tous les citoyens qui avaient demandé la parole, l'assemblée a été unanimement d'avis.

1°. Que l'émission de nouveaux assignats y jusqu'à concurrence de la dette exigible , serait généralememt avantageuse.
2°. Que leur cours devrait être forcé.
3°. Que ces assignats ne devaient porter aucun intérêt.
4°. Que dans la vente des biens nationaux, les assignats devaient être reçus en paiement, exclusivement à l'argent.
5°. Que la facilité des échanges paraissait exiger que , dans la nouvelle émission, il y ait pour une somme des billets de 100, 25 et 6 livres
6°. Que pour assurer le cours & le crédit des assignats, l'Assemblée nationale serait suppliée d'ordonner la publication dans les papiers publics, avoués de l'administration, & qui paraissent chaque jour , de la note exacte de toutes les ventes qui auront eu lieu dans tout le royaume, ainsi que de la somme & des numéros de tous les assignats brulés en conséquence des décrets.
7°. Il a été arrêté en outre, que l'Assemblée nationale serait suppliée de faire précéder l'émission des assignats par une fonte de trente millions de nouveaux Billons (monnaie en cuivre) y pour être d'abord et de préférence employés au paiement de la solde des troupes dans les villes frontières ; ce qui conserverait le numéraire dans le centre du royaume, et l'exportation à l'étranger.

L'assemblée arrête pareillement que le présent serait imprimé sans retard et envoyé à M, le président de l'Assemblée nationale, à MM. du comité des finances, du comité de commerce et d'agriculture, à MM. les représentants de la ville de Paris, à l'Assemblée nationale, à M. le maire de Paris, et à MM. les administrateurs de la municipalité provisoire, et enfin aux quarante-sept autres, sections.

Signé par Etienne Leroux, président et J.A. Lavau, secrétaire.

Chez Roland, imprimeur de la Section de l'Oratoire, rue Thibautodé, n°7

Source : Gallica-Bnf, 14 pages, Identifiant : ark:/12148/bpt6k6260845p

10, 11, et 12 septembre : A la constituante, l'on supprime les ordres d'avocats (article 10), « Les hommes de loi, ci-devant appelés avocats, ne devant former ni ordre ni corporation n’auront aucun costume particulier dans leurs fonctions ». Les avocats sont remplacés par des défenseurs officieux, et l'on passe ainsi d'une procédure inquisitoire à une procédure accusatoire. Qui améliore pour beaucoup la défense et la protection des individus par rapport à l'ancienne loi. Le lendemain, se clôture le débat engagé depuis le 7/09 et les cours des aides, les bureaux de finances, les élections (structure administrative des pouvoirs royaux), et les greniers à sel sont abolis. Le 12, l’Assemblée  donne à ses propres archives le nom d’Archives nationales et elles sont considérées comme le « dépôt de tous les actes » touchant à l'organisation du pays, et de « son droit public, ses lois et sa distribution en départements. »

13 septembre : En rade de Brest, se tient l'Assemblée générale de la partie française de Saint-Domingue à bord du navire le Léopard, celle-ci s'adresse aux Français. Malgré des éloges sur les nouveaux pouvoirs en France et la fin du despotisme, sont en cause dans le texte les autorités locales du roi, le comte de Peynier, et son ministre de la Marine, M. de La Luzerne, cité deux fois. (Source : Gallica-Bnf, 15 pages)

14 septembre : A l’Assemblée, l’on promulgue une réforme sur la discipline militaire. Un conseil de discipline est institué dans chaque corps de troupe. La liste des punitions est publiée : corvées, piquet, consigne, salle de police, prison, cachot.

15 septembre : Sur l'île Bourbon (île de la Réunion), l'assemblée générale des représentants s'est réunie, « après avoir pris connaissance de l'imprimé qui lui a été adressé par M. de Cossigny (...) contenant les décrets des 8 et 28 mars de l'Assemblée nationale et les instructions relatives ;  (...) l'assemblée générale a été spécialement convoquée pour décider s'il serait envoyé une députation à Paris et procéder à la nomination d'un ou plusieurs députés ». (Source: Gallica-Bnf, L'Ile Bourbon pendant la période révolutionnaire, E. Trouette, page 141, tome I, Paris-1888)

16 septembre : A Brest, il éclate une révolte au sein des équipages, les marins des navires le Patriote et le Léopard sous les ordres du chef de l'escadre, le comte d'Albert de Rions, se révoltent contre lui. Celui-ci avait déjà connu en décembre 1789 une mutinerie au sein de l'escadre de Toulon (il démissionnera, puis émigrera en 1792). A l'Assemblée, par décret la ville de Niort devient le chef-lieu du département des Deux-Sèvres, et sanctionné quelques jours plus tard (le 21/09) par le Roi.

17 septembre : Le ministre plénipotentiaire d'Espagne dans la capitale, M. Fernan Nuñez écrit à son ministre de tutelle, le comte de Floridablanca : « Hier je suis allé à Saint-Cloud, faire ma Cour à Leurs Majestés, dont la santé est sans changement. Le Roi est sorti à cheval l'après-midi. Mais il ne peut aller au parc de Versailles, car, depuis trois jours, il y a plus de trois mille chasseurs  qui détruisent sa chasse et Sa Majesté ne veut pas qu'ils soient molestés... Sa Majesté a réformé la majeure partie de son équipage de chasse » (Source : Albert Mousset, Un témoin ignoré de la révolution, le comte de Fernan Nuñez, ambassadeur d'Espagne à Paris, de 1787 à 1791, page 115, Paris-1924)

Dimanche 18 septembre : Au château de Saint-Cloud, le famille royale découvre la machine hydraulique de M. Augier.

19 septembre : A Paris, les défenseurs de l'ordre tués à Nancy sont célébrés au champ-de-Mars par des officiers royalistes hostiles à la Révolution. Le journaliste Elysée Loustalot, rédacteur au sein du journal Les Révolutions de Paris décède ce jour.

20 septembre : La Marche lugubre pour les Suisses est un hommage musical pour saluer la mémoire des victimes de Châteauvieux, que le compositeur F.G. Gossec a écrit cette Marche, pour que « Les tambours marquent sourdement le pas ; les violons répondent par un gémissement aigu et plaintif. Ce n'est pas vraiment une mélodie mais plutôt une suite d'accords poignants, qui frappent par l'audace de leur harmonie chromatique. Pour renforcer l'effet, Gossec n'a pas hésité à enrichir l'orchestre militaire de tam-tams, jusqu'alors inconnus ».

21 et 22 septembre : A l'Assemblée, un décret désigne la ville de Saintes comme le chef-lieu de la Charente inférieure (aujourd'hui Maritime), et le lendemain, un décret réglemente l'exercice la justice militaire, il y est question de la création des tribunaux militaires.

22-28 septembre : En Belgique, se déroule sur plusieurs jours des combats, dont la bataille de Falmagne le 22 (et non le 28/09, certaines estampes peuvent induire en erreur), entre les armées impériales autrichiennes et de la révolution brabançonne. Devant le manque d'organisation et les divisions entre patriotes belges, les troupes impériales remportent la victoire. Les jours qui suivront, Louis XVI finira par donner son accord pour que les troupes de l'empereur d'Autriche passe la Meuse par Gizet pour écraser la révolution belge.

23 septembre : Maroc, le sultan alaouite, Moulay Azid suite à la capture de deux navires pirates déclare la guerre au royaume d'Espagne, le lendemain débute le siège de la ville de Ceuta.

