Dans les locaux de "L'écho de Paris" : Conférence de Mr Bedel, au premier rang et au fond ?
Par Lionel Mesnard, le 04 août 2015
J’ai toujours gardé une grande admiration pour un résistant
d'aujourd'hui disparu, un ancien instituteur normand. Il
m’avait marqué au cours d’un échange, il avait fait le choix de se
taire sur le passé de nombreux collaborateurs de sa région, il venait de détruire
les derniers papiers qu’il avait pu conserver de la période de la
seconde guerre mondiale. Il avait été ce que l’on nomme une tête de
pont de la résistance dans son département. Beaucoup d’éléments écrits
de la sorte ont fini au feu et échapperont aux historiens, si cela est
regrettable pour l’histoire, son geste était celui d’une volonté de ne
pas réveiller de vieux démons ou de tourner la page.
Avec le temps je comprends mieux sa démarche. Si je cite cet élément de
mémoire au demeurant anodin, la prise en compte des réalités
historiques et de fait la circulation de la mémoire n’est pas un objet
simple. Né après 1945, de la fin du baby boom, l’évocation de cette
période commençant avec l’État Français du maréchal Philippe Pétain à
la libération du pays fut pour ma génération un sujet peu abordé, voire
un tabou familial ou de société, car cette histoire a traversé à l’époque toutes les familles
vivant sur le territoire national et colonial. Comme rien n’est jamais
tout blanc ou tout noir, nous pouvons parler d’une période sombre de
l’Histoire de France.
Il
a fallu, et ce ne fut pas la première fois,
qu’un historien étranger dans les années 1970 vint plus que troubler
l’histoire officielle et les mythes d’une France coupée en deux, entre
d’un côté les résistants et de l’autre les collabos (Robert Paxton).
Mais à l’examen du nombre existant de chaque part, le nombre des
impliqués ne dépassaient pas vers 1943, 200 à 250.000 personnes
actives. Si l’on distingue de cela ce que l’on nommait la résistance «
passive », qui a pu jouer néanmoins un rôle non négligeable. Aussi,
faut-il noter, de rares manifestations ont pu rassembler à Paris
jusqu’à 20.000 protestataires face à certaines mesures arbitraires de
l’occupant, et divers ou des multiples faisceaux de solidarité
permirent de sauver les deux tiers de la population juive d’échapper à
l’extermination.

Affiche de Philippe Pétain
Si, les lois anti-juives promulguées en octobre 1940 sont allées au-delà des
critères des nazis pour l’appartenance à une «race», qualifiée de juive. Les Juifs en
France connurent un secours que d’autres n’eurent pas comme les
communautés de l’Est de l’Europe, qui ont été quasi éliminées comme en
Pologne, Hongrie, et d’autres pays. Le plus délicat n’est pas de
savoir si le gouvernement de Vichy s’est plié aux ordres des occupants.
Mais pourquoi certaines anticipations, comme la chasse aux juifs et aux
francs-maçons ressembla pour beaucoup à l’idéologie nazie dominante
et imposée du moment ?
J’ai voté deux fois François Mitterrand et toujours au deuxième tour,
je n’ai jamais été mitterrandiste, mais toujours étonné par son goût du
secret, son habilité et ses paradoxes. Dire que tout m’éloignait
politiquement, probablement. C’est bien plus tard que j’ai tenté de
comprendre l’homme, sa vie et son parcours, quelques années après son
décès, puis il y a peu en tombant sur ses premiers écrits
journalistiques. Le personnage politique ne m’a jamais fasciné,
mais difficile de penser à certaines périodes de notre histoire, sans
s’interroger sur celui nommé : le sphinx ?
A partir de rapides
recherches, je n’ai pas découvert une nouvelle facette de la jeunesse
de l’ancien président. Mais un meilleur éclairage de ce qu’il faisait
lors de ses premières années parisiennes et la nature de ses relations.