24 septembre : A Rome, des cardinaux sont convoqués auprès de Pie VI, celui-ci cherche à se faire une idée sur la situation en France. A cette date, « les positions romaines apparaissent donc beaucoup plus ouvertes qu’on pourrait s’y attendre. Or, plus de six mois séparent cette congrégation de la formulation officielle du refus pontifical. On a parlé du « silence » de Pie VI. Les cardinaux lui conseillaient d’écrire... On a l’impression que la rapidité des décrets parisiens paralyse les réponses romaines. On déclarait attendre une détermination de l’épiscopat français : celle-ci vint, mais Rome attendit encore. » (Source : Open Edition, Rome et la Révolution française, Congrégation du 24/09, de Gérard Pelletier, 2004)

25 septembre : Martinique, M. De Percin un riche planteur prend une part aux guerres intestines de la période révolutionnaire aux Antilles ; il bat avec d'autres planteurs Jean-François Dugommier, chef de la Garde nationale locale à « l'Acajou », lui-même propriétaire en Guadeloupe, les combats font 470 morts. M. Dupont député de Nemours publie son discours sur les assignats, ou sur le projet de créer pour dix-neuf cents millions d'assignats-monnaie, sans intérêt. (Sources : Manioc et Gallica-Bnf, 63 pages).

26 septembre : Dans la capitale, la chambre des députés décrète que soit versé 10 millions de la Caisse d'escompte au Trésor public. Par une lettre datée de ce jour, M. « Bailly, maire de Paris, écrit à Lafayette, commandant de la garde nationale, que les ouvriers des ateliers de charité ravagent tous les jours les vignes du territoire de Charonne. Il en a été avisé par la Municipalité du lieu, et il le prie de faire exercer une surveillance par la garde nationale de la caserne de Montreuil. » (Source : Gallica-Bnf, Histoire des communes annexées à Paris en 1859. Tome 2, page 12, de M. Lucien Lambeau, Paris 1923)

27 septembre : Lettre de MM. de la municipalité de Brest à MM. les membres de l'assemblée générale de Saint-Domingue à Paris. « Vous connaissez sans doute la proclamation du roi, dont nous joignons ici un exemplaire, et vous avez vu, par le décret qui y a donné lieu, qu'on nous fait un crime d'avoir rempli à votre égard les devoirs sacrés de l'hospitalité ; qu'on attribue à l'arrivée du vaisseau leLéopard (...) Les chefs militaires de Brest ont saisi avidement cette occasion pour vous accuser de la prétendue insurrection des marins, et pour nous calomnier aux yeux du pouvoir législatif. (...) M. Hector nous a communiqué ce matin l'ordre du roi, pour transférer à l'île de Ré le détachement que vous avez laissé à Brest, et que nous ne verrons partir qu'à regret. Nous ignorons encore quelle sera à cet égard la décision de MM. les commissaires. Nous vous adresserons incessamment des exemplaires des pièces que nous, avons fait imprimer pour mettre dans le plus grand jour votre conduite et la nôtre. Quelque chose qui puisse arriver, nous ne nous repentirons jamais de l'accueil que nous vous avons fait, parce que nous avons cru que vous le méritiez, et que nous le croyons encore. (...) Vos très humbles et très obéissants serviteurs, les membres du bureau municipal. » Signés par MM. Cavellier, procureur de la commune, Nicolas le Roy, Binard et Béchennec. (Source : Gallica-Bnf, pages 1 à 3)

28 et 29 septembre : L'Assemblée décrète et ordonne l'impression et la communication au Roi de la lettre du directoire du département de Seine et Oise relativement à la destruction du gibier dans le parc de Versailles. Ce décret a été pris en raison des plaintes de Louis XVI... Le jour suivant, un décret est pris pour l'émission de 800 millions d'assignats, dont des coupures de 100 livres (ci-dessous, source : Musée Carnavalet). Des troubles se produisent dans la Midi.


30 septembre : L'archiduc Léopold (II) est proclamé empereur d'Allemagne. En France, parution de la Feuille villageoise de Cerutti, ancien jésuite, ami de MM. Mirabeau, Bailly, Lafayette et Necker.

X - Le mois d’octobre 1790

Vendredi 1er octobre :
Village de Vaugirard, la compagnie des Grenadiers, Volontaires & Chasseurs émet avec la municipalité un brevet après l'élection de son nouveau commandant : « Nous Maires et Officiers Municpaux, sousignés : certifions que M. Dumas capitaine d'infanterie, et Chevalier de l'Ordre Royal et Militaire de St-Louis a été élu commandant de la Garde nationale de Vaugirard (...) a réuni en sa faveur la majorité absolue des suffrages pour ce grade ». A la Constituante, M. Charles Chabroud juriste et député du Tiers pour le Dauphiné est rapporteur des événements survenus les 5 et 6 octobre 1789. (Persée.fr) Lors de cette séance sont lus les rapports des commissaires enquêteurs du Châtelet et M. Chabroud conclue le sien par la mise en cause du comte de Mirabeau et du duc d'Orléans. S'ensuit un âpre et long débat sur les suites judiciaires... sur plusieurs séances et pendant 2 ou 3 jours, qui visera à les dégager de toute responsabilité.

2 et 3 octobre : A l'Assemblée, M. de Mirabeau commence ainsi :
« Ce n'est pas pour me défendre que je monte à cette tribune. Objet d'inculpations ridicules, dont aucune ne m'est prouvée, et qui n'établiraient rien contre moi, lorsque chacune d'elles le serait, je ne me regarde point comme accusé, car si je croyais qu'un seul homme de sens - j'excepte le petit nombre d'ennemis dont je tiens à honneur les outrages - pût me croire accusable, je ne me défendrais pas dans cette Assemblée. Je voudrais être jugé, et votre juridiction se bornant à décider si je dois ou ne dois pas être soumis à un jugement, il ne me resterait qu'une demande à faire à votre justice, et qu'une grâce à solliciter de votre bienveillance, ce serait un tribunal. » Après une long discours Mirabeau termine son intervention sous des applaudissements soutenus, de la tribune à sa place. Le lendemain, c'est au tour du duc d'Orléans d'intervenir : « Compromis dans la procédure criminelle instruite au Châtelet de Paris sur la dénonciation des faits arrivés â Versailles dans la journée du 6 octobre, désigné par ce tribunal comme étant dans le cas d'être décrété, soumis au jugement que vous aviez à porter pour savoir s'il y avait ou n'y avait pas lieu à accusation contre moi, j'ai cru devoir m'abstenir de paraître au milieu de vous dans les différentes séances où vous vous êtes occupés de cette affaire. Plein de confiance dans votre justice, j'ai cru, et mon attente n'a pas été trompée, que la procédure seule suffirait pour vous prouver mon innocence. (...) Ce peu de mots que j'ai mis par écrit, je vais les déposer sur le bureau, pour y donner toute l'authenticité qui dépend de moi. (On applaudit à plusieurs reprises dans la grande majorité de l'Assemblée et dans toutes les tribunes) ».

4 octobre : Le Président des séances de l'Assemblée lit la lettre de M. de La Luzerne, ministre de la marine sur les troubles à Saint-Domingue et sur l'agitation des équipages de l'escadre de Brest. (Source : Persée.fr)

5 octobre :  A Paris, il est pris un
« Arrêté du département des hôpitaux relatif aux abus qui se sont introduits en ce qui concerne l'admission des pauvres dans les ateliers de filature, décidant que le prix du travail sera toujours inférieur à celui des travaux de même nature dans les fabriques particulières et réglant les jours et heures de délivrance des billets d'admission aux pauvres, » signé M. Bailly et les administrateurs. Lettre de M. Amée, secrétaire de la section du Jardin-des-Plantes, à M. de Jussieu, lui signalant la multitude de femmes qui s'amassent aux portes des Bernardins et sont obligées de revenir plusieurs fois, ce qui aigrit leur humeur bilieuse, « ces femmes, à son dire, en tout temps ne valant pas grand-chose et encore moins quand la bile est en fermentation » (sic). (Source : Gallica-Bnf, Alexandre Tuetey. Répertoire général des sources manuscrites de l'histoire de Paris pendant la Rév. fr. Tome 3, page 12)

6 octobre : La Cour prend le deuil pour onze jours suite au décès du duc Cumberland, frère du Roi d’Angleterre, la nouvelle est annoncée par M. Gower (ambassadeur extraordinaire), lors d'un entretien avec Louis XVI.

7 octobre : Le capitaine qui a ramené le vaisseau le Léopard de Saint-Domingue, lors du départ des membres de l'assemblée de Saint-Marc avait été par décret du 20/09 prié de se présenter devant l'Assemblée nationale. C'est ainsi que M. de Santo-Domingo, capitaine de la marine prend la parole devant les députés. Il fera aussi éditer un livret retraçant les raisons et les conditions dans lesquelles il se trouva à partir du 29 juillet de cette année : Conduite de M. de Santo-Domingo, lue par lui-même à l'Assemblée nationale. (Source : Gallica-Bnf, 8 pages)

M. de Santo-Domingo. « Je me trouve dans une de ces positions rares où la conduite la plus pure a besoin d'être justifiée. Je rapporterai simplement les faits, et j'attendrai sans inquiétude la décision de l'Assemblée nationale et du roi. Le 29 juillet dernier au matin, M. de La Galissonnière, capitaine de vaisseau le Léopard, voulut appareiller pour s'éloigner du Port-au-Prince ; l'équipage s'y refusa, en disant qu'il savait que les citoyens devaient être massacrés, et qu'il devait rester pour les secourir : M. de La Galissonnière observa que la partie française de Saint-Domingue était divisée en deux parties, dont l'un tendait à l'indépendance : « Eh bien ! dit l'équipage, restons pour conserver la colonie à la France. » Après avoir inutilement insisté pour le départ, le capitaine descendit à terre avec son état-major. Je me rendis au gouvernement pour prendre les ordres de M. de La Galissonnière ; je voulus retourner à bord, comme le service l'exigeait : il m'ordonna de rester ; j'obéis à cet ordre que je demandai par écrit. La dissolution du comité de l'Ouest ayant été effectuée, en vertu d'une proclamation du gouverneur, j'invitai l'équipage à rentrer dans le devoir, et je me rendis à bord, sur une permission du capitaine. L'équipage écrivit à M. de La Galissonnière, pour l'engager à reprendre le commandement ; je lui écrivis moi-même dans cette vue, et il me répondit qu'ayant perdu la confiance de son équipage, il ne retournerait pas à bord, et qu'il me priait seulement de lui renvoyer ses effets. L'équipage s'opposa à ce renvoi. Mes officiers supérieurs restant à terre, et l'ordre du service m'appelant au commandement, je le pris et je partis. Etant par le travers de Saint-Marc, quatre commissaires de l'assemblée générale de Saint-Domingue me présentèrent un décret qui m'invitait à mouiller dans la rade pour protéger la ville. M. Vincent parut alors, à la tête de l'armée, pour dissoudre par la force l'assemblée générale, qui se détermina à passer en France. (M. de Santo-Domingo fait lecture d'un grand nombre de pièces, à l'appui des faits qu'il rapporte.) Ainsi dans toute ma conduite, je me suis conformé aux ordres de mon capitaine ; j'ai suivi ceux du roi, servi l'humanité, ramené un vaisseau à la nation : je crois avoir bien mérité de la patrie. »

Source : Bib. de Stanford - Archives Parlementaires, séance du 7 octobre au soir

8 et 9 octobre : A Paris, c'est l'installation de la première municipalité constitutionnelle, élue conformément à la loi organique du 21 mai 1790. Probablement parti du port de Bordeaux, Thomas Jefferson quitte la France pour rejoindre New York, tout en pensant lors de son embarquement que « La révolution française sera terminée dans un an ». (Source : Wikisource, Cornelis de Witt, Thomas Jefferson, sa vie et sa correspondance, page 581) Le lendemain, M. Bailly fait un discours lors de la tenue de la première réunion du Conseil général de la Commune : « Le jour est enfin arrivé où la Municipalité de Paris est constituée, où elle va prendre les rennes d'une grande administration. Si la première Municipalité du Royaume a été établie la dernière, elle a été formée avec plus de réflexion et de choix : et elle sera recommandable par son intégrité, par ses lumières, comme elle l'est par l'importance de ses fonctions. » (Source Gallica-Bnf, 4 pages)

10 octobre : A la Constituante, M. Merlin de Douai est élu président de l'Assemblée pour les 15 prochains jours, il est le 35ème à sièger. M. de Talleyrand popose de nationaliser les biens du clergé, en contre-partie de la prise en charge du salaire des religieux. Ce débat durera trois semaines, MM. Malouet, Seyiès et Maury s'y opposeront.

11 octobre : Gilbert de Lafayette refuse toute indemnité comme commandant-général des gardes parisiennes.

12 et 13 octobre : A l’Assemblée, un décret prononce la dissolution de l'Assemblée de Saint-Marc et ses actes sont annulés. M. Pétion fait une intervention au sujet des troubles à  Saint-Domingue. Le jour suivant, M. de Talleyrand présente son rapport sur l'instruction publique et il est décidé de la création d'une commission des monuments (sa première réunion se tiendra le 8 novembre au collège des Quatre-Nations). L'on charge la municipalité parisienne et les directoires des départements de faire l'état des monuments et de veiller à leur conservation. Saint-Domingue, arrivée du jeune Vincent Ogé au Cap Haïtien brandissant l'étendard de la Liberté. (Source : Musée d'Aquitaine).

13 octobre : A Paris, le « Cercle social » fondé par l'abbé Fauchet au début de l'année, qui revendique des droits pour les pauvres et les femmes devient la « Société des Amis de la vérité » et tient sa première séance au cirque du jardin du Palais-Royal (Il s'agissait d'une vaste salle qui n'existe plus, en raison d'un incendie intervenu en 1799). L'abbé Fauchet a lancé un périodique dès 1789. Le tribun du peuple ou Recueil des lettres de quelques électeurs de Paris avant la Révolution de 1789 : pour servir d'introduction aux feuilles de La Bouche de fer, le premier numéro date de janvier 1790, en co-direction avec Nicolas de Bonneville. Il faut aussi noter la parution ce même jour d'un nouveau titre, le Journal de la vente des biens nationaux, qui en tant que périodique du « département de Paris, voulant instruire le public de toutes ses opérations, désire employer le moyen le plus sûr de lui donner connaissance de tous les Biens qui sont en vente. » (Sources : Gallica-Bnf)

14 octobre : Le député Jérôme Pétion de Villeneuve publie son discours sur les troubles de Saint-Domingue. Son avis aux lecteurs précise : « Je répète aujourd'hui l'avis que j'ai mis en texte de mon Discours sur la traite des noirs. Le voici... Je ne me permettrai aucune réflexion sur le décret que l'assemblée nationale a rendu à l'occasion des troubles de Saint-Domingue ; j'expose simplement le discours que je me proposais de prononcer, si la discussion eût été́ ouverte  Je me suis fait un devoir de n'y rien changer ». (Source bibliothèque Manioc, librairie Schoelcher de Fort-de-France).

15 octobre : A l'Assemblée, le Parlement de Paris, la plus ancienne et la plus puissante des cours souveraines de l'ancien régime, prend fin par décret après plus d'un demi-millénaire d'exercice, ou depuis l'année 1254. Le maire de Paris viendra au Palais de Justice poser les scellés sur les archives du Parlement (transférées en 1847 aux archives nationales). Sinon sont élus 48 officiers municipaux par les sections de la capitale.

16 octobre : La veille l'évêque de Soissons, monseigneur de Bourdeilles a annoncé et argumenté son refus de prêter serment sur la Constitution civile du clergé, le Directoire du district de Soissons en conformité avec la loi votée le 12 juillet prend des sanctions contre l'évêque réfractaire. Celui-ci sera déchu de son évéché et de son titre, par le département de l'Aisne, bien qu'élu en février et l'ayant reconduit à cette fonction épiscopale.