Je n’avais pas lu le livre de Pierre Péan à ce sujet (Une jeunesse
française - 1994), car à l’époque où sortit cet aspect peu connu de sa
vie, ce n’était pas pour moi et d'autres une véritable nouvelle. Mais
pendant des
années ce fut un grand flou, et à mon avis une grande erreur de sa
part. Il aurait fallu bien avant crever l’abcès. Un terreau de
« on-dit », de faits jamais vérifiables pouvaient laisser croire à de
plus
grands égarements ou sympathies pour la « Révolution nationale ».
Cette polémique semblait même un peu tardive ou utile à certaines
indignations de façade dans le camp socialiste (Manuel Valls et Pierre Moscovici toujours en activités), mais de tels éléments
comme la décoration de la francisque attribuée au printemps 1943. Alors
qu’il avait été désigné à une fonction administrative sous la férule
de Pétain aux prisonniers de guerre, et autres proximités à l’extrême
droite - n’étaient pas en soit une nouvelle, - et cet aspect caché
n’avait
pas donné jusqu’alors à de véritables recherches sur son passé. Depuis
nous savons que François Mitterrand a usé de ses fonctions pour aider
à la création de fausses pièces d'identité et rejoignit après un éclat
public (salle Wagram à Paris) la clandestinité et la résistance, à son
tour avec de faux papiers au nom de "Morland".
Le seul
qui m’avait apporté un indice fut par un historien du mouvement ouvrier et sociologue qui me
parla de ses relations sympathisantes avec une section parisienne, du
16ème arrondissement de l’Action française, mais à l’époque je n’avais
pas fait tous les liens avec ce courant spécifique et puissant dans les
années 1930, et qui au moment de la collaboration allait se diviser sur sa
participation, et une partie rejoindre la résistance.
Ce silence longtemps porté hors allusion en de très rares entretiens,
dont un de 1968 où le sujet fut abordé releva des non-dits et rumeurs
par la suite. Une voie ouverte à la propagation de propos malveillants
et à faire douter plus d’un sur son honnêteté intellectuelle et surtout
son rapport souvent ambigu comme porte-voix du socialisme hexagonal. Si
à la sortie du livre de Pierre Péan la stupéfaction fut grande,
est-on sûr pour autant qu’elle permit de comprendre un parcours
singulier, et une certaine complexité de l’époque ? rien n’est moins
sûr.
Toute l’extrême-droite française n’a pas collaboré avec le régime nazi,
une partie même allait participer à la libération de 1943 à 1944, dont
l’énigmatique François Mitterrand et le concernant dès son retour en
France de captivité. Son paradoxe ou ses contradictions, tout comme ses errements de
jeunesse ne sont pas le fait du hasard, il baigna dans un milieu
bourgeois prônant un régionalisme réducteur, à l’exemple d’un Alphonse
Daudet ou ce que l’on nommait les auteurs régionalistes. Pareillement
d’un christianisme très conservateur, il allait faire ses premiers pas
politiques dans un des courants réactionnaires de son temps, du moins
proche des royalistes.
Seule la figure du grand-père « radical-socialiste » caressait
ou posa la note discordante. La famille Mitterrand n’était pas
vraiment marquée à gauche, son austérité religieuse prédominait.
Doit-on souligner que cet homme a entre 17 et 21 ans, et que son entrée
en carrière se fit à Vichy plus tard, après s’être évadé de son camp
de prisonnier en Allemagne en décembre1941, où il passa 850
jours. Il a été étudiant de septembre 1934 à son incorporation
dans les troupes coloniales en 1937. Le jeune Mitterrand allait entre
autres suivre ses cours de sciences politiques et des études de droit
et même passé un concours, et avoir un goût très prononcé pour la
littérature et la fête. Aussi faut-il préciser que l’engagement
premier, est plus celle d’un mondain, que celle d’un casseur de «
métèque » de petit rang.