17 octobre : ​Au palais des Tuileries, envoyé par le nouvel empereur d’Autriche, Léopold II, le prince Charles de Lichtenstein vient annoncer la nouvelle de son couronnementaux aux époux royaux, et il présente ses lettres de notification.

18 octobre : La Liste de la section des Tuileries est un opuscule de 50 pages qui comprend la liste des citoyens actifs et éligibles de la section, et apporte des précisions sur ses limites et les rues qui la compose et ses plus de 700 membres avec leurs noms, leurs situations et adresse de domicile. Il y est entre autres spécifié les conditions requises pour jouir des droits de Citoyen actif, suivant les décrets de l'Assemblée Nationale, des 14 Décembre 1789, 22 Janvier 1790, etc. :

1°. Etre Français ou devenu Français.
2°. Etre majeur de 25 ans.
3°. Etre domicilié de fait dans le lieu, au moins depuis un an.
4°. Payer 3 livres d'impôt direct, c'est-à-dire, de taille, de capitation, de décimes, de vingtièmes, rachat de corvées, dixieme denier sur les offices, ou taxes payées pour la garde.
5°. N'être point dans l'état de domesticité, c'est-à-dire, de serviteur à gages.
6°. N'être ni banqueroutier, ni failli, ni débiteur insolvable.
7°. Avoir payé sa quote-part des dettes de son père, lorsqu'on a reçu ou qu'on retient une portion quelconque de ses biens, à tel titre que ce puisse être ; à moins que l'enfant marié n'ait touché cette portion de biens pour sa constitution dotale ; avant la faillite ou l'insolvabilité de son pere, notoirement connue.
8°. Avoir fait sa contribution patriotique, quand on a plus de 400 livres de revenu.
9°. Avoir fait le serment civique.

Et aussi les conditions pour être éligibie à la place de Commissaire de Police et à celle des seize Commissaires de Section :

1°. Réunir toutes les conditions néceccaires pour être Citoyen actif.
2°. Payer 10 livres au moins d'impôt direct.
3°. Etre Membre de la Section.
4°. N'être préposé à la perception d'aucun impôt indirect.

19 octobre : La commune de Saint-Mandé est créée à partir du territoire détaché de la commune de Charenton-Saint-Maurice (aujourd'hui la ville de Saint-Maurice).

20 Octobre : Georges Danton se fait porte-parole à l'Assemblée, d'un motion votée par les sections parisiennes qui demandent le renvoi des ministres. Cette pétition est repoussée, mais les ministres démissionnent, sauf M. de Montmorin restant aux Affaires étrangères

21 octobre : A l'Assemblée la demande de Jacques François de Menou de remplacer le drapeau blanc par le drapeau tricolore provoque un débat violent. Le marquis de Foucauld Lardimalie accuse les défenseurs du pavillon tricolore de profaner le drapeau blanc : « Laissez à des enfants ce nouveau hochet de trois couleurs. » A Mâcon, c'est la naissance d'Alphonse de Lamartine, poète, homme politique et auteur de l'Histoire des Girondins en 1847.

22 et 23 octobre : En Charente-Inférieure (aujourd’hui Maritime), il se produit à Varaize une émotion populaire, près de 2.000 citoyens et les curés des villages des alentours en tête s'y rendent, suite à la dénonciation d'un M. Laplanche par le maire de la commune, M. Pierre Latierce. Ce dernier est malmené, l'on a voulu le pendre, puis est pris comme otage. Lors des accrochages qui s'ensuivent, le maire et puis six autres personnes y perdent la vie. Fin novembre, l'Assemblée nationale apportera sa protection et répondra aux besoins de la famille du maire décédé, dont son fils échappa de justesse à la mort. A Paris, le même jour à la Convention est approuvé le décret général sur la désignation des biens nationaux à vendre, sur leur administration et sur l'indemnité de la dîme inféodée et il est présenté avec tous ses articles par M. Chasset rapporteur. (Source : Persée.fr)

24 octobre : A Paris, à la Constituante sur proposition de Mirabeau, il est décrèté que le pavillon tricolore flottera sur les vaisseaux de l'état comme signe de « la sainte confraternité des amis de la liberté ». Et que les cravates tricolores remplaceront les cravates blanches qui garnissaient les drapeaux des régiments.

25 octobre : A l'Assemblée, Antoine Barnave devient le président des séances pour les 15 prochains jours. Ce même mois, l'abbé Grégoire, député du département de la Meurthe, fait publier Lettre aux Philanthropes, sur les malheurs, les droits et les réclamations des gens de couleur de Saint-Domingue, et des autres îles françaises de l'Amérique ; où il dénonce le député Antoine Barnave. (Source : Gallica-Bnf, 21 pages)

26 octobre : Le ministre de la marine M. de La Luzerne envoie sa lettre de démission à Louis XVI et il est remplacé par M. Claret de Fleurieu.

27 octobre : Le député du Tiers du bailliage de Troyes, M. Nicolas Jeannet dit l'aîné est décédé à l'âge de 51 ans.

28 octobre : Au couvent des Jacobins, M. Dubois-Crancé propose une motion pour que soit immortaliser en peinture le Serment du Jeu de Paume, et suggère que ce soit le peintre David qui s'en charge. Ce dernier est présent et intervient pour la première fois, et il s'ensuit un débat sur qui sera sur la toile, sa place, etc.

28-29 octobre : A Saint-Domingue, des affranchis, souvent des métis nommés comme "libres de couleurs" se révoltent. Le meneur et organisateur du soulèvement est Vincent Ogé, lui et ses partisans réclament l'application du décret pris le 8 mars et ratifié par le roi le 28 mars de cette année.

30 octobre : Dans la capitale est représentée pour la première fois L'amour et la raison une comédie en un acte et en prose au théâtre du Palais-Royal, une pièce de Charles Pigault de l'Épinoy dit Pigault-Lebrun (1753-1835), dramaturge et romancier. (Sources : Bnf-Gallica)

31 octobre : A Paris, Gilbert Elliot, comte et député Whig au Parlement anglais et ami du philosophe Edmund Burke, ce diplomate d'origine écossaise fait une conférence devant des députés patriotes (Il sera de 1794 à 1796, vice-roi de Corse...).

XI - Le mois de novembre 1790

Lundi 1er novembre : C'est la date de publication des Réflexions sur la Révolution de France et sur les procédés de certaines sociétés a Londres, relatifs à cet événement d’Edmund Burke (du parti Whig ou libéraux en opposition au Tory anglais, conservateurs). Il décrit l’affaiblissement de la France et n’approuve pas les droits de l’homme et du citoyen. Thomas Paine qui sera député et citoyen français opposera un avis contraire et radical, sur l’universalité des droits et la république. Outre-Manche, quelques clubs républicains existent et selon les opinions, l’accueil de la Révolution est plus ou moins apprécié et provoque des tensions vives. (Source : Gallica-Bnf, 360 pages) A Paris, le jeune duc de Chartres, le futur roi Louis-Philippe Ier est admis au club des Jacobins, il est le fils du duc d'Orléans. « M. de Chartres a été reçu, lundi 1er novembre, membre de la Société des amis de la Constitution. Il est inutile de dire que pour son admission on n’a dérogé à aucunes des formalités d'usage. Seulement il a été très-applaudi en entrant. Voici le discours qu’il a prononcé ; Messieurs, Il y a longtemps que je désirais ardemment d’être admis au milieu de vous ; l’accueil favorable que vous daignez me faire me touche infiniment ; j'ose me flatter que ma conduite justifiera vos bontés ; et je puis encore vous assurer que toute ma vie je serai bon patriote et bon citoyen. » (Source Gallica-Bnf, La Chronique de Paris du 4/11, n°308 - page 1230)

2 novembre : La Constituante établie une loi qui modifie le Code pénal de la Marine.

3 novembre :  Retour dans la capitale, Louis XVI et la famille royale sont de retour de Saint-Cloud et arrêtent les circulations qui étaient devenues régulières entre le château de Saint-Cloud et les Tuileries. La reine Marie-Antoinette s'entretiendra chaque jour avec M. de Fersen.


4 novembre : Insurrection de l'île de France (actuelle île Maurice).

5 novembre : A Paris, au club des Jacobins, sont présents les députés de la Corse, M. André ou Andrea Pozzo di Borgo (en sculpture ci-dessous) intervient et dit à ses membres :




« MESSIEURS,

Flattés de l'honneur que vous voulez bien nous accorder en nous admettant dans le sanctuaire de la liberté parmi les défenseurs et les amis de la constitution, nous ne pouvons mieux répondre aux voeux d'un peuple qui a tant de fois armé son bras et versé son sang pour la défense de la liberté qu'en vous priant de nous accorder l'honneur d'assister à vos séances pendant notre séjour dans cette capitale, pour nous pénétrer de plus en plus des sages principes qui vous ont mérité, à juste litre, l'estime et la reconnaissance de tous les bons citoyens.

Les Corses, réunis aux Français par les liens de l'amour et de la fraternité, ne sont dans leur île qu'une Société d'amis de la constitution ; cependant .permettez Messieurs, que, de retour au milieu de nos compatriotes, nous jouissions leur annoncer que vous agréez l'affiliation d'une Société qu'ils formeront sous vos auspices.

Peut-être que l'Italie, dont nous sommes environnés, ne demeurera pas indifférente au spectacle de la liberté ; peut-être que cette contrée infortunée, qui n'existe plus que dans les monuments de l'histoire, imitant cet exemple, secouera le joug des faibles tyrans qui la déchirent et de la superstition qui l'avilit. »

Source : Gallica-Bnf, 2 pages
Discours prononcé à la Société des amis de la constitution
par MM. les députés extraordinaires du département de Corse



6 novembre : En Dordogne, à Sarlat, le Conseil général décide d'interdire toutes les sociétés affiliées au club royaliste des « Amis de la paix » dans le département. A la Constituante est accueilli une députation Corse, avec MM. Andrea Pozzo Di Borgo et Antonio Gentili, qui prennent respectivement la parole à la barre.

7 novembre : Dans la capitale est joué Nicodème dans la Lune, ou la Révolution pacifique, est une comédie en trois actes mêlée de vaudevilles. « Elle fut jouée sur le Théâtre-Français comique et lyrique de la rue de Bondy (il était situé au coin de la rue de Lancry) (...). L'auteur était un homme d'un esprit original, qui fit du bruit pendant quelque années et dont on ne se souvient plus guère maintenant. Louis-Jacques Beffroy de Reigny, plus connu sous le nom de Cousin Jacques dont il signa ses productions, était né à Laon en 1757. Il avait eu pour camarades au collège Louis-le-Grand Camille Desmoulins et Robespierre. » (Source : Gallica-Bnf, Théodore Muret, L'Histoire par le théâtre, 1789-1851, Paris, 1865)

8 novembre : M. de Lafayette fait un discours au Corps municipal, et le comité sur les monuments (ou pour la préservation du patrimoine) composé de 33 membres est réuni pour la première fois à la bibliothèque des Quatre-Nations.

9 novembre : A l'Assemblée, le Président, en séance du soir, précise que « L'ordre du jour est la discussion du projet de décret présenté par le comité d'agriculture et du commerce, relativement au canal du sieur Brûlée. » qui a pour but de le faire parvenir jusqu'au nord de la capitale. M. Poncin rapporteur du comité d'agriculture et de commerce précise que « L'Assemblée nationale a décrété, le 19 octobre, que M. Brûlée est autorisé à ouvrir à ses frais un canal de navigation qui commencera à la Beuvronne, près le pont de Souilly, et arrivera entre La Villette et La Chapelle, dans un canal de partage. » S'ensuit une présentation du projet et ses dimensions, la question des indemnisations allouées au sieur Brûlée, et des compléments au décret pris en sa faveur. Mais il faudra attendre 1802 au frais de la Ville de Paris pour que commence les travaux de ce qui adviendra le canal de l'Ourcq. Dans la capitale, il est joué Le procès de Socrate, ou Le régime des anciens temps  de J.M. Collot d'Herbois, une comédie en trois actes et en prose représentée pour la première fois au théâtre de Monsieur. (Source : Gallica-Bnf)

10 novembre : A Nantes, à l'initiative des Jacobins locaux, une messe de requiem est célébrée à la mémoire des victimes des massacres de Nancy.

12 et 13 novembre : A Paris, le marquis de Castries se bat en duel avec le député Charles Lameth, qui sort de l'affrontement blessé. Le lendemain, l'hôtel de Castries demeure du marquis est attaqué et pillé, rue de Varenne (plan ci-contre).  Aux cris de « Tous chez le duc! Vengeons Lameth! », ils sont dix mille sous les fenêtres de l'hôtel particulier avant les actes de saccage. Pas loin, se tient Lafayette observant avec des troupes et ne donne aucun ordre d’intervention. Le marquis de Castries au courant du danger sort épargné de cette émotion populaire, il s’était réfugié préalablement chez une amie. Et donne lieu à un débat à l'Assemblée nationale le même jour. A lire, la dévastation de l'hôtel de Castrie avec une proclamation de la municipalité parisienne. (Source Gallica-Bnf, 4 pages)


14 novembre : Discours prononcé au Club des Jacobins par un curé, électeur du district de Melun. « Encore quelques années, et des Pontifes défintéressés, patriotes et populaires, des curés vertueux et plus instruits que ne l'étaient la plupart de ceux des campagnes, apprendront à leurs habitants à bénir la révolution, et ils la béniront avec eux. Administré par des citoyens vivant avec lui, le vertueux laboureur acquittera gaiement des impôts, dont il connaîtra l'emploi ; il oubliera ses malheurs. Heureux dans leurs humbles foyers, les manouvriers (saisonniers) des campagnes ne regretteront plus la fécondité de leur mariage ; ils éléveront des citoyens à la Patrie ; les lumières ne seront plus concentrées dans les villes, et la France ne sera plus qu'une grande famille, dont les membres auront les mêmes droits, les mêmes motifs d'encouragement, etles mêmes assurances de parvenir aux honorables fonctions fixées par la Constitution. » Signé PICHONNIER, Curé d'Andrezel. (Source : Gallica-Bnf, page 8)

15 novembre : A Saint-Domingue, en raison de ses idées anti-esclavagistes, le commandant du fort Dauphin est arrêté.

16 et 17 novembre : M. du Portail est nommé ministre de la guerre au lieu de M. de la Tour-du-Pin. La Gazette Universelle ou Le Moniteur Universel annonce que le 7 septembre dernier que les Français établis à Smyrne ont prêté le serment civique et arboré la cocarde tricolore, et fait grande sensation... A la Constituante, un décret organise la Corse en un seul département. Le jour suivant est abordé l'organisation du tribunal de cassation. Sur la proposition de M. Duport, l’Assemblée décrète que le nombre des membres de ce tribunal sera égal à la moitié des départements, et que les départements, qui éliront en premier lieu, seront déterminés par le sort.

18 novembre : A Carpentras, il est mis un arrêt aux signes distinctifs pour les Juifs (chapeaux jaunes).