A
dix-sept ans, le bac en poche, François Mitterrand arriva à Paris
à la même période que le coup force des ligues fascistes de février
1934. Il s’installa et logea au « 104 ». Nom donné à la maison ou
pension des frères Maristes qui se trouvait au 104, rue de Vaugirard,
6e arrondissement (Péan y consacre un chapitre dans son livre). Il
collabora à la Revue se nommant le « 104 » et du même cru politique,
et cité par Pierre Péan. Là et dans la capitale le jeune François
tissa des liens et des amitiés, et allait rejoindre un temps les
Volontaires
Nationaux du Colonel de la Roque, des sympathies se tissèrent avec
l’Action Française (royalistes).
L’on présume diverses mouvances ultra nationalistes selon nos normes,
et en bout de course de cette jeunesse extrême droitière des liens avec
ce que l’on nommait la cagoule, d’où découle ses relations avec la
famille Bettencourt (André), notamment après 1945 et surtout les parfums
l’Oréal
(* - le père de Liliane épouse Bettencourt, Eugène Schueller était un
financeur des cagoulards, voir le documentaire de William Karel en bas de page). Tout comme ses relations avec Bousquet. Mais avec l’ancien
secrétaire général de la Police de Vichy, il n’y a jamais eu de lien
direct ou de rencontre avant ou pendant la seconde guerre, du moins
rien n’en a apporté la preuve contraire. Et Mitterrand a pu s’appuyer
sur le fait que ce dernier avait échappé à l’épuration et avait été
absout par la justice de la nouvelle République : la quatrième.
Faut-il pour autant condamné un homme à l’aune de ses premières amitiés
et elles furent nombreuses, tout aussi contradictoires les unes que les
autres, mais, il n’y a rien à porter comme jugements de valeur. Sauf
qu’il ne passa pas inaperçu. Une malheureuse photo, qu’a su exploiter
le journal Minute en son temps, et celui qui fut l’artisan et le
soutien premier à la fondation de SOS Racisme, il existe un sérieux
contraste.
Le malaise qui surgit en 1993 n’était pas anormal sur un
passé volontairement gommé, mais qui n’était qu’un secret de
polichinelle, sur l’attirance politique ou le respect de Mitterrand
pour Philippe Pétain. L’homme de Verdun dont la tombe a été fleurie par
ses deux prédécesseurs, n’a jamais été vraiment vantée, et cette
complaisance, si elle a disparu depuis en dit long sur les
parties immergées de la mémoire nationale.
Photo de L'écho de Paris 2 février 1935 (source Gallica-Bnf)
Le cliché gênant date de sa publication dans le journal les Echos de
Paris du 2 février 1935. Nous retrouvons le jeune Mitterrand
manifestant « contre l’invasion étrangère des foyers étudiants » (au centre de la photo) et
discutant avec la police et souriant. Ceci n’est qu’une image, et le
danger serait de la sur interprétée. Toutefois, elle donne idée du
climat que firent peser les ligues fascistes pendant,
l’entre-deux-guerres, et comment des policiers à Paris tentèrent
gentiment de disperser des jeunes gens de « bonne famille ». Un an après,
en 1936, c’était l’accession au pouvoir du Front populaire et de la
dissolution des ligues opérant contre la république. Mitterrand disait
avoir fait sa conversion à gauche à ce moment, il y a de fortes raisons
d’en douter.
Cette première image a pu embarrasser celui-ci plus tard, mais a
peut-être aussi permis de faire connaître ce jeune bourgeois charentais
monté à la capitale ? A partir d’éléments historiques incontestables,
et pour ceux et celles voulant aller plus loin dans des recherches sur
le journal les Echos de Paris. Vous trouverez une analyse sur cette
publication ayant fusionnée avec un autre titre de presse et qui
disparue en 1938. Surtout vous pouvez consulter sur le site
de la BNF, soit l’ensemble de ce journal de 8 à 10 pages quotidiennes;
publié de 1884 à 1938. Et accessible à tous !