19 novembre : Adressé à l'Assemblée et à la commune de Paris, il est présenté un mémoire pour l'Hôpital général de Paris et pour celui des Enfants trouvés. « L'obligation de nourrir les pauvres des hôpitaux est indépendante des changements qui peuvent survenir dans leur administration, et comme la municipalité de Paris n'a pas manifesté de vœu plus cher que celui de venir à leur secours, ces observations n'ont eu pour objet que de seconder les vues bienfaisantes, en lui exposant la situation et les besoins de l'Hôpital général et de celui des Enfants trouvés. M. le maire et MM. les administrateurs de la commune y verront aussi quelle est la nature des soins qu'exigent ces grands établissements, et l'étendue des secours qu'il sera nécessaire de solliciter pour eux, de la justice et de l'humanité de l'Assemblée nationale. »

20 novembre : A Paris, Jan Potocki, écrivain et savant polonais, rencontre le baron de Staël, ambassadeur de Suède, ils évoquent la possibilité d'une candidature suédoise au trône de Pologne. A l'Assemblée, sur le rapport de M. Barrère, le château de Vincennes est mis à la disposition de la commune de Paris pour y renfermer les détenus, les prisons de cette ville étant devenues insuffisantes. Est publiée la Lettre de J.P. Brissot à Barnave, cette lettre fait néanmoins une centaine de pages et se concentre sur la situation à Saint-Domingue. (Source : Gallica-Bnf)

Dimanche 21 novembre : Le nouveau Garde des Sceaux ou de la Justice est François Duport-Dutertre sur proposition de Lafayette en remplacement de Jerôme Champion de Cicé. Dans la Chronique de Paris du jour (Gallica-Bnf - page, 1298), on peut lire dans un articulet, que Claude Mansard, de la Société fraternelle des patriotes des deux sexes créée en février, bien que non cité donne des cours aux Jacobins : « Un maître de pension par un sentiment de patriotisme, rassemble, tous les soirs dans une salle des Jacobins, rue St-Honoré, plusieurs artisans, et des marchands de fruits et légumes du quartier, avec leurs femmes et leurs enfants, pour lire et interpréter les décrets de l'Assemblée nationale. Il apporte à cet effet, chaque fois un bout de chandelle dans la poche, avec un briquet et de l'amadou ; et dernièrement la lumière sur le point de manquer, plusieurs assistants se cotisèrent pour faire l'emplette d'une autre chandelle, qui fit durer la séance jusqu'à dix heures du soir, à la grande satisfaction de l'assemblée. »

22 novembre : Belgique, retour des armées autrichiennes.

23 novembre : A Uzès, des rixes font 32 victimes. A l’Assemblée, l'on décide de la création d'une contribution foncière répartie sur toutes les propriétés à raison de leur revenu net.

24 novembre : La Constituante promulgue une loi relative à la suppression des anciens receveurs généraux et à la nomination des receveurs des districts. Elle ordonne que tous les offices de receveurs généraux, trésoriers généraux et de receveurs particuliers des impositions, précédemment créés dans les provinces, seront supprimés à compter du 1er janvier 1791. Il est décidé que le recouvrement des impositions qui seront établies par des receveurs nommés par les districts,éligibles pour 6 ans, et rééligibles, et devant fournir un cautionnement. Ils encaisseront les fonds des collecteurs communaux.

25 novembre : A Saint-Domingue, il éclate la première révolte générale des populations noires.

26 novembre : Louis XVI donne au baron de Breteuil des pouvoirs pour négocier avec les cours étrangères les conditions de leur intervention.

27 novembre : A la Constituante, il est arrêté que tous les ecclésiastiques sont astreints à la prestation publique du serment, il sort renforcé dans son exécution des dispositions en relation avec la « Constitution Civile du Clergé » :

« Article 1er. — Les évêques et ci-devant archevêques, et les curés conservés en fonctions, seront tenus s'ils ne l'ont pas fait, de prêter le serment auquel ils sont assujettis par l'article 39 du décret du 24 juillet dernier, et réglé par les articles 21 et 38 de celui du 12 du même mois, concernant la Constitution civile du clergé. En conséquence, ils jureront, en vertu de ce dernier décret, de veiller avec soin sur les fidèles du diocèse ou de la paroisse qui leur est confiée, d'être fidèles à la nation, à la loi et au Roi, et de maintenir de tout leur pouvoir la constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le Roi ; savoir : ceux qui sont actuellement dans leur diocèse ou leur cure, dans la huitaine ; ceux qui en sont absents, mais qui sont en France, dans un mois ; et ceux qui sont en pays étrangers, dans deux mois ; le tout à compter de la publication du présent décret ».

Source : Gallica-Bnf - Lucien Misermont - Paris 1917
Serment à la constitution civile du clergé. Page 11.



29 novembre : A la chambre des députés, le député Barnave présente un rapport du comité des colonies : « Il y a peu de temps que vous vous êtes occupés de la situation de Saint-Domingue; aujourd'hui, celle de la Martinique n'est pas moins alarmante. (...) C'est vers la fin de l'année dernière et au commencement de celle-ci que les premiers troubles ont éclaté. Je ne vous rappellerai pas ce qui s'est passé pendant l'administration de M. Vioménil, M. Damas (gouverneurs) a comme lui soutenu les habitants. A l'arrivée de vos décrets la joie fut universelle ; mais, le jour de la Fête-Dieu (3 juin), une malheureuse circonstance renouvela les divisions. » Ensuite, Antoine Barnave appui l'idée d'acheminer des troupes aux colonies, il est aussi décidé d'envoyer des commissaires aux petites Antilles, en Martinique notamment ; et selon le Journal des Amis de la Constitution : « le roi est prié d'envoyer quatre commissaires (...) 6.000 hommes de troupe avec quatre vaisseaux en ligne ». Il est décidé aussi l'ouverture d'un second entrepôt à la Trinité et que les navires étrangers pourront hivernés à Fort-Royal (Fort-de-France).

30 novembre : En Belgique, la ville de Charleroi est reprise par les troupes Autrichiennes. Sur les côtes de l'île de Groix (Morbihan) un navire négrier Nantais, le Passe-partout fait naufrage. Périssent le capitaine, le pilote et deux hommes d'équipage. (Source : archeosousmarine.net)

XII - Le mois de décembre 1790

Mercredi 1er décembre : A l’Assemblée, l’impôt sur le sel, c'est-à-dire la « gabelle » est supprimée. Les décrets du 27/11 et de ce jour voit la naissance du Tribunal de cassation, seul habilité dorénavant à se prononcer sur les lois, retirant ainsi aux 13 Parlements toute prérogative ou regard sur les législations, et entraînant de fait leurs disparitions. Paraît le numéro un, du périodique La Feuille du jour, de M. Pierre-Germain Parisau (1754-1794), acteur, puis dramaturge et journaliste sous la Révolution. Ce quotidien faisait sa première page avec l'actualité des théâtres parisiens, il perdurera jusqu'en 1792. (Sources : Gallica-Bnf)

2 décembre : L'armée autrichienne entre dans Bruxelles et met fin aux Etats-Unis de Belgique.

3 décembre : Louis XVI lance un appel au roi Frédéric-Guillaume II de Prusse pour contrer la Révolution. Les Anglais disent non à la proposition française pour la fixation d'une unité des poids et mesures (le système métrique n’est pas encore né, on calcule en toise par exemple).

4 décembre : A la chambre des députés, une lettre de Louis XVI est lue, où il annonce le remplacement du contrôleur Général des Finances, M. Lambert, qui lui a donné sa démission, par M. Valdec de Lessart.

5 décembre : Paris, la Constituante, sous la présidence de M. Pétion, les droits de contrôle des actes civils et judiciaires sont abolis et création d'un droit d'enregistrement. Et l'on commence à discuter de la Garde nationale, Robespierre qui souhaite intervenir est rapidement interrompu et ne peut s'exprimer devant l'assemblée. Aux Jacobins, Robespierre s’oppose à Mirabeau contre l’exclusion des citoyens « passifs » de la Garde nationale. A Perpignan, des individus tirent sur les jacobins locaux. Le duc de la Rochefoucauld-Liancourt, en charge du comité de mendicité adresse un courrier au ministre de la Justice, M. Duport-Dutètre sur l'état lamentable des maisons de Bicêtre et de la Salpêtrière. Ce dernier lui répondra favorablement plusieurs jours après, et se rendra en sa compagnie visiter à Gentilly, la Maison de Bicêtre le 12 janvier 1791.

6 décembre : Bordeaux, création d'une caisse patriotique par le club local des Jacobins, elle est chargée d'échanger les assignats contre des petits billets de confiance. A l'Assemblée débute les débats sur l'Affaire de Nancy.

7 décembre :  L'Assemblée après avoir entendu le rapport de M. Brûlard de Sillery sur l'affaire de Nancy, qui lui a été fait au nom de ses comités militaires, des rapports et des recherches, décrète ce qui suit à l'article 1er : « L'Assemblée nationale abolit toutes les procédures commencées tant en exécution de son décret du 16 août dernier, qu'a l'occasion des événements qui ont eu lieu dans la ville de Nancy le 31 du même mois ; en conséquence, tous citoyens et soldats détenus dans les prisons en vertu des décrets décernés par les juges de Nancy, ou autrement, à raison desdits événements, seront remis en liberté immédiatement après la publication du présent décret. »

8 (et 26) décembre : M. Jean-Sylvain Bailly, Maire de Paris ré-organise l'administration de la police parisienne à l'échelle du département, ci-dessous le texte avec ses administrateurs et les fonctions qui leurs sont dévolues.


ADMINISTRATION DE POLICE 



MUNICIPALITÉ DE PARIS
MAIRE, M. BAILLY. (en portrait) - ADMINISTRATEURS, MM. THORILLON, JOLLY, PERRON ET MAUGIS.
« Les Administrateurs, sous la surveillance de M. le Maire, connaîtront concurremment de toutes les affaires du Département. Ils décideront ensemble toutes les affaires difficiles, et concourront, ensemble ou séparément, à la sûreté et tranquillité publiques, préviendront ou feront cesser les rixes y batteries et attroupements. Un jour de chaque semaine, et à l'heure qu'ils conviendront, chacun d'eux fera le rapport des affaires qui ont besoin du concours de tous. La nature de ces affaires fera déterminée et jugée par chacun d'eux. Toutes les fois qu'ils le jugeront convenables, ils appelleront vingt-quatre Commissaires de Sections, et vingt-quatre Commissaires de Police, pour conférer sur les opérations, et les changements ou précautions nouvelles, que les circonstances pourraient exiger.

Les vingt-quatre Commissaires de Sections seront pris dans les vingt-quatre Sections, qui n'enverront pas les vingt-quatre Commissaires de police. Chaque semaine, un Administrateur tiendra l'audience du Département, et répondra aux demandes des Sections, lorsqu’elles seront pressées, ou qu'elles n'auront pas de Département fixe. Chaque semaine, un Administrateur fera la visite des prisons et maisons d'arrêts, aux termes des décrets. Ces deux services se feront tour-à-tour.

L'Administrateur de service aux prisons pourra se dispenser de venir au Département ; mais alors, le Secrétaire des parties qui lui feront confiées ira, si besoin est, lui en rendre compte. Un ou plusieurs Commis iront travailler chez lui, s'il est nécessaire. Tour-à-tour, un des deux Administrateurs qui ne seront point de service, fait pour l'audience du Département , soit aux prisons, sera tenu de se trouver toute la journée au Département, pour seconder l’Administrateur de semaine. Et le plus ancien des Administrateurs ira présider le Tribunal de police en l’absence de M. le Maire.

Il y aura essentiellement un bureau central où toutes les affaires du Département seront enregistrées avec notes des décisions, de manière que le Public, et les Administrateurs auront la facilité d'y prendre connaissance de tout. Le chef de ce bureau distribuera à chaque Administrateurs les affaires qui lui seront plus particulièrement réparties, ou les remettra aux divers bureaux, si l’Administrateur l'ordonne ainsi.

A ce bureau central seront remises toutes les affaires résultantes des requêtes et mémoires qui, aux termes des décrets, doivent passer au bureau de renvoi établi chez M. le Maire. Ensemble tous les procès-verbaux et demandes des Sections qui seront adressées directement au Département de police.

Tous les matins, le chef du bureau central sera tenu de représenter à l'Administrateur de service la feuille de renvoi des bureaux de M. le Maire. Il est entendu que les affaires pressées seront envoyées directement à l'Administrateur qui va s'en trouver chargé par la distribution ci-après. Elles pourront aussi être remises au bureau central, qui, au moment, les répartira dans les divers bureaux, si l'Administrateur à qui elles sont attribuées l'exige ou est absent.

*

DIVISION des affaires du Département entre Messieurs les Administrateurs
qui tous concourront à la sûreté et à la tranquillité publiques.


PREMIERE DIVISION

M. THORILLON, Administrateur, rue des Fosses-St-Marcel, n°5. Connaîtra particulièrement des affaires concernant : Le militaire, les recrues pour l'armée, et des soldats de toutes armes en semestre, et particulièrement la garde nationale Parisienne et le régiment Provincial de Paris. Le balayage et enlèvement des boues et neiges. L'arrosement. L'illumination. Les incendies. Les pompes et pompiers, tant pour ce qui regarde les ordres à donner en cas d'incendies que pour l'achat des pompes, l'entretien, la solde, l'habillement, équipement des pompiers. Wauxhals. Panthéon. Bals publics. Clubs, Cirques. Promenades publiques, Places, Rues, Carrefours, Édifices, Églises Cimetières, pour le bon ordre, la décence, les mœurs et la sûreté. L'inspection des Pharmacies et Drogueries, pour assurer l'exécution des règlements faits et à faire.

DEUXIEME DIVISION

M. JOLLY, Administrateur, rue de l’Observance, Connaîtra particulièrement des affaires concernant : Les Spectacles. La Librairie, Imprimerie. Gravures. Colporteurs. Marché, et poste aux chevaux. Les voitures publiques, et de Places. Les Postes et Ménageries. Halles et Marchés. Les Ouvriers et Domestiques. Nourrices et Recommanderesses. Le dénombrement des habitants de Paris.

TROISIEME DIVISION

M. PERRON, Administrateur, Quai et vis-à-vis du pont de la Tournelle, Connaîtra particulièrement des affaires concernant : Les Hôtels-Garnis. Les Auberges, Logeurs, Cassés. Vagabonds, Escrocs, Mendiants, dénonciation de vols. Etrangers, Juifs. Maisons de jeux, assemblées nocturnes. Femmes publiques. Empiriques. Passeports. Correspondance avec les Maréchaussées, les Ministres, Départements et Districts du Royaume.

QUATRIEME DIVISION

M. MAUGIS, Administrateur, place Dauphine, Connaîtra particulièrement des affaires concernant : Les Corps et Communautés. Poids et mesures. Les Fripiers. Les Revendeurs. Halles aux toiles et aux draps. Les Boucheries et Tueries. Les Boulangeries. La Bourse, les Loteries. Les Barrières, et tout ce qui est relatif à la perception des droits. »
Fait et arrêté au Département de Police les 8 et 26 Décembre 1790. Signé, BAILLY, Maire. THORILLON, JOLLY, PERRON et MAUGIS, Administrateurs.

Source : Gallica-Bnf, Municipalité de Paris. Administration de police.

Jeudi 9 décembre : La FEUILLE DU JOUR, à la première page, l'on découvre les spectacles joués à Paris :

Opéra. Renaud,etc. la Chercheuse d’Esprit.
Théâtre de la Nation. L'Ecole des Pères, etc. le Tombeau de Défilles.
Th. Italien. Euphrosine, les Dettes.
Th. de Monsieur. Azélie, et le conseil imprudent.
Th. du Palais-Royal. Le Café de Rouen, le Duc de Momouth, et le Seigneur supposé , etc.
Th. de Mlle Montansier. Le Sourd, ou l’Auberge pleine, et Spinette et Marini.
Grands-Danseurs du Roi. Capana, Madame de Travers, etc. la Valise perdue etc.
Ambigu-comique. L’Auto-da-Fé, le Sourd, et le nouveau Doyen de Killerine.
Th. de la comédie lyrique. Le Berceau d’HenriIV, et les Vœux forcés.