De façon à ce qu’il n’existe aucun doute, Mitterrand n’a jamais
collaboré avec le régime nazi, ni n’a manifesté d’antisémitisme, et
avait pris des positions anti-allemandes dès 1938. C’est-à-dire
anti-nazies. Pour autant, il a été un maréchaliste avant de devenir un
héros de la résistance, sa conversion à gauche encore non réelle était
improbable. A avoir laisser le doute, et de la difficulté d’être un
acteur de l’histoire, on peut au moins affirmer qu’il n’a pas toujours
été de gauche et même un farouche adversaire des idées de progrès. Par
ailleurs, il n’est pas la seule figure historique à avoir changer
de camp, le jeune Victor Hugo n’est pas né politiquement républicain et
du côté de la sociale, non plus.
Les premiers écrits de François Mitterrand, hormis un texte que lui
attribue son rédacteur Péan de sa « jeunesse française », dans l'écho de Paris sur le conflit Italo Ethiopien et des prises de
positions contre un professeur de droit ayant soutenu le roi « du Négus
» contre l’invasion de Mussolini, dont il me manque les références
précises. Ce que j’ai pu découvrir des premiers écrits de ce dernier,
rien n’en fait un jeune fasciste, mais un homme qui a aimé briller en
société.
S’il y a à s’attarder sur des amitiés, c’est avec deux rédacteurs de ce
journal, dont le responsable du service politique. C’est auprès ou à
leur demande, qu’il allait rédiger des billets, puis une courte série
d’articles mièvres sur le thème : Y a-t-il encore des poètes ? Surtout,
il va passer ses diplômes et vivre dans le milieu estudiantin des
corporations, connues pour leurs engagements extrémistes, et à l’image
de la « douce France » des batailles rangées du quartier latin.
Si
Mitterrand a battu le pavé en de rares occasions, il se laissa
porter par les joies de son époque et les lieux festifs. Plus encore, «
En janvier 1938, François a le coup de foudre pour la future Catherine
Langeais. Il déploie des ruses de Sioux pour faire la conquête de la
belle. La fin de cette relation passionnée, provoquée plus tard par
l'éloignement dû à la guerre, le plongera dans un profond chagrin ».
(Libération – Eric Dupin)
Ce
qu’il est possible de découvrir sur le mondain et l’homme aux femmes
est d’un intérêt mineur, sauf à comprendre comment Mitterrand évolua
un court temps dans cet organe de presse. L’on pourrait presque parler
d’une opération de promotion, et du jour où il devint la première fois:
Président, de la section littéraire, puis du «cercle de la vie
étudiante». Ce cercle trouvant
pour accueil de leurs conférences les locaux du journal, L’écho de
Paris. Et que fait Mitterrand, il cause littérature et poésie, dans une
langue assez ampoulée et sur des considérations d’un intérêt limité, à
la fois lointain et proche du personnage. Le sachant plus attiré pour la bonne
littérature, plus que la photo…, ne fallait-il pas cacher ses aspects
ambitieux et son intérêt pour le monde des affaires ?
Les intérêts qui entouraient le journal s’appuient
sur des liens avec des milieux économiques importants, et sur une
certaine idée de la « nation et de la patrie » et de son empire
colonial. Ce en quoi Mitterrand a été longtemps, pour ne pas dire
toujours un conservateur et un républicain ambigu. Nourrit à
l’anticommunisme, agent du colonialisme jusqu’à la décolonisation et la
fin de la guerre d’indépendance en Algérie, il ne changea guère sur le
fond et dans sa conduite de gouvernant. Un petit faible pour les
guerres et affaires africaines marquèrent ses deux septennats.