10 décembre : A Lyon, un complot royaliste échoue. Signature au nom de l’Autriche, la Prusse et des Etats généraux de Hollande de la convention de La Haye et met un arrêt aux troubles en Belgique.

11 au 14 décembre : A Aix, l'annonce de l'existence d'une société monarchique se répend, la rumeur d'un projet contre-révolutionnaire dans la ville poussent les clubs patriotiques à la colère et des heurts éclatent ; le 14, l'on dénombre au moins 4 soldats pris pour cible et décédés suite à une pendaison en public.

12 décembre : L'empire d’Autriche restaure son autorité sur le pays Brabant, seule la ville de Liège échappe à ce retour à l'ordre. En France, c'est la création du papier timbré. A Saint-Domingue, l’assemblée du Cap décide d’élever un buste à Antoine Barnave comme « défenseur de la colonie ».

13 décembre : A Paris, après sa création, le 5/12, et son installation au Palais de Justice, le 9/12,  le dit Tribunal des Dix procède à sa première audience (affaires criminelles).

14 décembre : Autriche, Léopold II adresse une note officielle de protestation à la France au nom des traités de Westphalie (1648). A Aix-en-Provence, l'avocat monarchiste Pierre Pascalis sous les verrous avec M. Guiramand, d'une opinion comparable, les deux hommes sont pendus à un réverbère par la foule qui s'est introduite de force dans la prison de la ville.

15 au 21 décembre : A l’Assemblée, il est décidé la suppression de la vénalité des offices ministériels. Le lendemain, il est accordé 15 millions aux ateliers de charité. Le 18, toutes les rentes foncières sont déclarées rachetables, il est défendu de créer à l'avenir des redevances foncières non remboursables. Le 20, sont supprimés les « apanages » : domaine foncier propre d'un prince et bénéficiant du revenu exclusif, sans héritier une principauté d’apanage revenait de droit à la Couronne. La règle fut édictée sous les Plantagenêt au XIIIe siècle. Le lendemain il est demandé la construction d'une statue de Jean-Jacques Rousseau. Et l’on versera à Thérèse, sa veuve, une pension annuelle de 1.200 livres.

22 décembre : Pierre-François Lepoutre, député du bailliage de Lille, écrit à son épouse : « Vous me parlez du serment que devront prêter les évêques et curés, que ce serment trouble un peu les curés des postes de nos environs, je n’en suis nullement trompé, ma chère Amie. Ils voient bien qu’ils vont perdre toute leur autorité civile et je crains bien que leur obstination ne leur cause des chagrins plus tard. » (Source : OpenEdition, Correspondance du député Lepoutre à Paris, du 1/12/1790 au 30/06/1791)

23 décembre : Naissance de François Champollion à Figeac.

Vendredi 24 décembre : L'Assemblée décrète le brûlement des assignats défectueux (sanctionné le 29/12 par le roi).

Dimanche 26 décembre : Louis XVI décide de sanctionner la Constitution Civile du Clergé. Outre-rhin, se déroule la rencontre entre Haydn et Beethoven.

27 décembre : A la chambre des députés, 59 élus membres du Clergé prêtent serment. Le député de Rouen, Jacques-Guillaume Thouret (avocat), dans le cadre des débats sur les questions judiciaires, interpelle sur la police de sûreté : « cette police est nécessaire ; et il suffit de dire qu'il est indispensable qu'elle soit expressément constituée. Mais sur quels principes doit-elle l'être? » M. Duport-Dutertre, ministre de la Justice fait la lecture des deux premiers articles. Le député Jérôme Pétion, un peu après une intervention de Robespierre sur la police, le juge de paix et leurs rôles respectifs au sujet de la levée d'un coprs (décès à domicile) ; Pétion s'inquiète de : « L'argument par lequel le préopinant vient de terminer son discours me paraît spécieux ; mais il ne suffit pas pour déterminer l'Assemblée. La concurrence qu'on vous propose d'établir comme moyen d'émulation serait plutôt un objet de rivalité et de haine entre des officiers dont les fonctions sont naturellement incompatibles. Un militaire chargé d'exécuter la loi, habitué à agir sur-le-champ et sans examiner pourquoi, n'est pas l'homme à qui on peut confier les fonctions difficiles de la police. (On applaudit.) Quand la loi est obligée de confier à un officier public l'exercice arbitraire d'un pouvoir redoutable, elle doit choisir l'officier qui a la confiance de ses concitoyens, qui a été élu par eux. Je ne vois, au contraire, dans l'officier de maréchaussée aucun caractère qui inspire la confiance. Il est nommé par le roi, il est amovible (révocable) ; enfin il a cet esprit militaire si incompatible avec les fonctions de la justice de paix. Je crois donc que, s'il était nécessaire de faire concourir deux officiers à l'exercice de la police, il faudrait plutôt nommer un second commissaire par canton que d'employer les officiers de la maréchaussée. » Cinq articles sont débattus au cours de la séance.

28 décembre : A la Constituante, M Talleyrand, évêque d'Autin, et MM. Le Borlhe le Grandpré, et Montjallard, tous les deux curés prêtent serment chacun leur tour à la tribune, en raison du décret du 27 novembre dernier. Ensuite, M. Eugène Gossuin, député de la généralité de Valencienne, pour le comité de constitution propose de nommer et établir des juges de paix dans plusieurs départements et localités, son décret est approuvé sans débat.

29 décembre : A Paris, Camille Desmoulins, âgé de 27 ans, après avoir adressé une lettre demandant la main de sa fille (17 ans), le 18/12, à son futur beau-père, il épouse Lucile Laridon-Duplessis à l'église Saint-Sulpice sous les offices de l'abbé Bérardier, qui exhorte Camille Desmoulin à respecter davantage la religion... (le prêtre est un ancien professeur du Collège Louis-le-Grand). Jean-Georges Lefranc de Pompignan, député du haut clergé pour le Dauphiné aux Etats Généraux ayant rejoint le Tiers, décède à Paris dans la paroisse de Saint-Sulpice.

Mercredi 30 décembre : A l'Assemblée, il est décrété, que toute nouvelle invention devient la propriété de son auteur, lui garantissant la pleine et entière jouissance financière de sa découverte. Dans la capitale, au Cercle social ou au sein de l'Assemblée fédérative des Amis de la Vérité Me Etta Palm, née d'Aelders se présentant comme une baronne hollandaise fait lire un discours Sur l'injustice des loix en faveur des Hommes, au dépens des Femmes, elle réclame l'égalité des droits politiques.


31 décembre : A la Constituante, le député M. Vincent Ramel de Nogaret (opposant aux départements), l'élu de la sénéchaussée de Carcassonne fait approuver le décret suivant : « L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des Reports, décrète : qu'attendu la cessation des fonctions judiciaires de la municipalité de Toulouse, par l'effet des décrets concernant la nouvelle organisation des tribunaux, sanctionné par le Roi ; l'information attribuée par le décret du 26 juillet dernier à la municipalité de Toulouse relativement aux troubles qui ont eu lieu à Montauban, sera continuée devant le tribunal de district de Toulouse ; à cet effet, les minutes de toutes les procédures faites à cet égard devant les Officiers Municipaux de la dite ville, seront transportées au greffe du dit tribunal ». Le député François Gossin, élu du bailliage de Bar-le-Duc fait prendre un décret sur la création de tribunaux de commerce dans les villes portuaires où étaient les Amirautés, et de même à Troyes et à Chartres.
 
à suivre...



Suite sur la Révolution française
L'année 1791, première partie

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