Nous nous attarderons principalement sur ses premières années et un
certain Jean Delage. Qui fut rédacteur « de la vie des étudiants »
au sein de L’écho de Paris. Sa parution était d’environ une fois par
semaine, le samedi. Delage était membre du comité directeur du Parti
Social Français (PSF). Il se trouvait sous la direction de Henri de
Kerillis, directeur du service politique. Celui-ci sera élu député de
Neuilly sur Seine en 1936 dans le même groupe que Georges Mandel
(Indépendants Républicains), un nationaliste de l’entre-deux-guerres
assez atypique. De Kerillis se rendit le 14 juin 1940 à Londres et se
rangea aux côtés des Usa. Il a été l’acteur ou le négociateur du faux
compromis, entre les généraux Giraud et de Gaulle, sous la houlette des
Etats-Unis en Afrique du nord, encore une photographie trompeuse... et
très connue.
Delage à part des écrits et son métier de journaliste au sein de cette
rédaction. C’est à lui que l’on doit cette prose publiée comme
rédacteur d’une moitié de page avec d’autres jeunes étudiants. Il
allait participer à faire connaître un beau jeune homme, portrait à
l’appui
de François Mitterrand dans ses colonnes et tribunes. Jean Delage était
le responsable de la rubrique sur la vie étudiante du journal. Ils
devaient avoir à peu près le même âge, ce dernier étant l’aîné de
quelques années, tout au plus. De Kerillis, comme d’autres illustrèrent
certains compagnons de la résistance, venue des franges les plus
radicales de la droite. Quelques-uns ont refusé de se ranger du côté de
l’Allemagne nazie, mais lui sans se ranger du côté de Pétain et fut
condamné et déchu par «l’Etat Français».
D’autres venus de l’Action Française, ou ce qui restait d’influence du
Colonel de la Roque, ont pu pour certains devenir d’admirables
militants ou acteurs de la gauche française, plus tardivement. La
résistance de son côté et ce fut toute la difficulté de la rassembler
était composée de toutes les familles politiques. Les raisons aussi de
ses
fortes bisbilles et plus durant les années d’occupation. Dans le cas de
Kerillis, c’était encore une autre singularité. Il n’hésita pas à
écrire un « de Gaulle dictateur » en 1945. Démontrant surtout que les
parcours pouvaient être multiples (à ce sujet regarder absolument le
documentaire : Le chagrin et la pitié). Mitterrand devint le plus
jeune ministre de la quatrième République, et il exerça de nombreux
ministères, dont celui de la justice en pleine guerre en Algérie.
L’objet n’est pas de mener un procès à l’ancien président, mais de
saisir toute la complexité d’un parcours personnel, qu’il faut de plus
séparer de sa vie d’homme ou de père, ou de mari. Si l’on peut voir en
lui un ami de la littérature, et son regret de ne pas avoir été
écrivain de fiction, ni même poète. Le concernant n’avoir jamais exercé
une critique sur ses origines et ses passés politiques a donné plus de
lumière au faux attentat de l’observatoire dans la légende, qu’à ses
responsabilités au pouvoir. Le Mitterrand politique s’adaptait à ses
auditoires, et l’homme de la «rupture» est plus que discutable. Il a
su construire une légende, et tout autant travestir son histoire que ne
le fit André Malraux. A la différence, que l’un inventait et l’autre
restait dans le mystère de la politique.
C’est toute la difficulté pour un historien, et si 2016 a marqué le
centième anniversaire de la naissance et les 20 ans de la disparition de
François Mitterrand. En ces temps de « revival » du nationalisme qu’il
condamna, en reprenant un slogan anarchiste : «le nationalisme,
c’est la guerre» en tribune du Parlement Européen. Ce ne sont pas ses
convictions de gauche qui posent problèmes, mais de saisir que sa
filiation, somme toute politique, ne fut pas si contradictoire avec le
candidat "au clocher et au village" de 1981 (cf. à la campagne Séguéla).
Cette peinture du pâturage ou de la « grande France » ne doit pas
autant faire disparaître une certaine continuité des régimes de la
cinquième République. L’histoire au risque d’un homme est de toute
façon limitée,
c’est face à la nature des crises sociales, économiques et qui plus est
de la guerre que des personnalités, des vies se construisent en
parallèles. Le monde de celui que l’on appelait « Tonton » n’est plus.
Et pourtant survivent les mêmes simulacres et parodies de l’existence.
Certains en sont encore à disserter sur le « corps du roi », le régime
s’érige en système, et loin de nous en libérer, nous continuons à subir
cette logique d’ancien régime perdurant.
Photo de l'écho de Paris , voir les liens plus bas...
En guise de conclusion, et pour revenir une dernière fois sur un sujet
qui à l’époque avait fait fort peu polémique, et qui valut néanmoins la
condamnation d’un ministre (Pierre Joxe), ce fut concernant l’amnistie
en 1984 des anciens terroristes de l’Organisation de l'Armée Secrète (OAS). Ceux que de Gaulle avait fait
traduire, généraux félons inclus et qui lui vouèrent une haine sans
merci et à vie. Là aussi le soutien de Tixier Vignancourt en 1965,
ancien avocat de Pétain à la libération pourrait passer pour normal au
second tour de cette première présidentielle, sauf qu’une seule
et même conception s’y retrouvait, la fameuse « France
éternelle ».
Si chère aux grands hommes… et assez obscur sur un passé
pas si lointain. Pour un homme qui cultiva les symboles, il fallut
attendre 1997 et le discours de Jacques Chirac du 16 et 17 juillet (commémoration de la grande rafle),
pour que soit dit enfin, que l’Etat Français n’était pas la République.
Chose qui fut impossible sous les mandats présidentiels antérieurs,
Mitterrand inclus et le dernier à faire fleurir la tombe du « vainqueur
» de Verdun, mais pas son initiateur.
Les survivances, les connivences, les histoires du vingtième siècle ou
de l’après-guerre de 1914-1918 sont très riches en non-dit historique.
Je n’en suis plus au collectage de critiques outrancières ou des
dénonciations farfelues. Mitterrand a su entretenir avec Jean-Marie
Lepen, son cadet d’âge des relations relativement cordiales (et
situation dont le dinosaure se vante n’est pas totalement inexacte) et
l’exploitation de la menace « fasciste » par ses jeunes lieutenants ou
sa jeune garde était très exagérée ; notamment au regard des relations
élyséennes du sphinx et du président super-actif à cette époque du
Front National.
Mais, au pays des aveugles, ne dit-on pas que les borgnes sont rois?
Toutefois, Mitterrand a été un homme courageux tout au long de la
seconde guerre mondiale, sans abandonner quelques convictions
profondes, l’idée qu’il se faisait du pays de son enfance et ce qui
pouvait refléter son milieu d’origine, une austérité des mots qui lui
sera propre et familière. Vieilles règles bourgeoises et terrain de
l’arrivisme, histoires grandes et petites, l’Histoire devra encore
attendre un peu avant de trouver chaussure à ses pieds.
Sur les x.
livres, qui ont porté sur l’histoire de François Mitterrand ou de ses
relations à la politique et autre menus plaisirs de la vie doit se
compter par dizaines depuis son arrivée au pouvoir en 1981. Dont 98 %
des ouvrages doivent répéter à peu près la même chose, même son ancien
chauffeur a su trouver éditeur. Il était déjà de son vivant objet de
fiction dans un livre de Françoise Giroud. Personnage de roman à coup
sûr, il a du s’amuser à laisser quelques cailloux, mais il ne faut pas
se tromper sur le masque du pouvoir.
1er extrait photo d'un article de L'écho de Paris

2nd Extrait photo d'un article de Jean Delage
rédacteur de la rubrique étudiante de L'écho de Paris
& photo de FM président de sa section littéraire.
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Source : BNF - Gallica
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